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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/13625/2022

ACPR/745/2024 du 16.10.2024 sur OTMC/2766/2024 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE FUITE;MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/13625/2022 ACPR/745/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 16 octobre 20241

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de mise en détention provisoire rendue le 15 septembre 2024 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 25 septembre 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 15 septembre 2024, notifiée à l'audience du même jour, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) l'a placé en détention provisoire jusqu'au 13 novembre 2024.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de ladite ordonnance et à sa libération immédiate, assortie le cas échéant des mesures de substitution qu'il propose.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant guinéen, célibataire, né le ______ 1994, a été interpellé le 18 juillet 2023 dans le canton de Zurich. Il faisait également l'objet d'un avis de recherche et d'arrestation émis par le Ministère public genevois le 2 décembre 2020.

Le 21 juillet 2023, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Zurich a prononcé sa mise en détention provisoire jusqu'au 20 octobre 2023.

Le for ayant été repris par le canton de Genève, le prénommé y a été transféré le 31 juillet 2023.

Les autres procédures diligentées par les autorités judiciaires du canton de Zurich à l'endroit de l'intéressé ont toutes été jointes à la présente procédure.

b. Le précité est prévenu dans celle-ci d'escroquerie (art. 146 CP), subsidiairement de recel (art. 160 CP), de voies de fait (art. 126 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP), d'infraction à l'art. 119 LEI, ainsi que de délit à l'art. 19 al. 1 LStup et de contravention à l'art. 19a ch. 1 LStup, pour avoir :

- à Genève, le 5 janvier 2019, vendu dans le commerce D______, sis rue 1______ no. ______, contre la somme de CHF 600.-, une montre E______/2______ [marque/modèle] d'une valeur de plusieurs milliers de francs, en indiquant faussement en être le propriétaire, alors que ladite montre appartenait à F______ et avait été dérobée à celui-ci lors du cambriolage de son domicile entre le 20 et le 31 janvier 2018;

- à G______ [ZH], le 15 juin 2022, remis 1 gramme de cocaïne à H______;

- à G______, le 17 juin 2022, détenu 3,5 grammes de cocaïne, étant précisé qu'il avait l'intention d'en remettre une partie à des amis lors d'une fête, la drogue restante étant destinée à sa consommation personnelle;

- à G______, le 19 juin 2022, vers 17h, pénétré sans droit dans l'appartement de H______ sis rue 3______ no. ______, jusqu'au 20 juin 2022, vers 5h50, puis, après que le précité lui eut demandé de quitter les lieux, refusé et saisi l'intéressé par les épaules pour le jeter au sol, pris sa jambe pour le traîner jusque dans une chambre avant de lui donner plusieurs coups de poing à la tête ainsi qu'un coup de bâton à la jambe, lui occasionnant de la sorte une bosse au niveau de la pommette droite ainsi que diverses griffures au niveau des jambes;

- à Zurich, le 1er août 2022, au niveau de rue 4______ no. ______, détenu 8 boulettes de cocaïne destinées à la vente, puis pris la fuite lors de son contrôle par la police, l'usage de la force ayant été nécessaire pour le stopper et procéder à son interpellation au niveau de la rue 5______;

- à I______ [ZH], le 16 janvier 2023, vendu 1,18 gramme de cocaïne à J______ au prix de CHF 200.-;

- à Zurich, alors qu'une décision d'interdiction de pénétrer dans ce canton, valable du 22 août 2022 au 21 août 2024, lui avait été notifiée le 22 août 2022, omis de la respecter en pénétrant dans le canton de Zurich entre le 18 et le 25 août 2022, entre le 5 et le 7 septembre 2022, les 14 septembre et 4 octobre 2022, ainsi qu'à tout le moins les 6 juin et 18 juillet 2023, étant précisé qu'il a été interpellé respectivement les 25 août 2022, 7 septembre 2022, 14 septembre 2022, 4 octobre 2022, 6 juin 2023 et 18 juillet 2023;

- régulièrement consommé de la cocaïne et de la marijuana.

c.a. Entendu par le Ministère public le 25 août 2023, A______ a contesté en grande partie les faits reprochés.

S'agissant de sa situation personnelle, il a déclaré être venu en Suisse, plus précisément à Genève, en 2011. Il avait une fille née en 2014. Lors de sa séparation avec la mère de celle-ci, il avait quitté la Suisse pour K______, fin 2017. Il avait obtenu le statut de réfugié en France. Il avait travaillé dans ce pays jusqu'en juin 2022, d'abord dans la restauration, puis comme cariste et enfin, comme auto-entrepreneur pour L______ et M______. Il avait rencontré son actuelle copine à Zurich, en y venant pour faire du tourisme. Ils avaient eu un enfant, qu'il avait reconnu en juillet 2023 à la mairie de N______ [AG]. Au moment de son interpellation le 18 juillet 2023, il était à Zurich pour chercher du travail.

c.b. Le Ministère public a annoncé son intention de classer les voies de fait reprochées à l'encontre de H______ ainsi que l'infraction de violation de l'interdiction de pénétrer dans le canton de Zurich du 25 août 2022.

d. À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, le prévenu a été condamné à quatre reprises à Genève en 2013, 2014 et 2015 pour contravention et délit à la LStup, entrée et séjour illégal et faux dans les certificats; et à Zurich le 9 décembre 2022 pour non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée et contravention à la LStup.

e.a. La demande de mise en liberté formée par A______, le 17 août 2023, par devant le TMC, a été rejetée par ordonnance du 22 août 2023.

e.b. À la suite de l'arrêt de la Chambre de céans du 20 septembre 2023 (ACPR/724/2023) annulant cette ordonnance pour violation du droit d'être entendu et renvoyant la cause au TMC pour nouvelle décision, cette autorité a, le 29 septembre 2023, ordonné la mise en liberté du prévenu avec les mesures de substitution suivantes, valables jusqu'au 28 mars 2024, sous réserve de prolongation (OTMC/2905/2023) :

a. Dépôt de ses documents d'identité en main du Ministère public;

b. Obligation de résider c/o O______ rue 6______ no. ______, [code postal] P______ [AG];

c. Obligation d'informer le Ministère public de tout changement de domicile;

d. Obligation de déférer aux convocations de la justice qui pourront valablement être adressées à son conseil;

e. Interdiction de se rendre dans le canton de Zurich;

f. Obligation de travailler ou chercher un travail dans le respect de la législation et d'en attester mensuellement auprès de la Direction de la procédure.

e.c. Le TMC a précisé à cet égard que le risque de fuite ne pouvait être exclu, A______ étant de nationalité étrangère, disposant d'un titre de séjour en France et de possibilités d'emploi dans ce pays où son frère réside.

S'agissant du risque de réitération, celui-ci était concret, le prévenu ayant été condamné à 5 reprises depuis le 11 janvier 2013 pour des faits similaires, la dernière fois le 9 décembre 2022, par la Staatsanwaltschaft Zürich-Sihl, à une peine privative de liberté de 90 jours, ainsi qu'à une amende de CHF 300.- pour infraction à l'art. 119 LEI et contravention à l'art. 19a ch. 1 LStup. Il avait également été arrêté à 7 reprises entre août 2022 et juillet 2023 pour ne pas avoir respecté l'interdiction de pénétrer dans le canton de Zurich, seule son interpellation le 18 juillet 2023 ayant permis de mettre un terme durable à ses agissements. Au vu toutefois des attaches du prévenu avec la Suisse, attestées par pièces, du soutien dont il disposerait et des possibilités d'emploi qu'il invoquait, des mesures de substitution semblaient pouvoir contenir suffisamment ces risques, lesquels n'exigeaient pas impérativement que l'intéressé reste détenu.

f. Par ordonnance du 4 janvier 2024, le TMC, sur requête du prévenu – qui indiquait ne plus cohabiter avec sa compagne, O______, et leur fils à N______ [AG] mais résider désormais chez une amie dans le canton de Genève, étant précisé qu'il était désormais le père d'une petite fille résidant à Genève –, a modifié les mesures de substitution en ce sens que ce dernier avait l'obligation de résider c/o R______, route 7______ no. ______, [code postal] S______ [GE].

g.a. Le 28 février 2024, A______ a été interpellé par la police à la rue de Berne à Genève.

g.b. Il lui est reproché d'avoir, le jour en question :

- à 14h55, à la hauteur de la rue 8______ no. ______, vendu à T______, une boulette de cocaïne d'un poids brut de 0,5 gramme en échange de la somme de CHF 35.-;

- à 14h56, devant le bar U______, sis rue 9______ no. ______, vendu à une femme non identifiée, à tout le moins une boulette de cocaïne.

Il lui est en outre reproché d'avoir, à Genève, du 21 octobre 2023 au 28 février 2024, séjourné sur le territoire suisse alors qu'il ne disposait ni des autorisations nécessaires, ni d'un passeport valable, ni encore de ressources financières suffisantes lui permettant d'assurer sa subsistance durant son séjour.

g.c. Entendu par le Ministère public à l'audience du 29 février 2024 dans le cadre de cette procédure P/5590/2024, A______ a contesté les faits reprochés.

À l'issue de l'audience, le Ministère public a ordonné sa mise en liberté.

g.d. Ladite procédure a été jointe à la présente cause le 8 mars 2024.

h.a. Le 21 mars 2024, le Ministère public a sollicité du TMC la prolongation des mesures de substitution en vigueur depuis le 29 septembre 2023, tout en rappelant que l'obligation de résider à N______ [AG] avait été remplacée par celle de vivre c/o R______ à S______ [GE].

h.b. Par ordonnance du 22 mars 2024, le TMC a prolongé jusqu'au 28 septembre 2024 les mesures de substitution a. et c. à f. ordonnées le 29 septembre 2023, omettant de se prononcer sur l'obligation de résider à Genève (en ne la prolongeant pas ni en la levant).

Il a considéré, s'agissant des risques de fuite et de réitération, qu'il pouvait être renvoyé à l'ordonnance du 29 septembre 2023 (OTMC/2905/2023), aucun élément n'étant survenu depuis lors modifiant l'appréciation de ces risques. Partant, les mesures ordonnées paraissaient encore aptes et adéquates pour diminuer ceux-ci.

i.a. Le 17 mai 2024, A______ a été arrêté par la police à la rue des Alpes à Genève, après avoir été observé en train de vendre une boulette de cocaïne à V______, à la rue 8______ no. ______ (P/12287/2024).

Entendu comme prévenu par la police, l'intéressé a reconnu les faits, précisant avoir "juste" vendu une boulette pour pouvoir se nourrir. Il avait le droit d'être en Suisse, ajoutant avoir "un document du TMC" qui l'obligeait à séjourner à l'adresse sise c/o R______ à S______. À la question de savoir où il résidait, il a répondu qu'actuellement, il dormait où il pouvait.

Le lendemain, le Ministère public a ordonné sa mise en liberté.

i.b. Dite procédure a été jointe à la présente cause le 30 mai 2024.

j.a. Le 21 août 2024, A______ a été arrêté par la police à la rue 8______ no. ______ à Genève (P/19306/2024). Il était soupçonné d'avoir vendu, le jour en question, à W______, deux boulettes de cocaïne d'un poids total de 1,42 gramme pour la somme de CHF 120.-,

À la police, il a admis les faits, ajoutant que c'était "la première fois qu'il fai[sait] cela". L'argent retrouvé sur lui (environ CHF 600.- en petites coupures et EUR 50.-) provenait de son activité professionnelle en France comme auto-entrepreneur L______, étant précisé qu'un employé en France travaillait pour lui, lui-même restant en Suisse pour s'occuper de ses enfants. Il était sans domicile fixe mais a donné comme adresse de notification en Suisse celle de S______.

j.b. Prévenu par le Ministère public, le lendemain, d'infraction à l'art. 19 al. 1 LStup, l'intéressé a déclaré avoir agi car il avait des dettes (frais d'avocat).

À l'issue de son audition, le Ministère public a ordonné sa mise en liberté.

k.a. Le 28 août 2024, A______ a été arrêté par la police à la rue 8______ à Genève (P/19858/2024). Il était soupçonné d'avoir vendu, le jour en question, à X______, une boulette de cocaïne d'un poids brut de 0,4 gramme pour la somme de CHF 30.-.

À la police, il a admis les faits. Il ne faisait pas cela d'habitude. Un ami dont il ne connaissait pas le nom lui avait donné la drogue. Il lui avait demandé de l'aide pour se faire un peu d'argent. Il habitait actuellement chez des amis. Il n'avait pas d'adresse en Suisse.

k.b. Prévenu par le Ministère public, le lendemain, d'infraction à l'art. 19 al. 1 LStup, A______ a confirmé ses précédentes déclarations. Il avait des dettes en lien avec la procédure civile initiée pour pouvoir voir ses enfants. Il rappelait avoir deux enfants en Suisse, l'un à N______ [AG], l'autre à Genève. Il essayait d'obtenir un droit de visite.

À l'issue de l'audience, le Ministère public a ordonné sa mise en liberté.

l. Les procédures P/19306/2024 et P/19858/2024 seront jointes à la présente cause le 25 septembre 2024.

m.a. Le 13 septembre 2024, A______ a encore été arrêté par la police à la rue 8______ no. ______ à Genève (P/21273/2024). Il était soupçonné d'avoir vendu une boulette de cocaïne à Y______.

Il a contesté les faits devant la police. Lui-même consommait de la réside de cannabis. Il avait habité à S______ et recevait son courrier à cette adresse.

m.b. Prévenu par le Ministère public, le lendemain, d'infraction à l'art. 19 al. 1 LStup, A______ a contesté les faits. Il cherchait du travail mais n'en trouvait pas, faute de permis.

` À l'issue de l'audience, le Ministère public a informé le prévenu qu'il allait solliciter sa mise en détention provisoire en raison des risques de réitération et de fuite.

m.c. Dite procédure a été jointe à la présente cause le même jour.

n. Dans sa demande de mise en détention provisoire du 14 septembre 2024, le Ministère public rappelle factuellement les charges pesant sur le prévenu jusqu'à la date de prolongation des mesures de substitution, le 22 mars 2024. Il expose ensuite que, depuis lors, l'intéressé avait été interpellé à 4 reprises pour des délits à la LStup. Les procédures P/12287/2024 et P/21273/2024 avaient été jointes à la présente procédure, tandis que les procédures P/19306/2024 et P/19858/2024 devaient encore l'être. Il existait un risque de fuite et de réitération qu'aucune mesure de substitution ne pouvait pallier.

o. À l'audience du 15 septembre 2024 devant le TMC, A______ a contesté tout risque de fuite. Il n'avait jamais quitté la Suisse après avoir été libéré la dernière fois. S'agissant du risque de réitération, il était d'accord de se conformer à une interdiction de se rendre dans le quartier des Pâquis. Il s'engageait, en sus, à se présenter à un poste de police à intervalles réguliers; à entamer des démarches auprès de l'association Z______ pour bénéficier d'un travail; à se soumettre à un suivi régulier avec le Service de probation et d'insertion; à se soumettre à un suivi auprès de la Fondation AA_____ ou le CAAP AB_____; à prendre contact avec l'Hospice général à sa libération; à résider à la route 7______ no. ______ à S______; à effectuer des tests d'abstinence de consommation de stupéfiants; et à se soumettre aux précédentes mesures de substitution.

Il a ajouté regretter "les faits reprochés récemment". À la question du juge lui demandant s'il reconnaissait les derniers faits qui lui était reprochés, il a répondu n'avoir pas vendu de stupéfiants. Il regrettait d'avoir été aux Pâquis.

Il voyait ses enfants toutes les semaines. L'aînée, qui vivait à Genève avec sa maman, avait 10 ans. Le cadet avait un an et 4 mois et vivait avec sa mère à N______.

C. Dans son ordonnance, le TMC relève tout d'abord que la demande de mise en détention du Ministère public était muette sur les derniers faits reprochés au prévenu, soit ceux issus de la P/12287/2024 et la vente d'une boulette de stupéfiants le 13 septembre 2024, de sorte que se posait la question de savoir s'il pouvait se fonder également sur ces faits. Il constate à cet égard que le conseil du prévenu avait plaidé devant lui "les derniers faits reprochés au prévenu de septembre 2024" et indiqué que le Ministère public se fourvoyait en considérant que ces derniers faits justifiaient et motivaient la demande de mise en détention. Il retient ainsi qu'il était clair pour le prévenu et son conseil que les faits du 13 septembre 2024 participaient de la motivation de la demande de mise en détention du 14 septembre 2024, même s'ils étaient omis – par inadvertance du Ministère public – dans la demande de mise en détention, de sorte qu'il en serait tenu compte.

En l'état, les charges étaient graves et suffisantes, eu égard aux constatations policières, aux plaintes pénales déposées et aux aveux très partiels du prévenu. Le risque de fuite était concret, le prévenu étant de nationalité étrangère, disposant d'un titre de séjour en France et de possibilités d'emploi dans ce pays où son frère réside. Ce risque était renforcé par la peine-menace et concrètement encourue ainsi que par la perspective d'une expulsion de Suisse (art. 66a ss CP). Le risque de réitération était tangible, l'intéressé ayant déjà été condamné à 5 reprises depuis le 11 janvier 2013 pour des faits similaires, la dernière fois le 9 décembre 2022 par la Staatsanwaltschaft Zürich-Sihl. Le prévenu avait également été arrêté à 7 reprises entre août 2022 et juillet 2023 pour ne pas avoir respecté l'interdiction de pénétrer dans le canton de Zurich. Il avait en outre été interpellé à plusieurs reprises depuis la mise en place des mesures de substitution, pour des faits de vente de stupéfiants. Aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre les mêmes buts que la détention au vu des risques retenus.

D a. À l'appui de son recours, A______ conteste le risque de fuite. Les motifs invoqués à l'appui par le TMC étaient les mêmes que ceux qui avaient été avancés et contrés par les mesures de substitution ordonnées le 29 septembre 2023. Le TMC avait alors considéré que ses liens avec la Suisse et lesdites mesures de substitution étaient suffisants pour contenir ce risque. Faute d'élément nouveau, la décision querellée s'inscrivait en contradiction avec l'analyse du 29 septembre 2023. Il rappelle au demeurant avoir des attaches en Suisse en tant que père de deux enfants mineurs. Le cas échéant, le risque de fuite pouvait être pallié par les mesures qu'il proposait. Sous l'angle du risque de récidive, l'ordonnance de mise en liberté du 29 septembre 2023 reposait déjà sur les mêmes condamnations que celles invoquées aujourd'hui pour justifier la détention provisoire. La seule nouveauté était qu'il avait, selon le TMC, réitéré à plusieurs reprises ses comportements, malgré la mise en place de mesures de substitution. Cette affirmation vague ne précisait pas le nombre exact de réitération, ni les faits spécifiques auxquels il était fait référence. La décision querellée échouait à démontrer que le risque de récidive était suffisamment sérieux et imminent. Même s'il avait été interpellé à plusieurs reprises depuis sa mise en liberté, aucune de ces infractions – quelques grammes de drogue – n'était d'une gravité telle qu'elle justifierait une détention provisoire. Or, le placer en détention pour la supposée vente d'une petite quantité de cocaïne, de surcroît contestée, était disproportionné. Que le Ministère public ne retienne pas dans sa demande de mise en détention les faits issus des P/12287/2024 et P/21273/2024 démontrait que ces faits, dans leur globalité, étaient insignifiants à ses yeux. Par impossible, les mesures de substitution précédemment invoquées demeuraient valables pour écarter ce risque. Il en proposait par ailleurs d'autres, destinées à l'aider à se sortir de la précarité (soutien de l'Hospice général, qui avait accepté de faire une évaluation de sa situation financière, et de l'association Z______).

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours et se réfère à la motivation de l'ordonnance querellée.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance, sans autre remarque.

d. Le recourant n'a pas souhaité répliquer.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             À titre liminaire, il est rappelé que la Chambre de céans, en tant qu'autorité de recours, possède un plein pouvoir d'examen en fait et en droit et n'est pas liée par les motifs invoqués par les parties (art. 391 al. 1 let. a CPP) ou la motivation de l'autorité précédente dont elle à connaître des décisions, le seul principe applicable en la matière étant celui de la vérité matérielle objective et de la légalité (art. 7 CPP) .

3. Le recourant ne conteste pas les charges, lesquelles apparaissent toujours suffisantes et se sont même renforcées avec les nouvelles préventions des 17 mai 2024 et 13 septembre 2024 pour infractions à l'art. 19 al. 1 LStup, dans les P/12287/2024 et P/21273/2024, toutes deux jointes à la présente procédure le 30 mai, respectivement le 14 septembre, 2024.

Il n'y a dès lors pas lieu d'y revenir.

4. Le recourant conteste le risque de fuite et estime qu'il peut, le cas échéant, être pallié par les mesures de substitution qu'il propose.

4.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

4.2. En l'espèce, il est admis que le recourant est de nationalité étrangère et dispose d'un titre de séjour en France, où son frère réside. Il affirme travailler dans ce pays comme auto-entrepreneur et y disposer d'une source de revenu.

Nonobstant le fait que le prévenu ait un enfant (AC_____, né le ______ 2023, qu'il avait reconnu) et vivait avec lui et sa mère à P______ [AG] (cf. PP 1'086 ss), le TMC a considéré, dans son ordonnance du 29 septembre 2023, que le risque de fuite ne pouvait être exclu mais qu'il pouvait être pallié par les mesures de substitution suivantes : dépôt de ses documents d'identité; obligation de résider chez sa compagne, O______, à N______ [AG]; obligation d'informer le Ministère public de tout changement de domicile; et obligation de déférer aux convocations de la justice.

La seconde mesure de substitution a été modifiée et remplacée par le TMC le 4 janvier 2024, en ce sens que le prévenu – qui avait indiqué ne plus vivre chez sa compagne et leur fils à N______, mais désormais à Genève, où il était devenu père d'une petite fille –, avait l'obligation de résider chez R______, route 7______ no. ______, [code postal] S______ [GE].

Les mesures de substitution ordonnées le 29 septembre 2023 – hormis celle l'obligeant à vivre chez sa compagne à N______ – ont été prolongées par le TMC le 22 mars 2024.

Or, interpellé par la police le 17 mai 2024, le prévenu a déclaré qu'actuellement, il dormait où il le pouvait, puis, le 21 août 2024, à l'occasion d'une nouvelle interpellation dans le cadre de la P/19306/2024, il a indiqué être sans domicile fixe, l'adresse de S______ n'étant qu'une adresse de notification. Lors de sa nouvelle arrestation du 28 août 2024 dans la P/19858/2024, il a précisé qu'il habitait actuellement chez des amis. Enfin, lors de son audition à la suite de son interpellation du 13 septembre 2024, il a déclaré avoir habité à S______ et continuer à recevoir son courrier à cette adresse. Force est ainsi de constater que depuis le 22 mars 2024 – et indépendamment de savoir si le TMC, à cette occasion, a omis de prolonger l'obligation faite au prévenu de résider à S______ ou eu l'intention de lever cette mesure – l'intéressé ne réside plus à cette adresse genevoise, qu'il a uniquement gardée comme adresse de notification. On ignore, partant, où il est effectivement domicilié.

Il s'agit là incontestablement d'un fait nouveau en lien avec le risque de fuite, sous la forme de disparition dans la clandestinité, étant rappelé qu'alors qu'il était sans domicile connu, le prévenu avait fait l'objet d'un avis de recherche et d'arrestation émis le 2 décembre 2020 et n'avait été interpellé que deux ans et demi plus tard à Zurich, à l'occasion d'une infraction à l'art. 119 LEI.

Que l'intéressé soit à nouveau père d'une petite fille à Genève – dont on ignore au demeurant s'il l'a reconnue et quels liens il entretiendrait avec elle et sa mère – n'est pas de nature à rendre ce risque moins concret.

Les mesures de substitution qu'il propose pour pallier ce risque – identiques à celles qui prévalaient à l'époque, soit obligation de résider à la route 7______ no. ______ à S______, obligation de se présenter hebdomadairement à un poste de police, dépôt de ses documents d'identité, obligation d'informer le Ministère public de tout changement de domicile et obligation de déférer à toute convocation judiciaire – sont donc, au vu de ce qui précède, insuffisantes en tant qu'elles ne permettraient pas de prévenir sa fuite mais uniquement de la constater a posteriori. Il en va de même du prononcé d'un avertissement formel à son encontre, tel que proposé.

5. L'existence de ce risque indiscutable dispense d'examiner s'il existerait en sus un risque de réitération (arrêt du Tribunal fédéral 7B_188/2024 du 12 mars 2024 consid. 6.3.1).

6. La durée de la mise en détention provisoire reste proportionnée à la peine concrètement encourue, si l'ensemble des faits reprochés au recourant devait être confirmé.

La durée de deux mois prononcée apparaît nécessaire pour permettre au Ministère public de clore son instruction et renvoyer le prévenu en jugement.

7. Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

8. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

9. Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

9.1. Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

9.2. En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice du présent recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Monsieur Xavier VALDES TOP, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES TOP

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/13625/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

 

 

Total

CHF

1'005.00