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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3587/2022

ATA/825/2023 du 09.08.2023 sur JTAPI/403/2023 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 13.09.2023, rendu le 23.01.2024, REJETE, 2C_484/2023, 2F_4/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3587/2022-PE ATA/825/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 août 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Philippe GIROD, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 avril 2023 (JTAPI/403/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______1985, est ressortissant colombien.

Il est le père de B______, née le ______ 2007, C______, né le ______ 2011 et D______, le ______ 2013.

b. B______ est issue de sa relation avec E______, de nationalité colombienne, décédée en 2016. Elle est au bénéfice d’une autorisation de séjour. L’approbation du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) est toutefois réservée, selon courrier de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) du 29 septembre 2022.

Par ordonnance du 3 septembre 2019, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : TPAE) a retiré à A______ la garde de sa fille et l’a placée auprès de sa grand-mère paternelle, F______, tout en octroyant au précité un droit de visite qui s’exercerait d’entente entre les intéressés.

c. C______ est issu de sa relation avec G______, ressortissante dominicaine. Il est titulaire d’une autorisation d’établissement tout comme sa mère.

Le 30 juin 2014, donnant suite à une demande de renseignements de l’OCPM, G______ a expliqué que A______ n’entretenait pas de contacts avec leur fils C______. Il ne s’en était pas préoccupé depuis qu’elle était tombée enceinte. Il ne lui avait jamais versé d’aide financière, alors qu’elle était assistée par l’Hospice général (ci-après : l’hospice).

Par pli du 3 juillet 2014, A______ a indiqué à l’OCPM que la mère de C______ ne lui laissait plus voir son fils. Le 24 mai précédent, elle avait refusé de lui délivrer une attestation relative aux contributions qu’il versait pour son enfant, ainsi qu’aux visites.

Lors de l’audience de conciliation qui s’est tenue le 27 avril 2022 devant le Tribunal de première instance (ci-après : TPI), A______ et G______ sont convenus d’une reprise des relations personnelles entre C______ et son père. Celui-ci s’est engagé à verser une contribution mensuelle de CHF 350.- pour l’entretien de son fils.

d. D______ est issu de sa relation avec H______, ressortissante dominicaine. Il bénéficie d’une autorisation d’établissement à l’instar de sa mère.

Par jugement du 3 juin 2022, le TPI a donné acte à A______ de son engagement à verser, en mains d’H______, une contribution mensuelle pour l’entretien de D______ de CHF 375.-, ainsi qu’une somme de CHF 1'000.-, payable par tranches, correspondant aux contributions pour les mois de janvier à mai 2022. Il a confié la garde exclusive de D______ à sa mère en réservant un droit de visite à l’intéressé.

B. a. Le 7 janvier 2013, A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande d’autorisation de séjour pour regroupement familial, en vue de séjourner en Suisse auprès de son fils C______.

Par pli du 28 février 2013, il a expliqué être arrivé à Genève en 2007 en même temps que sa mère, sa sœur et son frère. Il avait arrêté ses études à la fin de l’école obligatoire et pratiqué la coiffure. Après avoir vécu quelque temps à Genève, il s’était rendu en Espagne, puis en France, où il avait tenté de s’engager dans la Légion étrangère, en vain. Il était revenu auprès des siens.

La mère de C______, G______, était sa compagne depuis deux ans. Il souhaitait régler sa situation et vivre une vie digne et tranquille. Sa famille l’aidait à subvenir à ses besoins. Il pratiquait la coiffure à domicile, ce qui ne lui procurait pas beaucoup d’argent.

b. Le 4 décembre 2013, A______ a déposé auprès de l’OCPM une autre demande d’autorisation de séjour, se déclarant célibataire, mais avoir pour conjointe H______.

Dans une lettre annexée, il a exposé qu’à la suite de sa séparation d’avec G______, un régime de visites avait été mis en place afin qu’il puisse voir C______, à qui il versait une contribution d’entretien mensuelle de CHF 300.-. Il avait entamé une relation amoureuse avec H______. Il ne vivait pas chez celle-ci, son appartement étant trop petit et ils recherchaient un logement. Il passait son temps libre avec ses fils.

L’OCPM a considéré cette requête comme une demande d’autorisation de séjour en vue de mariage.

c. Le 20 janvier 2015, A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande d’autorisation de séjour avec prise d’emploi.

d. Le 24 janvier 2017, H______ a informé l’OCPM que A______ n’habitait plus dans son appartement depuis un an déjà et qu’elle ne souhaitait pas l’épouser.

L’intéressé a répondu le 30 juin 2017 à l’OCPM qu’il vivait avec H______ depuis environ deux ans. Tous deux avaient entrepris les formalités en vue de leur mariage. Il souhaitait obtenir des informations au sujet de l’état de traitement de sa demande.

Le 7 août 2017, il a exposé qu’il ne s’était jamais séparé d’H______ et qu’il vivait avec elle depuis près de trois ans. Les moyens financiers du couple provenaient des prestations que sa compagne percevait de l’hospice pour ses deux enfants, ainsi que des allocations familiales. Il avait trouvé un emploi de coiffeur à raison de 24 heures par semaine et sollicitait une autorisation lui permettant de travailler.

Il a demandé à plusieurs reprises à l’OCPM de lui transmettre l’attestation lui permettant d’épouser H______, la dernière fois le 4 juin 2018.

e. Le 25 juin 2018, A______ a adressé à l’OCPM une attestation d’H______ du même jour, indiquant qu’il vivait de nouveau chez elle depuis le mois de novembre 2017 et qu’elle souhaitait l’épouser le plus rapidement possible.

Le 5 avril 2019, l’OCPM a délivré à A______ une attestation valable six mois en vue de la préparation de son mariage avec H______. Il pouvait demeurer en Suisse durant la procédure préparatoire.

Le 17 mars 2022, le service de l’état civil de la Ville de Genève a informé l’OCPM que, le 24 décembre 2020, il avait annulé la procédure de préparation de mariage entre A______ et H______.

f. Selon rapport de renseignements du 2 août 2017, l’intéressé a été interpellé par la police le 9 juillet 2017 à 6h01 en train de courir, nu, le long des voies de tram en direction de Genève, sur la route I______, alors qu’il tenait des propos incohérents. Il avait résisté à son interpellation et avait dû être placé de force sur un brancard, avec l’aide des ambulanciers.

g. Par ordonnance pénale du 12 juin 2018, l’intéressé a été condamné par le Ministère public à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, assortie du sursis, ainsi qu’à une amende de CHF 300.-, pour lésions corporelles simples, violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires et infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup – RS 812.121).

C. a. Le 10 mars 2022, A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande d’autorisation de séjour, fondant sa requête sur la présence à Genève de ses trois enfants. En revanche, son union avec H______ n’était plus d’actualité.

b. Le 18 mars 2022, l’hospice a indiqué à l’OCPM que A______ n’était pas connu de son institution.

c. À teneur d’une attestation de l’office des poursuites du 22 mars 2022, A______ faisait l’objet de poursuites et d’actes de défaut de biens pour des montants s’élevant à respectivement CHF 11'769.- et CHF 26'710.-, frais non compris.

d. Le 24 mars 2022, l’OCPM lui a fait part de son intention de rejeter sa requête déposée le 10 mars précédent.

e. Faisant usage de son droit d’être entendu le 25 avril 2022, il a exposé son parcours et sa situation personnelle. L’intention de préaviser négativement la demande d’autorisation de séjour déposée en faveur de B______ serait contestée par son représentant, au regard du nombre d’années qu’elle avait passées en Suisse durant son enfance et son adolescence, ainsi que de l’absence de contacts dans son pays d’origine.

f. Par décision du 29 septembre 2022, l’OCPM a refusé de transmettre le dossier de A______ au secrétariat d'État aux migrations (ci après : SEM) avec un préavis favorable, afin que cette autorité lui délivre une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Il a également prononcé son renvoi de Suisse.

Il n’avait jamais émargé à l’aide sociale, mais faisait l’objet de nombreuses poursuites et actes de défaut de biens. Son casier judiciaire faisait état d’une condamnation pénale. Il n’avait pas démontré qu’il maîtrisait la langue française. Certes, la durée de son séjour en Suisse, de neuf ans et demi, pouvait être considérée comme longue, mais il avait vécu en Colombie durant toute son adolescence et le début de sa vie d’adulte. Il ne pouvait se prévaloir d’une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée au point de devoir admettre qu’il ne puisse quitter la Suisse sans être confronté à des obstacles insurmontables. Doté d’une expérience professionnelle acquise dans un salon de coiffure, il n’avait pas acquis des connaissances si spécifiques qu’il ne puisse les mettre en pratique en Colombie. Par ailleurs, il était en bonne santé.

Sa volonté de rester auprès de ses trois enfants, sa mère et de ses frère et sœurs ne justifiait pas l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Il ne pouvait invoquer la protection de la vie familiale garantie par l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), étant donné que B______, domiciliée auprès de sa grand-mère, était dépourvue d’une autorisation de séjour. Au surplus, sa relation avec sa fille ne pouvait être qualifiée d’étroite et d’effective. Sa relation avec C______ et D______, titulaires d’un permis C et domiciliés auprès de leur mère respective, était très limitée, voire inexistante. Elle ne pouvait être qualifiée d’étroite ni d’effective du point de vue économique.

Enfin, le dossier ne faisait pas apparaître que l’exécution du renvoi se révélerait impossible, illicite ou inexigible.

g. Par acte du 31 octobre 2022, A______ a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) en concluant à l’annulation de la décision du 29 septembre précédent et à l’octroi d’une autorisation de séjour avec activité lucrative.

Il admettait que son intégration personnelle et professionnelle ne suffisait pas à justifier l’application des dispositions relatives au cas de rigueur. Toutefois, il convenait de tenir compte de sa situation familiale, à savoir des conséquences d’un renvoi de Suisse sur ses enfants, sa mère, ses sœurs, son frère et sur lui-même. Le renvoyer en Colombie reviendrait à l’isoler et à priver ses enfants de sa présence.

La décision de placement du TPAE concernant B______ ne constituait pas une sanction, mais la reconnaissance d’un cadre éducatif qui fonctionnait. Elle avait été autorisée à rester en Suisse chez sa grand-mère maternelle jusqu’à sa majorité.

Il avait fréquemment rencontré D______ et leur relation, effective, ne souffrait plus de ses désaccords avec H______. Cette relation avait connu un récent regain à l’âge important pour l’enfant de 9 ans. La décision entreprise violait son droit à mener une vie familiale avec D______.

Il n’entretenait pas une relation père-fils « intacte » avec C______, de sorte que
celle-ci ne justifiait pas l’octroi d’un titre de séjour sous l’angle de l’art. 8 CEDH. Il avait entrepris des démarches permettant une reprise des relations, dans l’intérêt de l’enfant selon le service de protections des mineurs (ci-après : SPMi).

h. L’OCPM a proposé le rejet du recours.

On ne pouvait parler d’une relation forte de A______ avec ses trois enfants au sens voulu par la jurisprudence. Par ailleurs, son comportement ne pouvait être qualifié d’irréprochable, au vu de sa condamnation pénale.

i. Dans sa réplique du 2 février 2023, A______ a ajouté que B______ habitait auprès de lui et de sa grand-mère paternelle. Il serait contraire à la réalité d’affirmer qu’il entretenait des relations assez irrégulières avec sa fille aînée alors qu’il partageait au quotidien un cadre de vie constant et régulier depuis plusieurs années. Dans cette période d’adolescence, la présence paternelle représentait un ancrage essentiel dans son histoire familiale, vu le décès de sa mère.

Maintenant que la relation s’était calmée avec la mère de D______, celui-ci lui témoignait un attachement profond, comme cela ressortait de témoignages écrits de la mère, la demi-sœur et du demi-frère de D______.

Il rencontrait davantage de difficultés dans ses relations avec C______, en raison de l’animosité et de la méfiance exprimées par sa mère. Toutefois, grâce à l’intervention du juge civil, il avait pu reprendre contact avec son fils. Les tensions entre ses parents constituaient un frein à une reprise plus sereine de leurs relations.

Sa condamnation pénale avait été prononcée à une période difficile et délicate de sa vie, à la fin de sa relation avec la mère de D______. Aucun autre problème de ce type n’était survenu depuis lors. Il s’était de tout temps organisé seul sur le plan financier, sans jamais solliciter l’aide sociale. Ses revenus n’étaient pas élevés, mais lui permettaient de verser régulièrement les contributions pour D______ et C______, et subvenir aux besoins de B______.

j. Par jugement du 11 avril 2023, le TAPI a rejeté le recours.

A______ ne se prévalait plus que de son droit au respect de sa vie privée et familiale, au motif que ses trois enfants résidaient à Genève.

Ces derniers disposaient d’un droit durable de résider en Suisse, puisque sa fille était titulaire d’une autorisation de séjour et ses fils, d’une autorisation d’établissement. En conséquence, l’intéressé pouvait a priori se prévaloir de
l’art. 8 CEDH. Il ne disposait toutefois de la garde d’aucun de ses enfants. Il ne démontrait pas qu’il avait exercé son droit de visite sur ses enfants, réglementé par le TPI et le TPAE, en particulier avec C______. Selon le rapport périodique du SPMi du 9 janvier 2023, la mère de C______ avait déclaré que A______ ne prenait pas de nouvelles de son fils et qu’il ne l’avait vu que très épisodiquement depuis sa naissance. Dès lors, il ne pouvait se prévaloir d’une relation affective particulièrement forte avec ses fils.

Il n’entretenait pas des relations étroites et effectives avec ses enfants sur le plan économique. Il ne démontrait pas qu’il avait contribué à l’entretien de B______. Si H______ avait indiqué notamment qu’il s’acquittait mensuellement de la pension due pour D______, le document était toutefois non daté, de sorte qu’il ne pouvait être exclu qu’il ait été établi pour les besoins de la cause. Par ailleurs, l’unique relevé de compte bancaire d’UBS SA produit faisait état du paiement d’une contribution pour D______ avec comme date d’exécution le
29 septembre 2022, soit le jour où la décision de renvoi avait été rendue. Un seul relevé de compte bancaire justifiait le versement d’une contribution pour C______. L’on ne pouvait dès lors pas retenir qu’il avait effectivement versé les prestations dues.

Il ne pouvait se prévaloir d’un comportement irréprochable vu sa condamnation du 12 mars 2018 et les poursuites pour dettes et actes de défaut de biens dont il faisait l’objet.

L’impossibilité d’exercer ses droits de visite une fois de retour en Colombie ne suffisait pas encore pour lui conférer le droit à séjourner en Suisse, étant donné que les trois autres conditions cumulatives, examinées ci-dessus, n’étaient pas remplies.

Pour le surplus, sous l’angle de l’intérêt supérieur de l’enfant consacré par la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l'Assemblée fédérale le 13 décembre 1996, Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107), il aurait certes été préférable que B______, C______ et D______ grandissent aux côtés de leur père. Toutefois, cette convention n’accordait ni à l’enfant ni à ses parents un droit à la réunion de la famille dans un État particulier ou une prétention directe à l’obtention d’une autorisation de séjour.

Enfin, toujours sous l’angle de l’art. 8 CEDH, A______ ne pouvait tirer aucun avantage du fait qu’il séjourne en Suisse depuis plus de dix ans, ayant immigré en 2007. En effet, il n’avait jamais bénéficié d’un quelconque titre de séjour et reconnaissait dans son recours ne pas être intégré personnellement ni professionnellement.

D. a. A______ a formé recours le 16 mai 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement dont il a demandé l’annulation. Une autorisation de séjour avec activité devait lui être accordée, subsidiairement le dossier renvoyé à l’OCPM pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants, plus subsidiairement encore l’audition de témoins ordonnée.

Le TAPI avait violé son droit d’être entendu en s’abstenant de procéder à l’audition de témoins pour des faits qu’il avait offert de prouver par ce biais. Il persistait ainsi dans ses offres de preuve d’audition de témoins.

Il était arrivé en Suisse au décès de son père, en 2007, en compagnie de sa mère, de sa petite sœur et de son petit frère. Ses trois autres sœurs, ressortissantes suisses, y étaient déjà installées.

B______ était arrivée en 2016, après le décès de sa mère en Colombie. Il vivait avec sa fille chez sa grand-mère paternelle et s’occupait quotidiennement de
celle-là. Des témoins pouvaient démontrer son implication dans la vie et l’éducation de sa fille. Le premier juge n’avait procédé à aucune mesure d’instruction.

La situation avec son fils D______ était stable. Le droit de visite fixé selon jugement d’accord du 3 juin 2022 était régulier et exercé même plus largement que le cadre prévu. B______ et D______ se connaissaient et se rencontraient très régulièrement lors des événements de famille. Le TAPI n’avait pas instruit ce point.

S’agissant de C______, un calendrier des visites avait été établi par le SPMi. Cependant, la mère ne s’était pas présentée avec l’enfant lors des deux derniers droits de visite. La conciliation ayant échoué avec la mère, il s’était vu délivrer une autorisation de procéder le 27 mars 2023.

Les versements en faveur de D______ et C______ étaient réguliers, ce qui ressortait de l’attestation d’H______ et des procès-verbaux d’audience de conciliation du TPI. Il produirait un relevé de son compte bancaire portant sur tous les versements opérés. Le placement de B______ était à la charge de l’État. Le SPMi lui avait demandé d’établir son revenu déterminant unifié (RDU) pour examiner la question de sa participation, mais il n’avait « pu le faire faire le calcul au regard de sa situation administrative ». Dans la mesure où il habitait avec elle, il participait depuis le début à ses frais courants.

Il avait signé un nouveau contrat de travail de durée indéterminée dès le 1er avril 2023 à un taux d’activité de 50%, taux qu’il chercherait à augmenter à l’issue de la période d’essai, pour un salaire mensuel brut de CHF 2'340.-. Cet emploi, plus stable que le précédent, lui permettrait de faire face à ses obligations alimentaires. Depuis le dépôt de sa première demande d’autorisation de séjour, le 7 janvier 2013, il lui avait été difficile de trouver un emploi vu son statut administratif instable.

Les exigences relatives à l’étendue de la relation père-enfants d’un point de vue affectif et économique étaient « dans l’ordre du possible et du raisonnable » par rapport à sa situation. Le jugement attaqué ne contenait aucune motivation quant à l’absence de démonstration de relations personnelles avec B______ et D______. Or, un tel lien existait. Il vivait au quotidien avec B______ et exerçait régulièrement et plus largement que prévu par le TPI le 3 juin 2022 son droit de visite sur D______, d’entente avec sa mère. Un retour en Colombie signifierait pour lui une impossibilité totale de mettre en œuvre ses relations personnelles, vu l’importante distance, ses moyens financiers limités et l’âge de ses enfants qui les exposerait à la violence et à un risque d’enlèvement très élevé. Une relation par les moyens de télécommunication modernes irait à l’encontre de l’intérêt supérieur de B______ et de D______.

S’agissant de C______, le TAPI n’avait fait référence qu’aux déclarations de sa mère, alors que les procès-verbaux des audiences démontraient une reprise des relations personnelles ainsi qu’une inimitié manifeste et une méfiance de la mère à son encontre, outre une collaboration déficiente avec le SPMi.

Le TAPI n’avait pas examiné quelles seraient les possibilités concrètes de ces relations personnelles depuis la Colombie.

Le lien économique avec ses enfants était démontré, à savoir le versement de contributions pour D______ et C______, le financement du placement de B______ étant assuré par l’État. Il ne faisait l’objet d’aucune poursuite pour non-paiement des contributions d’entretien ni de plainte pour violation de son obligation d’entretien.

Sa condamnation du 12 juin 2018 à une peine pécuniaire assortie du sursis et à une amende, sans être contestée, pouvait désormais être relativisée. Aucune interdiction ni expulsion n’avait été prononcée. Rien ne justifiait que le TAPI n’apprécie plus rigoureusement cette condamnation que ne l’avait fait à l’époque le juge pénal. Les poursuites dont il faisait l’objet résultaient de la précarité de sa situation au plan administratif et financier.

b. L’OCPM a proposé le rejet du recours.

c. Le 3 juillet 2023, le recourant a donné des détails sur la situation de B______ et D______. Il avait vu D______ une fois par mois durant une heure et demie, comme fixé par le SPMi, et le contact était bon. Sa mère avait accepté de discuter avec lui et dit vouloir contacter le SPMi pour élargir ces rendez-vous. Les trois relations avec ses enfants connaissaient une évolution positive. Il avait pris un retard de deux mois (sauf erreur) dans le paiement des contributions d’entretien lors de sa transition de travail (chômage partiel) et avait trouvé un accord de rattrapage avec le SCARPA. Il produirait les décomptes de gains intermédiaires pour les mois de mars, avril et mai 2023, toujours en cours ainsi que les preuves des autres paiements des contributions d’entretien.

d. Le 5 juillet 2023, le recourant a adressé à la chambre administrative copie du bulletin scolaire de C______. La reprise et la régularité de leur relation constituaient certainement l’une des explications des progrès constatés. Il avait mis à jour la contribution due pour son entretien et a produit un avis de débit valeur 4 juillet 2023 pour un montant de CHF 750.-.

e. Les parties ont été informées le 7 juillet 2023 que la cause resetait gardée à juger.

f. La teneur des pièces figurant au dossier sera pour le surplus reprise ci-dessous dans la mesure utile au traitement du litige.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant offre de démontrer par témoignages « la réalité de sa situation familiale et son implication dans la vie et l’éducation de B______ ». Il a sollicité, sans plus de précisions, l’audition de la mère de son fils D______. Il se plaint d’une violation du droit d’être entendu par le TAPI qui n’aurait procédé à aucune instruction.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l'espèce, le recourant a eu l’occasion de s’exprimer devant l’OCPM, le TAPI et la chambre de céans, et de produire toute pièce utile. Il n’expose pas quels éléments supplémentaires les auditions de témoins sollicitées « encore plus subsidiairement » apporteraient à l’instruction de la cause qu’ils n’auraient pas pu développer par écrit. Il n’a par ailleurs pas de droit à être entendu oralement par la chambre de céans ni d’obtenir l’audition de témoins. La chambre administrative dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause.

S’agissant du TAPI, il apparait que les faits pourraient ne pas avoir été suffisamment établis en particulier s’agissant de la relation du recourant avec chacun de ses enfants. Néanmoins, vu les éléments complémentaires dont la chambre de céans dispose sur ces points, la question d’une violation du droit d’être entendu restera ouverte, étant relevé qu’elle aura en tout état pu être réparée devant la chambre de céans qui jouit de plein pouvoir d’examen en fait et en droit (art. 61 al. 1 LPA).

3.             L’objet du litige est la décision du 29 septembre 2022 refusant de transmettre le dossier du recourant au SEM avec un préavis favorable en vue de la délivrance d’une autorisation de séjour et prononçant son renvoi de Suisse.

3.1 L'étranger est tenu de collaborer à la constatation des faits et en particulier de fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour (art. 90 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_161/2013 du 3 septembre 2013 consid. 2.2.1). Il est tenu de fournir sans retard les moyens de preuves nécessaires ou s’efforcer de se les procurer dans un délai raisonnable (art. 90 al. 1 let. b LEI).

3.2 Selon la maxime inquisitoire, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; ladite maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. En revanche, elle ne dispense pas les parties de collaborer à l'établissement des faits (art. 20 LPA ; arrêts 2C_787/2016 du 18 janvier 2017 consid. 3.1 et les références citées). Il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_787/2016 du 18 janvier 2017 consid. 3.1 et 2C_777/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.3, non publié in ATF 142 I 152).

4.             Tant devant le TAPI que la chambre de céans, le recourant ne s’est prévalu que de son droit à la vie privée garanti par l’art. 8 CEDH et d’une violation du principe de la proportionnalité.

4.1 Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2). Lorsque l'étranger réside depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2023 du 3 mai 2023
consid. 5.3.5). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3).

Récemment le Tribunal fédéral a expressément admis que la reconnaissance finale d’un droit à séjourner en Suisse issu du droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 § 1 CEDH pouvait s’imposer même sans séjour légal de dix ans à condition toutefois que le requérant atteste d’une intégration particulièrement réussie
(ATF 144 I 266 consid. 3.8 et 3.9 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2022 du 3 mai 2023 consid. 5.3).

4.2 Selon la jurisprudence, un étranger peut, en fonction des circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale garanti par l'art. 8 § 1 CEDH pour s'opposer à une éventuelle séparation de sa famille, à condition qu'il entretienne une relation étroite et effective avec un membre de celle-ci ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 137 I 284 consid. 1.3 ; 136 II 177 consid. 1.2). Les relations ici visées concernent en premier lieu la famille dite nucléaire, c'est-à-dire la communauté formée par les parents et leurs enfants mineurs (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; 135 I 143 consid. 1.3.2). Un étranger majeur ne peut se prévaloir d'une telle protection que s'il se trouve dans un état de dépendance particulier par rapport à un parent établi en Suisse en raison par exemple d'un handicap (physique ou mental) ou d'une maladie grave (ATF 129 II 11 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1153/2014 du 11 mai 2015 consid. 5.3 et 2C_251/2015 du 24 mars 2015 consid. 3).

4.3 Une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’art. 8 CEDH est possible aux conditions de l’art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu’elle soit prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le refus de prolonger une autorisation de séjour ou d’établissement fondé sur l’art. 8 § 2 CEDH suppose une pesée des intérêts en présence et l’examen de la proportionnalité de la mesure (ATF 139 I 145
consid. 2.2 ; 135 II 377 consid. 4.3). L’examen de la proportionnalité sous l’angle de l’art. 8 § 2 CEDH se confond avec celui imposé par l’art. 96 LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_419/2014 du 13 janvier 2015 consid. 4.3 ; ATA/1539/2017 du 28 novembre 2017 consid. 6b).

4.4 L’art. 8 CEDH n’emporte pas une obligation générale pour un État de respecter le choix par des immigrants de leur pays de résidence et d’autoriser le regroupement familial sur le territoire de ce pays (ACEDH Ahmut c. Pays-Bas, 28 novembre 1996, Rec. 1996-VI, req. n° 21702/93, § 67) ; il ne consacre pas le droit de choisir l'endroit le plus approprié à la poursuite de la vie familiale (DCEDH Adnane
c. Pays-Bas, du 6 novembre 2011, req. n° 50568/99 ; Mensah c. Pays-Bas, du
9 octobre 2001, req. n° 47042/99). Dans une affaire qui concerne la vie familiale aussi bien que l’immigration, l’étendue des obligations pour l’État d’admettre sur son territoire des proches de personnes qui y résident varie cependant en fonction de la situation particulière des personnes concernées et de l’intérêt général (ACEDH Osman c. Danemark, du 14 juin 2011, req. n° 38058/09, § 54 ; Abdulaziz, Cabales et Balkandali c. Royaume-Uni, du 28 mai 1985, série A n° 94, § 67 et 68).

Les facteurs à prendre en considération dans ce contexte sont la mesure dans laquelle le refus d’autorisation entrave la vie familiale, l’étendue des liens que les personnes concernées ont avec l’État contractant en cause, la question de savoir s’il existe ou non des obstacles insurmontables à ce que la famille vive dans le pays d’origine d’une ou plusieurs des personnes concernées et celle de savoir s’il existe des éléments touchant au contrôle de l’immigration ou des considérations d’ordre public pesant en faveur d’une exclusion de l’étranger (ACEDH Rodrigues da Silva et Hoogkamer c. Pays-Bas, Rec. 2006-I, req. n° 50435/99, § 39 ; DCEDH Margoul c. Belgique, du 15 novembre 2011, req. n° 63935/09).

Une autre considération importante consiste à savoir si la vie familiale a été créée à un moment où les personnes impliquées étaient conscientes que le statut de l'une d’elles vis-à-vis des services de l'immigration était tel que la pérennité de la vie familiale dans l'État hôte serait dès le départ précaire : lorsque tel est le cas, le renvoi du membre étranger de la famille ne sera qu'exceptionnellement incompatible avec l'art. 8 CEDH (ACEDH M.A. c. Danemark du 9 juillet 2021, req. n° 6697/18, § 134 ; Antwi et autres c. Norvège du 14 février 2012, req. n° 26940/10, § 89 ; Nunez précité, § 70).

4.5 En l’espèce, le séjour du recourant en Suisse s’est déroulé en totalité dans l’illégalité et il concède qu’il ne peut se prévaloir d’une bonne intégration, vu en particulier ses dettes, à savoir qu’il fait l’objet de poursuites et d’actes de défaut de biens pour plusieurs dizaines de milliers de francs. Il a aussi été condamné pénalement en juin 2018 pour lésions corporelles simples et violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires dans le cadre d’une interpellation par la police à la suite d’un conflit avec la mère de D______, outre une consommation occasionnelle de cocaïne. Le 9 juillet 2017, il a été appréhendé par les forces de l’ordre en train de courir, nu, le long des voies de tram en direction de Genève, sur la route I______, alors qu’il tenait des propos incohérents. Il a résisté à son interpellation et a dû être placé de force sur un brancard, avec l’aide des ambulanciers. Ses divers emplois comme coiffeur, à domicile ou plus récemment à 50%, étant relevé que cet emploi est trop récent pour retenir qu’il pourra s’inscrire dans la pérennité, ne lui permettent pas de subvenir sans aide à ses besoins. Il bénéficie au contraire de prestations du chômage, ce qui a été le cas en mai et juin 2023, alors même qu’il avait produit devant le TAPI le 31 octobre 2022 un contrat de travail à durée indéterminée comme coiffeur à compter du 1er septembre 2022, « à l’heure », pour un salaire horaire de CHF 21.50 plus les vacances. Il dit avoir par le passé fait appel à l’aide de sa famille et de la mère de D______ qui bénéficiait de prestations de l’hospice.

Depuis son arrivée en Suisse en 2007, son parcours personnel a ainsi été chaotique. Il ne résulte pas de la procédure qu’il aurait séjourné en Suisse sans interruption à compter de ce moment-là, étant au contraire relevé qu’il dit avoir essayé d’intégrer la légion étrangère en Espagne et en France durant la période courant entre 2007 et 2013.

Depuis l’année 2013, il n’a pas eu de lieu de vie stable et durable, la mère de D______ ayant plutôt démenti auprès de l’OCPM qu’il vivait avec elle à des périodes où il prétendait que c’était le cas. Il ne démontre pas une résidence effective et durable chez sa mère ni a fortiori de domicile fixe. Il a conçu deux de ses trois enfants qui vivent à Genève, à savoir ses fils nés en février 2011 et en juillet 2013, alors qu’il savait son statut illégal en Suisse et sa situation précaire. Il a fait venir sa fille née en 2007 en Suisse, en 2016, dans ces mêmes conditions, quand bien même le décès de la mère de celle-ci et la présence à Genève de sa grand-mère paternelle et de tantes peuvent expliquer ce choix.

Cinq membres de sa famille vivant à Genève ont attesté le 10 octobre 2022 du parcours chaotique de leur frère, beau-frère et fils. Ainsi, il avait connu à Genève une femme, puis une autre ; chaque fois un enfant était né. Malheureusement, cela avait été très compliqué et jamais il n’avait pu faire le pas pour conclure une union harmonieuse. « Ces derniers temps », il semblait se stabiliser en travaillant et en s’assumant seul, sans jamais profiter du système social genevois. L’hypothèse d’un renvoi dans son pays d’origine les rendait très inquiets.

À cet égard, de jurisprudence constante, le droit à la protection de la vie familiale garanti par l’art. 8 CEDH ne peut être invoqué que lorsque les parents et l’enfant mineur vivent ensemble.

S’agissant de sa fille, elle est âgée de 16 ans. Elle est titulaire d’une autorisation de séjour. Le recourant a été déchu de l’autorité parentale par ordonnance du TPAE du 3 septembre 2019 et sa fille placée chez sa grand-mère paternelle dans la mesure où il n’était pas en mesure de s’en occuper. En septembre 2022, ses relations avec sa fille étaient « comme bon lui semble » (cf. échanges de courriels internes de l’OCPM entre les 18 août et 20 septembre 2022). Il n’a depuis lors qu’un droit de visite sur celle-ci. S’il indique vivre au quotidien auprès de cette dernière, il ne démontre nullement une relation effective affective, au-delà de ce que relève une attestation de « J______ » du 15 mai 2023, s’exprimant « au nom de toute la famille, cela comprend plus de vingt personnes adultes, adolescents ou enfants » comme quoi si B______ est sous la garde légale de sa grand-mère, elle a tout loisir de voir son père pour parler de son sport favori, le football, sortir, manger, se promener, participer aux nombreuses fêtes de famille, anniversaires, etc. En tout état, si une relation étroite et effective pouvait être retenue du point de vue relationnel, ce qui est douteux, il sera relevé qu’il n’est pas démontré qu’il contribuerait économiquement à son entretien, étant au contraire admis de sa part que c’est l’État qui assure les frais de placement chez la grand-mère paternelle.

S’agissant de D______, sa mère a indiqué lors d’un entretien téléphonique avec l’OCPM le 26 août 2022 que le recourant le voyait un week-end sur deux depuis juillet 2022 et l’avait pris dix jours de suite durant les vacances d’été 2022. Il ne contribuait pas à son entretien depuis le mois d’août 2020 et avait promis de régler ce qu’il devait, soit pour les mois de juillet et août 2022, selon jugement du TPAE, avec un peu de retard en raison de problèmes personnels. Au jour de l’entretien téléphonique, il n’avait toujours pas versé de pension. Au vu de cet élément, le document intitulé « À qui de droit », non daté, produit devant le TAPI, émanant de la mère de D______ et faisant état d’un versement tous les mois de la pension, « des fois avec du retard » ne suffit pas à démontrer le versement régulier de la contribution fixée à CHF 375.- par mois, plus CHF 1'000.- payables par tranches pour les mois de janvier à mai 2022, selon jugement du TPI du 3 juin 2022. Il ressort des relevés produits que ne sont démontrés que trois versements de CHF 50.- en faveur de la mère de D______, les 16 mai, 1er juin et 30 juin 2023. Enfin, la présence « physique » que le recourant donne à son fils ne semble pas aller au-delà et semble même en-deçà d’un droit de visite usuel, tel que fixé en effet par le TPI dans son jugement du 3 juin 2022, à raison d’un week-end sur deux, mais seulement du samedi 18h30 au dimanche 18h30. Le fait que l’enfant serait attaché à son père, ce qui n’est pas remis en cause, ne suffit pas à renverser le constat selon lequel une relation étroite personnelle, d’une intensité telle qu’exigée par la jurisprudence, sur les plans relationnel et économique n’existe pas avec le recourant.

S’agissant de C______, il ressort du rapport d’évaluation sociale du 15 mars 2022 émis par l’office de l’enfance et de la jeunesse qu’il n’a été reconnu par son père que le 16 février 2012, soit près d’un an après sa naissance, après intervention d’une curatrice désignée aux fins d’établir la filiation et de faire valoir la créance alimentaire. La situation de C______ a fait l’objet d’un signalement de la part du service de santé de l’enfance et de la jeunesse le 5 avril 2016 et il est au bénéfice d’une curatelle d’assistance éducative depuis une ordonnance du TPAE du 10 novembre 2016. Sa mère avait déclaré qu’elle n’était pas opposée à ce que le recourant entretienne des relations avec son fils, mais remarquait qu’il avait été particulièrement absent de la vie de l’enfant depuis sa naissance et qu’un accompagnement spécifique était nécessaire. Le recourant avait émis le souhait d’entretenir des relations personnelles avec C______, par exemple le midi, le soir ou le dimanche. La mère se disait très perplexe quant à cette demande du recourant, qui avait fait preuve d’une absence d’implication jusqu’à présent et de disponibilité réelle. Il manquait de place chez lui et de temps. Elle imaginait des visites le midi ou le soir en semaine et le week-end à la journée. Le recourant avait vu pour la dernière fois C______ pendant l’été 2020, par hasard. Celui-là avait concédé se rendre compte que la relation père-fils était particulièrement faible. Selon ce rapport toujours, dans l’intérêt de l’enfant, un droit aux relations personnelles pourrait s’exercer à deux reprises de manière médiatisée, puis, sauf accord contraire entre C______ et ses parents, au minimum à raison de deux visites par mois, à leur convenance. Les vacances pourraient être réparties d’entente entre les parents et l’enfant. Quant à C______, il avait indiqué ne pas avoir très envie de voir son père qui n’avait pas été beaucoup présent et, « un beau jour » il avait demandé à le voir. Il ne se sentait pas très bien avec lui. Selon procès-verbal d’audience de conciliation du 29 juin 2022, à cette date, la reprise des relations personnelles entre le père le fils n’avait pas été possible. Une nouvelle audience devait être reconvoquée en décembre 2022 pour faire le point sur le droit de visite et la contribution d’entretien, y compris le rétroactif. Lors de l’audience de conciliation du 14 décembre 2022, la mère de C______ a relevé que le recourant ne l’avait vu qu’une seule fois, pendant 45 minutes, en octobre 2022. La prochaine rencontre n’interviendrait pas avant janvier ou février 2023. Une nouvelle audience serait fixée à la fin du mois de mars 2023. La conciliation a finalement échoué et l’autorisation de procéder a été délivrée au recourant le 27 mars 2023. Dans ces conditions et comme concédé par le recourant, la relation qu’il entretient avec C______ ne suffit pas à justifier l’octroi d’une autorisation de séjour fondée sur l’art. 8 CEDH, quand bien même il a démontré le versement quasi régulier de la contribution d’entretien, étant en effet relevé l’intervention du SCARPA en mai et juin 2023, d’un montant de CHF 375.- à sa mère dès le 29 août 2022.

Il ressort de ce qui précède que le recourant n’entretient avec aucun de ses enfants une relation effective sur les plans affectif et économique. Sur ce dernier plan, même si ses récents efforts de s’acquitter des contributions dues, en faveur de C______ uniquement, sont à relever, ils interviennent à un moment où le recourant a conscience des enjeux qui sont les siens et sont trop récents pour démontrer le lien effectif requis par la jurisprudence.

S’il est indéniable qu’un départ en Colombie est de nature à rendre plus difficile des relations avec ses enfants, comme déjà dit, celles-ci ne sont pas d’une intensité telle qu’il ne peut être exigé de la part du recourant qu’il les poursuive depuis la Colombie.

C’est donc à juste titre que l’OCPM a refusé de préaviser favorablement une autorisation de séjour fondée sur l’art. 8 CEDH.

5.             5.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation.

5.2 En l’occurrence, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l’intimé devait prononcer son renvoi. Pour le surplus, le recourant n'allègue pas que le retour dans son pays d’origine serait impossible, illicite ou inexigible au regard de l’art. 83 LEI, et le dossier ne laisse pas apparaître d’éléments qui tendraient à démontrer le contraire.

6.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 mai 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 avril 2023 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Philippe GIROD, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie LAUBER, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.