Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/309/2025 du 14.04.2025 sur OTDP/623/2025 ( TDP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/3745/2025 ACPR/309/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du lundi 14 avril 2025 |
Entre
A______, domicilié ______, agissant en personne,
recourant,
contre l'ordonnance de refus de nomination d'avocat d'office rendue le 14 mars 2025 par le Tribunal de police,
et
LE TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. Par acte expédié le 21 mars 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 14 précédent, notifiée le 17 suivant, par laquelle le Tribunal de police a refusé d'ordonner une défense d'office en sa faveur.
Sans prendre de conclusions formelles, le recourant indique "formuler son opposition" à l'ordonnance précitée, demandant que "l'assistance juridique [lui] soit accordée".
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
a. Un rapport de renseignements a été établi le 28 octobre 2023 en lien avec un accident de la circulation survenu le 3 précédent.
À teneur de celui-ci, il était reproché à A______ d'avoir, à Genève, ce jour-là, à 11h30, alors qu'il circulait au guidon d'une trottinette électrique sur la rue du Temple en direction de la rue Voltaire, à l'intersection avec la rue des Terreaux-du-Temple, poursuivi sa route en direction de la place Isaac-Mercier, alors que le signal lumineux était au rouge, heurtant avec l'avant de son véhicule le flanc droit du motocycle conduit par B______.
Sur place, les parties impliquées ont échangé leurs coordonnées avant de quitter les lieux. Aucune caméra n'a filmé l'accident.
Ne parvenant finalement pas à se mettre d'accord avec A______ sur les circonstances de la collision, B______ s'est présenté le 4 octobre 2023 au poste de police afin de signaler l'accident, produisant à cette occasion son constat amiable et des photos représentant les dégâts occasionnés sur son scooter.
Le 11 octobre 2023, A______ a transmis à la police la copie d'une lettre destinée à son assurance et dans laquelle il expliquait, sur cinq pages – photos comprises –, sa version des faits, contestant toute responsabilité dans la survenance de l'accident. Il a également produit son constat amiable d'accident, un schéma des lieux et un constat médical attestant d'une contusion de son genou droit.
b. Entendu par la police le 11 octobre 2023, C______, témoin de l'accident, a indiqué "penser" que l'individu circulant en trottinette [A______] avait traversé l'intersection alors que sa phase lumineuse était au rouge, le feu du scootériste [B______] se trouvant selon lui au vert. Lui-même avait déclaré à A______ qu'il était sûrement en tort, ce à quoi ce dernier n'avait rien répondu.
c. Par ordonnance pénale du Service des contraventions (ci-après: SdC) du 5 avril 2024, A______ a été reconnu coupable des faits sus-évoqués, constitutifs d'infraction à l'art. 90 de la loi fédérale sur la circulation routière, et condamné à une amende de CHF 950.-, ainsi qu'aux frais de la procédure en CHF 150.-.
d. Par courrier expédié le 11 avril 2024, A______ a formé opposition contre cette ordonnance pénale. Il ne s'estimait pas responsable de l'accident, dès lors qu'il n'avait pas grillé le feu et avait été renversé par B______. Il sollicitait de pouvoir consulter le dossier, ainsi que le versement à la procédure des images de vidéosurveillance disponibles.
e. Le 24 avril 2024, le SdC a transmis à A______ une copie du rapport de renseignements établi le 28 octobre 2023, tout en lui impartissant un délai au 24 mai 2024 afin de compléter les motifs de son opposition, à défaut de quoi il statuerait sur la base des pièces en sa possession.
f. Par courrier expédié le 21 mai 2024, A______ a prié le SdC de lui faire parvenir "le reste du dossier complet".
g. Le 17 juin 2024, le SdC a transmis à A______ les photos et croquis du lieu de l'accident, tout en lui impartissant un nouveau délai au 17 juillet 2024 pour faire part de ses observations complémentaires et motiver son opposition. A______ n'y a pas donné suite.
h. Par ordonnance du 11 février 2025, le SdC, au terme d'un examen circonstancié des divers éléments de preuve figurant au dossier – a maintenu son ordonnance pénale du 5 avril 2024 et transmis la procédure au Tribunal de police afin qu'il statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition.
i. Par courrier de son conseil du 12 mars 2025, A______ a sollicité l'octroi de l'assistance juridique.
Dans le formulaire d'assistance judiciaire, il a indiqué disposer de revenus annuels en CHF 37'992.- (rentes AVS/AI, CHF 20'628.-; prestations SPC, 17'364.-), ses charges annuelles s'élevant à CHF 17'004.- (loyer, CHF 4'848.-; arrangement impôt / Etat de Genève, CHF 3'600.-; primes d'assurance-maladie, CHF 8'556). Il motivait sa demande par le fait qu'il existait un conflit suite à l'accident de la route et qu'il "n'arrivait pas à faire valoir ses preuves pourtant évidentes".
j. Par mandat de comparution du 19 mars 2025, le Tribunal de police a convoqué A______ à une audience – appointée au 30 juillet 2025 – afin qu'il soit entendu suite à son opposition.
C. Dans l'ordonnance querellée, le Tribunal de police considère que l'assistance d'un défenseur n'était pas justifiée pour sauvegarder les intérêts de A______, lequel était à même de se défendre efficacement seul. D'une part, la cause ne présentait pas de difficultés particulières juridiques ou de fait. D'autre part, elle était de peu de gravité dans la mesure où A______ n'était passible que d'une amende.
D. a. Dans son recours de dix pages – photos des lieux de l'accident et certificats médicaux compris –, A______ consacre l'essentiel de ses développements à tenter de démontrer pour quelles raisons on ne pouvait lui imputer la commission d'une quelconque infraction. Dans un second temps, il soutient brièvement que, quand bien même la cause ne présentait pas de difficulté, l'assistance juridique était justifiée pour sauvegarder ses intérêts. Il n'avait "à ce jour pas pu faire valoir ses arguments et preuves pourtant évidentes", dans la mesure où on ne l'"écou[tait] simplement pas" et ne prenait pas en compte ce que le témoin avait lui-même indiqué à teneur du rapport de police.
b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.
EN DROIT :
1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).
2. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. Le recourant argue que la sauvegarde de ses intérêts nécessite l'assistance d'un avocat.
3.1. En dehors des cas de défense obligatoire, la direction de la procédure ordonne une défense d'office si le prévenu ne dispose pas des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur est justifiée pour sauvegarder ses intérêts (art. 132 al. 1 let. b CPP). Il s'agit de conditions cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 1B_667/2011 du 7 février 2012 consid. 1.2).
3.2. La défense d’office aux fins de protéger les intérêts du prévenu se justifie notamment lorsque l’affaire n’est pas de peu de gravité et qu’elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter (art. 132 al. 2 CPP). En tout état de cause, une affaire n’est pas de peu de gravité lorsque le prévenu est passible d’une peine privative de liberté de plus de quatre mois ou d’une peine pécuniaire de plus de 120 jours-amende (art. 132 al. 3 CPP).
3.3. Pour évaluer si l'affaire présente des difficultés que le prévenu ne pourrait pas surmonter sans l'aide d'un avocat, il y a lieu d'apprécier l'ensemble des circonstances concrètes. En particulier, il convient de s'attacher à la peine concrètement encourue et non à la seule peine menace prévue par la loi (ATF 143 I 164 consid. 2.4.3 et 3; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit Commentaire du CPP, 2e éd., 2016, n. 30 ad art. 132).
Pour apprécier la difficulté subjective d'une cause, il faut aussi tenir compte des capacités du prévenu, notamment de son âge, de sa formation, de sa plus ou moins grande familiarité avec la pratique judiciaire, de sa maîtrise de la langue de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1B_257/2013 du 28 octobre 2013 consid. 2.1 publié in SJ 2014 I 273 et les références citées) et des mesures qui paraissent nécessaires, dans le cas particulier, pour assurer sa défense, notamment en ce qui concerne les preuves qu'il devra offrir (ATF 115 Ia 103 consid. 4).
3.4. En l'espèce, la question d'une éventuelle indigence du recourant peut souffrir de demeurer indécise, dès lors que les autres conditions pour l'octroi de la défense d'office ne sont de toute manière pas réalisées, ainsi qu'il sera vu ci-après.
Premièrement, la condition de gravité de l'affaire au regard du seuil prévu à l'art. 132 al. 3 CPP n'est pas réalisée, dès lors que, dans l'éventualité où le Tribunal de police devait déclarer le recourant coupable des faits qui lui sont reprochés, ce dernier ne s'exposerait qu'au prononcé d'une seule amende, et non à celui d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté supérieure à 120 unités pénales.
Deuxièmement, les faits qui lui sont reprochés sont simples et circonscrits. Le recourant a, d'ailleurs, pu s'exprimer à leur sujet de manière claire et circonstanciée, tant dans sa lettre du 11 octobre 2023, que dans son recours. L'infraction qui lui est reprochée, soit une contravention à la législation sur la circulation routière, ne présente pas de réelle difficulté de compréhension ou d'application, même pour une personne sans formation juridique. Il ressort d'ailleurs des longs développements contenus dans les écritures du recourant qu'il a parfaitement compris les enjeux de la procédure, parvenant à expliquer, sans que l'aide d'un avocat ne lui fût nécessaire, les raisons pour lesquelles aucune infraction ne pouvait, selon lui, être retenue à son encontre.
On ne voit ainsi pas ce qui empêchera le recourant de plaider, seul, ses arguments devant le juge du fond.
En définitive, la cause est de peu de gravité et ne présente pas de difficultés particulières nécessitant l'intervention d'un avocat. Les conditions de l'art. 132 al. 1 let. b CPP ne sont dès lors pas réunies et la défense d'office du recourant pouvait être refusée par le Tribunal de police.
4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée et, partant, le recours rejeté.
5. La procédure de recours contre le refus de l'octroi de l'assistance juridique ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 20 RAJ).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours.
Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.
Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Tribunal de police.
Le communique, pour information, au Ministère public.
Siégeant :
Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Madame Catherine GAVIN et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.
La greffière : Arbenita VESELI |
| La présidente : Corinne CHAPPUIS BUGNON |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).