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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/23643/2022

ACPR/778/2025 du 26.09.2025 sur OTMC/2664/2025 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : MISE EN LIBERTÉ PROVISOIRE;REJET DE LA DEMANDE;DÉTENTION POUR DES MOTIFS DE SÛRETÉ;RISQUE DE FUITE;RISQUE DE RÉCIDIVE;MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION
Normes : CPP.221; CPP.237

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23643/2022 ACPR/778/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 26 septembre 2025

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de refus de mise en liberté rendue le 28 août 2025 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 8 septembre 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 28 août 2025, notifiée le même jour, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a refusé sa mise en liberté.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance querellée et, principalement, à sa mise en liberté, si besoin assortie de mesures de substitution [qu'il énumère], subsidiairement au renvoi de la cause au TMC pour nouvelle décision.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Par acte d'accusation du 27 juin 2025, A______ a été renvoyé en jugement pour enlèvement de mineur (art. 220 CP), séquestration et enlèvement (art. 183 ch. 2 CP), insoumission à une décision d'autorité (art. 292 CP), violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 CP), contrainte (art. 181 CP), mise en circulation et réclame en faveur d'appareils d'écoute, prise de son et de prise de vues (art. 179sexies CP), violation du domaine secret ou du domaine privé au moyen d'un appareil de prise de vues (art. 179quater CP), tentative de meurtre par dol éventuel (art. 111 CP cum 22 CP), violation fondamentale des règles de la circulation routière (art. 90 al. 3 et 4 LCR), dommages à la propriété (art. 144 CP), violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 CP), injure (art. 177 CP), empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP) et enfin voies de fait (art. 126 CP).

L'audience de jugement est fixée au 15 octobre 2025.

b. A______, ressortissant suisse né en 1972, domicilié à C______ [GE], a été appréhendé en France voisine, le 23 novembre 2022, et remis aux autorités suisses, le 6 janvier 2023, pour avoir enlevé ses enfants, alors âgés de sept et cinq ans, après qu’une décision du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : TPAE) eut suspendu son droit de visite et interdit tout contact avec eux.

Il a été placé, le 8 janvier 2023, en détention provisoire, motif pris d’un risque concret et élevé de réitération, dès lors qu’il avait déjà agi comme reproché, à deux reprises, en octobre et en novembre 2022. Par ordonnance du TMC du 13 janvier 2023, il a obtenu son élargissement sous mesures de substitution (dépôt de ses papiers d’identité; suivi psychothérapeutique bihebdomadaire; expertise psychiatrique judiciaire; interdiction de contacter les enfants, hors autorisation du TPAE et du Service de protection des mineurs; supervision des mesures par le Service de probation et d’insertion [ci-après : SPI]). Le TMC a ajouté le risque de fuite au risque de réitération.

A______ n'ayant pas respecté l'une des mesures de substitution (se rendre au SPI), il a à nouveau été arrêté puis été remis en liberté avec mesures de substitution par ordonnance du 29 janvier 2023 du TMC, qui a retenu des risques de fuite et de réitération.

Il a été derechef arrêté le 1er février 2023, pour avoir à nouveau omis de se présenter au SPI, puis placé en détention provisoire par le TMC le 2 février 2023, dans une ordonnance annulée sur recours le 1er mars 2023 par la Chambre de céans, au profit de mesures de substitution (obligation de déposer ses passeports suisses, échu et valable, au Ministère public; obligation de se soumettre à un suivi psychothérapeutique à tout le moins bihebdomadaire chez le Dr D______, avec dépôt mensuel au SPI d'une attestation de suivi; obligation de se soumettre à une expertise psychiatrique, si cette expertise était ordonnée par le Ministère public et que l'ordonnance entrait en force; obligation de respecter les décisions du TPAE; obligation de se rendre en personne au SPI, dans les cinq jours au plus tard suivant la notification de l'arrêt, puis à une fréquence mensuelle au minimum pour le suivi des mesures; obligation de déférer à toute convocation du Pouvoir judiciaire et du SPI). Au stade du recours, A______ n'avait pas contesté l’existence de charges suffisantes ni les risques de fuite et de réitération.

Ces mesures ont ensuite été prolongées par le TMC par ordonnance du 13 février 2024.

A______ a été une nouvelle fois arrêté le 13 août 2024, après avoir violé les mesures de substitution à réitérées reprises, puis placé en détention provisoire par ordonnance du TMC du 15 août 2024, sur la base des risques de fuite et de réitération. Cette détention provisoire a été prolongée par ordonnances des 13 septembre et
8 novembre 2024, lesquelles retenaient les mêmes risques.

Il a été remis en liberté par ordonnance du TMC du 29 novembre 2024, avec onze mesures de substitution, dont les obligations suivantes : se présenter au SPI et suivre les règles ordonnées par ce service, l'obligation de déférer à toute convocation du Ministère public et/ou de toute autre autorité judiciaire suisse, résider à la route 1______ no. ______ à C______, sauf autorisation de la direction de la procédure, se présenter une fois par semaine au poste de police de E______ et entreprendre un suivi psychothérapeutique au rythme et conditions fixés par la Dre F______.

A______ a en dernier lieu été arrêté le 25 mai 2025, après qu'il s'en fut pris verbalement et physiquement à son ex-compagne G______, le 18 mai précédent, en présence de leur fils. Il a été placé en détention provisoire, par ordonnance du TMC du 29 mai 2025, en raison des risques de fuite et de réitération qu'aucune mesure de substitution ne pouvait pallier.

Il a été mis en détention pour motifs de sûreté par ordonnance du TMC du 1er juillet 2025, jusqu'au 26 septembre 2025, les risques de fuite et de réitération étant retenus. Il n'a pas recouru contre cette ordonnance.

c. Depuis son renvoi en jugement, A______ a formé deux demandes de mise en liberté.

c.a. Il a déposé une première demande le 2 juillet 2025, que le TMC a rejetée, par ordonnance du 14 juillet 2025.

Outre l'existence de charges graves et suffisantes, le TMC a retenu l'existence d'un risque de fuite concret et élevé, y compris sous la forme d'une disparition dans la clandestinité en Suisse ou dans un autre pays. En sus de l'épisode de l'enlèvement en France de novembre 2022 qui avait donné lieu à son extradition, le recourant avait quitté la Suisse au cours de l'instruction pour un pays étranger dans lequel il avait entamé des démarches pour demander l'asile politique, démarches qu'il indiquait avoir "réactivées" selon son courrier du 5 mai 2025 adressé au Ministère public et au TPAE, et à teneur duquel il résiderait désormais à l'étranger. Il avait par ailleurs indiqué ne plus avoir les moyens de vivre en Suisse et avoir peur d'y être arrêté, ne s'était pas présenté au poste de police de E______ les dimanches 18 et 25 mai 2025 et avait également fait défaut à l'audience du 23 mai 2025 du Ministère public, sa demande de sauf conduit ayant été refusée. Enfin, devant le TMC, il avait confirmé vivre pour partie en France et pour partie chez des amis à Genève dont il n'avait pas souhaité donner l'adresse.

Le TMC a également retenu l'existence d'un risque de récidive concret, considérant le comportement du prévenu en cours de procédure, lequel justifiait ses actes par sa volonté de voir ses enfants et de les protéger, se plaçant délibérément en violation des décisions judiciaires, ainsi que sur l'expertise du groupe familial réalisée le 6 septembre 2021 et sur l'expertise psychiatrique pénale réalisée le 11 mai 2024, dont il ressortait notamment que l'intéressé présentait un risque de commettre à nouveau des actes de même nature que ceux qui faisaient l'objet de la procédure. Le risque qu'il poursuive ses actes afin d'être en lien avec ses enfants (de les protéger selon lui) était moyen à élevé. Ces actes pouvaient avoir une dimension violente pour les enfants bien qu'ils ne visassent pas directement à leur nuire. Il y avait également un risque hétéro-agressif contre les personnes du "système" en cas de sentiment conséquent et définitif d'injustice.

Pour le TMC enfin, aucune mesure de substitution n'était susceptible de contenir les risques retenus, aucun élément n'étant intervenu dans la procédure qui justifierait une autre appréciation que précédemment, étant relevé au contraire que lors de l'audience devant le TMC, le prévenu s'était déclaré en désaccord avec des mesures de substitution qui lui feraient interdiction de prendre contact avec ses enfants. Rien ne garantissait non plus qu'une éventuelle intensification du suivi auprès de la Dre F______ contiendrait efficacement les risques susmentionnés.

L'intéressé n'a pas recouru contre cette ordonnance.

c.b. A______ a déposé une nouvelle demande de mise en liberté le
18 août 2025.

Il concluait, principalement à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement au prononcé de mesures de substitution (obligation de se présenter à toute convocation du pouvoir judiciaire, obligation de résider à Genève chez sa mère, à H______ [GE], obligation de continuer son suivi psychothérapeutique auprès de la Dre F______, avec un contrôle hebdomadaire, obligation de se présenter au Service de la réinsertion et du suivi pénal [ci-après : SRSP] dans un délai à définir, obligation de suivre les règles ordonnées par ce service, dans le cadre du suivi des mesures de substitution, obligation de fournir au même service des attestations régulières quant au suivi des mesures de substitution, subsidiairement port d'un bracelet électronique, en sus des autres mesures proposées).

C.            Dans l'ordonnance querellée du 28 août 2025, le TMC a considéré en particulier qu'au vu des infractions pour lesquels le prévenu était renvoyé en jugement, il existait des soupçons portant sur la commission d'un crime ou d'un délit et les charges, sans conteste graves, étaient toujours suffisantes, renvoyant expressément aux nombreuses précédentes décisions qu'il avait rendues depuis le 8 janvier 2023.

Le risque de fuite était toujours très sérieux, y compris sous forme de disparition dans la clandestinité en Suisse ou dans un autre pays, et n'était pas amoindri par le fait que G______ se soit installée en France avec les enfants, à une adresse que l'intéressé ne connaissait pas pour l'instant; une fuite était au contraire précisément à craindre vers la France; le fait que l'unique but de A______ soit de se battre pour le bien de ses enfants n'était pas nouveau et avait déjà dûment été pris en compte dans les décisions précédemment rendues.

Le risque de récidive devait toujours être retenu, pour les motifs exposés dans l'ordonnance du 14 juillet 2025. Le déménagement de G______ en France avec les enfants ne l'amoindrissait pas, le risque se fondant sur le comportement de l'intéressé qui n'avait eu de cesse de transgresser les interdictions dont il faisait l'objet et sur le résultat de l'expertise du groupe familial; le curateur des enfants avait donné son accord pour que leur adresse soit communiquée à leur père, qui avait à cœur de les retrouver; il avait exprimé en audience de la colère vis-à-vis du système judiciaire, en lien avec le départ de ses enfants en France, ce qui constituait un facteur important de stress, synonyme, selon l'expertise, d'un risque de passage à l'acte, soit que le prévenu poursuive ses actes pour être en lien avec ses enfants pour, selon lui, les protéger.

Enfin, aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre le but de la détention, au vu des risques retenus; le prévenu avait déjà été mis au bénéfice de mesures de substitution depuis le début de la procédure, mais n'avait pas su les respecter. Les mesures proposées étaient comparables à celles ordonnées par le passé, lesquelles ne l'avaient pas empêché, par exemple, qu'il se rendît à l'étranger et y demandât l'asile. Aucune mesure d'interdiction de contacter ses enfants – qu'il ne proposait d'ailleurs pas – ne pouvait être envisagée pour pallier le risque de récidive puisque ceux-ci n'étaient plus sur le territoire suisse. Le port d'un bracelet électronique n'était pas de nature à pallier les risques de fuite ni de récidive, puisqu'il n'empêcherait pas le prévenu de quitter la Suisse mais permettrait tout au plus de constater sa fuite après coup. Enfin, le suivi psychothérapeutique auprès de la Dre F______ ne l'avait pas non plus empêché de s'en prendre verbalement et physiquement à G______ le 28 mai 2025, de surcroît en présence de leur fils.

D.           a. Dans son recours, A______ affirme contester "fermement" l'existence de charges suffisantes tout en indiquant qu'il ne les discutera pas.

Le risque de fuite devait être écarté. Le TMC avait retenu deux hypothèses mutuellement exclusives, soit celle d'une disparition dans la clandestinité en Suisse ou dans un autre pays, ainsi que celle d'une fuite en France où les enfants et leur mère s'étaient installés. Ces deux hypothèses ne reposaient sur aucun indice concret. En tout état, il était domicilié à Genève où il exploitait une entreprise individuelle, où résidaient sa mère et sa sœur et où il était régulièrement suivi par le Dre F______; son projet de vie était centré sur la reconstruction d'un lien avec ses enfants et ce lien allait devoir se créer en Suisse, ce qui était incompatible avec une disparition dans la clandestinité. Le fait que les enfants résident en France n'impliquait pas un risque accru mais traduisait au contraire un ancrage familiale identifiable. Il ne disposait en outre d'aucun titre de séjour en France, pays dont il n'avait pas la nationalité; en cas de départ en France, son extradition vers la Suisse serait automatique et aisée.

Le risque de récidive avait été retenu sans considération du fait que le déménagement des enfants en France avait eu pour conséquence que les mesures de substitution qu'on lui reprochait de ne pas respecter – interdiction de tout contact avec ses enfants – ne pouvaient juridiquement se déployer à l'étranger et étaient ainsi devenues sans objet, de sorte qu'il ne pouvait plus être craint qu'elles soient violées. Ce déménagement constituait un changement de situation déterminant qui n'avait pas été pris en compte. Depuis son extradition, il n'avait jamais tenté d'enlever ses enfants et aucun élément ne le laissait à penser ni n'était allégué. La "colère" qu'il avait manifestée en audience, dénuée de pertinence, était une réaction émotionnelle dans un contexte de détention prolongée et ne pouvait constituer un indice concret de dangerosité future. Il n'avait pas fait l'objet de deux condamnations antérieures comparables comme l'exigeait la jurisprudence récente de sorte qu'aucun pronostic défavorable ne pouvait être retenu.

Au titre de mesures de substitution, il proposait l'obligation de se présenter à toute convocation du Ministère public et/ou toute autorité judiciaire suisse, l'obligation de résider avenue 2______ no. ______ à H______, l'obligation de poursuivre son suivi médical avec la Dre F______, avec un contrôle hebdomadaire, l'obligation de se présenter au SRSP et de suivre les règles qui seraient ordonnées par ce Service et le port d'un bracelet électronique pour le contrôle de l'astreinte à domicile. Ces garanties cumulées, adaptées à la situation actuelle selon laquelle ses enfants résidaient hors de Suisse, permettraient de neutraliser un éventuel risque de fuite et de réitération. Rejeter ces mesures de substitution au motif qu'elles se seraient déjà révélées insuffisantes faisait fi de ce qu'elles étaient désormais renforcées et nouvelles par rapport aux précédentes, ainsi que du contexte factuel qui avait évolué de manière décisive avec le départ des enfants et de leur mère en France.

b. Dans ses observations du 11 septembre 2025, envoyées le lendemain, le Ministère public se réfère à l'ordonnance querellée s'agissant de la suffisance des charges.

Le risque de fuite avait été retenu, référence ayant été fait à l'ordonnance du 14 juillet 2025, sous la forme d'une disparition dans la clandestinité, laquelle pourrait s'accompagner d'un départ à l'étranger. Le Tribunal s'était notamment appuyé sur le fait que le recourant avait quitté la Suisse au cours de l'instruction pour un pays étranger dans lequel il avait entamé des démarches pour demander l'asile politique, démarches qu'il avait indiqué avoir récemment réactivées, étant précisé qu'il avait également expliqué résider désormais pour partie en France, n'ayant plus les moyens de vivre en Suisse, où il avait au demeurant peur d'être arrêté. Une disparition dans la clandestinité, effectivement incompatible, d'un point de vue rationnel, avec ses attaches et sa raison d'être, soit ses enfants, devait cependant être envisagée, le recourant s'obstinant à ne pas respecter les mesures qui lui étaient imposées pour reprendre contact de manière légale avec ses enfants. L'absence de titre de séjour en France n'était, enfin, pas un argument propre à rassurer, l'intéressé ayant d'ores et déjà indiqué qu'il résidait partiellement dans ce pays.

Le risque de réitération ne résultait pas tant de la violation des mesures de substitution, qui ne déploieraient pas d'effets juridiques à l'étranger, que de la probable réitération d'infractions pénales identiques à celles qui lui étaient reprochée. Or, l'enlèvement et la séquestration des enfants n'était pas la seule infraction à considérer, une tentative de meurtre lui étant également reprochées. Enfin, ce n'était pas deux condamnations antérieures qui étaient requises par la jurisprudence mais deux infractions, existantes en l'espèce au vu de l'arrêt de la Cour d'Assises de 1994, versé au dossier, et de la condamnation pour une rixe en 2012.

Aucune mesure de substitution n'était envisageable, le recourant étant absolument incapable de les respecter.

c. Le TMC renonce à formuler des observations et maintient les termes de son ordonnance.

d. Le TCO ne formule pas non plus d'observations et se réfère à l'ordonnance de la Direction de la procédure rendue ensuite de la dernière demande de mise en liberté de A______.

e. Sur réplique, A______ s'interroge sur la recevabilité des observations du Ministère public du 11 septembre 2025 et relève, sur le fond, qu'une disparition en Suisse était "matériellement" impossible au vu de sa situation et de son projet de vie qui reposait sur la reconstruction du lien avec ses enfants établis en France voisine; une fuite en France était tout aussi illusoire puisqu'il y était dépourvu de statut et y serait immédiatement exposé à une procédure d'extradition. Quant au risque de réitération, c'était artificiellement que le Ministère public le fondait sur une tentative de meurtre, par dol éventuel en lien avec une infraction en matière de circulation routière que le TMC avait lui-même qualifiée de "fait isolé". En réalité, le risque de réitération s'inscrivait dans le cadre d'une dynamique familiale conflictuelle née de sa volonté persistante de maintenir un lien avec ses enfants. La jurisprudence exigeait bien l'existence d'antécédents judiciairement constatés, soit de condamnations. Si le Tribunal fédéral avait en l'espèce accepté que la condamnation de 1994 soit versée au dossier, il avait aussi mis en garde contre le risque de constituer un "casier parallèle" et rappelé que le recours à de telles pièces devait respecter notamment le droit à l'oubli. En l'espèce, les condamnations de 1994 et 2012 ne présentaient aucun rapport direct avec les faits de la procédure et ne pouvaient, dès lors, fonder un risque actuel.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les observations du Ministère public, déposées dans le délai de 3 jours qui lui avait été fixé par la direction de la procédure, le sont également.

2.             S'il indique ne pas vouloir les discuter, le recourant déclare contester fermement l'existence de charges suffisantes.

2.1.       Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2.       En l'espèce, comme relevé par le TMC dans l'ordonnance querellée mais également dans ses précédentes décisions, les charges sont graves et suffisantes, eu égard aux plaintes et déclarations de G______, aux dénonciations du SPMI, aux décisions rendues par le TPAE, aux déclarations des enfants, aux constatations et saisies policières, aux résultats des analyses scientifiques, au rapport d'interpellation du prévenu du 13 août 2024, aux plaintes et déclarations de I______, de J______ et de K______, aux images de vidéosurveillance desquelles un cahier photographique a été tiré, au rapport de la gendarmerie du 4 septembre 2024 et aux aveux partiels du prévenu.

3.             Le recourant conteste le risque de fuite.

3.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

3.2.       En l'espèce, l'existence d'un risque de fuite a été retenue de manière constante depuis le début de la procédure, y compris dans l'ordonnance du TMC du
14 juillet 2025 contre laquelle l'intéressé n'a pas recouru. Ce risque a alors été retenu sous la forme d'une disparition dans la clandestinité en Suisse ou dans un autre pays.

Dans un premier argument, le recourant invoque sa situation personnelle (domicile, activité professionnelle, domicile des mère et sœur, suivi psychothérapeutique) pour nier tout risque de fuite. Il oublie cependant que ces éléments étaient déjà présents lorsque le risque de fuite a été précédemment retenu, y compris par la Chambre de céans dans son arrêt du 1er mars 2023.

L'existence de son projet de vie (reconstruire un lien avec ses enfants) a, lui aussi, déjà été allégué et pris en compte dans les précédentes décisions. Le recourant a d'ailleurs montré dans le passé qu'il était prêt à partir à l'étranger pour se soustraire aux décisions civiles rendues au sujet de sa relation avec ses enfants.

En réalité, le seul argument nouveau invoqué par le recourant est celui du déménagement de ses enfants et de leur mère en France voisine. Or, avec le Ministère public, on ne voit pas en quoi ce déménagement modifierait l'évaluation du risque de fuite. Au contraire, et quoiqu'en dise le recourant, ce déménagement accroit le risque qu'il ne quitte la Suisse, afin de rejoindre ses enfants dans leur nouveau pays de résidence. Une possible extradition en cas de départ à l'étranger ne change rien à l'évaluation de ce risque. Il en va de même d'une absence de statut administratif dans ce pays.

4.             Le recourant conteste l'existence d'un risque de récidive.

4.1.       L'art. 221 al. 1 let. c CPP, relatif au risque de récidive, dans sa nouvelle teneur au 1er janvier 2024 (RO 2023 468), présuppose désormais que l'auteur compromette sérieusement et de manière imminente la sécurité d'autrui en commettant des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre.

Selon la jurisprudence relative à l'art. 221 al. 1 let. c aCPP (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2023 [RO 2010 1881]) – transposable au nouveau droit (ATF 150 IV 149 consid. 3.1 s.) –, trois éléments doivent être réalisés pour admettre le risque de récidive : en premier lieu, le prévenu doit en principe déjà avoir commis des infractions du même genre, et il doit s'agir de crimes ou de délits graves; deuxièmement, la sécurité d'autrui doit être sérieusement compromise; troisièmement, une réitération doit, sur la base d'un pronostic, être sérieusement à craindre (ATF 146 IV 136 consid. 2.2; 143 IV 9 consid. 2.5).

L'hypothèse d'un simple risque de récidive présuppose l'existence d'une pluralité d'infractions et donc d'au moins deux infractions similaires commises antérieurement (arrêt du Tribunal fédéral 7B_1035/2024 du 19 novembre 2024 consid. 2.3.1).

Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3 et 4).

4.2.       Le nouvel art. 221 al. 1bis CPP prévoit pour sa part que la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté peut exceptionnellement être ordonnée si le prévenu est fortement soupçonné d'avoir porté gravement atteinte à l'intégrité physique, psychique ou sexuelle d'autrui en commettant un crime ou un délit grave et s'il y a un danger sérieux et imminent qu'il commette un crime grave du même genre (cf. ATF 150 IV 149 susmentionné, consid. 3.2, et arrêt du Tribunal fédéral 7B_1025/2023 du 23 janvier 2024 consid. 3.2).

Comme il est renoncé à toute infraction préalable (seul indice fiable permettant d'établir un pronostic légal), il semble justifié de restreindre les infractions soupçonnées aux crimes et délits graves contre des biens juridiques particulièrement importants (par ex., la vie, l'intégrité physique ou l'intégrité sexuelle). L'exigence supplémentaire de l'atteinte grave a pour objectif de garantir que lors de l'examen de la mise en détention, on prendra en considération non seulement les peines encourues, mais aussi les circonstances de chaque cas. Ces restrictions sont de plus requises en ce qui concerne le risque de crime grave du même genre. En effet, la détention préventive ne paraît justifiée que si le prévenu risque de mettre gravement en danger les biens juridiques des victimes potentielles (comme lorsque le motif de mise en détention est le passage à l'acte). Enfin, ces restrictions ont pour objectif d'exclure que ce motif de mise en détention soit avancé en cas de dommages purement matériels ou de comportements socialement nuisibles (Message du Conseil fédéral du 28 août 2019 [19.048] concernant la modification du Code de procédure pénale – mise en œuvre de la motion 14.3383 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États « Adaptation du code de procédure pénale » –, FF 2019 6351, p. 6395).

4.3.       En l'espèce, comme pour le risque de fuite, le risque de réitération a été retenu de manière constante à l'encontre du recourant dans les différentes décisions rendues relativement à sa détention.

Le recourant tire argument, ici aussi, du déménagement des enfants et de leur mère en France voisine, pour considérer que les mesures de substitution qui lui sont imposées (interdiction de contact) qu'on lui reprochait de ne pas respecter n'auraient pas d'effet à l'étranger. C'est oublier que c'est bien le risque de réitération, concret, qui motive sa détention. Les mesures de substitution pour pallier ce risque, seront examinées infra.

Enfin, l'argument portant sur les condamnations ou infractions antérieures n'est d'aucune utilité au recourant, le risque de récidive ayant été examiné et retenu non pas seulement sur la base de l'art. 221 al. 1 let c CPP, lequel n'impose pas nécessairement, comme rappelé plus haut, d'antécédents multiples, mais également sur la base de l'art. 221 al. 1bis et al. 2 CPP. Le TMC a d'ailleurs, dans son ordonnance du 14 juillet 2025, expressément rappelé le risque que le recourant ne commette à nouveau des actes de même nature que ceux faisant l'objet de la procédure, y compris des actes comportant une dimension violente pour les enfants, de même qu'un risque hétéro-agressif contre les personnes "du système".

5.             Le recourant soutient enfin que les éventuels risques retenus pourraient être palliés par des mesures de substitution.

5.1.       Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (al. 2 let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d), de se soumettre à un traitement médical ou à des contrôles (al. 2 let. f) et l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (al. 2 let. g). La liste des mesures de substitution énoncée à
l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du
7 décembre 2011 consid. 4.2).

5.2.       En l'espèce, les mesures proposées sont, quoi qu'en dise le recourant, similaires à celles déjà soumises au TMC et rejetées par ordonnance du 14 juillet 2025. Elles le sont également avec les mesures de substitution ordonnées par le TMC le 29 novembre 2024, lesquelles ont dû être révoquées en mai 2025 après que le recourant s'en soit pris verbalement et physiquement à la mère de ses enfants, en présence de leur fils.

Dès lors, comme relevé par le TMC, ces mesures se sont déjà avérées inaptes à atteindre les buts de la détention. Il apparaît également qu'en tout état, le recourant s'est montré à réitérées reprises incapable de les respecter.

6.             Enfin, le principe de la proportionnalité (art. 197 CPP) n'est pas violé compte tenu de la durée de la détention du recourant, de la date de l'audience de jugement fixée au
15 octobre prochain et de la peine concrètement encourue si les faits reprochés étaient confirmés.

7.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

8.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du
8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

9.             Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

9.1.       Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

9.2.       En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice du présent recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Admet l'assistance judiciaire pour le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Tribunal des mesures de contrainte, au Ministère public et au Tribunal correctionnel.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Valérie LAUBER et Catherine GAVIN, juges; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/23643/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1’000.00

 

 

Total

CHF

1'105.00