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Décisions | Chambre civile

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C/21768/2015

ACJC/1162/2022 du 06.09.2022 sur JTPI/10260/2021 ( OO ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 12.10.2022, rendu le 04.09.2023, CONFIRME, 4A_449/2022
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21768/2015 ACJC/1162/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 6 SEPTEMBRE 2022

 

Entre

A______ SA, sise ______ [VD], appelante d'un jugement rendu par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 16 août 2021, comparant par
Me Frank TIECHE, avocat, Bellefontaine 2, 1003 Lausanne, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

1.             Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé,

2.             Madame C______, domiciliée ______ [GE], autre intimée,

tous deux comparant par Me Lucien LAZZAROTTO, avocat, Siegrist & Lazzarotto, quai des Bergues 23, 1201 Genève, en l'Étude duquel ils font élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/10260/2021, reçu par A______ SA le 17 août 2021, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure ordinaire, a débouté A______ SA de toutes ses conclusions (ch. 1 du dispositif), ordonné au Conservateur du Registre foncier de Genève de procéder à la radiation de l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs inscrite provisoirement en faveur de A______ SA à concurrence de 112'562 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 26 juin 2015 sur la parcelle n° 1______, commune de D______ [GE], propriété de B______ et C______ (ch. 2), mis les frais correspondant du Registre foncier à charge de A______ SA et condamné cette dernière à les rembourser à B______ et C______ (ch. 3), communiqué au Registre foncier le chiffre 2 du dispositif du jugement en vue de son exécution (ch. 4), condamné A______ SA à payer à B______ et C______ 132'964 fr. 10 avec intérêts à 5% l'an dès le 18 décembre 2014 (ch. 5), arrêté les frais judiciaires à 43'246 fr. 50, qu'il a compensés avec les avances fournies et mis à charge de A______ SA à raison de 70% et de B______ et C______ à hauteur de 30%, condamné A______ SA à payer à B______ et C______ 10'476 fr. 05 (ch. 6), condamné A______ SA à payer à B______ et C______ 6'800 fr. TTC à titre de dépens (ch. 7) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

B.            a. Par acte expédié à la Cour le 15 septembre 2021, A______ SA a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, à ce que la Cour réforme le jugement entrepris et condamne B______ et C______, solidairement entre eux, à lui verser 155'065 fr. 55 avec intérêts à 5% l'an dès le 26 juin 2015, ordonne l'inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs d'un montant de 112'562 fr. 75 plus intérêts à 5% l'an dès le 26 juin 2015 sur la parcelle n° 1______ de la Commune de D______, dont B______ et C______ sont copropriétaires, ordonne au conservateur du Registre foncier de Genève de procéder à ladite inscription, condamne B______ et C______, solidairement entre eux, à l'intégralité des frais de première instance et à rembourser en conséquence les avances de frais qu'elle a consenties à hauteur de 19'796 fr. 50 et condamne B______ et C______, solidairement entre eux, à lui verser 28'443 fr. 40 à titre de dépens.

b. Par réponse du 19 novembre 2021, B______ et C______ ont conclu, avec suite de frais et dépens, à la confirmation du jugement entrepris et au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions. A titre subsidiaire, ils ont conclu à ce que la Cour annule le chiffre 5 du dispositif du jugement entrepris et, statuant à nouveau sur ce point, condamne A______ SA à leur payer 110'386 fr. 50 plus intérêts à 5% l'an dès le 18 décembre 2014 et confirme le jugement entrepris pour le surplus.

c. Les parties ont respectivement répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

C. a. A______ SA est une société anonyme ayant son siège à E______ (VD) et dont le but social est notamment l'aménagement et la décoration d'intérieur.

b. B______ et C______ sont copropriétaires par moitié chacun de la parcelle n° 1______ de la Commune de D______, sur laquelle ils ont fait construire une villa de haut standing.

c. Ils ont confié la conception du projet architectural de la construction de cette villa à la société F______ et la direction des travaux à G______ SA – devenue entretemps H______ SA - dont l'un des administrateurs est I______.

d. Le 6 janvier 2014, les époux B______/C______ d'une part et A______ SA d'autre part ont conclu un contrat intitulé "contrat d'entreprise" rédigé à l'entête de G______ SA portant sur la fourniture de parquet pour un prix de 61'871 fr. 02. A°l'article 3 de ce contrat, il était stipulé que "[l]es travaux [étaient] soumis aux normes SIA et règlement en vigueur". Des conditions générales intitulées "Cahier des charges – Conditions particulières des architectes" – lesquelles prévoyaient expressément l'application de la norme SIA-118 – ont été intégrées à ce contrat. Ce contrat stipulait en outre une "participation au compte prorata 1,5% et assurances 0.4% sur le montant HT de la facture vérifiée après rabais", ainsi que l'application d'une retenue de garantie de 10% pour les travaux n'excédant pas 200'000 fr. et de 5% en cas de coût supérieur des travaux.

e. Le 20 mars 2014, A______ SA a transmis à G______ SA une liste de prestations intitulée "offre de base" portant sur la pose du parquet, la confection de divers agencements, meubles, boiseries et escaliers. Le prix total pour ces prestations, incluant les études techniques, soumissions, plans de détails et plans d'exécution, s'élevaient à 488'665 fr. HT, soit 527'758 fr. 20 TTC.

f. Des acomptes ont été payés à A______ SA par les époux B______/C______ du 1er°avril au 18 décembre 2014.

g. Les travaux ont débuté au mois de mai 2014.

A______ SA a sous-traité une partie de la réalisation de l'ouvrage à [l'entreprise] J______, dont le siège se situe à Berne, et à K______ LDA dont le siège se situe au Portugal.

h. Le 6 octobre 2014, les époux B______/C______ ont emménagé dans la villa.

i. Le 10 octobre 2014, les époux BARBIR et direction des travaux ont établi un procès-verbal de réception de l'ensemble de la villa, lequel comprenait une liste de retouches, dont certaines concernaient A______ SA. Par courriel du 14 octobre 2014, la direction des travaux a adressé cette liste de retouches à A______ SA, lui indiquant ce qui suit : "[s]uite à la réception de la villa en date du 10 octobre 2014, vous trouverez ci-jointe la liste des retouches vous incombant accompagnée des plans vous indiquant l'emplacement des retouches numérotées ainsi que des photos représentatives". Parmi les éléments apparaissant dans cette liste, figuraient notamment la non-conformité du dressing, la pose insatisfaisante des espaliers dans la salle de fitness ainsi qu'une longue liste de retouches et de finitions à effectuer sur différents meubles et portes.

Après que certaines retouches ont été effectuées, en novembre 2014, la liste des retouches incombant à A______ SA a été mise à jour, précisant les retouches qui avaient été exécutées et les délais d'intervention pour celles restant à effectuer.

Entre le 10 octobre 2014 et le 13 mars 2015, A______ SA a encore procédé à certaines retouches.

j. Le 19 novembre 2014, A______ SA a établi une offre portant sur des éléments complémentaires, laquelle a été acceptée.

k. Dans un procès-verbal de réception des travaux de son sous-traitant K______ LDA du 12 mars 2015, A______ SA a ajouté une note manuscrite précisant que "l'ensemble du chantier sera réceptionné en présence de l'architecte responsable du projet architectural (bureau F______) ainsi que l'architecte en charge de la direction des travaux Mr I______ une fois l'ensemble des retouches demandées réalisées".

Par courriel du 14 avril 2015, A______ SA a transmis aux époux B______/C______ la liste des retouches évoquées lors de la réception des travaux en novembre 2014, complétée de mentions distinguant les réfections déjà effectuées de celles restant à faire, en précisant qu'elle serait en mesure d'y procéder dans les deux semaines à venir.

l. Par courrier du 10 juin 2015 aux époux B______/C______, A______ SA a notamment indiqué qu'un montant de plus de 130'000 fr lui était encore dû, que le retard de livraison de l'ouvrage était imputable à leur attitude mais que les retouches demandées seraient néanmoins effectuées.

Le même jour, A______ SA a adressé trois factures aux époux B______/C______, soit :

-          une facture finale d'un montant total de 527'758 fr. 20, dont le solde s'élevait à 84'880 fr. 20 TTC compte tenu des acomptes versés ;

-          une facture "éléments complémentaires" d'un montant total de 27'682 fr. 55 TTC ;

-          une facture finale des plus-values d'un montant total de 56'088 fr. 05, dont le solde s'élevait à 21'791 fr. compte tenu des acomptes versés

m. Par courrier du 18 juin 2015 à A______ SA, les époux B______/C______ se sont plaints de la lenteur des actions entreprises pour l'exécution des travaux de finition, ont accusé réception des factures et ont proposé de mettre sur pied une réception complète de leur travail en présence du bureau F______, afin de pouvoir envisager une clôture tant technique que financière du dossier.

Le 26 juin 2015, A______ SA a adressé à B______ deux rappels concernant respectivement la "facture finale" et la facture "éléments complémentaires" visées ci-avant, lui impartissant un délai de cinq jours pour s'en acquitter à défaut de quoi l'inscription d'une hypothèque légale serait requise.

n. Dans le cadre d'une expertise privée établie le 30 juin 2015 à la demande de la direction des travaux, L______ a relevé que certaines retouches ou améliorations devaient être réalisées pour donner satisfaction au maître d'ouvrage, que le choix des matériaux n'était pas à la hauteur de la qualité de cette construction, s'agissant notamment de certains ferrements, qui faisaient plus penser à une qualité industrielle qu'à une conception haut de gamme.

o. Par courrier adressé le 14 juillet 2015 aux époux B______/C______, A______ SA a indiqué que "concernant la norme SIA 118, il ne nous semble pas être relié à cette dernière contractuellement, comme nous ne l'avons pas intégrée aux contrats".

Par courrier du 27 juillet 2015, la direction des travaux a convoqué A______ SA à une séance de réception des travaux le 27 août 2015. Par courrier du 14 août 2015, A______ SA a pris bonne note de la date fixée pour la réception des travaux.

p. Le 27 août 2015, une réunion s'est tenue dans la villa en présence des parties, de leurs conseils respectifs, de la direction des travaux et de F______, afin de relever les défauts persistants. Cet objectif n'a pu être atteint.

q. Dans un document daté du 8 septembre 2015, la direction des travaux a établi un décompte des prestations, incorporant notamment les déductions suivantes : déduction assurance de 0,4%; déduction prorata de 1,5%; retenue de garantie de 10%.

r. Une deuxième séance de réception s'est tenue le 15 septembre 2015. A cette occasion, une "liste des réserves" comportant 33 points a été dressée et signée par les parties, la direction des travaux et F______.

s. Le 23 septembre 2015, A______ SA a adressé à B______ la liste des réparations évoquées durant la séance du 15 septembre 2015, décrivant pour chaque poste devant donner lieu à réparation le temps nécessaire pour chaque tâche, ainsi que le prix y relatif. Au pied de cette liste, elle a exposé que la durée globale des travaux allait se situer entre deux et trois semaines, voire plus en fonction des matériaux à commander, et nécessiter quatre ouvriers. Le coût total des travaux s'élèverait à 30'825 fr. Elle a également indiqué que la liste avait été établie à bien plaire dans le cadre de discussions transactionnelles et que, par conséquent, elle ne valait pas reconnaissance des défauts.

A______ SA n'a pas procédé à ces travaux.

D. a. Sur requête de A______ SA du 30 juin 2016, l'inscription d'une hypothèque légale d'artisans et entrepreneurs pour un montant total de 112'562 fr. 75 plus intérêts à 5% l'an à compter du 26 juin 2015 sur la parcelle des époux B______/C______, correspondant au solde de la facture finale en 84'880 fr. 20 TTC et à la facture pour les éléments complémentaires en 27'682 fr., a été ordonnée par le Tribunal le 6 juillet 2016 à titre superprovisionnel. Elle a été confirmée le 14 septembre 2016 sur mesures provisionnelles, un délai de 30 jours ayant été imparti à A______ SA pour valider ces mesures.

b. Par acte déposé au Tribunal le 19 octobre 2015, A______ SA a requis l'inscription définitive en sa faveur d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs d'un montant de 112'562 fr. 75, plus intérêts à 5% l'an dès le 26 juin 2016 et accessoires légaux en sa faveur sur le bien-fonds n° 1______ de la commune de D______, propriété de B______ et C______, sous suite de frais et dépens.

Cette procédure a été suspendue du 22 mars 2016 au 30 septembre 2016.

c. Par acte déposé au Tribunal le 3 juin 2016 après échec de la tentative de conciliation requise le 19 octobre 2015, A______ SA a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, à ce que B______ et C______ soient condamnés solidairement à lui verser 155'065 fr. 55 plus intérêts à 5% l'an dès le 26 juin 2015.

d. Le 30 septembre 2016, le Tribunal a ordonné la jonction des deux procédures en inscription d'hypothèque d'artisans et d'entrepreneurs et en paiement opposant les mêmes parties.

e. Par réponse et demande reconventionnelle du 19 décembre 2016, les époux B______/C______ ont demandé à la Cour d'ordonner la radiation de l'inscription provisoire de l'hypothèque légale, de constater qu'ils étaient libérés de toute obligation pécuniaire à l'égard de A______ SA, d'ordonner une expertise sur l'existence de défaut affectant l'ouvrage et de leur impartir un délai après réception du rapport de l'expert pour d'éventuelles conclusions en paiement à l'encontre de A______ SA.

f. Les parties ont respectivement répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

g. Le Tribunal a entendu les parties, ainsi que les témoins M______, I______, N______, O______.

Il a ordonné une expertise judiciaire confiée à P______, architecte, puis a chargé Q______, ébéniste, d'un complément d'expertise. L'expert P______ a établi son rapport d'expertise le 18 décembre 2017 qu'il a rectifié par courrier du 1er mars 2018, puis a été entendu par le Tribunal les 5 mars et 12 avril 2018. L'expert Q______ a rendu son rapport le 22 mai 2020 et été entendu par le Tribunal le 2 novembre 2020.

h. Dans leur écriture déposée le 26 juin 2020 après l'établissement des rapports d'expertises judiciaires, les époux B______/C______ ont pris à l'encontre de A______ SA des conclusions en paiement de 191'410 fr. 65 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er septembre 2014, au titre de moins-value à déduire des montants versés pour les travaux effectués.

i. Le 24 septembre 2020, A______ SA a conclu au rejet des conclusions reconventionnelles prises par les époux B______/C______.

j. Dans le cadre de leurs écritures de plaidoiries finales du 30 avril 2021, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

E. a. Dans son rapport d'expertise judiciaire, l'expert P______ a retenu que le coût total des travaux exécutés par A______ SA, hors fourniture du parquet, s'élevait à 540'897 fr. 90 TTC, correspondant à 500'831 fr. 40 HT, TVA de 8% en sus.

Pour parvenir à cette somme, l'expert a estimé le coût des travaux puis déduit un montant de 35'570 fr. en raison des travaux réalisés de manière non conforme aux règles de l'art.

Pour parvenir à ce montant, il a chiffré le coût des travaux avant déductions diverses à 512'508 fr., dont il a déduit divers montants, notamment la somme de 35'570 fr. au titre de déduction "pour travaux non conformes aux règles de l'art". Il a retenu que des acomptes avaient été payés à hauteur de 477'878 fr. TTC, de sorte que les époux B______/C______ étaient débiteurs d'un solde de 63'019 fr. 90 TTC. La déduction de 35'570 fr. HT était opérée car plusieurs prestations n'avaient pas été exécutées selon les règles de l'art. Des interventions étaient proposées pour corriger les défauts, sous réserve des défauts affectant respectivement le "totem" et la porte d'entrée pour lesquels un dédommagement était privilégié car les réparations s'avéreraient probablement moins satisfaisantes que les malfaçons.

Lors de son audition par le Tribunal, l'expert a précisé, s'agissant des portes de communication, que les charnières installées ne pouvaient pas supporter le poids des battants et que les entailles servant à l'installation des charnières ne correspondaient pas à la taille des charnières, ce qui constituait un défaut. Le prix des charnières "tectus" n'avait pas été inclus dans son expertise. Il a souligné que les panneaux de bois des armoires n'étaient pas supposés se déformer et que des tendeurs avaient dû être installés en raison de l'inadéquation des panneaux, ce qui représentait également un défaut. Le "totem" avait été fabriqué à partir de deux panneaux, alors que les plans prévoyaient la réalisation en un seul panneau. Concernant le dressing, il a expliqué que le plan établi par le premier architecte n'avait pas été respecté, induisant le problème de hauteur. Les frais de réparations avaient été déterminés par un ébéniste auquel avaient été soumis les plans et photographies du rapport. Il ne lui apparaissait pas opportun de compléter l'expertise technique en dépêchant sur place un professionnel afin qu'il puisse valider l'estimation des prix faite par un artisan n'ayant pas examiné l'ouvrage. S'agissant du dressing, il fallait selon l'expert remplacer deux armoires sur quatre afin d'éliminer la problématique des chemises froissées.

b. Dans son rapport d'expertise judiciaire complémentaire, l'expert Q______ a relevé que certains des ouvrages exécutés par A______ SA présentaient des défauts et n'avaient pas été réalisés selon les règles de l'art. Il a estimé le coût de réparation de ces défauts à 211'822 fr. TTC.

Lors de son audition du 2 novembre 2020, l'expert Q______ a précisé que son mandat portait sur les défauts en tant que tels et non pas sur les plus-values demandées par les époux B______/C______. Il s'était écarté des constats de l'expert P______ s'agissant des solutions totales ou partielles de réparations ainsi que sur l'origine des problèmes relevés, expliquant qu'en raison de leur formation respective d'architecte et d'ébéniste, les deux experts n'avaient pas les mêmes visions, notamment quant à la connaissance du bois. Il prenait comme exemple une réparation proposée par l'expert P______ pour une gâche trop petite par du silicone, ce qui constituait à ses yeux du bricolage et ne correspondait pas aux règles de l'art. S'agissant de l'estimation des travaux, la correction des défauts comportait 4 étapes, soit l'intervention d'un bureau technique (a), le coût des matériaux (b), la fabrication (c) et l'installation cas échéant complétée par la désinstallation (d). Pour les postes a, c et d, un tarif moyen entre 120 fr. et 125 fr. de l'heure, qui correspondait au taux horaire pratiqué dans la profession, avait été retenu. Dans son expertise, il avait inclus dans le montage deux heures aller-retour de déplacement. Il n'avait en revanche pas procédé par regroupement pour le bureau technique.

c. Les déclarations des témoins et des parties recueillies par le Tribunal font ressortir ce qui suit :

c.a M______, sous-traitant ayant œuvré sur le chantier pour le compte de A______ SA, entendu en qualité de témoin, a déclaré que les travaux avaient débuté en mai 2014 et s'étaient achevés en mars 2015, sans qu'il n'y ait de remise formelle avec l'architecte et les clients. La direction des travaux avait établi à tout le moins deux listes de retouches, peut-être trois. Il n'y avait pas eu de contrat signé entre les parties et la norme SIA-118 n'avait pas été intégrée. Lors de la séance dans les bureaux de I______ pour déterminer le solde dû pour les travaux, celui-ci avait confirmé que la norme SIA-118 ne s'appliquait pas à la relation contractuelle. La question avait été posée à I______ car il avait établi son décompte en application de cette norme. M______ a déclaré n'avoir pas participé à l'élaboration du contrat du 6 janvier 2014 qui était effectivement soumis à la norme SIA-118, mais il en avait connaissance. Pour lui, la question de l'application de la norme SIA-118 s'était posée pour la première fois lors de la séance avec I______. A cette occasion, celui-ci avait indiqué qu'elle ne s'appliquait pas. Le chantier était particulièrement difficile compte tenu du nombre d'intervenants et du manque de coordination par les responsables du chantier. B______ avait demandé de nombreuses modifications jusqu'à fin décembre 2014, ce qui avait eu des conséquences sur la qualité des meubles et leur fonctionnalité. Il ne parvenait pas à donner d'exemples concrets. A sa connaissance, les époux B______/C______ n'avaient annoncé aucun défaut à l'exception de la problématique des chemises. Les retouches indiquées sur les listes – qui ne constituaient pas des défauts – avaient été effectuées.

c.b R______, directeur de A______ SA entendu en qualité de partie, a déclaré que la norme SIA-118 n'avait jamais été intégrée dans la relation contractuelle avec les époux B______/C______. Le contrat sur la fourniture de parquet intégrait la norme SIA-118, sans toutefois qu'il puisse en expliquer les raisons. Aucune discussion concernant l'intégration de cette norme n'était intervenue entre les parties, ni à ce moment-là, ni ultérieurement. Lors d'une séance tenue en septembre 2015, I______ avait présenté un document avec les déductions prévues par la norme SIA-118. Le témoin s'en était étonné. I______ lui avait répondu qu'il était conscient que la norme SIA-118 n'avait pas été intégrée au contrat, mais demandait qu'elle soit intégrée après-coup au moment du décompte final, ce qu'il avait refusé. Il confirmait avoir reçu la liste des retouches du 10 octobre 2014, à l'exclusion toutefois du procès-verbal de réception de l'ouvrage. Il n'avait en revanche jamais reçu les projets de contrat ni le document intitulé "liste des retouches à effectuer au 1er novembre 2014". Il confirmait avoir reçu le document intitulé "liste des retouches à effectuer au 18 novembre 2014" sur lequel il avait apposé des annotations manuscrites, et notamment signé la mention "fait" à côté des retouches effectuées. A la suite de la réception des travaux de A______ SA, il n'avait pas reçu de liste ou d'avis de défauts, mais seulement les listes de retouches précitées. Au 10 octobre 2014, les travaux étaient encore en cours. Il restait en particulier à terminer l'agencement du bureau sur la passerelle, les banquettes dans le wellness, l'agencement des armoires du hall d'entrée donnant dans le parking ainsi que la porte d'accès à celui-ci, la fabrication sur mesure des poignées de porte de la cage d'escalier. Cela représentait environ 20 à 25% de la totalité des travaux.

c.c Entendu en qualité de partie, B______, a déclaré que I______ lui avait précisé qu'il était nécessaire de conclure des contrats avec l'ensemble des intervenants. Il était lui-même inexpérimenté, car il s'agissait de sa première construction. I______ s'était occupé de la gestion des aspects juridiques. B______ avait emménagé dans la maison le 5 ou 6 octobre 2014, qui était alors habitable même si de nombreux problèmes persistaient. Il avait par la suite demandé des travaux complémentaires à A______ SA en novembre 2014. S'agissant de ses relations contractuelles avec A______ SA, il avait signé deux contrats distincts, dont l'un portait uniquement sur la commande du parquet.

c.d I______, administrateur de l'entreprise chargée de la direction des travaux, entendu en qualité de témoin, a déclaré avoir établi un contrat écrit à la demande de A______ SA concernant la fourniture du parquet qui avait été signé par les parties. Pour le solde des travaux, des discussions étaient intervenues entre les parties et les montants avaient été arrêtés d'un commun accord. Le témoin n'avait retrouvé aucun contrat signé mais seulement un projet de contrat. Il ne savait pas si celui-ci avait été transmis à A______ SA. L'ensemble des contrats de constructions qu'il avait établis pour les époux B______/C______ avaient été basés sur le même modèle et incluaient des retenues de garantie propres aux normes SIA-118. Il ignorait si ces documents contenaient une référence expresse auxdites normes. De son point de vue, la norme SIA-118 s'appliquait aux relations contractuelles entre les époux B______/C______ et les artisans. Les retenues et délais de garantie de la norme SIA-118 avaient été appliqués à tous les intervenants, qu'il y ait ou non un contrat écrit. S'agissant de A______ SA, il se souvenait que le contrat de fourniture du parquet incorporait la norme SIA-118, mais il ne pensait pas en avoir discuté avec le responsable de A______ SA puisque l'intégration desdites normes était implicite pour ce type de travaux. Il ne se souvenait pas si le paiement de l'acompte ou de la facture finale pour la fourniture du parquet avait fait l'objet des retenues SIA précitées. Il affirmait que, dans tous les cas, il opérait la déduction de 10% de garantie sur le versement des acomptes. Il n'avait pas souvenir que la question de l'application de la norme
SIA-118 ait été abordée avec R______ lors de la séance du 8 septembre 2015 portant sur le décompte final, mais il était vraisemblable que la question des retenues y ait été abordée. Sur présentation du contrat concernant la fourniture du parquet, il a relevé que les proratas, garanties et assurances qui résultent des nomes SIA y étaient expressément mentionnés. Aucune retenue n'était prélevée sur le montant de 61'871 fr. 02 mentionné dans le contrat de fourniture du parquet et repris ensuite dans les acomptes reçus sur le décompte final du 8 septembre 2015, mais les retenues SIA avaient été opérées sur le montant global des travaux exécutés par A______ SA. S'agissant de la liste des retouches du 10 octobre 2014, il s'agissait d'un procès-verbal de réception établi sans les entreprises avant l'entrée dans les locaux. Le listing énumérait l'ensemble des points qui devaient être améliorés ou terminés, selon ce qui était visible. Cette liste avait été envoyée à l'ensemble des entreprises concernées. Il n'avait pas le souvenir que A______ SA ait refusé d'effectuer des retouches requises, mais elle avait parfois rencontré des difficultés à intervenir sur des agencements construits par un sous-traitant étranger.

c.e. N______, architecte chargé de la conception architecturale du projet entendu comme témoin, a déclaré ne pas avoir participé à l'élaboration des contrats et ignorer si les contrats conclus entre les parties étaient soumis à la norme SIA-118.

F. Dans la décision querellée, le Tribunal a considéré que les parties avaient intégré la norme SIA-118 à leur relation contractuelle. Il a retenu que le contrat passé le 6 janvier 2014 portant sur la fourniture de parquet prévoyait expressément l'application de cette norme, que lors de son audition, le directeur de A______ SA n'avait pas pu expliquer pour quelles raisons ce contrat faisait mention de cette norme, qu'il était peu probable que les parties n'entendaient pas l'appliquer pour la confection dudit parquet, ce qui aurait constitué un non-sens puisque cette norme réglait les travaux de construction. Enfin, dans son décompte final, A______ SA avait appliqué les retenues prévues par la norme SIA-118.

Sur la base de l'expertise établie par l'expert P______, le Tribunal a retenu que le prix global des travaux effectués par A______ SA s'élevait à 540'897 fr. 90, après déduction du montant de 35'570 fr. correspondant à la moins-value relative aux travaux n'ayant pas été exécutés dans les règles de l'art. Après imputation des acomptes versés à hauteur de 477'878 fr., le solde du prix de l'ouvrage s'élevait ainsi à 63'019 fr. 90.

S'agissant des conclusions reconventionnelles en réduction du prix de l'ouvrage, le Tribunal a retenu, en se fondant sur l'expertise de Q______, que la moins-value affectant l'ouvrage s'élevait à 195'985 fr., correspondant à la somme de 211'822 fr. retenue par l'expert, sous déduction de 13'858 fr. pour la porte coulissante et de 1'980 fr. pour les frais de déplacement.

Dans la mesure où la moins-value affectant l'ouvrage était supérieure au solde du prix restant dû, le Tribunal a libéré les époux B______/C______ de tout paiement à l'égard de A______ SA, qui a été déboutée de sa requête en inscription définitive d'une hypothèque légale et condamnée au versement de 132'964 fr. 10 correspondant à la moins-value retenue sous déduction du solde du prix de l'ouvrage (195'985 fr. – 63'019 fr. 90).


 

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement attaqué constitue une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). La voie de l'appel est ouverte, dès lors que la valeur litigieuse au dernier état des conclusions de première instance est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

L'appel doit être introduit par écrit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC).

Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, l'appel doit être motivé. Pour satisfaire à cette obligation de motivation, l'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_356/2020 du 9 juillet 2020, consid. 3.2). L'appelant doit tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner simplement à reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. Si ces conditions ne sont pas remplies, l'appel est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_356/2020 du 9 juillet 2020, consid. 3.2).

1.2 En l'espèce, ayant été formé en temps utile auprès de l'autorité compétente (art. 311 al. 1, 145 al.1 let b CPC et 120 al. 1 let. a LOJ), l'appel est recevable dans la limite des griefs que l'appelante fait valoir à l'égard du jugement querellé en motivant à satisfaction de droit ses critiques à l'égard dudit jugement.

Il ne sera en revanche pas entré en matière sur les arguments qu'elle fait valoir en se limitant à reprendre sur de nombreuses pages son argumentation présentée dans ses plaidoiries finales écrites de première instance, sans émettre de critique précise à l'encontre de la motivation de la décision querellée, ce procédé ne satisfaisant pas aux exigences de motivation.

2. La Chambre de céans revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

3. L'appelante soutient que le jugement querellé violerait son droit d'être entendue puisque la motivation du jugement ne traiterait pas des différents arguments qu'elle avait présentés dans ses plaidoiries finales.

3.1 Garanti aux art. 29 al. 2 Cst et 53 CPC, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur sujet (ATF 135°II°286 consid. 5.1; 135 I 187 consid. 2.20; 129 II 497 consid. 2.2).

Le droit d'être entendu impose également au juge de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse en saisir la portée et, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause. Pour répondre à cette exigence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 137 II 266 consid. 3.2; 136 I 229 consid. 5.2). Il n’a pas l’obligation d’exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_10/2021 du 1er juillet 2021 consid. 3.2.2 et 5A_19/2020 du 18 mai 2020 consid. 6). Il n’y a violation du droit d’être entendu que si l’autorité n’a pas satisfait à son devoir minimum d’examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 135 III 670 consid. 3.3.1; 133 III 235 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_609/2012 du 12 septembre 2012 consid. 3.1). L’essentiel est que la décision indique clairement les faits qui sont établis et les déductions juridiques qui sont tirées de l’état de fait déterminant (ATF
142 II 154 consid. 4.2 ; 135 II 145 consid. 8.2). En revanche, l’autorité se rend coupable d’un déni de justice formel si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 142 III 433 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_10/2021 précité).

3.2 En l'espèce, le premier juge a motivé sa décision en indiquant les faits qui l'ont conduit à retenir que les parties avaient intégré la norme SIA-118 à leur relation contractuelle. Il n'était, pour le surplus, pas tenu de discuter l'ensemble des arguments invoqués par l'appelante. Le droit d'être entendue de l'appelante a en conséquence été respecté.

4. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir retenu que la norme SIA-118 était applicable à la relation contractuelle liant les parties.

4.1.1 La norme SIA-118 (Conditions générales pour l'exécution des travaux de constructions) émane d'un organisme privé et s'applique uniquement si les parties ont convenu de l'intégrer à leur contrat (ATF 118 II 295 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_156/2018 du 24 avril 2019 consid. 3). Cette intégration peut résulter soit d'un accord exprès, soit d'un accord tacite. Elle découle souvent d'un simple renvoi aux dispositions de cette norme. Savoir si les parties ont intégré ou non la norme SIA-118 à leur contrat dépend de l'interprétation de leurs volontés (art. 1 et 18 CO; arrêts du Tribunal fédéral 4A_667/2016 du 3 avril 2017 consid. 3.2; 4A_106/2015 du 27 juillet 2015 consid. 5.1 et 5.2).

4.1.2 En présence d'un litige sur l'interprétation d'un contrat, le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2; ATF 132 III 626 consid. 3.1; ATF 131 III 606 consid. 4.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 118 II 365 consid. 1; ATF 112 II 337 consid. 4a). L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait (ATF 118 II 365 consid. 1; pour un résumé de la jurisprudence sur l'interprétation, cf. les arrêts du Tribunal fédéral 4A_508/2016 du 16 juin 2017 consid. 6.2, non publié aux ATF 143 III 348; 4A_98/2016 du 22 août 2016 consid. 5.1; 4A_608/2016 du 30 mai 2017 consid. 2.4). Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises (arrêt du Tribunal fédéral 4A_155/2017 du 12 octobre 2017 consid. 2.3).art. 18 al. 1 CO; ATF 140 III 86 consid. 4.1; 135 III 410 consid. 3.2).

Le sens d'un texte, apparemment clair, n'est pas forcément déterminant, de sorte que l'interprétation purement littérale est prohibée (art. 18 al. 1 CO). Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît limpide à première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que le texte de ladite clause ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu (ATF 130 III 417, consid. 3.2; ATF 129 III 118 consid. 2.5; ATF 127 III 444 consid. 1b). Il n'y a cependant pas lieu de s'écarter du sens littéral du texte adopté par les intéressés lorsqu'il n'y a aucune raison sérieuse de penser qu'il ne correspond pas à leur volonté (ATF 129 III 118 consid. 2.5; ATF 128 III 265 consid. 3a).

Si le juge ne parvient pas à dégager une intention réelle commune ou s'il constate que les volontés, sans que les parties l'aient su, étaient divergentes, il doit interpréter les comportements et les déclarations des parties selon la théorie de la confiance, en recherchant comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi par le cocontractant en fonction de l'ensemble des circonstances (interprétation dite objective; ATF 136 III 186 consid. 3.2.1;
133 III 675 consid. 3.3; 131 III 606 consid. 4.1). Le principe de la confiance permet d'imputer à une partie le sens objectif de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 130 III 417 consid. 3.2.;
129 III 118 consid. 2.5; arrêt du Tribunal fédéral 4A_66/2016 du 22 août 2016 consid. 4.1.2). La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit; pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait. Les circonstances déterminantes à cet égard sont uniquement celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, mais non pas les événements postérieurs (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 4A_155/2017 précité consid. 2.3).

4.1.3 Aux termes de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. La preuve doit ordinairement être rapportée de façon à ce que le fait soit considéré comme certain, établi, sans aucun doute possible. Un doute infime, qui n'est pas de nature à empêcher l'acquisition d'une certitude, n'est pas décisif à ce point de vue : la certitude doit être déduite d'une vraisemblance tellement forte qu'elle confine à la certitude. La certitude est acquise lorsqu'un doute raisonnable n'est plus permis, ce qui paraît plus exigeant qu'une seule haute vraisemblance (Piotet, Commentaire Romand CC I, 2010, n. 26 ad art. 8).

4.2 En l'espèce, les parties ont conclu un premier contrat le 6 janvier 2014 portant sur la fourniture du parquet. Dans ce contrat passé par écrit, elles ont expressément incorporé la norme SIA-118, comme cela ressort du texte du contrat, de ses annexes et des déclarations concordantes des parties devant le Tribunal. Elles ont en outre spécifiquement prévu l'application des déductions usuelles prévues par la norme SIA-118 (1,5% de prorata, 0,4% d'assurance, et 10% de retenue garantie). Leur volonté d'intégrer cette norme à leur relation contractuelle résulte ainsi du texte clair du contrat écrit qu'elles ont passé pour la fourniture du parquet.

Par la suite, le 20 mars 2014, A______ SA a adressé une liste des prestations intitulée "offre de base", comportant la pose du parquet et la confection de différents agencements, meubles, boiseries et escaliers, qui ne mentionne pas l'application de la norme SIA-118 ou d'autres normes SIA, ni ne fait application des retenues prévues par cette norme. Cette offre a été oralement acceptée par les intimés.

Le litige porte ainsi sur la question de savoir si l'intégration de la norme SIA-118 prévue dans le contrat passé le 6 janvier 2014 s'étend également aux prestations sur lesquelles les parties se sont accordées par l'acceptation de l'offre du 20 mars 2014.

Il apparaît manifeste, aux termes de l'instruction, que la direction des travaux, représentant alors les intimés, avait l'intention d'intégrer la norme SIA-118 dans la relation contractuelle avec A______ SA. En effet, une telle stipulation ressort des conditions générales du bureau d'architecte en charge de la direction des travaux, ce qui démontre l'usage de ce bureau d'intégrer ladite norme aux relations contractuelles avec les entrepreneurs. Un tel usage a d'ailleurs été confirmé par I______ dont les déclarations devant le Tribunal montrent qu'il tenait l'intégration de cette norme pour évidente, qu'il y ait ou non un contrat écrit.

Quant à l'appelante, elle a accepté, s'agissant du contrat de fourniture du parquet, de le soumettre à la norme SIA-118 et a signé à cette occasion les conditions générales qui lui étaient présentées par la direction des travaux qui stipulaient l'incorporation de ladite norme. Cela étant, aucun élément ne permet de conclure qu'elle avait la volonté d'incorporer cette norme à l'ensemble de sa relation contractuelle avec les intimés. Cette question n'a pas été discutée entre les parties et les offres et demandes d'acomptes présentées par l'appelante ne font pas application des retenues prévues par cette norme. En outre, comme le relève l'appelante à juste titre, le premier juge a, à tort, retenu que l'appelante avait elle-même appliqué les déductions et retenues prévues par la norme SIA-118 dans son décompte final du 8 septembre 2015, dès lors que ce décompte a été établi par la direction des travaux. A réception de ce décompte, l'appelante a réagi pour contester l'application de ladite norme. Ces circonstances ne permettent pas de retenir une volonté concordante des parties d'intégrer la norme SIA-118 à leur relation contractuelle.

L'interprétation selon la théorie de la confiance conduit à retenir que les intimés pouvaient de bonne foi comprendre que l'offre qui leur avait été faite par l'appelante le 20 mars 2014 était soumise à cette norme. Cette offre portait sur la pose du parquet et la confection de divers meubles et agencements et s'inscrivait ainsi dans la continuité de la relation contractuelle formalisée par contrat du 6°janvier 2014 qui intégrait la norme SIA-118. Le contrat signé le 6 janvier 2014, qui ne portait que sur la fourniture du parquet, ne relevait pas du contrat d'entreprise auquel la norme SIA-118 pouvait s'appliquer. L'incorporation de cette norme à ce premier contrat ne pouvait ainsi qu'être comprise comme ayant vocation à s'appliquer également aux prestations relevant du contrat d'entreprise que les parties allaient envisager ultérieurement, notamment quant à la pose envisagée du parquet dont la fourniture faisait l'objet du contrat initial du 6 janvier 2014. Dans ces circonstances, les intimés, soit pour eux la direction des travaux qui les représentait, pouvaient légitimement comprendre l'offre de l'appelante du 20 mars 2014 comme reprenant l'ensemble des conditions stipulées dans le contrat écrit qu'ils avaient conclu précédemment avec cette dernière, soit notamment l'intégration de la norme SIA-118.

Enfin, l'appelante ne saurait être suivie lorsqu'elle fait grief au premier juge d'avoir violé la maxime des débats en retenant l'application de la norme SIA-118 en l'absence d'allégués des intimés : ces derniers ont, dans leur réponse du 19°décembre 2016, allégué avoir passé avec l'appelante un contrat d'entreprise soumis à ces normes SIA. L'appelante n'expose pour le surplus pas quel fait dans le jugement querellé aurait été retenu en violation de la maxime des débats, se contentant de citer son argumentation de première instance.

En définitive, l'interprétation objective selon le principe de la confiance conduit à retenir que la norme SIA-118 a été intégrée aux rapports contractuels liant les parties.

Le grief soulevé par l'appelante n'est ainsi pas fondé.

5. L'appelante fait par ailleurs grief au premier juge d'avoir retenu que les intimés l'avaient avisée des défauts de manière conforme et en temps utile.

5.1 En dérogation aux dispositions légales, la norme SIA-118 instaure un délai de garantie de deux ans durant lequel le maître peut faire valoir en tout temps les défauts, de quelque nature qu'ils soient (art. 172 ss SIA-118). Pendant le délai de dénonciation des défauts, c'est-à-dire dans les deux ans à compter de la réception de l'ouvrage (art. 172 al. 2 SIA 118), tout avis des défauts l'est à temps, quel que soit le moment auquel le maître a découvert le défaut signalé. A l'expiration de ce délai, le maître perd le droit d'invoquer les défauts qu'il a découverts pendant cette période. La direction des travaux doit toutefois procéder avec l'entrepreneur à la vérification de l'ouvrage dans le délai d'un mois à compter de la réception de l'avis d'achèvement des travaux (art. 158 al. 2 SIA-118).

L'avis des défauts n'est soumis à aucune exigence de forme particulière. Il faut toutefois qu'il indique exactement quels sont les défauts découverts. Il doit par ailleurs exprimer l'idée que la prestation n'est pas conforme au contrat et que le maître de l'ouvrage tient l'entrepreneur pour responsable des défauts constatés (ATF 107 II 172 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_667/2016 du 3 avril 2017 consid. 3). L'essentiel est que l'entrepreneur comprenne sans hésitation que le maître entend s'en prendre à lui sur la base de sa responsabilité du fait des défauts. En règle générale, la simple communication des défauts implique déjà que le maître tient l'entrepreneur pour responsable; il n'en va autrement qu'en présence de circonstances particulières, par exemple lorsque le maître signale les défauts dans le seul but de mettre en garde l'entrepreneur pour l'avenir (arrêt du Tribunal fédéral 4A_293/2017 du 13 février 2018 consid. 2.2.2 et les références citées).

5.2 En l'espèce, un premier avis des défauts a été adressé à l'appelante par la direction des travaux le 14 octobre 2014. La liste des défauts a ensuite été mise à jour en novembre 2014. Suite à l'établissement de ces listes, l'appelante a procédé à certaines retouches.

Après l'avoir déjà proposé par courrier du 18 juin 2015, la direction des travaux a, par courrier du 27 juillet 2015, convoqué une séance de réception des travaux qui s'est tenue les 27 août et 15 septembre 2015. A cette occasion une liste de réserves comportant 33 points a été dressée et signée par les parties.

Tant la liste de retouches du 10 octobre 2014 que la liste des réserves établie à la suite des séances de réception des 27 août et 15 septembre 2015 satisfont à l'exigence matérielle d'un avis des défauts. Elles contiennent une description précise des défauts soulevés, et l'utilisation par les intimés des expressions "les retouches vous incombant" dans la liste du 10 octobre 2014 ou les plaintes formulées quant à la lenteur de l'appelante dans ses actions pour éliminer les défauts expriment clairement que les intimés considèrent que la prestation fournie par l'appelante n'est pas conforme au contrat et qu'ils en tiennent cette dernière pour responsable.

Reste à déterminer si ces avis des défauts ont été donnés en temps utile. Les parties se disputent sur la date d'achèvement des travaux qui serait intervenue le 6°octobre 2014 ou le 13 mars 2015.

Cette question souffre néanmoins de demeurer indécise. En effet, dans la mesure où les travaux ont été achevés entre le 6 octobre 2014 et le 13 mars 2015, l'avis des défauts - communiqué le 14 octobre 2014 et réitéré à l'issue de la séance de réception du 15 septembre 2015 - a été donné avant l'échéance du délai de deux ans prévu par la norme SIA-118. Il est en outre indifférent qu'un premier avis des défauts ait potentiellement (selon la date d'achèvement des travaux) été communiqué avant l'achèvement des travaux dans la mesure où une séance de réception s'est tenue après leur achèvement afin de déterminer les défauts encore subsistant, l'appelante ayant dans l'intervalle procédé à certaines réfections.

Enfin, l'appelante ne peut se prévaloir de ce que la séance de réception serait intervenue plus d'un mois après l'avis d'achèvement des travaux, – soit tardivement -, car elle n'a pas émis un tel avis et a accepté de participer à ladite séance de réception sans émettre une quelconque réserve. Le prétendu achèvement de l'ouvrage le 13 mars 2015 allégué par l'appelante, conjointement à l'utilisation de l'ouvrage par les intimés, ne saurait remplacer l'avis d'achèvement dans la mesure où ce moment ne pouvait être identifié par ces derniers qui avaient emménagé depuis plusieurs mois dans la villa dans laquelle l'ouvrage a été réalisé.

C'est en conséquence à raison que le Tribunal a considéré que les intimés avaient signalé l'existence de défauts valablement et en temps utile.

Ce grief de l'appelante n'est pas fondé.

6. L'appelante reproche par ailleurs au Tribunal d'avoir retenu qu'elle avait refusé de procéder à la réfection de l'ouvrage.

6.1 L'art. 169 al. 1 SIA-118 prescrit qu'en cas de défauts de l'ouvrage et exception faite du droit à des dommages-intérêts selon l'art. 171 SIA-118, le maître doit d'abord exiger de l'entrepreneur qu'il procède dans un délai convenable à l'élimination du défaut.

Si l'entrepreneur ne s'exécute pas, le maître peut, notamment, faire exécuter la réparation par un tiers aux frais de l'entrepreneur, déduire une moins-value de l'ouvrage ou se départir du contrat (art. 169 al. 1 ch. 1 à 3 SIA-118). Cette disposition consacre la primauté du droit à la réfection de l'ouvrage (arrêt du Tribunal fédéral 4A_460/2009 du 4 décembre 2009 consid. 5). Si le maître omet de donner d'abord à l'entrepreneur l'opportunité de tenter la réparation dans un délai déterminé, il est alors privé de ses droits (ATF 116 II 305 = JdT 1991 I 173 consid. 3a ; ATF 110 II 52 = JdT 1984 II 479).

Lorsque l'entrepreneur a expressément refusé de procéder à l'élimination du défaut ou qu'il n'en est manifestement pas capable, le maître peut exercer les autres droits de garantie (art. 169 al. 2 SIA-118). Le refus exprès signifie un refus clair et résolu. Lorsqu'avant la mise en demeure de réparation du maître, l'entrepreneur fait expressément savoir, de manière injustifiée, qu'il ne procèdera pas à une réparation, il est inutile de fixer un délai à cette fin (Gauch, Le contrat d'entreprise, 1999, n° 2667).

6.2 En l'espèce, après que la direction des travaux avait transmis à l'appelante un avis des défauts le 14 octobre 2014 détaillant les retouches lui incombant, cette dernière en a réalisé certaines, ce qui a conduit à une mise à jour de la liste des retouches en novembre 2014, puis à la transmission à la direction des travaux par l'appelante, le 14 avril 2015, de la liste complétée par les travaux déjà effectués et l'assurance que le solde serait exécuté dans les deux semaines à venir.

Au 10 juin 2015, l'appelante n'était pourtant toujours pas parvenue à exécuter l'ensemble des retouches qui lui était demandées, ainsi que cela ressort du courrier qu'elle a adressé à cette date à la direction des travaux. Le 18 juin 2015, cette dernière s'est d'ailleurs plainte de la lenteur des actions entreprises par l'appelante et lui a proposé d'organiser une séance de réception. L'appelante avait ainsi déjà disposé de plusieurs mois, soit d'un délai convenable, pour exécuter les retouches requises.

Des séances de réception se sont finalement tenues les 27 août et 15 septembre 2015. A cette occasion, une liste de 33 réserves a été établie et signée par les parties. Le 23 septembre 2015, l'appelante a adressé aux intimés la liste des réparations à apporter aux éléments relevés durant la séance du 15 septembre 2015, exposant que le prix de ces travaux s'élèverait à 30'825 fr., que la liste avait été établie à bien plaire et qu'elle ne valait pas reconnaissance des défauts.

Le courrier adressé aux intimés par l'appelante après la tenue de ces séances de réception – par lequel cette dernière indique ne pas reconnaître l'existence de défauts et chiffre le prix des travaux de réparation – ne peut qu'être compris comme le refus de l'appelante de procéder aux réparations de défauts dont elle ne s'estimait pas responsable, sans rémunération complémentaire. Suite à cet envoi, l'appelante n'a pas procédé à de quelconques travaux de réparation - celle-ci ayant d'ailleurs déjà bénéficié en vain de plusieurs mois pour s'exécuter - et a introduit deux procédures judiciaires à l'encontre des intimés, confirmant ainsi son refus de procéder aux réparations demandées.

Compte tenu du refus de l'appelante de procéder aux travaux de réfection et du fait que les intimés avaient laissé plusieurs mois à l'appelante pour procéder aux retouches demandées, ceux-ci n'étaient plus tenus d'impartir un délai à l'appelante pour procéder à la levée des réserves – ce qui aurait été inutile - avant de requérir, à l'occasion de leur écriture du 19 décembre 2016, la moins-value de l'ouvrage.

Le grief de l'appelante est ainsi infondé.

7. L'appelante soutient par ailleurs qu'elle n'était pas tenue de procéder aux réparations dans la mesure où les époux B______/C______ étaient en demeure de lui payer ses demandes d'acomptes échues.

7.1 Aux termes de l'art. 82 CO, celui qui poursuit l'exécution d'un contrat bilatéral doit avoir exécuté ou offert d'exécuter sa propre obligation, à moins qu'il ne soit au bénéfice d'un terme d'après les clauses ou la nature du contrat.

Selon le texte même de l'art. 82 CO, cette disposition s'applique aux contrats bilatéraux; elle vise directement les prestations d'un seul et même contrat synallagmatique promises l'une en échange de l'autre, soit celles qui dépendent l'une de l'autre pour leur naissance et leur exécution (arrêts du Tribunal fédéral 4A_68/2010 du 12 octobre 2010 consid. 3.2.3; 4A_252/2008 du 28 août 2008 consid. 2.2).

7.2 En l'espèce, l'appelante ne saurait se prévaloir de cette exception dans la présente procédure dans la mesure où elle a renoncé à l'exécution synallagmatique du contrat en s'engageant dans son courrier du 18 juin 2015 à procéder aux travaux de réfections malgré les montants qu'elle estimait lui être dus.

Ce grief n'est donc pas fondé.

8. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir retenu que l'ouvrage présentait une moins-value de 195'984 fr. en se fondant sur le rapport de l'expert Q______.

8.1 Le droit à la réduction du prix au sens de l'art. 169 al. 1 ch. 2 SIA-118 tend à une réduction proportionnelle à la moins-value de l'ouvrage. La jurisprudence considère que cette réduction doit être opérée selon la méthode relative, en fonction de la proportion qui existe entre la valeur objective de l'ouvrage avec défaut et la valeur objective de l'ouvrage sans défaut : le prix convenu est réduit dans la proportion obtenue (arrêts du Tribunal fédéral 4C_7/2005 et 4C_11/2005 du 30 juin 2005 consid. 3.2 et 4C.461/2004 du 13 mars 2005 consid. 2; Tercier/Favre/Carron, Les contrats spéciaux, 2009, n° 4601, p. 692).

Pour faciliter l'application de cette méthode, le Tribunal fédéral a établi deux présomptions selon lesquelles la valeur objective de l'ouvrage est égale au prix convenu entre les parties et la moins-value est égale au coût de la remise en état (ATF 116 II 305 consid. 4a, JT 1991 I p. 173; 111 II 162 consid. 3c). Il appartient à celle des parties qui allègue que l'une ou l'autre de ces valeurs est inférieure ou supérieure de l'établir (Tercier/Favre/Carron, op. cit., n° 4604, p. 692). Lorsque l'exactitude du montant de la réduction est difficile à rapporter, le juge peut faire application de son pouvoir d'appréciation conformément à l'art. 42 al. 2 CO (Chaix, op. cit., ad art. 368 n° 36 et 75).

8.2 Le tribunal peut, à la demande d'une partie ou d'office, demander une expertise à un ou plusieurs experts (art. 181 al. 1 CPC). Le juge apprécie librement la force probante d'une expertise. Dans le domaine des connaissances professionnelles particulières de l'expert, il ne peut toutefois s'écarter de son opinion que pour des motifs importants qu'il lui incombe d'indiquer, par exemple lorsque le rapport d'expertise présente des contradictions ou attribue un sens ou une portée inexacts aux documents et déclarations auxquels il se réfère (ATF 101 IV 129 consid. 3a).

8.3 En l'espèce, une première expertise a été ordonnée par le Tribunal et confiée à P______, qui a estimé la moins-value de l'ouvrage à 35'570 fr. Le Tribunal a ensuite ordonné, suite aux sollicitations des parties en ce sens, un complément d'expertise, confiant la mission à Q______, ébéniste, qui a chiffré, suite à l'examen de tous les points relevés par les intimés dans l'avis des défauts établi le 15 septembre 2015, le montant total des frais de réparation à 211'822 fr. TTC, ramené par le Tribunal à 195'984 fr.

L'appelante relève en premier lieu que l'expert Q______ aurait excédé les contours de sa mission en abordant des points différents de ceux examinés par le premier expert ainsi que des points qui n'avaient jamais fait l'objet d'un avis de la part des intimés. L'appelante n'expose néanmoins pas en appel quels points examinés par l'expert sortiraient du cadre de la mission confiée. Aussi, cette critique ne satisfait pas aux exigences de motivation et devra, partant, être rejetée.

De même, les critiques de l'appelante s'agissant de la prétendue méconnaissance du dossier par l'expert ne sont que peu étayées et n'emportent pas la conviction de la Cour. En particulier, le fait que l'expert n'ait pas examiné chaque porte individuellement ou se soit pas interrogé sur la question de savoir si les défauts qu'il examinait provenaient des choix du maître d'ouvrage, d'un choix de ses architectes, d'un défaut de conception ou d'un manque de coordination ne sont pas nature à mettre en cause l'expertise. Ces questions n'entraient pas dans le champ de son expertise qui tendait à vérifier la conformité aux règles de l'art des travaux exécutés et la présence d'éventuels défauts. Si l'appelante estimait que la non-conformité aux règles de l'art ou la défectuosité de certains ouvrages ne lui étaient pas imputables, il lui incombait de l'alléguer et de le démontrer. Au demeurant, l'appelante n'expose pas dans son appel, malgré les exigences en la matière, quels défauts lui auraient été imputés à tort par l'expertise ni quelles seraient les malfaçons causées par un manque de coordination, respectivement par un défaut de conception ou un choix du maître d'ouvrage. Ce grief est également infondé.

Enfin, l'appelante relève que le tribunal ne pouvait pas accepter sans autre les importantes différences entre les évaluations des deux expertises judiciaires. Dans le jugement querellé, le Tribunal expose que le complément d'expertise avait été ordonné car le premier expert n'avait pas procédé à l'examen de tous les défauts et avait préféré, pour certains défauts, l'option du dédommagement à celle de la réparation. Le second expert a par ailleurs expliqué que compte tenu de sa formation d'ébéniste, il était en mesure de proposer des solutions plus détaillées de réparation qu'un architecte. Ces éléments retenus par le premier juge permettent de comprendre les raisons qui l'ont conduit à tenir la seconde expertise pour probante, ce qui n'apparaît pas critiquable dès lors qu'un ébéniste apparaît effectivement plus à même de chiffrer des réparations nécessaires pour éliminer des défauts de menuiserie qu'un architecte. Quant au fait que l'expert se soit fondé sur des prix suisses, cela apparaît conforme à l'usage et n'est en soi pas non-plus critiquable, les intimés n'ayant pas à démarcher des entreprises à l'étranger pour effectuer les travaux de réparation.

Le grief de l'appelante s'agissant de la force probante de l'expertise n'est dès lors pas fondé. La moins-value de l'ouvrage sera ainsi fixée à hauteur de 195'984 fr. comme le Tribunal l'a retenu en se fondant l'estimation de cette expertise, de 211'822 fr. TTC, dont il a déduit les sommes de 13'858 fr. et 1'980 fr. s'agissant des postes relatifs à la porte coulissante et à des frais de déplacement, qui n'ont pas été remis en cause en appel.

9. L'appelante reproche au premier juge d'avoir pris en compte certaines moins-values à double dans le calcul qu'il a opéré pour déduire du prix de l'ouvrage le montant des moins-values et les acomptes versés par les intimés.

Ce grief est fondé. Pour parvenir à la somme de 132'964 fr. 10 que l'appelante a été condamnée à verser aux intimés, le Tribunal a déduit le montant de 195'984 fr., correspondant à la moins-value affectant l'ouvrage, de la somme de 540'897 fr. 90 TTC retenue comme valeur des travaux effectués, sous déduction des acomptes versés par les intimés (540'897 fr. 90 - 477'878 fr. – 195'984 fr. = 132'964 fr. 10).

Dans la mesure où la moins-value retenue par l'expert Q______ à hauteur de 195'984 fr. correspond à l'ensemble des moins-values affectant l'ouvrage, il convient de ne pas tenir compte de la moins-value de 35'570 fr. qui avait déjà été déduite par l'expert P______ à ce titre.

Le calcul s'établit dès lors comme suit : le coût de l'ouvrage selon l'expertise P______, compte non tenu de cette déduction de 35'570 fr., est de 536'401 fr. 40 HT (500'831 fr. 40 HT + 35'570 HT), soit à 579'313 fr. 50 TTC (536'401 fr. 40 + 8%). De ce montant, il convient de retrancher les acomptes versés en 477'878 fr. TTC ainsi que le montant de la moins-value en 195'984 fr. TTC, de sorte que l'appelante sera condamnée à payer aux intimés 94'548 fr. 50, avec intérêts à 5% l'an dès le 18 décembre 2014, date du dernier acompte versé par les intimés, à titre de remboursement du trop-perçu.

L'appel sera donc admis dans cette mesure.

10. 10.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Le Tribunal a arrêté la quotité des frais judiciaires de première instance à 43'246 fr. 50, sans que cela ne soit contesté par les parties.

Dans la mesure où l'appelante succombe pour l'essentiel (elle n'a pas gain de cause sur ses conclusions en paiement et en inscription définitive d'une hypothèque légale en respectivement 155'065 fr. 55 et 112'562 fr. 75) et que les intimés ont gain de cause pour la moitié de leur prétention environ (95'548 fr. 92 sur 191'410 fr. 65 requis en première instance), il convient de mettre les frais judiciaires de première instance à charge de l'appelante à raison de 70% et des intimés à raison de 30 %, le jugement querellé devant ainsi être confirmé sur ce point.

Pour les mêmes motifs, les dépens alloués en premier instance aux intimés en 6'800 fr. – lequel tient compte de l'issue du litige – seront confirmés.

10.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 10'800 fr et mis à la charge de l'appelante qui succombe pour l'essentiel (art. 106 al. 1 CPC; art. 17 et 35 RTFMC). Ils seront compensés avec l'avance de même montant fournie par l'appelante, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelante sera également condamnée à verser 10'000 fr. aux intimés à titre de dépens d'appel, débours et TVA compris (art. 85 RTFMC, art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ SA contre le jugement JTPI/10260/2021 rendu le 16 août 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21768/2015.

Au fond :

Annule le chiffre 5 du dispositif du jugement entrepris et cela fait, statuant à nouveau :

Condamne A______ SA à payer à B______ et C______, créanciers solidaires, la somme de 94'548 fr. 50, avec intérêts à 5% l'an dès le 18 décembre 2014.

Confirme le jugement pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 10'800 fr., les met à charge de A______ SA et les compense entièrement avec l'avance de frais fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à payer à B______ et C______, créanciers solidaires, 10'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.