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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3078/2021

ATA/1338/2021 du 07.12.2021 ( TAXIS ) , REJETE

Descripteurs : NOTIFICATION DE LA DÉCISION;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;CHAUFFEUR;TAXI;PROFESSION;AUTORISATION D'EXPLOITER UN SERVICE DE TAXI;DEVOIR DE COLLABORER;LIBERTÉ ÉCONOMIQUE
Normes : LPA.46.al2; LPA.47; Cst.29.al2; LTVTC.10.al1; LTVTC.10.al2; LTVTC.11.al1; LTVTC.12; LTVTC.11.al2.letb; LPA.22; Cst.27.al1; Cst.36
Résumé : Faute pour le recourant d'avoir démontré l'incapacité de travail alléguée au stade du recours, celle-ci ne peut être prise en considération pour éviter la caducité de son autorisation d'usage accru du domaine public, inutilisée durant plus de douze mois consécutifs. Reposant sur une base légale formelle, cette décision respecte le principe de la proportionnalité, au vu du but recherché (garantir un service de taxi efficace et adapté) et de la possibilité pour le recourant de déposer une nouvelle requête en ce sens. Il conserve également sa carte professionnelle lui permettant de poursuivre son activité en tant que chauffeur professionnel. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3078/2021-TAXIS ATA/1338/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 décembre 2021

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



EN FAIT

1) En tant que chauffeur de taxi, Monsieur A______, né le ______ 1967, s'est vu délivrer le 8 septembre 2017 une autorisation d'usage accru du domaine public (ci-après : AUADP) sous l'immatriculation GE 1______, valable jusqu'au 30 juin 2023.

Le 13 septembre 2017, il a obtenu sa carte professionnelle de chauffeur de taxi.

2) Par décision du 11 mars 2020, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a ordonné le retrait du permis de conduire de M. A______, à titre préventif et pour une durée indéterminée. Il lui était reproché d'avoir conduit sous l'influence de stupéfiants.

Le 11 décembre 2019 à 00h05 sur la place Cornavin, M. A______ avait été contrôlé au volant de son véhicule. L'analyse toxicologique avait révélé de la cocaïne. Une évaluation de son aptitude à conduire devait être effectuée. Vu ses antécédents, il ne pouvait pas justifier d'une bonne réputation.

3) Par ordonnance pénale du 21 avril 2020, M. A______ a été reconnu coupable de conduite d'un véhicule automobile dans l'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool, de conduite sans assurance responsabilité civile, de non-respect d'une interdiction de conduire sous l'influence de l'alcool et d'emploi incorrect d'un tachygraphe. Il a été condamné à une peine pécuniaire, assortie du sursis, et à deux amendes.

4) Par décision du 19 mai 2020, envoyée en courrier A Plus, le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) a informé M. A______ qu'il envisageait de constater la suspension de sa carte professionnelle de chauffeur de taxi durant l'exécution du retrait préventif de son permis de conduire. Un délai au 1er juin 2020 lui était imparti pour faire valoir son droit d'être entendu.

M. A______ ne pouvait plus utiliser lui-même son AUADP durant la suspension de sa carte professionnelle de chauffeur de taxi, respectivement le retrait de son permis de conduire. Si celui-ci devait dépasser douze mois, la caducité de son AUADP devrait être prononcée à moins qu'il ne la mette à disposition d'une tierce personne. Il devrait alors s'annoncer en tant qu'entreprise de taxis.

5) Par courrier A Plus du 5 juin 2020, la PCTN a derechef adressé à M. A______ son pli précédent, en lui impartissant un nouveau délai au 17 juin 2020 pour se déterminer. L'OCV lui avait communiqué une nouvelle adresse.

6) Par décision du 24 juin 2020, adressée en courrier A Plus, la PCTN a suspendu la carte professionnelle de chauffeur de taxi de M. A______ durant le retrait de son permis de conduire et ordonné le dépôt immédiat de celle-ci.

7) Après réception du rapport d'expertise du 6 avril 2021 attestant de l'aptitude à conduire des véhicules à moteur de M. A______, l'OCV l'a informé, le 14 avril 2021, de la restitution de son permis de conduire. Celui-ci lui avait été retiré pour une durée de sept mois, soit du 22 mai au 21 décembre 2020.

8) Par lettre A Plus du 10 mai 2021, la PCTN a informé M. A______ qu'il envisageait de prononcer la révocation de sa carte professionnelle de chauffeur de taxi.

S'agissant d'une infraction grave aux règles de la circulation routière, l'ordonnance pénale du 21 avril 2020 et la décision de l'OCV du 14 avril 2021 étaient susceptibles de constituer une condamnation et une décision administrative incompatibles avec l'exercice de l'activité de transport professionnel de personnes.

Sur renseignements de l'OCV, les plaques d'immatriculation GE 1______ avaient été déposées le 22 mai 2020 et n'avaient pas été remises en circulation depuis lors. Un délai au 25 mai 2021 lui était imparti pour faire les démarches nécessaires pour les récupérer auprès de l'OCV. Le formulaire idoine était joint. À défaut, la caducité de son AUADP serait prononcée.

9) Le 3 juin 2021, l'OCV a confirmé à la PCTN que les plaques d'immatriculation GE 1______ n'avaient pas été remises en circulation.

10) Par décision du 22 juillet 2021, la PCTN a constaté la caducité de l'AUADP liée aux plaques d'immatriculation GE 1______ délivrée à M. A______ à compter du 25 mai 2021, en raison de son non-usage pendant douze mois consécutifs. Lesdites plaques ne pouvaient plus être récupérées.

M. A______, qui n’avait pas utilisé son AUADP pendant plus de douze mois consécutifs sans invoquer aucune incapacité de travail attestée par certificat médical, avait perdu le droit d’utiliser cette autorisation. La PCTN renonçait à révoquer sa carte professionnelle, considérant qu'il avait été suffisamment sanctionné. Il était ainsi loisible à M. A______ de poursuivre son activité professionnelle de chauffeur de taxi dès lors que son aptitude à la conduite était attestée et que l’infraction commise le 11 décembre 2019 constituait un cas isolé. Il remplissait donc à nouveau les conditions de délivrance de la carte professionnelle de chauffeur de taxi.

11) Le même jour, M. A______ a déposé à la PCTN un pli daté du 16 juillet 2021, intitulé « contestation du retrait des plaques d'immatriculation ».

Le 13 juillet 2021, il avait contacté la PCTN afin de se renseigner sur la démarche à effectuer pour récupérer ses plaques d'immatriculation. À sa surprise, il avait découvert qu'elles ne lui étaient plus attribuées, sans en avoir été avisé.

Bien qu'il avait récupéré son permis de conduire le 14 avril 2021, il avait attendu le 13 juillet 2021 pour se manifester en raison de sa situation financière précaire et du fait qu'il était sans voiture. Il lui avait fallu du temps pour « établir un plan de reprise de [son] métier », notamment se procurer un véhicule et payer l'assurance ainsi que les frais auprès de l'OCV. Face au retrait de son permis de conduire, à la crise liée à la pandémie de Covid-19 et à l'augmentation de ses dettes après une année sans emploi, il s'était retrouvé dans une situation délicate. Le retrait de ses plaques d'immatriculation empirait sa situation et entravait la reprise de son activité. Il n'avait perçu aucune aide sociale.

12) En réponse, la PCTN lui a transmis, par courriel du 28 juillet 2021, une copie de sa lettre du 10 mai 2021 et de sa décision précitée, en précisant qu'il conservait la possibilité de recourir contre celle-ci.

13) Par acte du 14 septembre 2021, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision du 22 juillet 2021, demandant son annulation.

Il n'avait pas reçu le courrier de la PCTN du 10 mai 2021 et n'avait pris connaissance de la « décision » que le 13 juillet 2021, après s'être renseigné sur les démarches à effectuer pour récupérer ses plaques d'immatriculation. Il n'avait pas pu faire valoir son droit d'être entendu. Le 22 juillet 2021, il avait adressé un courrier à la PCTN qui était resté sans réponse.

Au début du mois d'avril 2021, il avait été placé en quarantaine, étant considéré comme un « cas contact ». Dès le 13 avril 2021, il avait présenté les symptômes du Covid-19, de sorte qu'il avait été alité durant une quinzaine de jours. Son état de santé s'était amélioré à partir de la fin du mois de juin 2021. Faute de moyens financiers, il avait été suivi à distance par un ami médecin et n'avait pu se déplacer pour effectuer un test en raison de son état de santé. La décision querellée portait gravement atteinte à sa liberté économique et à sa vie privée, dans la mesure où il était privé de son unique source de revenu. Ne possédant aucune autre formation ni aucun autre diplôme et vu son âge, il était dans l'impossibilité d'exercer une autre profession.

14) La PCTN a conclu au rejet du recours.

Selon les justificatifs joints, le courrier A Plus du 10 mai 2021 avait été déposé dans la boîte aux lettres du recourant le 11 mai 2021 à 10h06. La décision du 22 juillet 2021 avait été distribuée le 29 juillet 2021 à 17h53. Ces deux actes avaient donc été notifiés valablement. La question de savoir quand il en avait réellement pris connaissance était sans pertinence.

Dès le 19 mai 2020, l'attention du recourant avait été attirée, à maintes reprises, sur la caducité de son AUADP pour défaut d'usage pendant douze mois consécutifs de façon effective, avant le prononcé de la décision querellée. Depuis le 19 mai 2020, le recourant était informé des conséquences de l'absence de reprise de ses plaques d'immatriculation. Il s'était vu octroyer, à trois reprises, la possibilité de faire valoir son droit d'être entendu, par plis des 19 mai et 5 juin 2020 et 10 mai 2021. La PCTN ne pouvait se voir reprocher de ne pas avoir pris en compte ses explications adressées deux mois après le délai accordé au 21 mai 2021. Celles-ci s'étaient en outre croisées avec l'envoi de la décision litigieuse.

La précarité de sa situation financière et le fait qu'il était sans voiture ne permettaient pas de renoncer au prononcé de la caducité de l'AUADP. De plus, dans son courrier du 22 juillet 2021, il n'avait allégué aucune incapacité de travail, ne faisant référence qu'à sa situation financière précaire et l'absence de voiture. Entre ces explications et celles figurant dans son acte de recours, la préférence devait être donnée aux premières, conformément à la jurisprudence.

15) Le recourant n'ayant pas répliqué dans le délai imparti, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant invoque un défaut de notification des communications et de la décision querellée.

a. Les décisions sont notifiées aux parties par écrit (art. 46 al. 2 LPA). Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA).

La prestation « Courrier A Plus » – « A+ » – offre la possibilité de suivre le processus d’expédition du dépôt jusqu’à la distribution. Elle comporte également l’éventuelle réexpédition à une nouvelle adresse ainsi que le retour des envois non distribuables. Lors de l’expédition par « Courrier A Plus », l’expéditeur obtient des informations de dépôt, de tri et de distribution par voie électronique via le service en ligne « Suivi des envois ». Les envois « Courrier A Plus » sont directement distribués dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire. En cas d’absence, le destinataire ne reçoit pas d’invitation à retirer un envoi dans sa boîte aux lettres (document de La Poste suisse sur Internet « Courrier A Plus [A+] – La transparence tout au long du processus d’expédition » ; ATF 142 III 599 consid. 2.1).

Selon la jurisprudence, ce type de courrier est réputé notifié dès son dépôt dans la boîte aux lettres ou la case postale de son destinataire, moment qui constitue le point de départ pour le calcul du délai de recours (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1021/2018 du 26 juillet 2019 consid. 4.1 et les références citées). Ce principe vaut également lorsque la livraison par courrier A+ intervient un samedi et que le pli n'est récupéré qu'à une date ultérieure, comme le lundi suivant (arrêt du Tribunal fédéral 8C_124/2019 du 23 avril 2019 consid. 10.2 et les nombreux arrêts cités). Dès lors, si l'envoi est distribué un samedi par courrier A+, le délai de recours commence à courir le dimanche (arrêts du Tribunal fédéral 2C_882/2019 du 31 octobre 2019 consid. 4.1 ; 8C_124/2019 précité consid. 8.2.2).

b. In casu, à l'appui de ses écritures responsives, l'autorité intimée a produit les deux documents de suivi des envois des 10 mai et 22 juillet 2021. Il en ressort que ceux-ci ont été distribués au recourant respectivement les 11 mai et 29 juillet 2021. Ce dernier ne conteste d'ailleurs pas avoir reçu la décision du 22 juillet 2021 dont est recours, laquelle a été notifiée à la même adresse que le courrier du 10 mai 2021.

Il appert ainsi que, contrairement à ce que prétend le recourant, les deux plis en question lui ont été valablement notifiés, de sorte qu'il ne saurait prétendre qu'il n'en avait pas connaissance.

3) Le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir violé son droit d'être entendu.

a. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 135 I 279 consid. 2.3).

b. En l'espèce, le recourant se plaint de ne pas avoir pu exercer son droit d'être entendu au motif qu'il n'aurait pas eu connaissance du courrier du 10 mai 2021 et que l'autorité intimée n'aurait pas pris en considération son courrier du 16 juillet 2021, déposé le 22 juillet 2021. Tel que retenu précédemment, le courrier du 10 mai 2021 et la décision querellée ont été valablement notifiés au recourant. À cela s'ajoute que, dès le 19 mai 2020, l'autorité intimé lui a adressé, à tout le moins, quatre plis avant la décision du 22 juillet 2021. Hormis la décision du 24 juin 2020, chaque courrier lui impartissait un délai pour faire valoir son droit d'être entendu. Ainsi, bien que le recourant ait été invité à réitérées reprises à s'exprimer, il n'a pas fait usage de ces possibilités. Ce n'est que le 22 juillet 2021, soit près de deux mois après l'échéance du dernier délai accordé au 25 mai 2021, qu'il s'est manifesté. En outre, dès lors que l'autorité intimée n'avait pas connaissance du courrier déposé par le recourant le 22 juillet 2021 lorsqu'elle a rendu sa décision, il ne saurait lui être reproché de ne pas en avoir tenu compte.

Partant, le grief relatif à la violation du droit d’être entendu sera écarté.

4) Le recourant conteste la caducité de son AUADP, en alléguant que la précarité de sa situation financière, l'absence de véhicule et son infection au Covid-19 au printemps 2021 l'auraient empêché de faire valoir ses droits en temps utiles.

a. Les voitures de taxis sont au bénéfice d'une autorisation d'usage accru du domaine public. Chaque autorisation correspond à une immatriculation (art. 10 al. 1 de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 - LTVTC - H 1 31). Le nombre des autorisations est limité en vue d'assurer un bon fonctionnement des services de taxis, par une utilisation optimale du domaine public, et en vue de garantir la sécurité publique (art. 10 al. 2 LTVTC).

Les autorisations d'usage accru du domaine public sont attribuées sur requête, à des personnes physiques ou morales. Elles sont personnelles et incessibles (art. 11 al. 1 LTVTC).

L'autorisation est valable six ans. Elle est renouvelable selon les critères de l’art. 11 LTVTC (art. 12 al. 1 LTVTC). Le département constate la caducité de l'autorisation lorsque son titulaire n’en fait pas usage pendant douze mois consécutifs de façon effective, sauf en cas d'incapacité totale de travail dûment attestée (art. 12 al. 3 let. c LTVTC). Le département révoque l'autorisation lorsqu'une des conditions de sa délivrance n'est plus remplie. Des décisions administratives ou des condamnations incompatibles avec l'exercice de la profession au sens de l'art. 11 al. 2 let. b LTVTC peuvent également donner lieu à révocation (art. 12 al. 4 LTVTC). En effet, le requérant doit ne pas avoir, comme requérant à titre individuel ou comme exploitant d'entreprise, fait l'objet dans les cinq ans précédant la requête de décisions administratives ou de condamnations incompatibles avec l'exercice de la profession, telles que définies par le Conseil d'État (art. 11 al. 2 let. b LTVTC).

L'autorisation ne crée aucun droit acquis. Si les conditions ne sont plus remplies, l'autorité compétente constate la caducité ou révoque l'autorisation. Ainsi, la renonciation expresse ou par acte concluant résultant du défaut de demande de renouvellement à l'échéance entraînent la caducité de l'autorisation. Il convient de ne pas permettre le blocage d'une autorisation par un titulaire qui n'en fait pas usage pendant de nombreux mois. Dans ce cas, elle devient caduque. L'autorisation peut également être révoquée si les conditions de délivrance ne sont plus réalisées. Ce sera le cas si la carte professionnelle venait à être retirée. En outre, une sanction pénale ou une décision administrative ultérieures et incompatibles avec l'exercice de la profession peuvent conduire à la révocation de l'autorisation (Exposé des motifs du PL 11'709 projet de loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur [LTVTC - H 1 31] du Conseil d’État du 26 août 2015, p. 32 et 33 in MGC 2015-2016 VIII/3 A 32-33).

b. Selon l'art. 22 LPA, les parties sont tenues de collaborer à la constatation des faits dans les procédures qu’elles introduisent elles-mêmes.

La procédure administrative est régie essentiellement par la maxime inquisitoire, selon laquelle l'autorité définit les faits pertinents et les preuves nécessaires, qu'elle ordonne et apprécie d'office. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, à savoir le devoir des parties de collaborer à l'établissement des faits (ATF 128 II 139 consid. 2b ; 120 V 357 consid. 1a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_205/2012 du 6 novembre 2012 consid. 2.1). Conformément au principe général de procédure consacré à l'art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), il incombe en effet à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'il est le mieux à même de connaître, notamment parce qu'ils ont trait spécifiquement à sa situation personnelle (ATF 125 IV 161 consid. 4 ; 120 Ia 179 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_205/2012 précité consid. 2.1 ; 1B_152/2008 du 30 juin 2008 consid. 3.2). Le Tribunal fédéral a même qualifié cette obligation de « devoir de collaboration spécialement élevé » lorsqu'il s'agit d'éléments ayant trait à la situation personnelle de l'intéressé, puisqu'il s'agit de faits qu'il connaît mieux que quiconque (arrêts du Tribunal fédéral 1C_58/2012 du 10 juillet 2012 consid. 3.2 et la référence citée ; 2C_703/2008 du 8 janvier 2009 consid. 5.2 ; 2C_80/2007 du 25 juillet 2007 consid. 4 et les références citées).

c. En l'occurrence, l'OCV a confirmé à l'autorité intimée le 3 juin 2021 que le recourant avait déposé ses plaques d'immatriculation le 22 mai 2020 et ne les avait pas reprises depuis lors. Ce dernier ne le conteste pas.

Pourtant, dans son courrier du 19 mai 2020, l'autorité intimée avait informé le recourant des conséquences de l'absence d'utilisation effective durant douze mois de son AUADP. En dépit de cet avertissement, renouvelé les 5 juin 2020 et 10 mai 2021, il n'a pas entrepris les démarches indiquées.

Par-devant la chambre de céans, le recourant fait valoir une incapacité de travail entre les mois d'avril et juin 2021, en raison d'une infection au Covid-19. Il ne produit toutefois aucun document permettant de retenir ces allégations pour avérées, alors qu'il lui appartient d'en apporter la preuve s'agissant d'un droit dont il entend se prévaloir, conformément aux principes susrappelés. Par ailleurs, ce n'est qu'au stade de son recours qu'il invoque ce motif tandis qu'il ne l'a pas mentionné devant l'autorité intimée. Faute d'éléments prouvant l'incapacité de travail invoquée par le recourant, celle-ci ne saurait être prise en considération. Or, à teneur des bases légales applicables, en particulier de l'art. 12 al. 3 let. c LTVTC, elle constitue le seul motif susceptible d'éviter la caducité de l'AUADP in casu.

Par conséquent, c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé la caducité de l'AUADP délivrée au recourant pour les plaques d'immatriculation GE 1______.

5) Le recourant invoque encore une atteinte à sa liberté économique. La caducité de son AUADP le priverait de son unique source de revenu, tandis qu'il ne possède aucune formation ni aucun autre diplôme et est âgé de 54 ans.

a. Telle qu'elle est garantie par l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2 Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 128 I 19 consid. 4c.aa ; Message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitution fédérale, in FF 1997 I 1 ss, p. 176). Le libre exercice d'une profession implique de pouvoir choisir le moment, le lieu, les moyens de production, la forme juridique, les partenaires, les clients, les conditions de travail, les prix, les coûts, soit tous les éléments qui organisent et structurent le processus social conduisant à la production d'un gain (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/ Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, 3ème éd., 2013, n. 952). Tant les personnes physiques que les personnes morales sont titulaires de la liberté économique ainsi définie (ATF 131 I 223 consid. 4.1 ; Message précité, FF 1997 I 1 ss, p. 179).

Comme tout droit fondamental, la liberté économique peut être restreinte, pour autant qu'une telle restriction soit fondée sur une base légale, repose sur un intérêt public ou sur la protection d'un droit fondamental d'autrui et soit proportionnée au but visé (art. 36 Cst. ; ATF 131 I 223 consid. 4.1 et 4.3).

b. En l'espèce, la caducité de l'AUADP liée aux plaques d'immatriculation GE 1______ délivrée au recourant le 8 septembre 2017 et valable jusqu'au 30 juin 2023, constitue une atteinte à sa liberté économique.

Elle repose néanmoins sur une base légale formelle, à savoir l'art. 12 al. 3 let. c LTVTC.

Tel que rappelé précédemment, à teneur de l'art. 10 al. 2 LTVTC, le nombre des AUADP est limité en vue d'assurer un bon fonctionnement des services de taxis, par une utilisation optimale du domaine public, et en vue de garantir la sécurité publique. Cet objectif relève d'un intérêt public évident autorisant une restriction de la liberté économique.

Quant à la proportionnalité, la caducité de l'AUADP apparaît apte à atteindre le but recherché, dans la mesure où il s'agit de garantir un service de taxis efficace et adapté et où le délai de douze mois de non-utilisation semble relativement long pour permettre à l'intéressé de prendre les dispositions nécessaires. À cet égard, il est rappelé que l'attention du recourant a été attirée à plusieurs reprises sur les conséquences d'une non-utilisation prolongée de l'AUADP qui lui avait été délivrée. En outre, sous cet angle, le grief selon lequel toute activité lui serait désormais impossible procède d'une appréciation erronée. D'une part, le recourant dispose de la possibilité de déposer une nouvelle requête d'AUADP au sens de l'art. 11 LTVTC, sous réserve d'en remplir les conditions. D'autre part, l'autorité intimée a renoncé à révoquer sa carte professionnelle, considérant qu'il avait été suffisamment sanctionné, ce malgré sa condamnation pénale du 21 avril 2020. Il conserve ainsi la possibilité de poursuivre son activité en tant que chauffeur professionnel.

Le grief sera donc écarté.

6) Le recourant se plaint finalement d'une violation de son droit à la vie privée.

Il n'expose toutefois pas en quoi son droit à la vie privée serait atteint par la mesure. Dépourvu de motivation, le grief sera écarté.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

7) Au vu des circonstances du cas d’espèce, il sera renoncé à la perception d’un émolument (art. 87 al. 1 LPA). Il n’y a pas lieu à l’allocation d’une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2021 par
Monsieur A______ contre la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 22 juillet 2021 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir ainsi qu'à l'office cantonal des véhicules.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf et Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :