Aller au contenu principal

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/9955/2016

ACJC/197/2024 du 13.02.2024 sur OTPI/564/2023 ( SDF ) , RENVOYE

Recours TF déposé le 19.03.2024, 5A_186/2024
Normes : CPC.276
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9955/2016 ACJC/197/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 13 FÉVRIER 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, Albanie, p.a B______, ______ [VD], appelant d'une ordonnance rendue par le Tribunal de première instance le 15 septembre 2023, représenté par Me Valérie MALAGOLI-PACHE, avocate,

et

Madame C______, domiciliée ______ [GE], intimée, représenté par Me Thomas BARTH, avocat, BARTH & PATEK, Boulevard Helvétique 6, Case postale, 1211 Genève 12,

et

Les mineurs D______ et E______, domiciliés chez leur mère, Madame C______, représentés par leur curatrice, Me F______, ______ [GE], autres intimées.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/564/2034 du 15 septembre 2023, reçue par A______ le 20 septembre 2023, le Tribunal de première instance, statuant sur requête de mesures provisionnelle déposée par A______, a notamment modifié le chiffre 2 de l'ordonnance sur mesures provisionnelles OTPI/954/2021 du 17 décembre 2021 et supprimé le chiffre 2 de l'ordonnance du 22 juillet 2022 (ch. 1 du dispositif) et, statuant à nouveau, réservé à A______ à un droit de visite sur ses enfants D______ et E______ s'exerçant au Point Rencontre, selon les modalités "1 pour 1 ", à raison d'une heure toutes les semaines, sauf avis contraire des curateurs (ch. 2), ainsi qu'un droit aux relations personnelles sous la forme d'appels téléphoniques d'au minimum 1 fois par semaine, le mardi dans le créneau horaire 18h00-19h00, voire plus en cas de souhait des enfants et sur leur initiative, étant précisé que ces derniers pourraient en limiter la durée, et cela pour autant que A______ s'abstienne d'évoquer avec eux la procédure/le conflit qui l'oppose à leur mère (ch. 3), a maintenu la curatelle ad hoc prononcée sur mesures superprovisionnnelles le 14 mai 2021 (ch. 4) et la limitation de l'autorité parentale de A______ et C______ en découlant (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B. a. Le 2 octobre 2023, A______ a formé appel contre cette ordonnance, concluant à ce que la Cour de justice l'annule partiellement, lui réserve un droit de visite sur ses enfants D______ et E______ s'exerçant sauf accord contraire entre les parties à raison d'un dimanche sur deux, de 10h00 à 16h00 avec passage des enfants au Point Rencontre pour une durée d'un mois (conclusion n° 4), dise qu'à l'échéance de cette période, le droit de visite sera élargi à tous les week-ends du vendredi 18h00 au dimanche 18h00 ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, l'alternance durant les fêtes étant la règle (concl. n° 5), annule la curatelle ad hoc prononcée sur mesures superprovisionnelles le 14 mai 2021 (concl. n° 6), maintienne la limitation de l'autorité parentale de C______ en conséquence (concl. n° 7) et ordonne au Service de la population à Lausanne
(ci-après : SPOP), respectivement à la Police cantonale vaudoise, de procéder à la suppression immédiate de la dénonciation du 4 janvier 2021 à son encontre (conclusion n° 8), le tout avec suite de frais et dépens.

b. Le 6 novembre 2016, la curatrice des enfants à conclu à ce que la Cour confirme l'ordonnance querellée et statue sur la conclusion n° 8 de l'appel, avec suite de frais et dépens.

Elle a déposé une note de frais et honoraires en 825 fr.

c. Le 13 novembre 2023, C______ a conclu à la confirmation de l'ordonnance querellée, avec suite de frais et dépens.

d. Les parties ont été informées le 4 janvier 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. Les époux C______, née le ______ 1987 à G______ (Kosovo), ressortissante du Kosovo, et A______, né le ______ 1986 à H______ (Albanie), ressortissant d'Albanie, se sont mariés le ______ 2010 au Kosovo.

Trois enfants sont issus de cette union :

-  I______ née le ______ 2009 et décédée le ______ 2010;

-  D______ [même prénom que I______], née le ______ 2011;

-  E______, né le ______ 2012.

C______ et A______ vivent séparés depuis le mois d'octobre 2012.

A______ partage son temps entre l'Albanie et J______ [VD], où il vit chez son frère.

C______ a donné naissance à deux nouveaux enfants, K______, né le ______ 2022, et L______, née le ______ 2023, dont le père est M______, ressortissant du Kosovo.

b.a Le 13 mai 2016, C______ a déposé une demande en divorce par devant le Tribunal de première instance.

Le divorce de C______ et de A______ a été prononcé par jugement partiel du Tribunal JTPI/15697/2021 du 13 décembre 2021.

b.b C______ s'est remariée le ______ 2022 avec M______.

c. La procédure opposant C______ et A______ se poursuit depuis 2016 sur les effets accessoires du divorce, particulier sur le sort des enfants.

Chaque parent réclame l'autorité parentale et la garde de ceux-ci et a requis de l'autre parent le versement de contributions d'entretiens.

d. La situation des enfants D______ et E______ est suivie depuis le début de la procédure par le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (SEASP, anciennement Service de protection des mineurs (SPMi)) et de nombreux rapports ont été rendus par ce service, de même que par le Point Rencontre au sein duquel le droit de visite de A______ s'exerce.

Les enfants font également l'objet d'un suivi psychologique.

Une curatrice de représentation a en outre été nommée pour les représenter dans la présente procédure le 27 août 2021. Elle a rédigé plusieurs rapports concernant leur évolution.

e. Par ordonnance sur mesures provisionnelles ORTPI/486/2016 du
21 septembre 2016, le Tribunal a notamment attribué à C______ la garde sur les enfants, réservé à A______ un droit de visite s'exerçant, sauf accord contraire entre les parties, à raison de deux heures par semaine en milieu surveillé et ordonné l'instauration d'une curatelle de surveillance et d'organisation des relations personnelles au sens de l'article 308 al. 2 CC.

Cette ordonnance a été confirmée par arrêt de la Cour ACJC/424/2017 du
7 avril 2017.

f. Par la suite de nombreuses ordonnances de mesures provisionnelles (plus d'une dizaine), voire superprovisionnelles, ont été rendues par le Tribunal, dont certaines ont fait l'objet d'appels auprès de la Cour, pour réglementer notamment le droit de visite de A______, litigieux en l'espèce.

g. Dès 2017, le Tribunal, après avoir requis l'avis des services sociaux, a progressivement élargi le droit de visite.

Ainsi, à partir du printemps 2019, celui-ci devait s'exercer à la journée, et pendant une partie des vacances scolaires, puis, dès fin 2019, à une fréquence d'environ un week-end sur deux, puis tous les week-ends dès septembre 2020.

h. Fin 2020, les professionnels entourant cette famille ont constaté que la situation des enfants se dégradait. Ceux-ci étaient pris dans un conflit de loyauté portant atteinte à leur bon développement et se montraient tristes et anxieux. Cet état de fait était notamment dû à l'attitude de leur père, qui n'avait pas un comportement rassurant avec eux mais qui les impliquait de manière excessive dans le conflit parental et dénigrait leur mère. D______ avait peur de son père et E______ exprimait sa souffrance notamment par de l'agressivité. Un risque d'aliénation parentale par le père était évoqué (rapports du SPMi des 14 et 15 décembre 2020).

i. Par ailleurs, au vu des craintes existant en lien avec un éventuel enlèvement des enfants par leur père, le Tribunal a, par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 13 juillet 2020, interdit à ce dernier de quitter la Suisse avec les enfants et a ordonné à l'Office fédéral de la police de procéder à l'inscription de ceux-ci dans le système de recherches informatisées de police (RIPOL) et dans le système d'information Schengen (SIS).

Par ordonnance du 23 décembre 2020, le Tribunal a ordonné à l'Office fédéral de la police de radier les inscriptions susmentionnées (ch. 1 du dispositif).

j. Par requête urgente du 12 mai 2021, le SPMi a sollicité, sur mesures superprovisionnelles, la suspension du droit de visite de A______, compte tenu de la péjoration de la situation des enfants, des inquiétudes de l'ensemble du réseau et des derniers éléments transmis par C______. Les suivis thérapeutiques des enfants avaient été interrompus, ce qui leur était préjudiciable. Ils n'allaient pas bien, étaient agités et angoissés. A______ intervenait en particulier de manière inadéquate dans les activités scolaires de D______, notamment en lien avec les cours de piscine, qu'il désapprouvait.

Le SPMi avait reçu un appel de C______ le 10 mai 2021. Celle-ci avait expliqué que la police avait dû intervenir à son domicile le dimanche au retour des enfants de chez leur père, suite au refus de E______ de rentrer chez elle. L'enfant voulait rester avec son père, disait ne pas vouloir vivre avec le mari de sa mère, avait affirmé que ce n'était pas la juge qui décidait, qu'on voulait le séparer de son père et avait traité sa mère de "pute". Le SPMi avait parlé au téléphone avec D______, qui avait expliqué que la venue de la police l'avait stressée, que son père les forçait à jeûner et les obligeait à se réveiller à 3 heures du matin pour manger, que son frère était stressé, violent et la tapait parfois, et qu'elle n'arrivait pas à lui parler. E______ avait déclaré au SPMi qu'il était triste car il voulait rester avec son père; celui-ci lui avait promis de lui offrir des [consoles de jeux vidéo] N______ s'il restait avec lui et de l'emmener en Albanie. Son père lui avait dit que sa mère allait l'abandonner et il avait très peur qu'elle le fasse. L'enfant avait de plus indiqué au SPMi qu'il entendait aller vivre en Albanie avec son père, que ce n'était pas la juge qui décidait et qu'il n'était pas obligé d'aller à l'école.

k. Par ordonnance sur mesures superprovisionnelles du 14 mai 2021, le Tribunal a notamment restreint le droit de visite de A______ en ce sens qu'il devait s'exercer au Point Rencontre selon la modalité "1 pour un 1", à raison d'une heure toutes les deux semaines (ch. 1 du dispositif), instauré une curatelle ad hoc, à charge du curateur d'organiser des suivis thérapeutiques pour les enfants (ch. 4) et limité l'autorité parentale des deux parents en conséquence (ch. 5).

l. Lors de l'audience du Tribunal du 11 octobre 2021, la curatrice des enfants a expliqué que D______ était prise dans un conflit de loyauté, ce qui se répercutait physiquement sur elle; elle était stressée, se rongeait les ongles jusqu'au sang et avait mal au ventre. Elle était écartelée entre le comportement qu'elle devait avoir à l'école et les injonctions de son père et mise sous pression par les propos que lui rapportait son père sur la procédure et sur sa mère. E______ était agité de manière générale et violent à l'école. Selon l'éducatrice de l'école, il était en conflit entre le comportement préconisé par son père - comme le droit de se défendre, même avec violence - et les obligations comportementales de l'école. Il avait beaucoup de peine à faire confiance aux adultes. Il montrait une grande loyauté envers son père et était content d'avoir pu reprendre la thérapie. Selon l'infirmière de l'école, D______ voulait reprendre son suivi thérapeutique et était soulagée de l'instauration d'un droit de visite au Point Rencontre, se réjouissant de revoir son père dans ce cadre.

m.a Par ordonnance sur mesures provisionnelles OTPI/954/2021 du 17 décembre 2021, le Tribunal a notamment confirmé la fixation du droit de visite en milieu protégé, soit au Point de rencontre selon la modalité "1 pour 1", à raison d'une heure toutes les deux semaines, sauf avis contraire des curateurs (ch. 2) et a autorisé A______ à avoir des entretiens téléphoniques avec ses enfants deux fois par semaine, les mardis et jeudis de 18h00 à 19h00 (ch. 3).

m.b Cette ordonnance a été confirmée par arrêt de la Cour ACJC/846/2022 du
21 juin 2022.

La Cour a notamment relevé que l'introduction d'un droit de visite non surveillé en mai 2019 avait provoqué une péjoration de la situation des enfants. Les différents intervenants sociaux, les enseignants des enfants et leur curatrice de représentation avaient constaté une instrumentalisation des enfants par leur père qui les plaçait dans un important conflit de loyauté qui les faisait souffrir et entravait leur bon développement.

Ces intervenants avaient tous relevé que la situation des enfants était préoccupante du fait des pressions exercées par leur père dans le cadre de son droit de visite et des contacts téléphoniques. Les enfants étaient pris à partie par leur père, qui discréditait de manière répétée leur mère ainsi que les différents intervenants sociaux. Il les instrumentalisait pour les besoins de sa cause, par exemple en leur disant de ne pas se confier aux curatrices parce qu'elles étaient "méchantes" ou en leur demandant de dire à leurs maîtresses d'école que leur père leur manquait. Le stress ressenti par les enfants du fait de ce comportement les atteignait dans leur santé psychique et physique : D______ se rongeait les ongles et perdait du poids tandis que E______ souffrait de tics aux yeux et gérait de moins en moins bien ses émotions, de telle sorte qu'il se mettait parfois en danger (chute d'un arbre, bagarres, comportements agressifs à l'encontre de sa mère ou à l'école par exemple).

La prise en charge de enfants par la mère était adéquate; elle faisait de son mieux pour les protéger du conflit familial, ce qui n'était pas le cas du père, qui avait du mal à prendre en compte l'intérêt de ses enfants et ne collaborait que peu aux démarches entreprises pour améliorer leur situation.

Les enfants avaient été entendus par différents enseignants et assistants sociaux ainsi que par la curatrice de représentation, et les propos rapportés par ceux-ci étaient concordants et crédibles. Les sentiments de D______ étaient également documentés par les courriers qu'elle avait rédigés à l'attention du Tribunal. Les allégations de A______ selon lesquelles les personnes précitées étaient toutes partiales en sa défaveur et motivés par une animosité à son égard n'étaient quant à eux étayés par aucun élément concret.

Les modalités du droit de visite fixée par le Tribunal dans son ordonnance du
17 décembre 2021 convenaient aux enfants, qui avaient confié à leur curatrice de représentation être soulagés par la réintroduction d'un droit de visite surveillé. Suite à cette modification, la curatrice avait constaté une amélioration dans le comportement de E______, qui ressentait moins de tensions et de colère et gérait mieux ses relations avec les tiers.

n. Le 7 avril 2022, le Centre universitaire romand de médecine légale a rendu le rapport d'expertise du groupe familial requis par le Tribunal le 16 juin 2022. Cette expertise a été rendue sans le concours de A______, qui a refusé de déférer aux convocations des experts.

Les experts préconisent notamment l'attribution de la garde à C______, le maintien du droit de visite de A______ en milieu surveillé et le maintien de la curatelle de surveillance du droit de visite.

o. Par ordonnance du 22 juillet 2022, le Tribunal a supprimé les appels téléphoniques entre le père et les enfants au vu des derniers renseignements obtenus au sujet des enfants, ces entretiens étant préjudiciables à leur développement.

p.a Le 3 mars 2023, le SEASP a rendu un rapport d'évaluation duquel il ressort qu'il est dans l'intérêt des enfants de maintenir le droit de visite surveillé selon les modalités actuelles "1 pour 1", et de renoncer aux appels téléphoniques non-médiatisés entre A______ et ses enfants. Les visites se déroulaient de manière appropriée et faisaient du bien aux enfants, qui appréciaient de pouvoir entretenir des relations personnelles avec leur père. Un élargissement de celles-ci en dehors du Point de rencontre pourrait être une source d'anxiété pour les enfants, qui avaient indiqué aux curatrices être soulagés que les visites se déroulent en présence de tiers. Une reprise des appels non-médiatisés entre le père et ses enfants n'était pas indiquée en l'état, car rien ne permettait de retenir que ces appels seraient focalisés sur le quotidien des enfants et non sur la procédure en cours ou sur la mère des enfants. Les enfants avaient indiqué à leurs thérapeutes respectifs qu'ils avaient besoin de stabilité dans leurs lieux de vie, scolarité et espaces thérapeutiques.

Les procédures judicaires entamées unilatéralement par A______ au Kosovo en lien avec les enfants, tendant à obtenir la modification de leur nom de famille de C______ en A______ et l'attribution exclusive en sa faveur de l'autorité parentale, sans tenir compte du fait que C______ détenait elle aussi l'autorité parentale sur ses enfants, démontraient les difficultés du père à sortir du conflit parental, dont il sous estimait l'impact délétère sur le développement des enfants.

p.b Le SEASP relève que, vu la brièveté des délais impartis, il n'a pas procédé à une nouvelle audition des parents de D______ et E______, d'entente avec le Tribunal.

Les parties se sont exprimées sur ce rapport lors de l'audience du Tribunal du 8 mars 2023.

q. Le 27 juin 2023, A______ a déposé une requête de mesures provisionnelles, concluant à ce que le Tribunal supprime le chiffre 2 du dispositif de l'ordonnance de mesures provisionnelles du 17 décembre 2021 (OTPI/954/2021) et lui réserve un droit de visite sur ses enfants qui s'exercera, sauf accord contraire des parties, à raison d'un dimanche sur deux, de 10h00 à 16h00 avec passage des enfants au Point Rencontre, pour une durée de trois mois, dise qu'à l'échéance de ces 3 mois, le droit de visite sera élargi et s'exercera à raison d'un week-end sur deux du vendredi à 17h00 en bas du domicile de C______ au dimanche 18h00 en bas du même domicile, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, l'alternance durant les fêtes étant la règle.

Il a en outre conclu à ce que le Tribunal complète le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance de mesure provisionnelles du 23 décembre 2020 et "ordonne au Service de la population à Lausanne (SPOP), respectivement à la Police cantonale vaudoise, de procéder à la suppression immédiate de la dénonciation du ______ janvier 2021 à son égard".

Il a fait valoir que le droit de visite surveillé ne pouvait pas perdurer indéfiniment. Les visites se déroulaient bien, comme l'attestait le rapport du Point Rencontre pour la période du 5 mars au 11 juin 2023. C______ était d'accord avec l'élargissement du droit de visite, en ce sens que la surveillance pouvait être supprimée et le droit de visite se dérouler au Point Rencontre pendant deux heures une semaine sur deux.

Par ailleurs, le SPOP avait écrit le 4 janvier 2021 à la police cantonale vaudoise pour lui signaler que A______ "figurait au Ripol". Répondant à une requête de sa part, l'Office fédéral de la police l'avait cependant informé le 11 mars 2021, qu'aucune donnée le concernant ne figurait dans les systèmes RIPOL ou SIS.

r. C______ a conclu au déboutement de A______ de ses conclusions sur mesures provisionnelles. Il n'était pas envisageable de prévoir un droit de visite en dehors du Point Rencontre tant que la situation du nom de famille des enfants, de leur garde et de l'autorité parentale n'était pas réglée. Au vu des démarches entreprises au Kosovo par A______ en attribution exclusive de l'autorité parentale et en changement de nom des enfants, elle craignait que, dans le cadre de visites hors du Point Rencontre, il tente d'emmener les enfants au Kosovo.

s. La curatrice des enfants a conclu à ce que le Tribunal maintienne les modalités actuelles du droit de visite, soit "1 pour 1" à raison d'une heure toutes les deux semaines, introduise une "modalité de temps de passage", annule le chiffre 3 de l'ordonnance OTPI/596/2022 du Tribunal de première instance du
19 septembre 2022, autorise A______ à recevoir des appels téléphoniques de ses enfants une fois par semaine, sous réserve d'une solution soit trouvée pour que ces appels téléphoniques soient médiatisés et pour autant que les enfants souhaitent ces appels et limite l'autorité parentale de A______ sur les enfants D______ et E______ s'agissant de la question de la naturalisation suisse, autorisant ainsi C______ à poursuivre seule les démarches en ce sens.

Elle s'est référée à son rapport intermédiaire du 21 février 2023, relatant notamment que les enfants étaient éprouvés par la procédure qui n'en finissait pas. D______ manifestait son inquiétude s'agissant de la possibilité de participer à des événements scolaires de peur que son père s'y oppose ou encore de pratiquer un sport en dehors de l'école. Elle souhaitait que les rencontres avec son père se passent dans le milieu protégé du Point Rencontre, en présence d'éducateurs, craignant les remarques que son père pourrait lui faire quand ils étaient seuls. E______ avait exprimé des souhaits dans le même sens. D______ était soulagée que les appels téléphoniques avec son père ne soient plus réguliers ni obligatoires. Ces appels étaient vécus par les enfants comme intrusifs, ayant souvent donné lieu à des questionnements de la part de leur père qui les mettait mal à l'aise. Elle était prête à avoir des contacts téléphoniques avec son père, si elle avait la liberté de choisir quand l'appeler et quand mettre fin à l'entretien. E______ souhaitait pour sa part avoir plus de contacts avec son père, et surtout revoir son cousin de J______ [VD]. Les modalités des appels téléphoniques telles que proposées par D______ lui convenaient.

t. La cause a été gardée à juger par le Tribunal sur mesures provisionnelles le
22 août 2023.

EN DROIT

1. Le Tribunal a retenu qu'il ressortait des derniers rapports du SEASP et du Point Rencontre que le droit de visite surveillé se déroulait de manière harmonieuse et satisfaisait les enfants. Un élargissement du droit de visite n'était pas approprié pour le moment car cela constituerait une source d'anxiété pour les enfants, qui préféraient que les visites se déroulent en présence de tiers. Pour donner suite à la demande de E______ de voir plus son père, le droit de visite pouvait intervenir de manière hebdomadaire. Il résultait du rapport de la curatrice de surveillance du droit de visite que l'instauration d'un appel téléphonique par semaine serait favorable aux enfants, à condition que leur père adopte une communication constructive et bienveillante et que les enfants soient libres de mettre fin à la communication. Il convenait par conséquent de mettre en place des appels téléphoniques médiatisés. Il n'y avait pas lieu de supprimer les curatelles ordonnées ni la limitation de l'autorité parentales des parties en lien avec les suivis thérapeutiques des enfants.

En lien avec le droit de visite et la curatelle instaurées par ordonnance du
14 mai 2021, l'appelant fait valoir, dans un acte qui mélange le fait et le droit, que le Tribunal a mal constaté les faits et a violé son droit d'être entendu. Il reproche, au fil d'une argumentation confuse et prolixe, aux différent assistants sociaux du SEASP et à la curatrice de représentation des enfants, d'avoir fait des constatations erronées, de mal rapporter les propos des enfants et de faire preuve d'arbitraire et de partialité en sa défaveur. Les enfants voulaient le voir et parler au téléphone avec lui. La curatrice de représentation faisait "tout pour l'empêcher d'entretenir des relations personnelles normales avec ses enfants" et la curatrice de surveillance du droit de visite "ne respectait pas les décisions de justice". Le nom véritable des enfants était "A______" et non "C______". L'expertise du groupe familial était affectée de nombreux vices et devait être écartée de la procédure. Des documents avaient été dissimulés, les enfants étaient manipulés et aliénés par les différents intervenants et par leur mère.

L'appelant reproche par ailleurs au Tribunal de ne pas avoir statué sur sa conclusion tendant à ordonner au SPOP, respectivement à la Police cantonale vaudoise, de procéder à la suppression immédiate de la dénonciation du 4 janvier 2021 à son encontre, commettant ainsi un déni de justice.

1.1 En vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe au recourant de motiver son appel. Selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique. Même si l'instance d'appel applique le droit d'office
(art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. A défaut, son recours est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 
4A_621/2021 du 30 août 2022 consid. 3.1) 

Ainsi, notamment, lorsque la motivation de l'appel est identique aux moyens qui avaient déjà été présentés en première instance, avant la reddition de la décision attaquée (arrêt 4A_97/2014 du 26 juin 2014 consid. 3.3), ou si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance, elle ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC et l'instance d'appel ne peut entrer en matière (arrêt du Tribunal fédéral 4A_621/2021 du 30 août 2022 consid. 3.1). 

1.2 En l'espèce, l'appel a été déposé en temps utile (art. 314 al. 1 CPC).

Il est suffisamment motivé en tant que l'appelant se plaint de déni de justice en lien avec sa conclusion n° 8 tendant à ce que le Tribunal ordonne au SPOP, respectivement à la Police cantonale vaudoise de procéder à la suppression immédiate de la dénonciation du 4 janvier 2021 à son encontre. L'appel est dès lors recevable en tant qu'il est dirigé contre le ch. 6 de l'ordonnance querellé déboutant les parties de toutes autres conclusions et qu'il concerne la conclusion n° 8 de l'appelant.

La motivation de l'appel en lien avec les autres conclusions prises par l'appelant, notamment le droit de visite et la suppression de la curatelle instaurée le
14 mai 2021, ne correspond par contre pas aux exigences légale. En effet, l'appelant se limite à exposer sa propre version des faits de la cause, sans désigner concrètement quels éléments de fait ou de droit retenus par le Tribunal pour trancher les questions litigieuses à ce stade de la procédure sont erronés et pour quels motifs, pièces à l'appui. Il mélange de manière confuse des allégations de fait, des considérations de nature juridique et des jugements personnels. Il consacre en particulier de longs développement à la critique de l'expertise familiale, alors que le Tribunal ne s'est pas fondée sur celle-ci dans les considérants de la décision litigieuse. Les conclusions n° 3 à 7 de l'appel ainsi irrecevables pour défaut de motivation.

L'appel sera dès lors déclaré irrecevable en tant qu'il est dirigé contre les chiffres 1 à 5 du dispositif de l'ordonnance querellée.

Il sera déclaré recevable pour le surplus.

1.3 La Cour relèvera que, même si l'appel dirigé contre les chiffres 1 à 5 précités avait été recevable, il aurait dû être rejeté.

Comme la Cour l'a déjà relevé dans son arrêt du 21 juin 2022, dont les considérants sont toujours d'actualité, aucun élément concret ne permet de retenir que les enseignants, assistants sociaux et la curatrice des enfants seraient tous partiaux en défaveur de l'appelant ou qu'ils seraient mus par une animosité à son égard les conduisant à effectuer des constatations fausses sur l'évolution des enfants ou les propos tenus par ceux-ci. Les enfants ont été entendus par plusieurs personnes et les propos rapportés par ceux-ci sont concordants et crédibles. Les critiques formulées par l'appelant à l'égard des intervenants précités ne constituent que de simples affirmations de sa part, qui ne sont fondées sur aucun élément probant.

Il ressort de la procédure que, après l'élargissement du droit de visite de l'appelant dès 2019, la situation des enfants s'est dégradée. Leur père les a excessivement impliqués dans le conflit familial, de sorte qu'ils se trouvaient plongés dans un conflit de loyauté, préjudiciable à leur bon développement. Les enfants étaient pris à parti par leur père, et leur entourage social discrédité. Ils étaient tristes et angoissés, ce qui, pour E______, se traduisait notamment par de l'agressivité. Ces difficultés ont nécessité la prise de mesures urgentes, et la réintroduction d'un droit de visite en milieu protégé dès 2021. Depuis, le droit de visite se passe bien et les enfants vont mieux. Ils sont tous les deux rassurés par le fait que, en présence de tiers, leur père se consacre à eux, sans revenir sur ses griefs à l'égard de leur mère ou des services sociaux. Compte tenu du fait que l'équilibre qui a pu être atteint est encore fragile, il est prématuré en l'état de modifier cette situation. Les enfants sont encore petits et il n'est pas établi que l'appelant a pris conscience de la nécessité de les voir pour eux-mêmes, en respectant leurs besoins, sans tenter de les impliquer de manière répétée dans des conflits qui ne sont pas les leurs. Les enfants ont d'ailleurs fait part à leurs thérapeutes de leur besoin de stabilité.

A cela s'ajoute que l'on comprend mal pour quel motif l'appelant a effectué des démarches au Kosovo pour changer le nom de famille des enfants sans l'accord de leur mère et obtenir sur ceux-ci l'autorité parentale exclusive. Cet élément est de nature à raviver les craintes de l'intimée et des intervenants sociaux sur un éventuel risque d'enlèvement. Cette situation est d'autant plus inquiétante que l'appelant n'a jamais versé à la procédure les décisions judiciaires kosovares rendues dans ce cadre.

L'appelant ne forme par ailleurs aucun grief à l'encontre de la curatelle ad hoc instituée par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 14 mai 2021, ni à l'encontre de la limitation de l'autorité parentale en découlant.

Enfin, l'appelant a pu s'exprimer de nombreuses fois sur tous les aspects de la procédure et des rapports fournis, de sorte que son droit d'être entendu a été pleinement respecté. Il a en particulier pu se prononcer sur le rapport du SEASP du 3 mars 2023 à l'occasion de l'audience du Tribunal du 8 mars 2023 et a déposée des déterminations à plusieurs reprises.

Il résulte de ce qui précède que, même si l'appel dirigé contre les ch. 1 à 5 du dispositif de l'ordonnance querellées avait été recevable, ce qui n'est pas le cas, il aurait dû être rejeté, la règlementation des relations personnelle entre l'appelant et ses enfants adoptée par le Tribunal étant conforme aux dispositions légales applicables, notamment à l'art. 273 CC.

2. L'appelant se plaint de déni de justice au motif que le Tribunal n'a pas statué sur sa conclusion tendant à ce qu'il soit ordonné au SPOP, respectivement à la Police cantonale vaudoise, de procéder à la suppression immédiate de la dénonciation du 4 janvier 2021 à son encontre.

2.1 Il y a déni de justice formel (art. 29 al. 1 Cst.) notamment lorsque le juge refuse indûment de se prononcer sur une requête ou sur un moyen de droit qui lui est soumis et dont l'examen relève de sa compétence (ATF 125 III 440 c. 2a,
JdT 1999 II 172). En revanche, lorsque le juge entre en matière et statue formellement sur le moyen de droit qui lui est soumis, il ne peut y avoir de déni de justice formel, mais seulement une violation du droit d'être entendu si la motivation de sa décision ne satisfait pas aux exigences minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst. (arrêt du Tribunal fédéral 4A_30/2017 du 4 juillet 2017
consid. 2.1).  

Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2015 du
20 octobre 2015 consid. 3.1).

Dans la mesure où l'instance précédente a violé des garanties formelles de procédure, la cassation de sa décision est la règle. En outre, les justiciables ont en principe le droit au respect des degrés de juridiction (ATF 137 I 195 consid. 2.7, SJ 2011 I 345).

2.2 En l'espèce, le Tribunal a débouté l'appelant de toutes ses conclusions sur mesures provisionnelles, y compris de sa conclusion tendant à ce qu'il soit ordonné au SPOP, respectivement à la Police cantonale vaudoise, de procéder à la suppression immédiate de la dénonciation du 4 janvier 2021 à son encontre.

Il n'a cependant fourni aucun motif à l'appui de cette décision.

Le droit d'être entendu de l'appelant a ainsi été violé. Le ch. 6 du dispositif de l'ordonnance querellée sera par conséquent annulé et la cause renvoyée au Tribunal pour qu'il statue sur cette question.

3. Les frais judiciaires de l'appel, comprenant les frais de la curatrice en 825 fr., seront fixés à 1'625 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et mis à charge des parties à raison d'une moitié chacune, compte tenu de la nature familiale du litige et de son issue (art. 107 al. 1 let. c CPC).

Les deux parties plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, les frais judiciaires seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève, lequel pourra en réclamer le remboursement ultérieurement aux conditions de l'art. 123 CPC.

Pour les mêmes motifs, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel.

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre le chiffre 6 du dispositif de l'ordonnance OTPI/564/2023 du 15 septembre 2023 rendue par le Tribunal de première instance dans la cause C/9955/2016.

Déclare l'appel irrecevable pour le surplus.

Au fond :

Annule le chiffre 6 du dispositif de l'ordonnance querellée.

Renvoie la cause au Tribunal pour nouvelle décision au sens des considérants.

Confirme l'ordonnance querellé pour le surplus.

Sur les frais :

Met les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 1'625 fr., à charge des parties à raison d'une moitié chacune.

Dit que les frais judiciaires d'appel sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.