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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1281/2022

ATA/790/2023 du 18.07.2023 sur JTAPI/1422/2022 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1281/2022-ICCIFD ATA/790/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juillet 2023

4ème section

 

dans la cause

 

A______ SA recourante
représentée par Me Jérôme PIGUET, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 décembre 2022 (JTAPI/1422/2022)


EN FAIT

A. a. A______ SA (ci-après : la contribuable ou la société) est inscrite au registre du commerce du canton de Genève depuis le 21 janvier 2013. Elle a pour but la « gestion administrative et commerciale de marques, franchises et brevets dans le secteur de la haute horlogerie et de la joaillerie, notamment conseils et assistance juridique, administrative et commerciale ».

b. B______ en est actionnaire et administrateur unique. C______ en est directeur administratif.

c. Pour l’année fiscale 2014, la société a été imposée sur la base des éléments qu’elle avait déclarés à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE). Elle avait notamment fait état dans ses comptes, au titre de charge, de « frais de représentation » pour un total de CHF 421'833.70 et d’un bénéfice net de CHF 10'444.18. Les bordereaux de taxation y relatifs sont entrés en force.

d. Pour l’année fiscale 2015, la contribuable a été taxée d’office. Les bordereaux de taxations y afférents sont également entrées en force.

e. Les 2, 3, 9 et 12 juillet 2019, dans le cadre des taxations pour les années fiscales 2016 et 2017, l’AFC-GE a procédé à un contrôle dans les locaux de la société.

B. a. Le 17 juillet 2019, l'AFC-GE a informé la contribuable de l’ouverture à son encontre de procédures en rappel et en soustraction d’impôt pour les années 2013 à 2015 ainsi que d’une procédure en tentative de soustraction pour les années 2016 et 2017. Il était apparu suite au contrôle susmentionné que la société avait effectué des distributions dissimulées de bénéfices, en faisant bénéficier des entités proches de prestations par la comptabilisation dans ses comptes de charges excessives, en consentant des prêts simulés à des sociétés sœurs et en ne comptabilisant pas une partie des actifs. Un contrôle supplémentaire d’une durée de trois jours serait effectué dans les locaux de la société, à l’occasion duquel celle-ci devait remettre un certain nombre de documents.

b. La contribuable faisait partie d'un groupe international de sociétés, D______ LTD, qu’elle dirigeait. Elle exploitait une boutique à Genève et effectuait des tâches pour des entités du groupe, telles que le marketing, la publicité, le développement des collections, le financement, l'acquisition et le suivi de la clientèle, la comptabilité et la gestion du stock du groupe.

c. Le 5 novembre 2021, l'AFC-GE a notifié à la contribuable quatre bordereaux de rappel d’impôt pour les années 2014 et 2015, quatre bordereaux de taxation pour les années 2016 et 2017 et six bordereaux d’amende, dont quatre pour soustraction d’impôt (2014 et 2015) et deux pour tentative de soustraction d’impôt (2016). Compte tenu de la faute intentionnelle et des circonstances aggravantes, à savoir le caractère répétitif et le concours des infractions, ainsi que la familiarité de l’administrateur avec le monde des affaires, la quotité des amendes était fixée à 1,25 fois les impôts soustraits.

Les montants des reprises s’élevaient à CHF 425'513.- pour 2014, CHF 102'911.- pour 2015 et CHF 149'475.- pour 2016.

Pour l’année 2014, une reprise de CHF 199'806.- avait été opérée sur des frais de représentation. Cette charge devait être supportée également par d’autres entités du groupe. Les frais pour le maintien et la publicité de la marque « B______ » avaient été répartis en fonction du chiffre d'affaires généré par les cinq sites de vente. La contribuable ayant généré 52 % du chiffre d’affaires du groupe, les frais de représentation qu’elle avait comptabilisés (CHF 416'262.-) devaient être supportés à concurrence de 48 % par les autres entités, soit CHF 199'806.-.

Seule cette reprise et la quotité des amendes demeurent litigieuses.

d. Le 13 décembre 2021, la société a formé réclamation contre ces bordereaux.

Le montant des frais de représentation comptabilisés en 2014 comprenait principalement divers voyages d’affaires à l’étranger et étaient nécessaires pour la société et en lien direct avec le chiffre d’affaires et les ventes. Ce montant ne correspondait pas à la totalité des frais supportés par le groupe. Les amendes devaient être reconsidérées.

e. Par décision du 11 avril 2022, l'AFC-GE a rejeté cette réclamation.

Il était ressorti de l'audition du directeur administratif du groupe, C______, que la contribuable avait comptabilisé les frais de représentation, comprenant les frais de marketing et de publicité, pour un montant de CHF 416'262.- en 2014. Or, cette promotion-marketing avait bénéficié à plusieurs sociétés du groupe et aucune refacturation n’avait été effectuée. Plusieurs sociétés du groupe en avaient ainsi bénéficié, alors que les frais y relatifs avaient été pris en charge entièrement par la contribuable.

À défaut d'autres informations pour effectuer une répartition équitable de ces frais entre les sociétés du groupe, elle avait procédé à une répartition en fonction du chiffre d'affaires des cinq points de vente du groupe ayant bénéficié de la promotion-marketing. Cette répartition avait été présentée par la société elle-même, laquelle n’avait pas démontré de lien direct de ces frais avec son chiffre d'affaires, ni n’avait fourni de nouveaux éléments permettant une autre appréciation.

La quotité des amendes avait été fixée compte tenu de plusieurs circonstances aggravantes et du fait que la soustraction s'étendait sur plusieurs années et avait été effectuée selon différents procédés.

C. a. Le 25 avril 2022, la contribuable a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à ce que la reprise pour frais de représentation de CHF 199'806.- soit ramenée à CHF 26'437.-, que les amendes pour 2014 et 2015 soient réduites à une fois les impôts soustraits et qu’un bénéfice de CHF 50'000.- ne soit pas pris en compte dans le calcul de l’amende 2016.

Il ne se justifiait pas de répartir le montant total des frais de représentation payés par elle en 2014 en proportion des chiffres d'affaires des sociétés exploitant des boutiques de la marque « B______ ». Ces frais concernaient majoritairement des expositions à l'étranger des pièces de haute joaillerie. Seuls les postes « frais Moscou » (CHF 4'659.-), « frais New York » (CHF 21'288.-) et « frais Londres » (CHF 490.-), soit un total CHF 26'437.-, concernaient des boutiques qui n'étaient pas exploitées par elle-même.

La quotité des amendes était excessive, dès lors qu’elle avait pleinement collaboré. Il n’était pas contesté que l’administrateur était rompu aux affaires, celui-ci n’étant toutefois pas familier avec la fiscalité suisse. Elle était une petite entreprise familiale et n’avait pas recouru aux services de conseillers fiscaux. L'essentiel de son effort était porté sur la création et le développement commercial, ce qui avait pu l’amener à négliger certaines questions administratives et de conformité. Il ne s’agissait toutefois pas d'une action planifiée ayant fait appel à différents procédés. Il n'existait pas de circonstances aggravantes justifiant de s'écarter de la règle selon laquelle l'amende correspondait, en principe, au montant de l'impôt soustrait. Enfin, des charges salariales relatives à l'exercice 2015, à hauteur de CHF 50'000.-, avaient été comptabilisées par erreur dans le cadre de l'exercice 2016 et ne constituaient pas une soustraction fiscale. Cette somme ne devait ainsi pas être prise en compte dans le calcul des amendes 2016.

b. L'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

La contribuable avait comptabilisé, par exemple, des frais pour le maintien et le développement de la marque « B______ », alors que celle-ci ne lui appartenait pas, mais à une société proche. Elle n'avait pas prouvé le lien direct des frais de représentation avec son chiffre d'affaires, ni n’avait remis de document permettant d'admettre une autre répartition des frais entre les sociétés du groupe. Dès lors que la société n'aurait pas consenti de telles prestations en faveur de tiers, elle avait fourni des services pour un montant de CHF 199’806.-, sans encaisser de contre-prestations, ou à tout le moins sans reporter le montant de ces contre-prestations à l'actif de son bilan pour les années en cause.

II n'était pas possible de réduire un montant de CHF 50’000.- de l'impôt soustrait sous peine de contrevenir aux principes stricts en matière de droit pénal fiscal. Le processus élaboré pour dissimuler des montants imposables, se déroulant sur plusieurs années, ne pouvait être ignoré des organes de la société. Une telle manière de procéder était caractéristique d’une faute grave imputable à la contribuable. La quotité des amendes devait donc être confirmée.

c. Dans sa réplique, la contribuable a relevé que la méthode de répartition appliquée par l'AFC-GE supposait qu’elle avait assumé la totalité des frais de représentation du groupe. Or, des frais de marketing et de publicité avaient également été supportés par d'autres sociétés du groupe, à hauteur de plus de CHF 204'087.- en 2014. Même à considérer que les comptes produits ne suffisaient pas à justifier une allocation directe des frais et qu'il fallait procéder à une allocation indirecte basée sur le chiffre d'affaires, il fallait alors au moins procéder à une allocation de la totalité des frais du groupe. En lui attribuant 52 % de ces frais, elle pouvait déduire CHF 322'581.-, ce qui limitait la reprise à CHF 93'680.-.

Il n'y avait pas lieu de procéder à une répartition proportionnelle sur le seul exercice 2014, pendant lequel elle avait supporté des frais de représentation significatifs et qui, pour l'essentiel, concernaient sa propre activité. Le groupe n'effectuait pas de planification fiscale visant à réduire les bénéfices de la société au profit d'entités offshore. À considérer, comme l'AFC-GE, que les frais de représentation devaient être répartis en proportion du chiffre d'affaires des entités du groupe, la contribuable aurait dû se voir refacturer une part de ces frais lors des exercices 2015 à 2017 et son résultat s'en serait trouvé réduit d'autant.

Dans l’hypothèse où l'erreur de comptabilisation en 2016 de salaires versés en 2015 devait être considérée comme une soustraction, il ne s'agissait que d'une faute très légère, ce dont il y avait lieu de tenir compte en diminuant la quotité globale de l'amende.

d. Dans sa duplique, l'AFC-GE a répondu que la conclusion nouvelle de la contribuable portant sur ses nouveaux calculs de la répartition des frais litigieux ne pouvait être suivie, dès lors que les comptes remis étaient présumés exacts et liaient l'AFC-GE et qu’aucune correction des comptes n'était prouvée, ni alléguée. Il était contraire aux règles du droit commercial demander la déduction de charges supplémentaires que la société n'avait pas supportées. Elle ne pouvait ainsi prétendre que les frais de CHF 204'087.-, encourus uniquement par les autres sociétés du groupe, auraient dû être comptabilisés dans ses propres comptes, avant de faire l'objet d'une allocation.

e. Par jugement du 19 décembre 2022, le TAPI a rejeté le recours.

La reprise de CHF 199'806.- opérée dans le cadre de l’exercice 2014 pour charges injustifiées commercialement devait être confirmée. La contribuable avait admis que la somme de CHF 416'262.-, comptabilisée initialement au titre de ses propres frais de représentation, comprenait également des frais encourus par quatre autres entités du groupe. Dans la mesure où elle n’était pas parvenue à démontrer le montant exact de ces derniers, la méthode de répartition choisie par l’AFC-GE était admissible. Ce calcul avantageait la société dès lors que l'AFC-GE aurait pu reprendre l’entier de la somme précitée.

La répartition que soutenait la contribuable, selon laquelle seul un montant de CHF 26'437.- représentait une charge à attribuer aux autres entités du groupe, devait être écartée. Celle-ci n’était fondée sur aucune documentation comptable probante et les montants des frais cités à titre d’exemple étaient compris dans les CHF 216'456.- admis en déduction par l’AFC-GE.

La nouvelle répartition proposée au stade de la réplique – tenant compte des frais de représentation comptabilisés par tout le groupe – était manifestement infondée. Il s’agissait uniquement de déterminer dans quelle mesure le poste de CHF 416'262.- qu’elle avait elle-même comptabilisé constituait une charge justifiée commercialement, ce qu’il lui appartenait de démontrer de manière précise et indiscutable. Il ne se justifiait pas de prendre en compte les frais de tout le groupe, alors que la contribuable avait admis que le montant précité ne concernait qu’elle-même et quatre autres entités. Il lui appartenait de ne comptabiliser que des frais en relation immédiate et directe avec son bénéfice, ce qu’elle n’avait pas fait. Elle n’avait pas non plus établi à quel montant exact s’élevaient ses propres frais.

La quotité des amendes fixée à 1,25 fois les impôts soustraits était proportionnée, vu les circonstances et l’intensité de la faute imputable à la contribuable. Si la collaboration de la société avait été bonne, elle avait été insuffisante à elle seule pour admettre une quotité correspondant au montant des impôts soustraits compte tenu des circonstances aggravantes et de l’importance des montants. La contribuable errait en alléguant que la comptabilisation indue en 2016 d’une charge de CHF 50'000.- ne procédait d’aucune faute. Vu l’importance et la nature de ce montant et les principes comptables, que les organes de la société ne pouvaient ignorer, une telle comptabilité erronée découlait à tout le moins d’une négligence très grave de ces derniers, laquelle ne suffisait pas pour admettre une réduction des amendes. Enfin, les organes de la contribuable avaient commis intentionnellement une soustraction fiscale importante s'étant déroulée sur plusieurs années et consistant en la prise à sa charge des frais des sociétés du groupe, la comptabilisation de charges non justifiées commercialement et l’octroi de prêts fictifs à des sociétés sœurs, dissimulant ainsi des montants considérables des bénéfices imposables. Une telle soustraction d'impôt procédait d'une faute grave devant être sanctionnée par une amende supérieure à une fois le montant de l'impôt soustrait.

D. a. Le 20 janvier 2023, la contribuable a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à ce que ce dernier soit réformé en ce sens que : l’ajustement de son bénéfice imposable 2014 soit réduit de CHF 199'806.- à CHF 26'437.-, subsidiairement à CHF 96'355.- ; pour les ajustements restants, la quotité de l’amende soit réduite à une fois le montant de l’impôt soustrait pour les périodes fiscales 2014 et 2015 ; l’ajustement du bénéfice de l’exercice 2016 servant de base de calcul à l’amende soit réduit de CHF 50'000.-.

Il n’y avait pas de raison de s’écarter de ses comptes pour déterminer les charges commercialement justifiées, en particulier de mettre en cause la régularité de la comptabilisation de CHF 421'833.70 des frais de représentation. Vu la présomption d’exactitude de la comptabilité, il ne lui appartenait pas de démontrer le caractère justifié de chacune des dépenses qu’elle avait comptabilisées, mais à l’autorité intimée de fournir suffisamment d’indices de l’existence d’une prestation appréciable en argent.

Contrairement à ce qu’avaient retenu l’AFC-GE puis le TAPI, C______ ne se souvenait pas avoir déclaré, lors de la procédure de contrôle, que la société avait supporté des frais au bénéfice d’autres sociétés du groupe sans les refacturer à ces dernières, ce qui n’était d’ailleurs pas conforme à la réalité. Elle n’avait pas vocation à prendre en charge les frais d’autres sociétés apparentées – lesquelles avaient, certaines années, assumé des frais de représentation bien plus importants –et avait supporté une part substantielle desdits frais pour son propre bénéfice, notamment dans le cadre d’évènements lors desquels des pièces lui appartenant avaient été exposées puis vendues. Seul un montant de CHF 26'437.-, qu’elle avait pris en charge pour d’autres sociétés, pouvait être retenu comme prestation appréciable en argent.

S’il fallait s’écarter des comptes pour procéder à une allocation en proportion du chiffre d’affaires de l’ensemble des sociétés du groupe, il convenait également de tenir compte de la totalité des frais de représentation supportés par lesdites sociétés, soit CHF 625'920.- (CHF 421'833.- recourante + CHF 204'087.- autres sociétés). Il en résultait ainsi un montant de frais de représentation justifiés de CHF 325'478.- (CHF 625'920.-*52%), de sorte que la reprise se limitait à CHF 96'355.-. Dans la mesure où l’AFC-GE s’était fondée sur une approche économique basée sur une vue consolidée du groupe, il fallait par cohérence y inclure l’ensemble des coûts supportés par le groupe. Il n’était pas possible de s’écarter de sa comptabilité pour lui refuser la déduction d’une part de ses charges tout en s’en tenant strictement aux comptes lorsqu’il s’agissait de déterminer quelle part était justifiée.

Il n’existait pas, pour les exercices 2014 et 2015, de circonstances aggravantes justifiant que la quotité des amendes excède le montant des impôts soustraits. Elle avait pleinement collaboré dans le cadre des procédures de contrôle et de rappel d’impôt. Bien qu’elle avait reconnu ne pas avoir géré ses affaires fiscales avec la rigueur nécessaire, dès lors qu’il s’agissait d’une petite entreprise familiale dont l’actionnaire et administrateur se consacraient exclusivement au développement commercial, au détriment de suivi des obligations fiscales, cela ne démontrait pas que ses organes avaient agi de manière intentionnelle. Elle n’avait pas cherché à réaliser des économies d’impôt et n’agissait pas de manière planifiée. Si les montants des reprises n’étaient pas négligeables, compte tenu de ses bénéfices, ils n’étaient pas non plus considérables au point de justifier une augmentation de la quotité des amendes, ce d’autant moins que la plupart de ces reprises devaient être retranchées.

Enfin, l’erreur de comptabilisation de CHF 50'000.- de salaires n’avait pas été intentionnelle. Cette charge était indiscutable et la société ne tirait aucun bénéfice à la comptabiliser en 2016 plutôt qu’en 2015. Une amende pour tentative de soustraction de ce montant ne se justifiait en conséquence pas.

b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

La recourante faisait partie du groupe international de sociétés « B______ ». Elle exploitait la boutique genevoise du même nom, mais était également, dans les faits, la direction du groupe pour lequel elle effectuait des tâches telles que le marketing, la publicité, le développement des collections, de financement, l’acquisition et le suivi de la clientèle, la comptabilité et la gestion du stock du groupe, sans qu’aucune refacturation ne soit prévue. La gestion de la boutique genevoise, initialement par une autre société tombée en faillite en 2017, avait été reprise progressivement par la contribuable dès 2013. La marque « B______ » était détenue par une autre société du groupe n’ayant pas de locaux ni de comptabilité. D’autres sociétés dont le siège se trouvait aux Îles Vierges britanniques (ci-après : BVI) avaient été mises en place pour centraliser les achats au sein de l’ensemble du groupe. Celles-ci n’avaient pas non plus de structure et l’administration et la logistique du stock et des commandes, de même que la réception et l’envoi de la marchandise étaient assurés par le personnel de la recourante à Genève. Ainsi, la marge payée par cette dernière aux sociétés des BVI en tant que fournisseurs était injustifiée au regard de leur activité inexistante. Par ailleurs, le groupe organisait de nombreux événements promotionnels de la marque, contribuant à sa mise en valeur de manière globale, de sorte que cette promotion ne visait pas uniquement la boutique genevoise. Elle profitait à l’ensemble du groupe, notamment aux sociétés détenant les boutiques de Londres, Moscou, New-York ou Beverly Hills, celles-ci pouvant appliquer des prix de vente incluant la valeur de la marque, étant précisé qu’aucune royalties n’était versée. C’était dans ce contexte que les frais de représentation de la contribuable avaient été répartis en fonction du chiffre d’affaires de chaque entité et qu’il ne se justifiait pas que l’entier de ces frais soit supporté par la recourante. La méthode de calcul utilisée n’était pas contestable.

Il n’y avait pas lieu de prendre en considération la totalité des frais de représentation des autres sociétés du groupe pour déterminer la part de chacune. Seuls les frais de représentation qui n’étaient pas exclusivement liés au site genevois avaient fait l’objet d’une reprise, soit les frais destinés à la promotion de la marque, qui devaient être répartis entre les différentes entités. Les autres frais qui ne concernaient qu’une entité en particulier ne pouvaient pas être répercutés sur les autres.

Des prestations appréciables en argent qui ne se justifiaient pas d’un point de vue commercial avaient été accordées par la contribuable. Il lui appartenait dès lors de démontrer le contraire, ce qu’elle avait échoué à faire puisque les éléments remis ne permettaient pas de déterminer à satisfaction que les frais de promotion, qu’elle alléguait être à sa seule charge, étaient effectivement et strictement en lien avec la boutique genevoise.

S’agissant de la quotité de l’amende, la recourante se prévalait de sa bonne collaboration, de sa négligence dans la gestion des affaires, de ne pas avoir agi de manière planifiée et du montant des reprises. Or, l’intimée n’avait pas obtenu, lors du contrôle, les réponses et documents nécessaires, et avait dû à plusieurs reprises adresser des demandes de renseignements complémentaires et repousser les délais initialement octroyés à la contribuable. Sa collaboration ne pouvait ainsi pas atténuer la quotité de l’amende. Le caractère intentionnel ne pouvait pas être exclu, dans la mesure où compte tenu de sa qualité d’actionnaire ultime du groupe, B______ ne pouvait pas ignorer que la société avait effectué des distributions dissimulées de bénéfice.

c. Dans sa réplique, la recourante a précisé que l’AFC-GE n’indiquait pas en quoi la présomption d’exactitude des comptes aurait été renversée, se limitant à faire valoir que des prestations appréciables en argent avaient été accordées par la société et que cela n’était pas contesté. Or, il ne pouvait pas être déduit du fait qu’elle n’avait pas contesté des reprises qui n’étaient à ce jour plus litigieuses que la présomption avait été renversée s’agissant des frais de marketing. Il n’existait pas d’élément concret permettant de remettre en cause l’exactitude des comptes et partir de l’idée qu’elle avait pris à sa charge des frais d’autres sociétés du groupe. Au contraire, il apparaissait que ces dernières avaient pris à leur charge des frais substantiels, ce qui n’aurait pas été le cas si la contribuable avait été le centre de coûts du groupe en matière de frais marketing.

L’augmentation de l’intimée quant à sa conclusion subsidiaire visant à prendre en compte la totalité des frais du groupe était contradictoire. L’AFC-GE semblait partir de l’idée que la société avait pris en charge des frais concernant l’entier du groupe alors que les autres sociétés n’avaient pris en charge que leurs propres frais, ce qui ne reposait sur aucun élément concret.

Enfin, l’intimée ne répondait pas au grief concernant les CHF 50'000.- comptabilisés par erreur à déduire de la base de calcul de l’amende pour 2016. Cette erreur relevait de la négligence et avait été clairement mentionnée dans ses comptes, de sorte qu’elle n’avait pas agi intentionnellement.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur la reprise de CHF 199'806.- opérée par l’AFC-GE sur la taxation 2014 de la contribuable pour charges injustifiées commercialement, ainsi que sur la quotité des amendes prononcées pour soustraction d’impôt, respectivement tentative de soustraction pour les années fiscales 2014 à 2016.

2.1 La présente cause concerne la taxation IFD et ICC de la recourante pour les années fiscales 2014 à 2016. Elle est ainsi régie par les dispositions de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11), respectivement celles de la loi sur l'imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15).

2.2 La question étant traitée de manière semblable en droit fédéral et en droit cantonal, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme cela est admis par la jurisprudence (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_662/2014 du 25 avril 2015 consid. 1).

3.             Selon la recourante, il n’y avait pas lieu de remettre en question la régularité de sa comptabilisation de CHF 421'833.- à titre de frais de représentation. La reprise de CHF 199'806.- opérée par l’AFC-GE devait à tout le moins être réduite à CHF 26'437.-, subsidiairement à CHF 96'355.-. La société n’avait pas pris en charge les frais de sociétés apparentées et avait supporté une part importante de frais pour son propre bénéfice, notamment dans le cadre d’évènements lors desquels des pièces lui appartenant avaient été exposées puis vendues. L’intimée ne disposait pas de suffisamment d’indices pour retenir l’existence d’une prestation appréciable en argent. Si la répartition devait être effectuée en proportion du chiffre d’affaires de l’ensemble des sociétés du groupe, il fallait tenir compte de la totalité des frais de représentation supportée par celles-ci.

3.1 Selon l'art. 57 LIFD, l'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Celui-ci comprend outre le bénéfice net résultant du solde du compte de résultats, compte tenu du solde reporté de l'exercice précédent (art. 58 al. 1 let. a LIFD) tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultat qui ne servent pas à couvrir les dépenses justifiées par l'usage commercial tels que notamment les frais d'acquisition, de production ou d'amélioration d'actifs immobilisés, les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial ainsi que les produits qui n'ont pas été comptabilisés dans le compte de résultats (art. 58 al. 1 let. b et c LIFD).

3.2 Les cantons doivent imposer l'ensemble du bénéfice net dans lequel doivent notamment être inclus les charges non justifiées par l'usage commercial, portées au débit du compte de résultats ainsi que les produits et les bénéfices en capital, de liquidation et de réévaluation qui n'ont pas été portés au crédit du compte de résultats (art. 24 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14).

3.3 Pour ce qui est de l'ICC, sont notamment considérés comme bénéfice net imposable le bénéfice net, tel qu'il résulte du compte de pertes et profits, les tantièmes ainsi que les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l’usage commercial (art. 12 let. a et h LIPM).

3.4 Selon la jurisprudence, il y a distribution dissimulée de bénéfice constitutive de prestation appréciable en argent lorsque les quatre conditions cumulatives suivantes sont remplies : 1) la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante ; 2) cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le ou la touchant de près ; 3) elle n'aurait pas été accordée dans de telles conditions à un tiers ; 4) la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste, de telle sorte que les organes de la société auraient pu se rendre compte de l'avantage qu'ils accordaient (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_181/2020 du 10 août 2020 consid. 5.2).

Il convient ainsi d’examiner si la prestation aurait été accordée dans la même mesure à un tiers étranger à la société, soit si la transaction a respecté le principe de pleine concurrence (« dealing at arm’s length » ; ATF 140 II 88 consid. 4.1). Le droit fiscal suisse ne connaissant pas, sauf disposition légale expresse, de régime spécial pour les groupes de sociétés, les opérations entre sociétés d’un même groupe doivent également intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence. En conséquence, il n’est pas pertinent que la disproportion d’une prestation soit justifiée par l’intérêt du groupe (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_181/2020 du 10 août 2020 consid. 5.2).

Une prestation appréciable en argent peut prendre la forme d’une renonciation à un produit, qui conduit à une diminution correspondante du résultat chez la société. Tel est par exemple le cas lorsqu’une société renonce totalement ou en partie à un revenu qui lui revient en faveur d’un détenteur de part ou d’un proche, ou qu’elle n’obtient pas, pour la prestation qu’elle a effectuée, la contre-prestation qu’elle aurait exigée d’un tiers (ATF 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_377/2014 du 26 mai 2015 consid. 9.4.1 ; ATA/533/2021 du 18 mai 2021 consid. 5b).

3.5 Les art. 959 ss de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) traitent des comptes annuels et de la tenue du bilan.

Les comptes établis conformément aux règles du droit commercial lient les autorités fiscales, à moins que le droit fiscal ne prévoie de règles correctrices spécifiques. L’autorité peut en revanche s’écarter du bilan remis par le contribuable lorsque des dispositions impératives du droit commercial sont violées ou des normes fiscales correctrices l’exigent (ATF 137 II 353 consid. 6.2 ; 136 II 88 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_712/2020 précité consid. 4.2 ; 2C_132/2020 du 26 novembre 2020 consid. 7.2).

Le respect du droit comptable, qui résulte des art. 957 ss CO, est une condition préalable nécessaire, mais non suffisante, de la justification commerciale d'une dépense. Dans une deuxième étape, l'autorité fiscale doit notamment s'assurer du respect des règles correctrices parmi lesquelles figure l'art. 58 al. 1 let. b LIFD (arrêts du Tribunal fédéral 2C_712/2020 précité consid. 4.2 ; 2C_508/2014 du 20 février 2015 consid. 5.3.1 ; Michael BERTSCHINGER, op. cit., n° 194 ; Peter BÖCKLI, Neue OR-Rechnungslegung, Schulthess 2014, n° 228 ss, spéc. 231 et 235). Les règles correctrices en faveur du fisc permettent aux autorités fiscales de réintroduire dans le résultat fiscal des éléments qui n'apparaîtraient pas dans les comptes commerciaux; les dispositions fiscales conduisent à la prise en compte d'un résultat que les états financiers ne faisaient pas apparaître en toute légalité. Ces reprises peuvent concerner aussi bien des refus de charges que des réintégrations de produits du compte de résultats (Pierre-Marie GLAUSER, IFRS et droit fiscal IFRS et droit fiscal, Les normes true and fair et le principe de déterminance en droit fiscal suisse actuel, Archives 74, p. 529 ss, p. 537 s.).

3.6 Le principe de déterminance déploie un effet contraignant pour le contribuable. En effet, celui-ci est lié par son mode de comptabilisation et seules les écritures ressortant des comptes sont décisives (Robert DANON, in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire romand de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2e éd., 2017, ad art. 57-58, n. 74). Les écritures comptables effectivement passées doivent être reprises par le droit fiscal et le contribuable ne peut se prévaloir que des écritures qu'il a effectivement enregistrées dans ses comptes, lesquels lui sont d'ailleurs opposables (principe de comptabilisation). Ce dernier principe implique donc que le contribuable est lié par les comptes qu'il a joints à sa déclaration (Pierre-Marie GLAUSER, Apports, 2005, p. 89 ; Pierre-Marie GLAUSER, Goodwill et acquisitions d'entreprises. Une analyse sous l'angle du droit fiscal et comptable, p. 430). Si le contribuable a passé des écritures en faisant usage de sa liberté d'appréciation, lui permettre de les remettre en question reviendrait à tolérer un comportement contradictoire, ce d'autant plus si la modification du bilan est motivée par un souci d'économie fiscale. Celui qui, par exemple pour des raisons fiscales, ne fait pas valoir des charges justifiées, ne peut ultérieurement demander à modifier les comptes (Pierre-Marie GLAUSER, Apports, 2005, p. 91).

3.7 Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6.4).

3.8 En matière fiscale, il appartient à l'autorité de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d'impôts. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve, ces règles s'appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.5 ; ATA/1239/2021 du 16 novembre 2021 consid. 5a ; ATA/1223/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3c).

Si les preuves recueillies par l'autorité fiscale apportent suffisamment d'indices révélant l'existence d'éléments imposables, il appartient à nouveau au contribuable d'établir l'exactitude de ses allégations et de supporter le fardeau de la preuve du fait qui justifie son exonération (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_80/2021 du 29 juillet 2021 consid. 3.2).

3.9 En l’espèce, les contrôles opérés par l’intimée en 2019 ainsi que les documents qui lui ont été remis à cette occasion ont établi que la recourante fait partie d’un groupe international de sociétés, pour certaines desquelles elle a pris à sa charge, sans les refacturer, une partie des frais relatifs à la promotion et la mise en valeur de la marque qu’elle représente, notamment en s’occupant du marketing, de la publicité, du développement des collections, du financement, de l’acquisition et du suivi de la clientèle, de la comptabilité et de la gestion du stock du groupe.

C’est sur la base de ces éléments et après instruction que l’intimée a retenu, à juste titre, l’existence d’indices probants quant à une prestation appréciable en argent et a opéré, sur le montant de CHF 421'833.- de frais de représentation comptabilisés par la recourante qui comprenaient également des frais bénéficiant à quatre autres entités du groupe, une reprise de CHF 199'806.-. Cette dernière a été calculée, faute de pièces comptables détaillées fournies par la contribuable permettant de se fonder sur un autre mode de calcul, en proportion du chiffre d’affaires réalisé par la contribuable, respectivement par les quatre autres sociétés concernées. Le fardeau de la preuve incombant, en l’occurrence, à la contribuable qui n’est pas parvenue à contredire les nombreux indices de l’existence d’une prestation appréciable en argent ni à démontrer quels frais étaient en relation immédiate et directe avec son bénéfice, respectivement le montant exact des frais supportés par les autres sociétés, la méthode de calcul retenue par l’AFC-GE n’apparaît pas critiquable. Par ailleurs, le montant de CHF 26'437.- représentant, selon la recourante, les charges à attribuer aux autres sociétés concernées est compris dans le montant admis en déduction par l’intimée.

Le mode de répartition proposé subsidiairement par la recourante, visant à tenir compte des frais de représentation comptabilisés pour toutes les sociétés du groupe et à réduire ainsi le montant de la reprise à CHF 96'355.-, ne peut pas non plus être suivi. La contribuable a elle-même comptabilisé un montant de CHF 421'833.- au titre de frais de représentation, alors qu’il lui appartenait de ne comptabiliser que des frais en relation immédiate et directe avec son bénéfice. Elle est toutefois liée par les comptes joints à sa déclaration fiscale, dont l’intimée s’est écartée à juste titre sur la base des normes correctrices des art. 58 al. 1 LIFD et 12 LIPM. Dans la mesure où il s’avère que ces frais concernent également quatre autres entités du groupe et non toutes les autres sociétés du groupe, il ne se justifie pas de prendre en considération la totalité des frais du groupe et de les répercuter sur l’ensemble des sociétés.

C’est en conséquence de manière conforme au droit que l’AFC-GE puis le TAPI ont confirmé la reprise de CHF 199'806.- opérée dans le cadre de l’exercice 2014 pour charges injustifiées commercialement.

4.             La recourante conteste les montants et la quotité des amendes, alléguant d’une part qu’il ne se justifiait pas que celle-ci excède le montant de l’impôt soustrait et, d’autre part, qu’il convenait de déduire de la base de calcul des amendes relatives à l’année 2016 une charge salariale de CHF 50'000.- liée à l’exercice 2015 qu’elle avait comptabilisée par erreur.

4.1 En cas de soustraction consommée, l’amende est, en règle générale, fixée au montant de l’impôt soustrait. Si la faute est légère, l’amende peut être réduite jusqu’au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 1 LHID ; art. 69 al. 2 LPFisc). Le montant de l’impôt soustrait constitue donc le premier critère de fixation de l’amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d’augmentation de sa quotité (ATA/1287/2021 du 23 novembre 2021 consid. 14a ; ATA/600/2020 du 16 juin 2020 consid. 7c).

4.2 La quotité précise de l’amende doit par ailleurs être fixée en tenant compte des dispositions de la partie générale du CP, les principes qui régissent la fixation de la peine prévus à l’art. 47 CP s’appliquant. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l’impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l’auteur. Les circonstances atténuantes de l’art. 48 CP sont aussi applicables par analogie (ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1 s).

4.3 Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales, qui doivent faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi, disposent d’un large pouvoir d’appréciation lors de la fixation de l’amende, l’autorité de recours ne censurant que l’abus du pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_12/2017 du 23 mars 2018 consid. 7.2.1 ; ATA/1287/2021 précité consid. 14c ; ATA/1002/2020 du 6 octobre 2020 consid. 9b et les références citées).

4.4 En vertu des principes de l'étanchéité des exercices et de la périodicité de l'impôt, chaque exercice est considéré comme un tout autonome, sans que le résultat d'un exercice puisse avoir une influence sur les suivants, et le contribuable ne saurait choisir au cours de quelle année fiscale il fait valoir les déductions autorisées. Les déductions doivent être demandées dans la déclaration d'impôts de l'année au cours de laquelle les faits justifiant l'octroi des déductions se sont produits (ATA/441/2022 du 26 avril 2022 consid. 3c ; ATA/1637/2019 du 5 novembre 2019 consid. 8a) ; plus généralement, les deux principes précités impliquent que tous les revenus effectivement réalisés ainsi que tous les frais engagés durant la période fiscale en cause sont déterminants pour la taxation de cette période (arrêt du Tribunal fédéral 2C_87/2015 du 23 octobre 2015 consid. 8.1.2 et les références citées ; Message concernant les lois fédérales sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes ainsi que sur l'impôt fédéral du 25 mai 1983 in FF 1983 III p. 177).

4.5 En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a collaboré dans le cadre des procédures initiées à son encontre pour soustraction d’impôt et tentative de soustraction, en particulier lors des contrôles opérés en ses locaux par l’AFC-GE, sous réserve pour cette dernière d’avoir dû effectuer plusieurs relances et reporter certains délais pour obtenir des informations de la contribuable. Cette bonne collaboration ne permet toutefois pas, vu les circonstances aggravantes que constituent le montant des impôts soustraits - le montant de la reprise étant confirmé - la périodicité de la soustraction et la faute grave de la recourante s’agissant de la négligence dans la gestion de ses affaires, d’atténuer la quotité des amendes.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, l’autorité intimée n’a ni excédé ni abusé de son pouvoir d’appréciation lors de la fixation des amendes à 1,25 fois le montant des impôts soustraits, quotité apparaissant conforme aux principes développés ci-dessus, ainsi que proportionnée à l’intensité de la faute commise et aux circonstances du cas d’espèce, si bien qu’elle sera également confirmée.

Enfin, eu égard aux principes de l'étanchéité des exercices et de la périodicité de l'impôt, la contribuable a commis, à tout le moins, une grave négligence en comptabilisant dans le cadre de son exercice 2016 un montant de CHF 50'000.- de charges salariales relatives à l’exercice 2015, ce que ne pouvaient pas ignorer ses organes. Ainsi et compte tenu de l’importance du montant précité, il ne se justifie pas de réduire le montant servant de base de calcul aux amendes prononcées pour 2016.

Il résulte de ce qui précède que le recours, mal fondé, doit être rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 janvier 2023 par A______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 décembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______ SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jérôme PIGUET, avocat de la recourante, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Fabienne MICHON RIEBEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. MICHON RIEBEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :