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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2431/2022

ATA/1075/2022 du 25.10.2022 ( RECU ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2431/2022-RECU ATA/1075/2022

COUR DE JUSTICE

Délégation des juges de la Cour de justice en matière de récusation

Décision du 25 octobre 2022

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

Madame B______

 



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1970, a été engagée le 1er novembre 2018 en qualité de directrice générale de l’office médico-pédagogique (ci-après : OMP) du département de l’instruction publique, de la formation et la jeunesse (ci-après : DIP).

2) Elle a acquis le statut de fonctionnaire le 1er novembre 2020.

3) Par courrier du 3 décembre 2021, le DIP a convoqué Mme A______ à un entretien de service dans le but de l’entendre au sujet d’une éventuelle insuffisance des prestations fournies et d’une inaptitude à remplir les exigences du poste.

Il lui était notamment reproché de n’avoir pas été en mesure d’analyser les causes des problèmes rencontrés par l’OMP, de définir et de planifier les actions réalistes pour y remédier, de n’avoir pas conclu des liens de collaboration avec les partenaires internes, de n’avoir pas réalisé les objectifs fixés par le DIP dans le cadre de sa lettre de mission, de n’avoir pas su gérer adéquatement la crise au C______, d’avoir continué à solliciter des travaux auprès de la direction générale pour agrandir et rénover le C______, de n’avoir pas tenu son budget pour préparer la rentrée 2021-2022, de n’être pas parvenue à apaiser les tensions et à nouer un dialogue constructif avec les collaborateurs et de n’avoir pas pris en compte les difficultés exprimées. Le DIP avait également relevé un manque de distance émotionnelle et d’analyse stratégique et politique.

S’ils étaient avérés, ces faits étaient susceptibles de constituer une violation de l’art. 20 du règlement d’application de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01).

Mme A______ était libérée provisoirement de l’obligation de travailler jusqu’à la prise d’une décision sujette à recours.

4) Par courrier du 10 janvier 2022, Mme A______ a contesté l’intégralité des faits reprochés par le DIP.

5) L’entretien de service a eu lieu le 26 janvier 2022.

Mme A______ a notamment précisé entretenir de très bonnes relations tant avec ses collègues qu’avec les entités subventionnées et les associations de parents. Elle avait même contribué à améliorer la qualité de la relation entre l’OMP et l’ensemble des partenaires. La collaboration avec le mandataire externe avait été très problématique en raison du comportement inadéquat de celui-ci. Les missions de l’office avaient été validées. La crise sanitaire et l’organisation de la rentrée 2021-2022 ne lui avaient pas permis d’avancer sur les travaux relatifs à la vision de l’OMP avant l’automne 2021.

6) Le 21 février 2022, Mme A______ a formulé des observations complémentaires.

Son attitude professionnelle devait être reconnue, plus particulièrement en relation avec la crise de C______ ainsi qu’en attestaient des échanges de courriels produits avec ses observations.

7) Par décision du 13 juin 2022, déclarée exécutoire nonobstant recours, la Conseillère d’État en charge du DIP a ouvert une procédure de reclassement à l’endroit de Mme A______.

Les éléments constitutifs d’un motif fondé de résiliation des rapports de service, à savoir l’insuffisance de prestations, étaient réalisés.

La direction des ressources humaines du DIP procéderait à la recherche d’un poste disponible répondant à ses capacités au sein de l’administration et ce durant un délai de deux mois. Un bilan définitif serait dressé au terme des deux mois au cours d’un entretien de service.

8) Par arrêté du Conseil d’État du 15 juin 2022, Mme A______ a été libérée de son obligation de travailler à compter de la réception de l’arrêté. La mesure était sans incidence sur son droit au traitement, l’intéressée étant toutefois tenue de rester à la disposition de sa hiérarchie, tout en veillant à prendre son solde de vacances.

Le recours formé par Mme A______ contre cet arrêté a été enregistré sous le numéro de procédure A/2131/2022.

9) Par acte du 24 juin 2022, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 13 juin 2022, concluant à son annulation. Préalablement, l’effet suspensif devait être restitué. La procédure a été ouverte sous le numéro A/2116/2022.

S’agissant de la restitution de l’effet suspensif, elle avait déjà fait l’objet d’une mesure de libération de son obligation de travailler par son supérieur hiérarchique, de sorte qu’il n’y avait aucune urgence à procéder à son reclassement.

Les démarches que l’autorité intimée indiquait vouloir entreprendre en exécution de la décision querellée lui causeraient un préjudice irréparable, ne serait-ce que par la publicité qu’impliquerait le fait pour l’autorité de s’adresser à différents services de l’État en vue de son reclassement.

La décision querellée ne contenait aucune motivation quant à la dérogation au principe général de l’effet suspensif du recours, et aucune circonstance ne justifiait son exécution immédiate.

10) Le 29 juin 2022, la juge déléguée, Madame B______, a imparti au DIP un délai au 11 juillet 2022 pour communiquer son dossier et ses déterminations sur effet suspensif, et un délai au 2 août 2022 pour se déterminer sur le fond.

11) Par courrier du 30 juin 2022, le DIP a demandé la prolongation du premier délai précité au 15 juillet 2022 « pour des raisons organisationnelles », et celle du second délai au 15 novembre 2022, à titre tout à fait exceptionnel et par souci d'efficience et de simplification de la procédure.

Le recours portait sur une décision incidente d'ouverture de la procédure de reclassement et n'était recevable qu'à la condition que l'existence d'un préjudice irréparable soit constatée « et donc que [Mme A______] ait accepté un poste dans le cadre de ladite procédure ». La décision attaquée ayant été notifiée au mois de juin 2022, Mme A______ ne manquerait pas d'être convoquée prochainement par la direction des ressources humaines du DIP aux fins de fixer les modalités de la procédure de reclassement. Il serait peut-être nécessaire d'effectuer un bilan de compétences avant de procéder à la recherche de postes proprement dite. Il convenait dès lors de prendre en compte la durée de ces différentes étapes.

12) Le 4 juillet 2022, la juge déléguée a prolongé les deux délais en les fixant aux échéances souhaitées, soit au 15 juillet 2022 et au 15 novembre 2022.

13) Le 15 juillet 2022, le DIP a conclu au rejet de la demande en restitution de l’effet suspensif.

14) Mme A______ a sollicité la récusation de Mme B______ par courrier du 15 juillet 2022.

La décision de prolonger le délai pour répondre du DIP au 15 novembre 2022 ne pouvait qu'impliquer que l'effet suspensif serait octroyé, sauf à retenir qu'il faille que la décision attaquée puisse déployer ses effets, à suivre la théorie douteuse du DIP, et qu'elle soit amenée à devoir accepter un poste pour que son recours soit déclaré recevable. En réalité, la stratégie du DIP était simple, à savoir prononcer une décision de licenciement déclarée exécutoire nonobstant recours avant de devoir se justifier sur l'ouverture même d'une procédure de reclassement, dont il avait été jugé qu'elle causait per se un préjudice irréparable.

Que la juge déléguée donne corps à cette position et octroie une prolongation de délai de quatre mois pour répondre au recours mettait à cet égard gravement en cause son impartialité à statuer tant sur effet suspensif que sur le fond du recours.

Une procédure sur récusation a été ouverte sous numéro A/2431/2022.

15) Le 4 août 2022, Mme B______ a conclu au rejet de la demande de récusation.

Elle contestait toute prévention réelle ou apparente ainsi que toute irrégularité dans la conduite de la procédure. La prolongation de délai accordée au 15 novembre 2022 ne pouvait fonder une apparence de prévention. Le DIP avait dûment motivé sa demande. Les raisons l'ayant conduite à accorder la prolongation sollicitée étaient tout à fait étrangères à tout comportement partial, étant précisé que la prolongation en cause permettait au DIP de produire des pièces utiles à la procédure de recours, sur lesquelles Mme A______ aurait pu se prononcer, mais aussi d'éviter de solliciter un délai pour former une duplique.

Si Mme A______ estimait que la durée de la prolongation était excessive, elle pouvait l'interpeller sur ce point. Un délai lui avait du reste été imparti – après le dépôt de la requête en récusation – pour se déterminer sur les motifs invoqués à l'appui de la demande de prolongation de délai, mais elle n'y avait pas donné suite.

16) Par décision du 16 août 2022, la présidence de la chambre administrative a refusé la restitution de l'effet suspensif au recours.

17) Le 18 août 2022, Mme A______ a persisté dans les termes de sa demande, en répondant aux arguments développés par Mme B______ dans sa prise de position.

En particulier, la prolongation avait été accordée « sans autre » et sans interpellation de la partie recourante. La décision étant de nature incidente, elle avait eu 10 jours pour interjeter recours, tandis que le DIP avait eu 140 jours pour répondre au recours. La prolongation de délai avait permis au DIP de mettre sa décision querellée à exécution. En se ralliant au raisonnement du DIP sur la recevabilité du recours, la juge déléguée avait déjà préjugé que l'ouverture de la procédure de reclassement ne lui causait pas un préjudice irréparable.

18) Sur ce, la présente cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Selon l'art. 15A al. 4 LPA, la demande de récusation doit être présentée sans délai et par écrit à la juridiction compétente.

En l'occurrence, la requête a été déposée le 15 juillet 2022, soit moins de dix jours après réception du mémo prolongeant le délai de réponse au recours. Elle a ainsi été présentée dans les délai et forme prescrits par la loi, de sorte qu'elle est recevable.

2) La décision sur récusation est prise par une délégation de trois juges, dont le président ou le vice-président et deux juges titulaires (art. 15A al. 5 LPA ; art. 31 al. 2 du règlement de la Cour de justice du 20 juin 2014 - E 2 05.47).

En l'espèce, la composition de la délégation, formée du vice-président de la Cour de droit public de la Cour de justice et de deux autres juges de la Cour de droit public, selon leur rang, est conforme aux dispositions précitées.

3) La garantie d'un juge indépendant et impartial telle qu'elle résulte des art. 30 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101) et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) – lesquels ont, de ce point de vue, la même portée – permet, indépendamment du droit de procédure, de demander la récusation d'un magistrat dont la situation ou le comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle vise à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation uniquement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de la part du juge ne peut être prouvée ; il suffit que les circonstances donnent l'apparence d'une prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat ; cependant, seules les circonstances objectivement constatées doivent être prises en considération, les impressions purement individuelles n'étant pas décisives
(ATF
144 I 162 et les références citées).

La récusation doit cependant rester l'exception et ne peut être admise à la légère, dès lors qu'à défaut, il y aurait danger que les règles de compétence des tribunaux et ainsi, le droit d'être jugé par un tribunal ordinaire, institué par la loi, soient vidés de leur substance (arrêts du Tribunal fédéral 2C_187/2021 du 11 mai 2021 consid. 3.1 ; 1C_654/2018 du 25 mars 2019 consid. 3.1). 

4) a. En droit administratif genevois, l'art. 15A LPA prévoit que les juges doivent notamment se récuser s'ils ont un intérêt personnel dans la cause (let. a) ; s'ils ont agi dans la même cause à un autre titre, notamment comme membre d'une autorité, comme conseil juridique d'une partie, comme expert, comme témoin ou comme médiateur (let. b) ; s’ils sont conjoints, ex-conjoints, partenaires enregistrés ou ex-partenaires enregistrés d’une partie, de son représentant ou d’une personne qui a agi dans la même cause comme membre de l’autorité précédente ou mènent de fait une vie de couple avec l’une de ces personnes (let. c) ; s’ils sont parents ou alliés en ligne directe ou jusqu’au troisième degré en ligne collatérale d’une partie (let. d) ; s’ils sont parents ou alliés en ligne directe ou au deuxième degré en ligne collatérale d’un représentant d’une partie ou d’une personne qui a agi dans la même cause comme membre de l’autorité précédente (let. e) ; ou s'ils pourraient être prévenus de toute autre manière, notamment en raison d'un rapport d'amitié ou d'inimitié avec une partie ou son représentant (let. f). Les juges, les membres des juridictions et les membres du personnel des juridictions qui se trouvent dans un cas de récusation sont tenus d'en informer sans délai le président de leur juridiction (art. 15A al. 3 LPA).

b. Les art. 15 et 15A LPA sont calqués sur les art. 47 ss du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272 ; ATA/987/2019 du 4 juin 2019 consid. 2b ; ATA/578/2013 du 3 septembre 2013 consid. 7c, avec référence au MGC 2008-2009/VIII A 10995), ces derniers, tout comme les art. 56 ss du code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0), avec lesquels ils sont harmonisés, étant calqués, à l'exception de quelques points mineurs, sur les art. 34 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF - RS 173.110), si bien que la doctrine, et la jurisprudence rendue à leur sujet, valent en principe de manière analogique (arrêt du Tribunal fédéral 6B_621/2011 du 19 décembre 2011 consid. 2.2 ; Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse, FF 2006 6841 ss, spéc. 6887 ad art. 45 [devenu l'art. 47 CPC] ; Message du Conseil fédéral sur l'unification de la procédure pénale, FF 2005 1125 s.).

5) a. La procédure de récusation n’a pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l’instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure. Même dans ce cadre, seules des circonstances exceptionnelles permettent de justifier une récusation, lorsque, par son attitude et ses déclarations précédentes, le magistrat a clairement fait apparaître qu'il ne sera pas capable de revoir sa position et de reprendre la cause en faisant abstraction des opinions qu'il a précédemment émises (ATF 138 IV 142 consid. 2.3). D’autres motifs doivent donc exister pour admettre que le juge ne serait plus en mesure d'adopter une autre position, de sorte que le procès ne demeure plus ouvert (ATF 133 I 1 consid. 6.2).

b. En règle générale, les prises de position qui s'inscrivent dans l'exercice normal des fonctions gouvernementales, administratives ou de gestion, ou dans les attributions normales de l'autorité partie à la procédure, ne permettent pas, dès lors que l'autorité s'exprime avec la réserve nécessaire, de conclure à l'apparence de la partialité et ne sauraient justifier une récusation, au risque sinon de vider de son sens la procédure administrative (ATF 140 I 326 consid. 5.2 ; 137 II 431 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_44/2019 du 29 mai 2019 consid. 5.1 ; 2C_931/2015 du 12 octobre 2016 consid. 5.1 et les références citées).

c. Ainsi, même à l'aune de l'art. 30 Cst., seules les erreurs particulièrement graves du magistrat et dénotant en outre objectivement que celui-ci est prévenu, justifient de retenir sa partialité (ATF 138 IV 142 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_761/2020 du 8 février 2021 consid. 5.2.2).

6) a. La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 3 1ère phr. de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

b. Un juge délégué conduit la procédure et peut prendre seul les décisions incidentes y relatives ; il tient les audiences et procède aux transports sur place (art. 131 al. 3 LOJ).

c. L’autorité qui a pris la décision attaquée et toutes les parties ayant participé à la procédure de première instance sont invitées à se prononcer sur le recours (art. 73 al. 1 LPA). La juridiction administrative – soit le juge délégué en application de l'art. 131 al. 3 LOJ précité – fixe les délais dans lesquels les parties doivent produire leurs écritures (art. 75 LPA). Le délai imparti par l’autorité peut être prolongé pour des motifs fondés si la partie en fait la demande avant son expiration (art. 16 al. 2 LPA).

7) a. Selon la jurisprudence, l’ouverture d’une procédure de reclassement constitue une décision incidente au sens de l’art. 57 let. c LPA. Le recours contre une telle décision, préalable au prononcé d'un licenciement administratif, n’est ouvert qu’à des conditions restrictives (ATF 143 I 344 consid. 7.5 et 8.3 ; ATA/1260/2020 du 15 décembre 2020 consid. 3). Selon le Tribunal fédéral, ces conditions sont remplies, sous l'angle du préjudice irréparable, lorsque l'ouverture d'une procédure de reclassement se fonde sur un examen a priori de la situation, sans avoir procédé à une instruction complète. Un tel examen pouvait dès lors conduire, comme l'avait expressément relevé le Conseil d'État dans les travaux préparatoires, à des situations « à la limite » ; le contrôle juridictionnel étant alors « déterminant » pour éviter de « faire échouer le traitement RH adéquat ». Le législateur a donc envisagé la possibilité d'un recours au stade déjà de l'ouverture de la procédure de reclassement (arrêt du Tribunal fédéral 8C_607/2016 du 8 août 2017 consid. 8 et références citées).

b. Dans certaines espèces, la chambre administrative a admis la recevabilité de recours interjetés contre une telle décision (ATA/37/2022 du 18 janvier 2022 consid. 2b), tandis que dans d'autres, plus nombreuses, elle a déclaré les recours sans objet ou irrecevables parce que la décision au fond avait été rendue dans l'intervalle (ATA/1356/2021 du 14 décembre 2021 consid. 2 et les arrêts cités). La question de la recevabilité a parfois été laissée ouverte (ATA/1260/2020 du 15 décembre 2020 consid. 2c).

8) En l'espèce, la recourante reproche à la juge intimée le fait d'avoir accueilli favorablement la demande de prolongation de délai du DIP pour répondre au recours. Ce faisant, elle aurait entériné l'analyse du DIP en préjugeant de l'issue du recours quant à sa recevabilité.

On doit tout d'abord rappeler d'une part que c'est le juge délégué qui fixe les délais de réponse, et d'autre part que le délai de réponse n'a pas nécessairement à être de la même longueur que le délai de recours. En l'espèce, le délai pour répondre a été prolongé d'une durée certes inhabituelle, mais cela ne fonde pas encore une apparence de partialité de la juge déléguée, vu le large pouvoir d'appréciation dont celle-ci dispose, et en prenant aussi en compte que la prolongation couvrait également le mois d'août, pendant lequel les délais impartis sont généralement plus longs. L'on ne se trouve en toute hypothèse pas face à une erreur procédurale grave ou répétée, qui seule pourrait justifier une récusation.

Que la prolongation du délai pour répondre puisse éventuellement conduire à une perte d'objet du recours en raison des suites données par l'administration à la procédure de reclassement n'entre ici pas en ligne de compte, dès lors qu'une procédure sur effet suspensif a été menée, qui a permis de statuer sur la question du caractère exécutoire de la décision attaquée dans un délai nettement plus bref, la décision sur effet suspensif ayant été rendue le 16 août 2022. Par ailleurs, il ne peut être déduit de l’éventualité de la perte de l’objet du recours en cours de procédure, en fonction des suites réservées à la procédure de reclassement, que la prolongation du délai imparti constituerait l’expression d’une prévention de la magistrate en faveur de l’une ou l’autre partie au litige.

De plus, il ne résulte pas du dossier que la juge intimée ait à aucun moment formulé des propos ni adopté une attitude pouvant faire naître une quelconque suspicion de partialité à l'encontre de la requérante.

La demande de récusation doit donc être rejetée.

9) Vu l'issue de la demande, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la requérante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA – art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA DÉLÉGATION DES JUGES DE LA COUR DE JUSTICE

EN MATIÈRE DE RÉCUSATION

rejette la demande de récusation formée le 15 juillet 2022 par Madame A______ contre la juge B______ ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Romain Jordan, avocat de Madame A______, à Madame B______ ainsi que, pour information, au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : M. Verniory, président, Mmes Krauskopf et Payot Zen-Ruffinen, juges.

 

 

 

 

la greffière :

 

 

C. Ravier

 

 

 

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :