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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/23083/2024

ACPR/895/2024 du 04.12.2024 sur ONMMP/4455/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : CAPACITÉ DE DISCERNEMENT;CURATEUR;REPRÉSENTATION LÉGALE;DÉNONCIATION CALOMNIEUSE
Normes : CC.16; CPP.310; CPP.106; CP.303

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23083/2024 ACPR/895/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 4 décembre 2024

 

Entre

A______, domiciliée au Service de protection de l'adulte, case postale 107, 1211 Genève 8, agissant en personne

recourante,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 10 octobre 2024 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 15 octobre 2024 au Ministère public, et transmis à la Chambre de céans, A______ recourt contre l'ordonnance du 10 précédent, notifiée le 14 suivant, par laquelle l'autorité précédente a refusé d'entrer en matière sur sa plainte.

La recourante, sans prendre de conclusions formelles, déclare s'opposer à cette décision.

b. Elle a été dispensée de verser les sûretés (art. 383 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par ordonnance pénale du 3 avril 2023, notifiée en mains propres le même jour, A______ a été condamnée à une peine pécuniaire d'ensemble de 120 jours-amende à CHF 30.- – sous déduction d'un jour-amende correspondant à un jour de détention avant jugement – notamment pour lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), injure (art. 177) et violence ou menace contre les autorités (art. 285 ch. 1 al. 1 CP) au préjudice des agents de sécurité de B______ [soit] C______, D______ et E______ (ci-après, agents de sécurité de B______).

Selon la partie "en fait" de cette décision, les 2 et 3 avril 2023, les prénommés avaient déposé plainte contre A______ et produit des certificats médicaux attestant de leurs blessures. Entendue par la police, la mise en cause avait refusé de répondre aux questions et de signer le procès-verbal de son audition.

b. Par ordonnance du 24 mai 2024 – entrée en force –, le Tribunal de police a jugé l'opposition, formée par A______ le 18 avril précédent, irrecevable, car tardive.

c. Par lettre du 2 octobre 2024 adressée au Ministère public, A______ a déposé plainte pénale contre les agents de sécurité de B______ pour dénonciation calomnieuse (art. 303 CP).

Elle n'avait jamais été entendue en lien avec les plaintes déposées à son encontre et les policiers l'avaient "forcée" à signer "le recommandé". Par ailleurs, un dénommé F______ avait également déposé des plaintes pénales contre les agents de sécurité de B______.

Elle se constituait partie plaignante au pénal.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public a considéré que les éléments constitutifs d'une infraction n'étaient pas réunis, dès lors que la plaignante avait été condamnée pour les faits dénoncés par les agents de sécurité de B______.

D. a. Dans son écrit, A______ s'oppose à l'ordonnance de non-entrée en matière du 10 octobre 2024.

b. À réception, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

E. Il ressort de l'arrêt ACPR/894/2024 de la Chambre de céans que A______ est placée sous curatelle de portée générale selon ordonnance du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du 24 mars 2021.

EN DROIT :

1.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2.             2.1. Le recours a été déposé selon la forme – bien que limite sous l'angle de la motivation – et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP); il concerne, en outre, une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP).

2.2. Il convient cependant d'examiner sa recevabilité, en tant qu'il a été déposé par une personne placée sous curatelle de portée générale.

2.2.1. Conformément à l'art. 106 CPP, une partie ne peut valablement accomplir les actes de procédure que si elle a l'exercice des droits civils (al. 1). Dans la négative, elle doit agir par l'intermédiaire de son représentant légal (al. 2). Une personne qui n'a pas l'exercice des droits civils mais qui est capable de discernement peut exercer elle-même ses droits procéduraux de nature strictement personnelle, même contre l'avis de son représentant légal (al. 3).

Les personnes mineures ou placées sous curatelle de portée générale, mais capables de discernement, peuvent agir seules, ou par l'intermédiaire d'un représentant librement choisi, pour faire valoir les droits relevant de leur personnalité. Elles n'ont pas besoin de l'accord de leur représentant légal, qui ne peut d'ailleurs agir à leur place qu'avec leur consentement au moins tacite (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 14 ad art. 106).

Au rang des droits procéduraux de nature strictement personnelle figure notamment le droit d'interjeter recours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_847/2015 du 13 juin 2016 consid. 2.1).

2.2.2. Selon l'art. 16 CC, toute personne qui n'est pas privée de la faculté d'agir raisonnablement en raison de son jeune âge, de déficience mentale, de troubles psychiques, d'ivresse ou d'autres causes semblables est capable de discernement. Cette disposition comporte deux éléments, un élément intellectuel, la capacité d'apprécier le sens, l'opportunité et les effets d'un acte déterminé, et un élément volontaire ou caractériel, la faculté d'agir en fonction de cette compréhension raisonnable, selon sa libre volonté (ATF 124 III 5 consid. 1a).

2.2.3. En l'espèce, la recourante semble conserver une capacité de discernement suffisante pour comprendre les tenants et aboutissants de la procédure pénale, dès lors qu'elle s'est constituée partie plaignante dans la présente cause et a été en mesure de contester l'ordonnance querellée.

Cela étant, la question de savoir si la recourante est capable de discernement, respectivement celle de la recevabilité du recours, peuvent rester indécises, dès lors que, supposé recevable, celui-ci devrait de toute manière être rejeté pour les motifs exposés ci-après.

3.             3.1. À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé (arrêts du Tribunal fédéral 6B_488/2021 du 22 décembre 2021 consid. 5.3; 6B_212/2020 du 21 avril 2021 consid. 2.2; 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1).

3.2. L'art. 303 ch. 1 CP réprime notamment du chef de dénonciation calomnieuse quiconcque aura dénoncé à l'autorité, comme auteur d'un crime ou d'un délit, une personne qu'il savait innocente, en vue de faire ouvrir contre elle une poursuite pénale.

Sur le plan objectif, une dénonciation calomnieuse est composée de deux éléments, soit qu'une dénonciation soit faite et qu'elle fasse porter l'accusation sur une personne innocente. La dénonciation n'est calomnieuse que si la personne mise en cause est innocente, en ce sens qu'elle n'a pas commis les faits qui lui sont faussement imputés, soit parce que ceux-ci ne se sont pas produits, soit parce qu'elle n'en est pas l'auteur. Est "innocent" celui qui a été libéré par un jugement d'acquittement ou par le prononcé d'un classement. Le juge de la dénonciation calomnieuse est, sauf faits ou moyens de preuve nouveaux, lié par une telle décision (ATF 136 IV 170 consid. 2.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_859/2022 du 6 mars 2023 consid. 3.1).

Sur le plan subjectif, l'auteur doit savoir que la personne qu'il dénonce est innocente. Il ne suffit donc pas qu'il ait conscience que ses allégations pourraient être fausses. Il doit savoir que son affirmation est inexacte. Le dol éventuel ne suffit pas
(ATF 136 IV 170 consid. 2.1.1). Celui qui dépose une dénonciation pénale contre une personne ne se rend ainsi pas coupable de dénonciation calomnieuse du seul fait que la procédure pénale ouverte consécutivement à la dénonciation a débouché sur une décision d'acquittement ou de classement (ATF 136 IV 170 consid. 2.2; arrêts du Tribunal fédéral 6B_859/2022 du 6 mars 2023 consid. 3.2; 6B_1248/2021 précité consid. 2.1.2).

3.3. En l'espèce, la recourante considère être victime d'une dénonciation calomnieuse, au motif que les mis en cause auraient déposé des plaintes contre elle, alors qu'ils la savaient innocente. Il ressort toutefois du dossier que les mis en cause présentaient des lésions constatées par des certificats médicaux. La recourante a du reste été condamnée par ordonnance pénale, entrée en force, pour les faits reprochés. Le fait qu'une autre personne ait déposé une plainte à l'encontre des agents de sécurité de B______ n'est pas pertinent pour l'issue du litige et n'y change rien.

Il ressort ainsi de ce qui précède que les éléments constitutifs de l'art. 303 CP ne sont pas réunis. C'est donc à bon escient que le Ministère public n'est pas entré en matière sur cette infraction.

4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, arrêtés à CHF 400.-, vu sa situation personnelle (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 400. -.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante (soit pour elle le Service de protection de l'adulte et de l'enfant) et au Ministère public.

Le communique, pour information, à A______ en personne.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Valérie LAUBER et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Xavier VALDES TOP, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES TOP

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/23083/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

315.00

Total

CHF

400.00