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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1982/2021

ATA/539/2023 du 23.05.2023 sur JTAPI/1108/2022 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.07.2023, 1C_336/2023, A 309333/1
Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;ADMINISTRATION DES PREUVES;AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;BÂTIMENT OUVERT AU PUBLIC;CHANGEMENT D'AFFECTATION;PLAN DE ZONES;POUVOIR D'APPRÉCIATION;AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);EXCEPTION(DÉROGATION)
Normes : Cst.29.al2; LPA.18; LPA.19; LPA.20; LPA.37.letc; LPA.41; LCI.1.al1.letb; LCI.3.al3; LCI.3.al4; LCI.3.al5; LAT.14.al1; LAT.21.al1; LaLAT.13.al1.letg; LaLAT.19; LExt.15A.al1; RPUS.1.ch1; RPUS.3.ch6; RPUS.9; RPUS.14.al1
Résumé : Recours contre un jugement du TAPI confirmant le refus de délivrer à la recourante une autorisation pour un changement d'affectation d'une arcade commerciale sise au rez-de-chaussée en centre médical. Celle-ci est située en Ville de Genève, de sorte que le RPUS lui est applicable. Le centre médical accueille des patients dans des conditions de confidentialité et doit ainsi être considéré comme un local fermé au public, quand bien même les consultations auraient lieu à l'étage. Quoi qu'il en soit, seule un peu plus de la moitié de la surface de l'arcade pourrait être considérée comme ouverte au public, ce qui est insuffisant. Le Conseil administratif a refusé de donner son accord à l'octroi d'une dérogation, de sorte que le département ne pouvait l'accorder lui-même. La recourante ne démontre pas que l'activité mise en œuvre dans l'arcade présenterait une utilisation plus judicieuse du sol. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1982/2021-LCI ATA/539/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 mai 2023

3ème section

 

dans la cause

 

A______ SA
représentée par Me Romain JORDAN, avocat recourante

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE – OAC

et

VILLE DE B______ - DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DE L'AMÉNAGEMENT intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 octobre 2022 (JTAPI/1108/2022)


EN FAIT

A.           a. Le A______ SA (ci-après : A______ SA) est locataire d'une arcade située au rez-de-chaussée de l'immeuble sis place C______ ______, à B______.

Cet immeuble se trouve en deuxième zone de construction ainsi que dans le secteur A de la carte annexée au règlement relatif aux plans d’utilisation du sol de la Ville de B______ du 20 février 2007 (RPUS - LC 21 211).

b. L'arcade a été occupée par le D______SA (ci-après : le D______), en tant qu’établissement bancaire, de 1993 à 2018.

Le 23 octobre 2010, le D______s'était vu délivrer une autorisation de construire en procédure accélérée (ci-après : APA) portant sur des transformations intérieures de l'agence.

Selon les plans déposés dans le cadre de la procédure d'APA, l'arcade était affectée à une activité d’accueil, de guichet pour les opérations courantes et de zone ouverte 24 heures sur 24 avec bancomats ; elle était accessible tant aux clients de la banque qu’aux tiers. Une surface minimale de 57,2 m2 était accessible au public.

Dans le cadre de l’instruction de la demande, la Ville de B______ (ci-après : la ville) avait émis un préavis favorable sous conditions, requérant que l’accès au public soit garanti et que l’ensemble des vitrines donnant sur la rue ne soit pas opacifié.

B.            a. Le 17 août 2020, A______ SA a déposé auprès du département du territoire (ci‑après : le département), une demande d'APA, enregistrée sous la référence APA 309’333/1, portant sur le changement d’affectation de l’arcade en centre médical.

b. Lors de l’instruction de la demande, le service de la médecin cantonale a rendu un préavis favorable sous conditions, notamment que les locaux respectent la confidentialité et la dignité des patients.

c. La ville a rendu un préavis défavorable le 5 octobre 2020, en raison du fait que l’activité déployée dans l'arcade, soit un centre médical, n’était pas accessible au public et ne contribuait pas à l’animation du quartier.

d. Invitée par le département à se déterminer sur ce préavis, A______ SA a exposé que le centre médical ne devait pas être considéré comme un local fermé au public et a, dans l'hypothèse où tel devait néanmoins être le cas, sollicité une dérogation pour le changement d'affectation.

e. Le 16 décembre 2020, la ville a réitéré son préavis défavorable, dans la mesure où son Conseil administratif avait, lors de sa séance du 25 novembre 2020, refusé d'octroyer la dérogation.

f. A______ SA a prié le département de s’écarter du préavis communal, celui-ci n’étant pas motivé.

g. Par décision du 7 mai 2021, le département a refusé d’octroyer l’autorisation de construire sollicitée, au vu de la non-conformité du projet au RPUS.

C.           a. Le 7 juin 2021, A______ SA a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) et a notamment requis l'audition des parties et la tenue d'un transport sur place.

b. Le 12 juillet 2021, la ville est intervenue dans la procédure.

c. Le TAPI a rejeté le recours par jugement du 20 octobre 2022 (JTAPI/1108/2022).

D.           a. Par acte remis à la poste le 21 novembre 2022, A______ SA a interjeté recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant préalablement à la tenue d'un transport sur place ainsi qu'à la comparution personnelle des parties et, à titre principal, à son annulation et à celle de la décision de rétablissement d'une situation conforme au droit et de l'amende du 4 juin 2021 de l'office des autorisations de construire (sic).

Son droit d'être entendue avait été violé par le TAPI. D'une part, il avait refusé le transport sur place en motivant ce choix par la possibilité de visualiser l'arcade litigeuse grâce aux outils numériques dont il disposait. Il avait ainsi admis ne pas disposer d'un dossier complet et aurait dû procéder à un transport sur place, ce qui lui aurait permis de constater que l'arcade litigieuse était ouverte au public. La comparution personnelle des parties lui aurait permis d'instruire les questions de circonstances dans lesquelles la modification d'affectation avait eu lieu, d'absence de modification des vitrines existantes et de l'affectation des locaux. D'autre part, les juges précédents avaient recherché des éléments de fait à l'aide d'outils numériques, après que la cause eut été gardée à juger, sans les lui soumettre. Elle ignorait quels étaient ces outils, de sorte qu'elle n'avait pas pu s'exprimer sur les faits examinés par ce biais, alors que ceux-ci provenaient vraisemblablement de sites internet qui n'avaient pas une valeur probante particulière.

Le raisonnement du TAPI sur la question de l'accessibilité de l'arcade du centre médical au public et sa participation à l'animation du quartier était erroné. Le centre médical ne pouvait être comparé à un cabinet médical. Les médecins y travaillant étaient indépendants, de sorte que l'arcade gardait une activité à caractère commercial. Aucune consultation médicale n'avait lieu au rez-de-chaussée, accessible à tous. Les conditions d'accueil de la patientèle étaient identiques à celles d'un établissement bancaire, dont l'activité pratiquée exigeait les mêmes conditions de confidentialité.

Aucune modification de la partition et de la substance existante n'avait été réalisée. Les vitrines n'avaient pas été transformées et l'accès au rez-de-chaussée avait été maintenu. La surface ouverte au public était plus importante que celle du précédent établissement bancaire. Le centre médical ne constituait ainsi pas un local fermé au public.

Il existait, aux alentours de la Place C______ , au moins cinq établissements bancaires et de nombreux commerces, mais aucun centre médical. La nouvelle affectation contribuait ainsi à l'implantation d'activités de manière harmonieuse, diversifiée et équilibrée.

Pour rendre sa décision, le département s'était fondé exclusivement sur le refus – non motivé et non fondé – du Conseil administratif d'accorder une dérogation. Ni ce dernier, dans son préavis défavorable non motivé, ni le département, dans sa décision, n'expliquaient en quoi les circonstances justifiaient le refus d'une dérogation. Le département n'était pas lié par le préavis du Conseil administratif.

Les conditions d'octroi d'une dérogation, qui aurait permis une utilisation plus judicieuse du bâtiment, étaient remplies. L'activité déployée par l'établissement bancaire ayant précédé le sien comprenait uniquement un accueil restreint du public au rez-de-chaussée à des guichets, dont le nombre était limité, alors que la nouvelle affectation permettait de pérenniser l'animation du quartier.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

Les plans et photographies figurant au dossier ainsi que les explications écrites données par les parties avaient permis au TAPI de trancher le litige en toute connaissance de cause.

Il supposait que les « outils numériques » dont la juridiction précédente disposait pour visualiser l'arcade correspondaient à des outils de plans, tels que le site d’information du territoire genevois (SITG) ou Google Maps, permettant de situer les locaux. L'utilisation de ces sites ne nécessitait pas d'interpeller les parties. Le jugement attaqué ne se fondait pas sur des éléments de fait qui auraient été établis par le TAPI uniquement et sur lesquels A______ SA n'aurait pu se déterminer.

L'arcade, en raison de son affectation en tant que centre médical, devait être qualifiée de local fermé au public. Une telle activité était par essence confidentielle et ne pouvait participer à l'animation du quartier. L'opacité des vitrines en était un signe. Les plans produits à l'appui de la demande d'autorisation démontraient que l'arcade au rez-de-chaussée n'était pas entièrement ouverte au public, dans la mesure où la moitié était dévolue à des salles dédiées au personnel, au stockage ou à des consultations.

Dans la pratique, l'activité d'un centre médical ne se différenciait pas de celle d'un cabinet médical.

S'agissant de la partition des locaux, la comparaison avec ceux du D______n'était pas pertinente, dans la mesure où seule était déterminante la conformité à la loi de l'activité désormais déployée. La quasi-totalité du rez-de-chaussée était, lorsque le D______exploitait les locaux, ouverte au public.

D'autres cabinets médicaux étaient déjà situés à proximité immédiate de l'arcade, dans les étages des différents immeubles.

c. La ville a également conclu au rejet du recours.

L'utilisation par le TAPI d'outils numériques à sa disposition, tels que Google Street View et SITG, n'était pas illicite, ce d'autant plus qu'elle permettait d'économiser le temps nécessaire à un transport sur place et que ce dernier n'aurait fait que confirmer le contenu des plans et photos produites. Le TAPI semblait s'être fondé uniquement sur les pièces produites par les parties.

A______ SA avait largement pu s'expliquer sur les circonstances de la modification de l'affectation, de sorte que son audition n'était pas utile.

Le but du RPUS était de maintenir des activités ouvertes au public au rez‑de‑chaussée des bâtiments. Que A______ SA exploitât un centre médical ou des cabinets médicaux, son activité était exercée dans un lieu où la médecine était pratiquée, de sorte que la confidentialité devait y être garantie. Un médecin devait respecter les devoirs fixés par la loi, qu'il exerçât en tant qu'employé ou indépendant. Dès lors, l'aménagement du centre médical devait assurer la confidentialité des patients, raison pour laquelle les vitrines étaient entièrement opacifiées et le resteraient.

Il s'avérait nécessaire de maintenir l'animation du secteur, à laquelle l'implantation d'un centre médical destiné à recevoir de la clientèle en toute confidentialité ne participait pas. La place C______ se situait au cœur du centre-ville, dans un quartier soumis à une intense activité sociale et commerciale.

Les vitrines du centre médical donnaient sur les locaux affectés à une salle d'attente, des vestiaires, une salle de repos ainsi qu'un espace de consultation d'urgence. L'arcade était aménagée de telle sorte qu'aucune interaction ne pût se créer avec les passants, de sorte que la présence du centre médical nuisait à l'animation du quartier.

d. Dans sa réplique, A______ SA a indiqué que, dans la mesure où il était reproché à la nouvelle affectation de l'arcade litigeuse d'être une « vitrine morte », un transport sur place aurait été nécessaire. Ce dernier aurait non seulement permis de visualiser l'arcade litigieuse, mais également de contextualiser la zone dans laquelle elle s'insérait et de constater qu'elle permettait de préserver l'animation de la ville.

L'outil Street View n'était pas à jour car le précédent établissement bancaire y apparaissait encore. De la sorte, le transport sur place ne pouvait être remplacé par une consultation d'outils numériques.

Tout un chacun pouvait librement pousser les portes de l'arcade litigieuse. Le propre de la permanence médicale était d'être ouverte à tous, contrairement à un cabinet médical qui ne recevait que de la patientèle. La permanence permettait aux habitants d'obtenir une consultation médicale en centre-ville et constituait une prestation qui n'était pas offerte à proximité immédiate de l'arcade.

D'autres activités médicales étaient exercées au sein d'arcades installées au cœur de zones animées du centre-ville.

e. Sur ce, les parties ont été informées, le 14 février 2023, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 149 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 - LCI - L 5 05).

2) La recourante prétend que son droit d’être entendue aurait été violé par le TAPI, qui n’a pas donné suite à ses demandes de transport sur place et d'audition des parties, qu'elle réitère devant la chambre administrative.

Elle estime qu'un transport sur place permettrait de constater que l'arcade litigeuse est ouverte au public. De même, la comparution des parties permettrait d'instruire les questions de circonstances dans lesquelles la modification d'affectation a eu lieu, d'absence de modification des vitrines existantes et de l'affectation des locaux.

Elle soutient également que le TAPI a violé son droit d'être entendue en recherchant, à l'aide d'outils numérique, des éléments de fait sans les lui soumettre.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_157/2021 du 7 juillet 2021 consid. 3.1 ; 1C_638/2020 du 17 juin 2021 consid. 2.1 et les références citées).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2020 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 5.1.1 ; ATA/444/2023 du 26 avril 2023 consid. 2.1).

Le droit d'être entendu n'implique pas une audition personnelle de l'intéressé, celui‑ci devant simplement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l'issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid.  9.6 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_83/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.2 ; 2C_236/2019 du 4 juillet 2019 consid. 5.2 ; ATA/444/2023 précité consid. 2.1).

2.2 En droit genevois, la procédure administrative est en principe écrite ; toutefois, si le règlement et la nature de l'affaire le requièrent, l'autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA).

La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d'autres moyens de preuve (art. 20 LPA).

Afin de constater un fait par elle-même, l’autorité peut notamment ordonner le transport sur place (art. 37 let. c LPA).

2.3 En l’espèce, le TAPI a renoncé à procéder à un transport sur place car il a considéré que les plans versés au dossier et les outils numériques dont il disposait permettaient parfaitement de visualiser l’arcade litigieuse.

Il n'a pas non plus donné une suite favorable à la demande d'audition des parties formulée par la recourante, dans la mesure où il a estimé qu'elle avait pu exprimer son point de vue à plusieurs reprises par ses écrits et avait pu produire les pièces qu’elle estimait utiles.

Bien que l’outil numérique Google Street View ne soit certes pas à jour en ce qui concerne la place C______ et ne permette ainsi pas de visualiser l’arcade litigieuse, la solution retenue pas le TAPI ne prête toutefois pas le flanc à la critique.

En effet, les photos prises le 9 décembre 2020 par un agent de l’autorité intimée, qui ont été versées au dossier et portées à la connaissance de la recourante, qui a ainsi eu la possibilité de se déterminer sur leur contenu, permettent – à elles seules – de visualiser distinctement l’arcade. Les plans produits par la recourante montrent également de façon claire l'aménagement intérieur des locaux.

Dès lors, le TAPI a pu déterminer en toute connaissance de cause, sur la base des faits établis pendant l'instruction ainsi que des pièces du dossier, si les locaux litigieux étaient ouverts ou fermés au public, de sorte qu'un transport sur place n'était effectivement pas nécessaire pour répondre à cette question et trancher le litige.

Contrairement à ce que prétend la recourante, rien ne permet de déduire de la solution retenue par le TAPI en tant qu’elle porte sur le fond du litige, en particulier le consid. 18, que ce dernier aurait établi, sans les lui soumettre, de nouveaux faits après que la cause a été gardée à juger. La simple mention de la consultation d’outils numériques – accessibles par ailleurs à tous – ne suffit pas à le démontrer.

La juridiction précédente a ainsi renoncé à bon droit à procéder à un transport sur place.

S’agissant de l’audition des parties, la recourante a déjà eu l’occasion de s’exprimer largement par écrit dans le cadre de l’instruction. Si sa demande est certes motivée, elle ne démontre ni ne prétend que les éléments qu’elle souhaiterait apporter oralement – et qui ont du reste été suffisamment discutés par les parties – n’auraient pas pu l’être par écrit, étant rappelé que la procédure administrative est menée en principe par écrit (art. 18 LPA), sauf circonstances particulières qui ne se présentent en l'occurrence pas.

Le TAPI a ainsi retenu à juste titre que l’audition des parties n’était pas nécessaire.

Au vu de ce qui précède, le grief d’une violation du droit d’être entendu sera écarté. Il ne sera pas non plus donné suite à la demande d’actes d’instruction de la recourante, la chambre de céans considérant, à l'instar du TAPI et pour les raisons précitées, que le dossier est complet et en état d’être jugé.

3) La recourante invoque une violation de l'art. 9 al. 1 RPUS.

3.1 Sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, modifier même partiellement le volume, l’architecture, la couleur, l’implantation, la distribution ou la destination d’une construction ou d’une installation (art. 1 al. 1 let. b de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 - LCI - L 5 05).

Les demandes d’autorisation sont soumises, à titre consultatif, au préavis des communes, des départements et des organismes intéressés. L’autorité de décision n’est pas liée par ces préavis. Les communes et toutes les instances consultées formulent leur préavis dans un délai de 30 jours à compter de la date d’enregistrement de la demande. Passé ce délai, le département peut statuer, considérant que le défaut de réponse équivaut à une approbation sans réserve (art. 3 al. 3 LCI).

Lorsque le département refuse une autorisation, il se prononce néanmoins sur tous les éléments qui la concernent (art. 3 al. 4 LCI).

Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser. La délivrance d'autorisations de construire demeure toutefois de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/1102/2022 du 1er novembre 2022 consid. 6b et les arrêts citées).

Selon la jurisprudence bien établie, chaque fois que l’autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s’imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème édition, 2018, p. 176 n. 508). L’autorité de recours se limite ainsi à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/862/2021 du 24 août 2021 consid. 4b ; ATA/807/2020 du 25 août 2020 consid. 9a).

3.2 Les plans d’affectation règlent le mode d’utilisation du sol (art. 14 al. 1 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 - LAT - RS 700) et ont force obligatoire pour chacun (art. 21 al. 1 LAT).

Afin de maintenir et de rétablir l’habitat dans les quatre premières zones de construction au sens de l’article 19 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), et dans leurs zones de développement, d’y favoriser une implantation des activités qui soit harmonieuse et équilibrée, tout en garantissant le mieux possible l’espace habitable et en limitant les nuisances qui pourraient résulter de l’activité économique, les communes élaborent en collaboration avec l’État et adoptent des plans d’utilisation du sol approuvés par leur conseil municipal (art. 15A al. 1 de la loi sur l’extension des voies de communication et l’aménagement des quartiers ou localités du 9 mars 1929 - LExt - L 1 40).

L’affectation et le régime d’aménagement des terrains compris à l’intérieur d’une ou plusieurs zones peuvent être précisés par divers types de plans et règlements, à savoir notamment les plans d’utilisation du sol et leur règlement d’application visés par la LExt (art. 13 al. 1 let. g LaLAT).

Les plans d'utilisation du sol selon les art. 15A ss LExt et l'art. 13 al. 1 let. g LaLAT sont des plans d'affectation au sens de l'art. 14 LAT (ATA/227/2018 du 13 mars 2018 consid. 4a et les références citées), qui ont ainsi, conformément à l'art. 21 al. 1 LAT, force obligatoire pour chacun.

3.3 Le RPUS a été adopté par le conseil municipal de la Ville de B______ le 20 février 2007 et approuvée par le Conseil d'État le 27 février 2008. Il repose sur une délégation de la LExt (ATA/282/2006 du 23 mai 2006 consid. 5a).

3.3.1 Son art. 1 ch. 1 prévoit qu'en vue de favoriser la qualité de vie en ville, les plans d'utilisation du sol élaborés par la Ville de B______, en collaboration avec l'État, ont pour but de maintenir et rétablir l'habitat tout en favorisant une implantation harmonieuse des activités qui garantisse le mieux possible l'espace habitable et limite les charges sur l'environnement qui pourraient résulter d'une répartition déséquilibrée des affectations

À cette fin, il répartit notamment en logements et en activités les surfaces brutes de plancher supplémentaires obtenues par des transformations de bâtiments (surélévation, aménagement de combles) ou par des constructions nouvelles (art.  1 ch. 2 let. a RPUS) et définit l'affectation et la destination des constructions existantes dans les cas où les dispositions du règlement leur sont directement applicables (art. 1 ch. 2 let. b RPUS).

Les dispositions du RPUS s'appliquent notamment aux quatre premières zones à bâtir au sens de l'art. 19 LaLAT. Elles s'appliquent aussi bien aux constructions existantes qu'aux constructions nouvelles (art. 2 ch. 1 RPUS).

Par bâtiment d'activités, il faut entendre tout bâtiment comportant des locaux qui, par leur destination, leur aménagement et leur distribution, sont destinés à des activités telles que les services de prestations ou administratifs, les diverses catégories de magasins, les cafés, les restaurants, les tea-rooms, les théâtres, les cinémas, les musées, les salles de concert, de spectacles, de conférences, ou les lieux de loisirs (art. 3 ch. 6 RPUS).

Selon le plan d'utilisation du sol annexé au RPUS, la ville est découpée en trois secteurs : le premier comprend la E______ (secteur 1) et le deuxième (secteur 2) est composée de trois sous-secteurs couvrant tous les quartiers de la ville, à l'exception des zones faisant l'objet de plans localisés de quartier (PLQ), ces dernières étant attribuées au troisième secteur (ATA/258/2020 du 3 mars 2020 consid. 7b).

3.3.2 L'art. 9 RPUS est intitulé « Règles applicables aux activités contribuant à l'animation des quartiers ». Selon son chiffre 1, qui traite des activités accessibles au public, afin de développer l'animation et l'attractivité des quartiers dans les secteurs 1 à 3, en maintenant et en favorisant l'implantation des activités de manière harmonieuse, diversifiée et équilibrée, les surfaces au rez-de-chaussée des bâtiments, doivent, pour la nette majorité de chaque surface, être destinées ou rester destinées à des activités accessibles au public, lorsqu'elles donnent sur des lieux de passage ouverts au public .

3.3.2.1 L'art. 9 ch. 1 RPUS n'exclut pas les affectations mixtes, impliquant une cohabitation entre surfaces fermées au public et surfaces ouvertes au public, pour autant que ces dernières soient en « nette majorité » (arrêt du Tribunal fédéral 1C_ 317/2009 du 15 janvier 2010 consid. 8.2).

Le but d'intérêt public poursuivi par cette disposition réside dans l'interdiction d'affecter à des bureaux fermés au public les surfaces au rez-de-chaussée donnant sur des lieux de passage ouverts au public, afin de lutter contre les « vitrines mortes », en particulier dans les zones fréquentées et animées (arrêt du Tribunal fédéral 1C_317/2009 précité consid. 8.2).

Cette interdiction constitue manifestement un but d'intérêt public, en particulier dans les zones fréquentées et animées. En d'autres termes, l'art. 9 RPUS vise à préserver l'animation de la ville par le maintien d'une affectation ouverte au public des rez-de-chaussée (ATA/1103/2021 du 19 octobre 2021 consid. 21b et les références citées).

L'objectif principal de cette disposition, dont la formulation laisse une large place à l'appréciation, est donc d'avoir des commerces ouverts au public afin que le quartier soit animé. Elle n'interdit en revanche aucune affectation spécifique et n'a pas pour but d'interférer dans la concurrence entre les acteurs économiques du quartier. Certes, l'esprit de cette disposition tend à garantir une certaine diversité des commerces, mais la portée de cette norme ne va pas jusqu'à exiger une variété des commerces dans un périmètre restreint (arrêt du Tribunal fédéral 1C_72/2018 du 19 avril 2018 consid. 3.3).

3.3.2.2 À teneur de l'art. 9 ch. 2 RPUS, par activités accessibles au public, il faut entendre les locaux ouverts au public, les arcades ou les bâtiments accessibles depuis le rez‑de‑chaussée, quels que soient les étages ouverts au public, notamment destinés au commerce, à l'artisanat, aux loisirs, aux activités sociales ou culturelles, à l'exclusion des locaux fermés au public (ch. 2.1). Par locaux fermés au public, on entend des locaux inoccupés par des personnes ou des locaux occupés essentiellement par des personnes de l'entreprise ou qui sont destinés à une clientèle accueillie dans des conditions de confidentialité, notamment des bureaux, cabinets médicaux, études d'avocats, de notaires, fiduciaires, experts-comptables, agents immobiliers, etc. (ch. 2.2 ; ATA/1103/2021 du 19 octobre 2021 consid. 21a).

3.3.2.3 Les changements de destination de surfaces de plancher, au sens de l'art. 9 RPUS, seront soumis à autorisation du département, même en l'absence de travaux, en application de l'art. 1 al. 1 let. b LCI (art. 9 ch. 6 RPUS).

3.4 En l'espèce, la recourante estime qu'un centre médical ne peut être comparé à un cabinet médical, dans la mesure où les médecins qui y travaillent sont indépendants, avec pour conséquence que l'arcade garderait une activité à caractère commercial, et que le propre d'une permanence médicale serait d'être ouverte à tous.

Comme l'a retenu à juste titre le TAPI, la question de savoir si l'arcade litigieuse conserve ou non une activité ayant un caractère commercial n'est pas pertinente pour déterminer si un local doit être considéré comme ouvert ou fermé au public au sens de l'art. 9 RPUS.

En effet, l'art. 9 ch. 2.2 RPUS met l'accent sur la notion de confidentialité et exclut ainsi des activités accessibles au public celles pour lesquelles la clientèle est accueillie dans des conditions de confidentialité, quand bien même il suffirait de pousser la porte pour entrer dans le bâtiment. Ainsi, il convient au préalable de déterminer si, en l'occurrence, un centre médical offre une activité destinée à une clientèle accueillie dans des conditions de confidentialité.

Il ne fait aucun doute, et cela n'est pas contestable, ni contesté, que les locaux d'un centre médical doivent être aménagés de manière à garantir la confidentialité et la dignité des patients, comme l'a d'ailleurs précisé le service de la médecin cantonale, autorité composée de spécialistes, dans son préavis. La médecine y est pratiquée et les patients sont pris en charge par des médecins soumis aux mêmes devoirs que ceux qui exercent dans un cabinet. Preuve en est qu'en l'occurrence, les vitrines des locaux litigieux demeurent toutes opacifiées, dans le but de garantir la confidentialité des prestations fournies aux patients.

Reste à déterminer si le fait que les prestations médicales ne soient en l'occurrence et pour la plupart d'entre elles pas effectuées au rez-de-chaussée, mais au premier étage, est de nature à faire de l'arcade exploitée par la recourante un local ouvert au public.

L'art. 9 ch. 2.2 RPUS prévoit que les locaux fermés au public sont notamment ceux qui sont destinés à une clientèle accueillie dans des conditions de confidentialité. En l'occurrence, l'arcade litigieuse, située au rez-de-chaussée, fait indéniablement partie du centre médical, ce qui n'est pas contesté ni contestable ; elle est affectée à l'accueil des patients. Le but du centre consiste à fournir des prestations médicales, soit une activité qui nécessite de garantir strictement la confidentialité des patients. Par conséquent, les locaux du rez-de-chaussée du centre médical nécessairement destinés à accueillir des patients qui recevront des soins médicaux, quand bien même ceux-ci sont prodigués au premier étage. Ils sont donc destinés à accueillir une clientèle dans des conditions de confidentialité.

Au vu de ce qui précède, l'arcade litigieuse doit être considérée comme étant fermée au public. On notera que la totale opacité de ses vitrines contrevient par ailleurs à l'intérêt public poursuivi par le RPUS, soit préserver l'animation de la ville par le maintien d'une affectation ouverte au public des rez-de-chaussée.

Si la recourante prétend que la surface du centre médical ouverte au public serait plus importante que celle du précédent établissement bancaire, elle perd toutefois de vue que cette comparaison n'est ici pas pertinente, dans la mesure où l'examen porte uniquement sur la conformité à l'art. 9 RPUS du changement d'affectation effectué par la recourante, affectation qui est potentiellement amenée à perdurer.

Quoi qu'il en soit, et comme l'a retenu à juste titre le TAPI, seul un peu plus de la moitié de la surface de l'arcade, soit 55,90 %, pourrait être considérée comme ouverte au public – à supposer que l'espace d'accueil commun (49,80 m2) et l'entrée (3,80 m2) puissent toutefois être considérés ainsi –, ce qui est insuffisant au regard des exigences posées par l'art. 9 ch. 1.1, qui exige une nette majorité de surfaces ouvertes au public. Le reste de la surface de l'arcade se compose de locaux fermés au public, à savoir des locaux affectés à une salle d'attente, au vestiaire du personnel et sa salle de repos, ainsi que d'une salle de stockage et d'un espace pour les consultations urgentes.

Enfin, si la recourante affirme que le propre d'une permanence médicale serait d'être ouverte à tous, elle méconnait que, selon le Tribunal fédéral, une permanence médicale a l'obligation de fonctionner d'une manière ininterrompue 24 heures par jour et tous les jours de l'année (ATF 100 Ib 345 consid. 4). Dans la mesure où il est établi que le centre médical est ouvert tous les jours de l'année uniquement pour les urgences et que la recourante ne démontre ni ne prétend qu'il fonctionnerait d'une manière ininterrompue 24 heures par jour, le centre ne saurait être considéré comme une permanence médicale. Dès lors, cet argument ne lui est d'aucun secours.

Par ailleurs, et même à considérer que tel serait le cas, cet élément influence le type de patientèle mais non la nécessaire confidentialité qui lui est due.

Au vu de tout ce qui précède, le département n'a pas violé l'art. 9 RPUS.

Le jugement sera confirmé sur ce point et le grief tiré de la violation de l'art. 9 RPUS écarté.

 

4) La recourante se plaint d'une violation de l'art. 14 al. 1 RPUS.

4.1 Selon l'art. 14 al. 1 RPUS, le Conseil d'État ou le département peuvent avec l'accord du conseil municipal, dans le cadre de plans d'affectation, ou du Conseil administratif en matière d'autorisation de construire, déroger aux dispositions du RPUS lorsqu'une utilisation plus judicieuse du sol ou des bâtiments l'exige impérieusement.

La délivrance d'une dérogation est donc soumise à la réalisation de trois conditions cumulatives, à savoir l'accord du conseil municipal ou du Conseil administratif (1) et un besoin impérieux (2) d'utiliser de façon plus judicieuse le sol ou les bâtiments (3). Le conseil municipal, respectivement le Conseil administratif, ne sont pas simplement consultés. Leur accord est nécessaire pour obtenir une dérogation.

Selon le Tribunal fédéral, les dérogations prévues par l'art. 14 RPUS ne peuvent être délivrées qu'à des conditions restrictives, à défaut de quoi le règlement se trouverait vidé de son sens (arrêt du Tribunal fédéral 1C_317/2009 consid. 7.1).

4.2 Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 5.1 ; ATA/827/2022 précité consid. 5a).

Constitue un excès négatif du pouvoir d'appréciation le fait que l'autorité se considère comme liée, alors que la loi l'autorise à statuer selon son appréciation, ou encore qu'elle renonce d'emblée en tout ou partie à exercer son pouvoir d'appréciation (ATF 137 V 71 consid. 5.1), ou qu’elle applique des solutions trop schématiques, ne tenant pas compte des particularités du cas d’espèce (ATA/926/2021 du 7 septembre 2021 consid. 6b ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 514).

4.3 L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/328/2023 du 28 mars 2023 consid. 5.8).

4.4 En l'espèce, le TAPI a considéré que rien ne lui permettait de retenir que le département eût outrepassé son pouvoir d’appréciation en suivant le préavis négatif de l'autorité intimée, la recourante n’ayant dans tous les cas pas démontré que l’activité mise en œuvre dans l’arcade présentait une utilisation plus judicieuse du sol.

Il est établi que le Conseil administratif a refusé de donner son accord à la dérogation. Ainsi, la première condition cumulative –, prévue expressément par l'art. 14 RPUS – nécessaire à la délivrance de la dérogation n'est de toute évidence pas remplie, de sorte que l'autorité intimée, liée par la loi, ne pouvait l'accorder, sinon à s'arroger un pouvoir qui n'est pas le sien.

Ainsi, contrairement à ce qu'affirme la recourante, l'autorité intimée était liée par le refus du Conseil administratif et n'a ainsi pas violé la loi en refusant d'accorder la dérogation.

La recourante prétend toutefois que le refus du Conseil administratif ne serait pas fondé.

Même si celui-ci n'a certes pas expliqué, dans le cadre de la procédure non‑contentieuse, les raisons de ce refus, l'intervenante a, dans le cadre de la procédure contentieuse cette fois-ci, indiqué que l'octroi d'une dérogation nécessitait que le changement d'affectation envisagé contribue à l'amélioration de la situation existante, ce qui n'était pas le cas de celui proposé par la recourante, raison pour laquelle la dérogation n'avait pas été accordée. Le TAPI a suivi ce point de vue.

La notion d'utilisation « plus judicieuse du sol » est sujette à interprétation et la loi ne la définit pas de façon explicite. Il appartient au requérant de la dérogation de démontrer en quoi le changement d'affectation pourrait consacrer une utilisation plus judicieuse du sol, ce qui ne lui garantit néanmoins pas d'obtenir la dérogation, vu l'exigence de circonstances impérieuses et le pouvoir d'appréciation conféré au département.

En l'occurrence, la recourante présente deux arguments principaux pour tenter de démontrer que la nouvelle affectation permettrait une utilisation plus judicieuse du sol ou des bâtiments. Son centre médical serait plus animé que l'établissement bancaire l'ayant précédé et aucun autre centre médical n'existerait dans le voisinage de la place C______.

Elle ne saurait toutefois être suivie.

En effet, il ressort des plans produits par l'autorité intimée qu'une surface de 57,2 m2 au minimum, soit celle consacrée au sas (4,1 m2), au hall (39,2 m2) et à la zone 24 heures sur 24 (13,9 m2) était ouverte au public lorsque l'établissement bancaire exploitait l'arcade litigieuse, alors que la nouvelle affectation présente une surface supposée ouverte au public – inférieure – de 53,6 m2.

La recourante ne démontre pas non plus que son centre médical serait plus animé que l'établissement bancaire l'ayant précédé et aurait contribué à l'amélioration de l'animation du quartier, ce d'autant plus que les vitrines demeurent opacifiées, contrairement à la demande qui avait déjà été faite en 2010 par l'intervenante dans le cadre de l'instruction de la demande du D______ portant sur les transformations intérieures de l'agence.

Enfin, la recourante, en prétendant qu'aucun autre centre médical n'existerait dans le voisinage de la place C______, perd de vue que tel n'est pas le cas, le centre médical des Eaux‑Vives se situant à moins de 360 m à vol d'oiseau de l'arcade litigeuse.

Les arguments de la recourante visant à démontrer que l'octroi de la dérogation était justifié tombent donc à faux.

Au vu de ce qui précède et comme l'a retenu à juste titre le TAPI, la recourante a échoué à démontrer que l'activité mise en œuvre dans l'arcade présentait une utilisation plus judicieuse du sol, de sorte que l'autorité intimée n'est pas tombée dans l'arbitraire en se conformant au refus de l'intervenante d'octroyer la dérogation, auquel elle était, quoi qu'il en soit, liée.

Le jugement sera donc également confirmé sur ce point et le grief tiré de la violation de l'art. 14 RPUS lui aussi écarté.

Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA), et il ne lui sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 novembre 2022 par le A______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 octobre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge du A______ SA ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat de la recourante, au département du territoire – OAC, à la Ville de B______ - département des constructions et de l'aménagement ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Présidente, Valérie LAUBER, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :