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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2214/2020

ATA/117/2021 du 02.02.2021 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2214/2020-AIDSO ATA/117/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 février 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre


SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS


EN FAIT

1) Madame et Monsieur A______, domiciliés à Genève, sont les parents de B______ né le ______ 2005.

Leur mariage a été dissout par jugement du Tribunal de première instance du 17 août 2017. M. A______ a notamment été condamné à verser en mains de Mme A______ une contribution d'entretien mensuelle en faveur de B______, d'un montant de CHF 1'200.- à compter du 27 juin 2017 et ce jusqu'au 19 novembre 2020.

2) Depuis le 24 juin 2020, B______ a été placé au foyer de C______.

3) Par décision du 14 juillet 2020, le Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) a facturé à Mme A______ la contribution des frais d'entretien mensuels relatifs au placement de son fils B______ à compter du 24 juin 2020, soit un montant de CHF 502.- (CHF 360.- représentant les frais de pension et CHF 142.- pour l'entretien personnel de B______ compte tenu de la tranche d'âge de seize à dix-huit ans).

Cette contribution tenait compte d'un rabais de 20 %, calculé sur la base de son revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) et du nombre d'enfants à sa charge.

4) Le 15 juillet 2020, le SPMi a adressé à Mme A______ une facture d'un montant de CHF 117.60, correspondant à la « part. parents placement » pour une semaine, soit du 24 au 30 juin 2020.

5) Par acte du 21 juillet 2020, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision précitée en demandant à ce que celle-ci soit « revue ».

Depuis janvier 2019, elle ne recevait plus la pension alimentaire due par son ex-époux et avait, entre temps, obtenu des avances du service cantonal d'avance et de recouvrement et des pensions alimentaires (ci-après : SCARPA). Depuis le placement de son fils au foyer de C______, le SCARPA avait cessé « de contribuer » et avait suspendu le versement de sa pension alimentaire.

À ce titre, elle a joint un relevé de compte du SCARPA (du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2020), sur lequel figuraient des avances de CHF 8'076.- pour la période du 1er janvier au 30 juin 2020, de CHF 673.- pour le mois de juillet 2020 et de CHF 1'346.- pour la période du 1er août au 30 septembre 2020.

Par ailleurs, le rabais de 20% sur sa contribution reposait sur des informations erronées, dès lors que le SCARPA avait cessé de l'aider financièrement et que de surcroît elle payait elle-même l'assurance maladie de son fils, ses factures de téléphone ainsi que les frais occasionnés par son retour le week-end. Partant, elle était incapable de s'acquitter des montants sollicités par le SPMi.

6) Dans ses observations du 5 août 2020, le SPMi a rappelé qu'il n'avait pas accès au RDU détaillé des contribuables, de sorte qu'il lui eût été impossible de vérifier si le calcul du code tarif appliqué à Mme A______ tenait compte d'une pension alimentaire. De fait, il a invité l'intéressée à lui faire parvenir son attestation annuelle RDU 2020.

7) Par courriers des 2 et 22 septembre 2020, Mme A______ a, respectivement, transmis à la chambre administrative son attestation RDU 2020 (année de référence 2018) et une copie du relevé de compte du SCARPA. Ledit relevé faisait état d'une dette due par M. A______ d'un montant de CHF  6'700.- et témoignait, donc, de l'irrégularité des remboursements faits par son ex-époux. Cette situation mettait à mal ses finances.

8) Dans ses observations du 30 septembre 2020, le SPMi a conclu au maintien de sa décision.

Selon l'attestation RDU annuelle 2020 de Mme A______, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) avait tenu compte d'un montant perçu au titre de pensions alimentaires. Or, le SPMi n'était pas habilité à remettre en question un document fiscal, de sorte que si celui-ci était erroné, l'intéressée devait directement interjeter recours auprès de l'AFC.

Par ailleurs, pour le calcul des prestations tarifaires il était uniquement tenu compte du RDU calculé sur la dernière taxation fiscale définitive.

9) Le 1er octobre 2020, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

2) a. Selon l'art. 65 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (al. 2).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d'une certaine souplesse s'agissant de la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu'elles ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est, en soi, pas un motif d'irrecevabilité, pour autant que l'autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/1718/2019 du 26 novembre 2019 consid. 2 ; ATA/1243/2017 du 29 août 2017 consid. 2a ; ATA/518/2017 du 9 mai 2017 consid. 2a). Ainsi, une requête en annulation d'une décision doit être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu'elle ne déploie pas d'effets juridiques (ATA/1243/2017 précité consid. 2a).

c. En l'espèce, la recourante n'a pas pris de conclusions formelles dans son recours. La chambre administrative comprend toutefois de son acte de recours qu'elle est en désaccord avec le montant de sa contribution aux frais d'entretien mensuels relatifs au placement de son fils.

Le recours est ainsi recevable.

3) a. Les père et mère contribuent ensemble, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de l'enfant et assument en particulier les frais de sa prise en charge, de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (art. 276 al. 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210). L'entretien est assuré par les soins, l'éducation et des prestations pécuniaires (art. 276 al. 1 CC).

Cette obligation dure jusqu'à la majorité de l'enfant (art. 277 al. 1 CC). La contribution d'entretien doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère ; il est tenu compte de la fortune et des revenus de l'enfant (art. 285 al. 1 CC).

b. L'art. 310 al. 1 CC prévoit que lorsqu'elle ne peut éviter autrement que le développement de l'enfant ne soit compromis, l'autorité de protection de l'enfant retire l'enfant aux père et mère ou aux tiers chez qui il se trouve et le place de façon appropriée.

Si l'éducation ou le traitement exigés par l'état du mineur ne peuvent être assurés autrement, l'autorité de jugement ordonne son placement. Ce placement s'effectue chez des particuliers ou dans un établissement d'éducation ou de traitement en mesure de fournir la prise en charge éducative ou thérapeutique requise (art. 15 al. 1 de la loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 20 juin 2003 ; Droit pénal des mineurs, DPMin - RS 311.1). Le placement est une mesure de protection du mineur.

Les parents participent aux frais des mesures de protection au titre de leur obligation d'entretien au sens du droit civil (art. 45 al. 5 PPMin.).

c. Lorsque l'enfant est placé, l'office de l'enfance et de la jeunesse perçoit une contribution financière aux frais de pension et d'entretien personnel auprès des père et mère du mineur (art. 81 al. 2 de la loi d'application du code civil suisse et d'autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 - LaCC - E 1 05 ; art. 1 al. 1, 2 al. 1 et 2, ainsi que 3 du règlement fixant la contribution des père et mère aux frais d'entretien du mineur placé hors du foyer familial ou en structures d'enseignement spécialisé de jour du 21 novembre 2012 - RCFEMP - J 6 26.4).

d. Aux termes de l'art. 1 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU ; J 4 06), ladite loi a pour but de définir les éléments dans le calcul du RDU au plan cantonal. Les prestations octroyées par le SPMi sont calculées sur la base du RDU additionné des prestations catégorielles (art. 1 let. d du règlement d'exécution de la LRDU du 27 août 2014 - RRDU - J 4 06.01 ; art. 1 et art. 13A al. 1 LRDU). Sont considérées comme des prestations catégorielles, notamment les subsides de l'assurance-maladie et les allocations de logement (art. 13 al. 1 let. a LRDU).

Le RDU se calcule sur l'ensemble des revenus et de la fortune selon la dernière taxation fiscale définitive (art. 9 al. 1 LRDU). Il est en principe actualisé sur la base des derniers éléments de revenus et de fortune connus de la personne (art. 10 al. 1 LRDU). Il peut être actualisé sur demande d'un service et/ou lorsque la condition économique de l'intéressé s'est modifiée entre la période qui a servi de base au calcul de la prestation et le moment où il présente sa demande. Ces changements sont annoncés et justifiés par l'intéressé (art. 10 al. 2 LRDU). Le processus d'actualisation du revenu déterminant unifié selon l'al. 1 s'applique toutefois à l'examen ou au réexamen des seules demandes de prestations catégorielles et de comblement visées à l'art 13 al. 1 LRDU, sauf exceptions définies par le Conseil d'État.

e. En vertu de l'art. 2 RCFEMP, lors de placements résidentiels au sens de l'art. 1 al. 1 let. a à c RCFEMP, le prix de pension est facturé sur une base journalière forfaitaire fixée à CHF 30.- (al. 1). À ce montant s'ajoutent les frais d'entretien personnel du mineur qui sont à la charge des père et mère (al. 2).

Conformément au ch. 3 de la directive interne d'application du RCFEMP, entrée en vigueur le 1er janvier 2015 (ci-après : directive 2015), quel que soit le nombre de jours compris dans le mois, le montant forfaitaire mensuel prévu à l'art. 2 al. 1 RCFEMP est fixé à CHF 900.- (ATA/873/2019 du 7 mai 2019 consid. 3d).

L'art. 3 RCFEMP prévoit que les frais d'entretien personnel mensuels s'élèvent à CHF 355.- pour un enfant dès seize ans.

L'art. 5 al. 1 RCFEMP prévoit qu'un rabais, fondé sur le RDU, est accordé aux père et mère, pour le prix de pension fixé à l'art. 2 al. 1 et les frais d'entretien personnel définis à l'art. 3. Cinq niveaux de revenus sont mentionnés, auxquels correspond un pourcentage de réduction.

4) En l'espèce, bien que la nature du placement ne soit pas précisée (pénale ou civile), il n'est pas contesté que le mineur a été placé.

Les frais de placement établis par la décision attaquée résultent de l'addition des frais de pension et des frais personnels correspondant au montant prévu pour l'âge de l'enfant, respectivement CHF  900.- et CHF 355.-, soit un total final de CHF 1'255.- et dont la somme de CHF 627.50 a été mis solidairement à la charge de chaque parent.

Bien que la recourante le conteste, c'est à juste titre que l'autorité intimée a tenu compte d'un rabais de 20% calculé sur la base de son RDU 2020 (avec année de référence 2018) et du nombre d'enfants à sa charge, de sorte que les frais de placement s'élèvent au final à CHF 502.-.

En effet, si au stade de la réplique elle a produit son attestation RDU 2020, la recourante ne soutient pas ni n'étaye avoir formé une réclamation en temps utile auprès de l'AFC contre sa taxation 2018, qui seule fait foi.

La chambre de céans, qui est saisie uniquement du litige en lien avec la contribution due par la recourante en faveur de son fils, retiendra qu'en l'état de la situation, le SPMi a valablement calculé cette contribution pour l'année 2020 sur la base du RDU année de référence 2018.

Au demeurant, selon la jurisprudence, l'obligation d'entretien n'a pas le même fondement que celle liée au placement d'un mineur (ATA/352/2018 du 17 avril 2018 consid. 5). En effet, la première est due à l'enfant et versée durant sa minorité à son représentant légal ou au parent qui en assume la garde, est fixée par un juge civil, doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère et a pour objectif de couvrir l'entretien convenable de l'enfant. Elle est fiscalement déductible chez le débirentier alors qu'elle s'ajoute aux revenus du crédirentier. La seconde doit servir à couvrir les frais de placement d'un mineur dans un établissement où il est placé, à des fins de protection. Ces frais sont extraordinaires et sont, à rigueur de loi, dus par les deux parents. Partant, le montant dû suite à un placement est indépendant de celui de la contribution d'entretien fixée judiciairement pour l'entretien convenable de l'enfant.

Ainsi, à l'aune des éléments précités, le recours, infondé, sera rejeté.

5) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 juillet 2020 par Madame A______ contre la décision du service de protection des mineurs du 14 juillet 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'au service de protection des mineurs.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :