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Décisions | Assistance juridique

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AC/384/2023

DAAJ/101/2023 du 26.09.2023 sur AJC/1242/2023 ( AJC ) , RENVOYE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/384/2023 DAAJ/101/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 26 SEPTEMBRE 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :


Monsieur A______, domicilié ______ [GE],

 

contre la décision du 6 mars 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : le recourant) est l'associé gérant de la société B______ SÀRL (ci-après : la Sàrl), dont le but est l'étude, la planification et la direction de constructions en Suisse et à l'étranger.

b. Le 22 août 2019, l'Administration fiscale cantonale (ci-après : l'AFC) a informé le recourant de l'ouverture de procédures en rappel et en soustraction d'impôts pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : l'ICC) et l'impôt fédéral direct (ci-après : l'IFD) pour les années 2013 à 2016, considérant que celui-ci aurait perçu des prestations appréciables en argent, non imposées, sous forme d'un prêt simulé octroyé par la Sàrl. Par bordereaux de rappels d'impôt et d'amendes du 12 octobre 2021, l'AFC a procédé aux reprises et amendes résultant desdites procédures, pour un montant total de 519'436 fr. 30, intérêts compris.

Le recourant a formé réclamation, puis recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) à l'encontre de ces bordereaux. Ces derniers sont devenus définitifs et exécutoires, le recours ayant été déclaré irrecevable pour cause de tardiveté.

c. Le 16 juin 2022, le recourant a adressé une demande de remise d'impôts à l'AFC et sollicité la suspension de la procédure de recouvrement correspondante.

Il ne pouvait pas payer les impôts dus, sous peine de se trouver en faillite personnelle. De 2014 à 2016, il avait perdu en bourse 1'221'000 fr. des bénéfices de la Sàrl, étant précisé que les investissements effectués étaient toujours intervenus pour le compte de la Sàrl et non pour son compte privé. Il devait rembourser ce montant à son entreprise. En dehors des montants qu'il devait à l'AFC, il faisait l'objet de nombreuses dettes pour un total de 33'110 fr. Le minimum vital de son ménage était de 4'575 fr. 20 par mois, soit 54'900 fr. par an. Ses dépenses réelles étaient plus élevées, car ni les impôts, ni le remboursement des dettes, ni la part privée de l'assurance-maladie n'étaient pris en compte. Il ne lui était pas possible d'augmenter son salaire, dans la mesure où il avait contracté un crédit Covid-19 pour son entreprise. Etant donné sa situation et ses faibles revenus prévisibles, le paiement de l'impôt, des amendes et des intérêts auraient pour lui des conséquences extrêmement dures.

d. Par décision du 6 octobre 2022, l'AFC a rejeté la demande de remise du recourant.

e. Par deux décisions sur réclamation du 23 décembre 2022, l'AFC a maintenu ses décisions de refus de remise du 6 octobre 2022.

f. Par acte du 17 janvier 2023, référencé sous cause A/1______/2023, le recourant a formé recours à l'encontre des deux décisions sur réclamation précitées auprès du TAPI, concluant, préalablement, à l'octroi de l'effet suspensif au recours et, principalement, à l'annulation des décisions sur réclamation du 23 décembre 2022, ainsi qu'à la mise au bénéfice d'une remise sur l'ensemble des suppléments d'impôts et des amendes du 12 octobre 2021 et sur les intérêts et frais de ceux-ci.

B.            a. Le 6 février 2023, le recourant a sollicité l'assistance juridique pour la procédure devant le TAPI dans la cause A/1______/2023.

b. Par courrier du 9 février 2023, le greffe de l'assistance juridique a informé le recourant qu'il n'était, en l'état, pas en mesure d'évaluer les chances de succès des démarches envisagées, ni de procéder à l'évaluation de sa situation financière. Il lui a imparti un délai au 1er mars 2023 pour lui fournir une copie de sa police d'assurance‑maladie obligatoire de 2023, ainsi que celle de son fils, les documents relatifs aux frais de 520 fr. mentionnés sous la rubrique "Pensions alimentaires/cuisines scolaires, parascolaires, etc." et les preuves de paiement desdits frais pour les trois derniers mois, à défaut de quoi ils seraient écartés, une copie des bilans et comptes de pertes et profits de 2022 de la Sàrl, ainsi que de C______ SA, les relevés détaillés bancaires et/ou postaux commerciaux pour les trois derniers mois des deux sociétés précitées, une copie de son dernier avis de taxation fiscale reçu dans son intégralité, ainsi que du bordereau d'impôts y relatif, une copie des décisions de l'AFC contestées et du recours déposé auprès du TAPI le 17 janvier 2023. Il a en outre demandé au recourant s'il était actionnaire de C______ SA et dans l'affirmative, à quel pourcentage, et enfin s'il avait déjà pris contact avec un avocat ou s'il désirait que le greffe lui en commette un d'office en cas d'octroi de l'aide étatique.

c. Le 19 février 2023, le recourant a produit des documents et fourni des renseignements, dont les bordereaux de rappel d'impôt et d'amende du 12 octobre 2021, mais non les autres décisions de l'AFC, et son recours devant le TAPI, précisant que le bordereau de pièces y relatif pourrait être fourni sur demande. Il a également sollicité un délai supplémentaire de trois mois pour produire les bilans et comptes de pertes et profits de 2022 de la Sàrl et de C______ SA.

d. Le 28 février 2023, le greffe de l'assistance juridique a informé le recourant qu'il n'était, en l'état, toujours pas en mesure d'évaluer les chances de succès des démarches envisagées. Il lui a imparti un délai au 20 mars 2023 pour lui fournir une copie de la décision rendue le 6 octobre 2022 par l'AFC, ainsi que les courriers adressés les 20 octobre et 23 décembre 2022 par l'AFC au recourant (fait non contesté par l'Assistance juridique).

e. Par décision AJC/1242/2023 du 6 mars 2023, notifiée au recourant le 10 mars 2023, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique, au motif que la cause du recourant était dénuée de chances de succès. Elle a estimé que les arguments invoqués par le recourant ne constituaient pas des causes pouvant conduire à une situation de dénuement. La perte en bourse ne constituait pas une perte commerciale au sens de la règlementation applicable.

C.           a. Recours est formé contre la décision AJC/1242/2023 du 6 mars 2023, par acte expédié le 6 avril 2023 à la Présidence de la Cour de justice. Le recourant conclut à l'annulation de la décision attaquée et à l'octroi de l'assistance juridique. Il fait en particulier valoir que le premier juge aurait rendu la décision litigieuse sur la base d'un état de fait incomplet, dès lors que celle-ci aurait été notifiée avant l'échéance du délai imparti au 20 mars 2023 pour produire trois pièces complémentaires. Les 59 autres pièces de la procédure A/1______/2023 n'auraient également pas été versées à la présente procédure, alors que le recourant s'était proposé de le faire sur demande.

Le recourant produit des pièces nouvelles, soit le bordereau de 62 pièces produit à l'appui de son recours formé le 17 janvier 2023 par-devant le TAPI, dans la cause A/1______/2023. Il produit également, outre des pièces déjà connues du premier juge, copie d'un courrier adressé le 28 février 2023 par le greffe de l'assistance juridique, qui lui imparti un délai au 20 mars 2023 pour lui transmettre une copie de la décision de l'AFC du 6 octobre 2022, ainsi que les courriers de l'AFC des 20 octobre et 23 décembre 2022.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

c. Le 31 août 2023, la recourant a encore produit une nouvelle pièce.

d. Parallèlement à cette procédure, le recourant a également sollicité, par courrier du 17 mars 2023, la reconsidération de la décision AJC/1242/2023, laquelle a été rejetée dans la mesure de sa recevabilité par décision du 24 mars 2023.

EN DROIT

1.             1.1 La décision entreprise est sujette à recours auprès du président de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 10 al. 3 LPA), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours dans un délai de 30 jours (art. 10 al. 3 LPA, 130, 131 et 321 al. 1 CPC, applicables par renvoi des art. 10 al. 4 LPA et 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 du 15 juin 2011 consid. 2.2).

1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrits par la loi.

1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 10 al. 3 LPA), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 précité). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

1.4 Il n'y a pas lieu d'entendre le recourant, celui-ci ne le sollicitant pas et le dossier contenant suffisamment d'éléments pour statuer (art. 10 al. 3 LPA; arrêt du Tribunal fédéral 2D_73/2015 du 30 juin 2016 consid. 4.2).

2.             A teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions et les allégations de faits nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'une procédure de recours.

Par conséquent, les allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance et les pièces nouvelles produites à l'appui de son recours du 6 avril 2023 et par courrier du 31 août 2023 ne seront pas pris en considération.

3.             3.1 Le droit d'être entendu garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 53 CPC, qui ont à cet égard la même portée, accorde aux parties le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit rendue, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves et de se déterminer à leur propos ainsi que de s'exprimer sur les éléments pertinents du litige avant qu'une décision touchant leur situation juridique ne soit prise (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1; 135 II 286 consid. 5.1; 133 I 270 consid. 3.1; 132 II 485 consid. 3.2; 127 I 54 consid. 2b). En effet, le droit d'être entendu est à la fois une institution servant à l'instruction de la cause et une faculté de la partie, en rapport avec sa personne, de participer au prononcé de décisions qui lèsent sa situation juridique (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa; 124 I 49 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_401/2022 du 14 février 2023 consid. 5.1; 4A_364/2015 du 13 avril 2016 consid. 2.2 non publié aux ATF 142 III 355).

Le droit d'être entendu – dont le respect doit être examiné en premier lieu – est un grief de nature formelle dont la violation entraîne l'annulation de la décision attaquée indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 141 V 495 consid. 2.2; 127 V 431 consid. 3d/aa). L'admission du grief conduit au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision (ATF 134 III 379 consid. 1.3; arrêt du Tribunal fédéral 5D_19/2018 du 14 février 2018 consid. 2.2).

3.2 En l'espèce, quand bien même le recourant aurait déjà disposé d'un délai pour compléter sa requête, le greffe de l'assistance juridique lui a fixé un délai supplémentaire échéant au 20 mars 2023 pour fournir des renseignements complémentaires et évaluer les chances de succès de sa cause. L'autorité de première instance ayant statué sur la demande du recourant avant l'échéance dudit délai, c'est à juste titre que celui-ci se plaint d'une violation de son droit d'être entendu.

Dans la mesure où la violation du droit d'être entendu ne peut pas être réparée par l'Autorité de céans, celle-ci ne disposant pas d'un pouvoir d'examen aussi étendu que le premier juge, la décision querellée sera annulée et la cause renvoyée à la vice-présidence du Tribunal civil pour instruction complémentaire et nouvelle décision, un délai devant être imparti au recourant pour compléter son dossier (cf. art. 69 al. 3 LPA, applicable par renvoi de l'art. 25 RAJ).

4. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé le 6 avril 2023 par A______ contre la décision rendue le 6 mars 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/384/2023.

Au fond :

Annule la décision entreprise et cela fait :

Renvoie la cause à la vice-présidence du Tribunal civil pour instruction complémentaire et nouvelle décision.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Notifie une copie de la présente décision à A______ (art. 327 al. 5 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), la présente décision incidente peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.