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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/22/2024

ACPR/228/2024 du 27.03.2024 ( RECUSE ) , REJETE

Recours TF déposé le 05.04.2024, 7B_402/2024
Descripteurs : RÉCUSATION;DISCIPLINE EN PROCÉDURE
Normes : CPP.56; CPP.61.leta; CPP.63; CPP.181.al3

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/22/2024 ACPR/228/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 27 mars 2024

Entre

A______, détenu à la prison de B______, représenté par Me Tano BARTH, avocat, Pont-Rouge Avocats, route des Jeunes 9, 1227 Les Acacias,

requérant

 

et

C______, Procureure, p.a MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

citée

 


EN FAIT :

A. Par lettre du 23 février 2024, A______ a demandé à C______, Procureure chargée d’instruire la procédure P/1______/2024 dirigée contre lui, de se récuser.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.        A______ et D______ ont passé la soirée du 6 janvier 2024 au bar de E______, à Genève, buvant et flirtant, avec des allées et venues aux toilettes de l’établissement.

Après leur dernier passage aux toilettes, ils se sont rendus dans un local technique, attenant à l’établissement. D______ prétend y avoir été violée. Elle déclare avoir ensuite gagné la voiture de A______, stationnée non loin dans la rue, s’en être échappée peu après qu’il eut pris le volant et avoir pris un taxi pour rentrer chez elle.

b.        A______ conteste l’avoir violée. Prévenu de viol (art. 190 CP), il est en détention provisoire depuis le 9 janvier 2024. Une première demande de libération a été rejetée le 9 février 2024 (cf. ACPR/165/2024), et une deuxième le 15 mars 2024.

c.         Des photos de D______ laissent deviner des éraflures aux mains, genoux et avant-bras. Aucune vidéo de l’intérieur de E______ n’existe. Les images disponibles le sont pour l’extérieur et montrent A______ et D______ qui cheminent, le 7 janvier 2024 à 4h., vers l’automobile du premier, puis dix minutes plus tard, la prénommée qui en sort pour se diriger vers un taxi. Selon les analyses du CURML du 14 février 2024, la présence de sperme de A______ a été décelée dans les parties intimes de D______ et sur la culotte qu’elle portait.

La police a été chargée le 9 janvier 2024 d’auditionner le directeur de l’établissement, un agent de sécurité, le chauffeur de taxi et l’infirmière qui avait reçu D______ aux HUG, et de fournir des photos des lieux présumés de survenance des faits. Le chauffeur de taxi a expliqué avoir pris en charge D______, qui s’était assise à l’avant de son véhicule alors qu’une cliente s’était déjà installée à l’arrière, et l’avoir conduite à F______ [GE]. Le directeur de E______ et l’employé préposé, ce soir-là, à l’accueil ont précisé que A______ avait travaillé dans l’établissement comme « extra » à la mi-décembre 2023, semble-t-il à la suggestion du second, qui le connaissait déjà. Ils avaient observé des allées et venues aux toilettes de D______ et A______ ; leurs déclarations sur l’apparence d’imbibition de la jeune femme ne sont pas concordantes. Le directeur avait indiqué verbalement à la police le 7 janvier 2024 que A______ était, par ailleurs, un client régulier de la discothèque et que, le soir des faits litigieux, il avait passé plus de dix minutes aux toilettes avec une jeune femme. Ces dépositions correspondent aux premières déclarations de D______, qui avait signalé que A______ lui avait dit avoir travaillé à E______ et qu’il semblait bien en connaître le personnel. L’infirmière a expliqué que, pendant la consultation, D______ avait reçu un appel téléphonique de la sœur de A______, qu’elle-même avait pu comprendre parce qu’elle parlait l’espagnol et lors duquel la patiente s’était fait traiter de menteuse et menacer d’expulsion.

d.        Dans sa plainte à la police, D______ a notamment précisé que, après qu’elle eut bu son cinquième gin tonic, elle s’était levée pour aller aux toilettes, mais ne marchait pas droit, et que, en passant vers le vestiaire, « un homme du bar » avait ri à son sujet avec A______. Revenue au bar, elle avait à peine touché son sixième gin tonic, puis avait accepté la suggestion de A______ de retourner aux toilettes. Celui-ci avait demandé pour elle sa veste « à la personne du vestiaire ». Ce vêtement sur le bras, elle s’était rendue avec lui aux toilettes ; après quoi, A______ l’avait entraînée derrière une porte, puis dans un local situé en haut d’une échelle métallique, où il avait commencé à l’embrasser, puis à la violer.

e.         Le 22 janvier 2024, le défenseur de A______, se fondant sur cette déposition, a présenté deux réquisitions de preuve « particulièrement urgentes », soit les auditions de « la personne au bar » et de « la personne au vestiaire » de E______ ; il conviendrait aussi de convoquer une confrontation avec D______ (et de l’enregistrer) avant le 12 février 2024, ainsi que de perquisitionner le téléphone portable de celle-ci. L’instruction était « trop dirigée à charge ».

f.          Par pli du 30 janvier 2024, intitulé « mise en demeure préalable à un recours en déni de justice et à une demande de mise en liberté », le défenseur de A______ a intimé au Ministère public de convoquer sous quarante-huit heures la confrontation, à tenir avant le 12 février 2024. Il listait simultanément des « erreurs de procédure » qui auraient été commises à son détriment, reprochant – en termes vifs – à C______ de manquer au serment qu’elle avait prêté.

g.        Par retour du courrier, C______ a répondu qu’elle avait chargé la police de diverses investigations, dont la défense se rendrait compte en consultant le dossier, et qu’une confrontation serait organisée ensuite.

h.        Le même jour, la police a rendu un rapport circonstancié, comprenant les auditions susmentionnées (let. B.c. supra), ainsi qu’un cahier photographique de l’ensemble des lieux fréquentés par les parties à E______ et les locaux adjacents.

i.          Le lendemain, le défenseur de A______ lui a intimé de faire entendre par la police « la personne au bar » et « la personne au vestiaire » de E______, estimant ces témoignages « beaucoup plus importants » que ceux à recueillir selon le mandat d’actes d’enquêtes décerné le 9 janvier 2024. Il renouvelait cette mise en demeure sous peine de former recours en déni de justice et de présenter une demande de mise en liberté.

j.          Le 10 février 2024, le défenseur de A______ a communiqué quatre dates auxquelles il était disponible pour l’audience de confrontation, précisant qu’il ne considérerait pas une date postérieure au 19 février 2024 comme une réponse suffisamment rapide à une injonction sur ce point du Tribunal des mesures de contrainte (ci-après, TMC). Il a renouvelé la demande d’auditions des témoins du bar et du vestiaire.

k.        Le 11 février 2024, il a rappelé sa requête de perquisitionner le téléphone portable de D______, que C______ refuserait, faisant naître un soupçon de parti pris contre lui.

l.          Le 14 février 2024, il a redemandé que la confrontation à venir soit filmée, au motif que la crédibilité, les tics de langage et la posture corporelle devaient pouvoir être examinés.

m.      Le 22 février 2024, D______, entendue contradictoirement de 14h.15 à 17h.41 en salle LAVI, avec interprète et sans être filmée, a détaillé sa version des faits, depuis sa rencontre avec A______ jusqu’à ce que celui-ci la retînt lorsqu’elle avait voulu sortir du local. Pendant cette déposition, C______ a signifié à A______ l’interdiction de prendre des notes personnelles. À l’issue de l’audience, elle a imparti un délai aux parties pour demander d’autres auditions.

n.        Le 23 février 2024, le défenseur de A______ a demandé la rectification du procès-verbal de l’audience de la veille, au motif que C______ n’avait pas protocolé ses objections sur le fait que le rappel des droits et obligations de la partie plaignante n’avait pas été donné littéralement.

o.        Le 26 février 2024, A______ a modifié ses demandes d’audition du personnel de E______, les étendant aux deux personnes qui, par suite d’un « changement de shift » (sic), servaient au bar et précisant que celui qui était affecté au vestiaire de l’établissement se prénommerait G______. C______ y donnera une suite favorable le 18 mars 2024.

p.        Le 7 mars 2024, la Chambre de céans a rejeté un recours de A______ contestant son maintien en détention par le TMC (cf. let. B.b. supra) et offrant, notamment, des sûretés en CHF 10'000.- (ACPR/165/2024). Le 18 mars 2024, elle a déclaré sans objet un recours contre des refus de visite en détention (ACPR/201/2024) et en fera de même, le 27 mars 2024, d’un recours en déni de justice (ACPR/226/2024). Le 27 mars 2024 encore, elle a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, un quatrième recours du prévenu, formé contre l’interdiction de prendre des notes personnelles en audience (let. B.l. supra ; ACPR/227/2024).

q.        Le 8 mars 2024, la confrontation entre A______ et D______ s’est poursuivie et achevée sous l’égide d’un autre Procureur. En fin d’audience, les conseils des parties ont déclaré n’avoir pas d’autres questions à poser à D______.

r.         Le 11 mars 2024, C______ a préavisé négativement une demande de libération présentée par A______, sauf à ce que celui-ci fournît notamment des sûretés en CHF 10'000.-. Le 15 suivant, le TMC a refusé d’élargir le prévenu. Un recours contre cette décision est pendant.

C. a. Dans sa requête, A______, qui invoque l’art. 56 let. f CPP, énumère ce qu’il tient pour des entraves aux droits de la défense et qu’il aurait reprochées à C______ dès le 22 janvier 2024. Il se plaint, en bref, que l’instruction ne se déroulerait qu’à charge et avec une lenteur destinée à le pousser à bout ; que la prénommée aurait menti dans des observations à l’attention de la Chambre de céans ; et que le déroulement de l’audience du 22 février 2024 aurait « dépassé la fiction » (refus de faire filmer ; absence ou omission de donner lecture des dispositions sur la dénonciation calomnieuse, les déclarations induisant la justice en erreur et l’entrave « à l’action à la plaignante » [sic] ; interdiction unilatérale de prendre des notes ; interruption abrupte de l’audience). Il lui serait désormais beaucoup plus difficile de démontrer qu’il avait été victime d’une dénonciation calomnieuse.

b. C______ estime la requête tardive, au motif que A______ avait recensé dès le 30 janvier 2024 déjà toutes les erreurs procédurales qu’il lui reproche dans sa requête. Sur le fond, elle rejette toutes ces critiques, mais concède qu’il lui avait échappé, dans sa prise de position sur le refus de libération du mois de février 2024 [cf. ACPR/165/2024, précité, let. D.c.], que le prénommé avait, en réalité, spontanément déclaré avoir travaillé une fois à E______, en décembre 2023.

c.A______ réplique longuement, introduisant des griefs supplémentaires.


 

EN DROIT :

1.             Partie à la procédure, en tant que prévenu (art. 104 al. 1 let. a CPP), le requérant a qualité pour agir (art. 58 al. 1 CPP), et la Chambre de céans est compétente pour connaître de sa requête, dirigée contre un membre du Ministère public (art. 59 al. 1 let. b CPP).

2.             L’objet du litige est délimité strictement par les faits invoqués dans la requête : il ne s’étend pas à ceux énoncés en réplique seulement (ACPR/847/2023 du 31 octobre 2023 consid. 2). En effet, le droit de réplique sert à déposer des observations au sujet d'une prise de position ou d'une pièce nouvellement versée au dossier (cf. ATF 137 I 195 consid. 2), mais n'a pas vocation à permettre à la partie qui saisit le juge de pallier une argumentation défaillante ou de compléter son acte (ATF 143 II 283 consid. 1.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_752/2021 du 19 mai 2022 consid. 2.2.), p. ex. en soulevant des griefs qui auraient déjà pu être exposés dans le mémoire de recours (arrêt du Tribunal fédéral 1C_575/2019 du 1er mars 2022 consid. 2.4.).

3.             3.1. Conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la récusation doit être demandée sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation, sous peine de déchéance (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3 p. 275). En matière pénale, n'est pas tardive la requête formée après une période de six ou sept jours (arrêt du Tribunal fédéral 1B_118/2020 du 27 juillet 2020 consid. 3.2 et les arrêts cités).

3.2. En l’occurrence, le requérant tire essentiellement parti des circonstances de l’audience du 22 février 2024 (sa requête étant d’ailleurs formée le jour suivant). Sur ce point, il a agi sans délai, au sens qui vient d’être rappelé.

4.             Le requérant estime que l’apparence de partialité de la citée contre lui serait démontrée par la façon partiale dont la citée conduit la procédure pénale dirigée contre lui.

4.1.       Un magistrat est récusable, selon l'art. 56 let. f CPP, lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre suspect de prévention. Cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes. Elle correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH (ATF 144 I 234 consid. 5.2 ; 143 IV 69 consid. 3.2). Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération. Les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 144 I 159 consid. 4.3). En tant que direction de la procédure (art. 61 let. a CPP), l'attitude et/ou les déclarations du procureur ne doivent pas laisser à penser que son appréciation quant à la culpabilité du prévenu serait définitivement arrêtée (art. 6 et 10 CPP ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_430/2015 du 5 janvier 2016 consid. 3.2 = SJ 2017 I 50 ; 1B_384/2017 du 10 janvier 2018 consid. 4.3).

La récusation n'a pas pour finalité de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure. En effet, il appartient aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre (ATF 143 IV 69 consid. 3.2).

4.2.       En l'espèce, le but de l’instruction préparatoire étant d’éclaircir des faits, autant dans l’optique d’une poursuite que d’un classement de la procédure (art. 299 al. 2 let. c et 319 al. 1 CPP), l’audience du 22 février 2024 – qui s’avère à avoir été la première de deux consacrées à recueillir contradictoirement la version du requérant et celle de la partie plaignante – ne dénote aucun manquement de la citée à l’impartialité.

En refusant sur le siège de faire filmer le déroulement de l’audience, puis en demandant au requérant de cesser de prendre des notes pendant que la partie plaignante faisait sa déposition, la citée exerçait la police de l’audience (art. 63 CPP). Ces deux décisions ont été dûment portées au procès-verbal ; comme telles, elles pouvaient être contestées par les voies de droit à disposition d'un prévenu. L’une d’elles a, d’ailleurs, été frappée d’un recours (cf. ACPR/227/2024). Quant au refus de l’autre, l’enregistrement sur un support-son et/ou un support-image, au sens de l’art. 76 al. 4 CPP, il n’a pas été attaqué. On ne saurait en tout cas pas voir d’instruction à charge ou d’autre manquement à l’impartialité dans le refus, sur ce point, de faire usage d’une compétence qu’assume la citée en sa qualité de Direction de la procédure (art. 61 let. a CPP).

Quant à la lecture, que le requérant eût voulu liminaire et in extenso, des dispositions légales réprimant la dénonciation calomnieuse (art. 303 CP), l’induction de la justice en erreur (art. 304 CP) et l’entrave à l’action « à la plaignante » (recte : à l’action pénale, art. 305 CP), le requérant n’indique pas d’où il tire pareille obligation. Il suffit de constater que la partie plaignante, qui était entendue à titre de renseignements (art. 178 let. a CPP) et avait l’obligation de déposer (art. 180 al. 2 CPP), s’est vu rappeler par la citée, conformément à la loi (art. 181 al. 2 CPP), les conséquences possibles d’infractions aux dispositions pénales susmentionnées (cf. p.-v. du 22 février 2024 p. 2). La doctrine voit d’ailleurs dans l’obligation du Ministère public à cet égard une incitation à dire la vérité, ni plus ni moins (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 181). Que la citée ait choisi de mettre cette incitation dans la bouche de la partie plaignante en reprenant simplement la formulation de l’art. 181 al. 3 CPP ne saurait lui être reproché. Pour le surplus, le requérant a demandé une « rectification » du procès-verbal sur ce point, au motif qu’une protestation de son défenseur n’avait pas été consignée, et il n’est donc pas dépourvu d’autres moyens qu’une récusation pour obtenir ce qu’il souhaite à ce sujet (ACPR/154/2015 du 12 mars 2015 consid. 3.3.).

Pour ce qui concerne l’interrogatoire proprement dit de la partie plaignante, l’audience du 22 février 2024 a duré de 14h.15 à 17h.41, ce qui, compte tenu des nécessités d’interprétation (et des incidents sur la prise de notes et la désignation exacte en français de l’échelle gravie par la partie plaignante), ne saurait être considéré comme un privilège conféré à la partie plaignante, mais bien comme le souci de traiter exhaustivement la version des faits données par celle-ci, ne serait-ce qu’à la lumière du cahier photographique. Pour le surplus, on se bornera à relever que le supposé manque « de préparation » préalable de la citée, le libre cours prétendument laissé à la partie plaignante pour s’exprimer et l’interruption abrupte alléguée de l’audience sont, typiquement, à classer parmi les impressions individuelles du requérant. Celui-ci peut d’autant moins soutenir qu’il n’aurait pas eu l’occasion de porter la contradiction à la partie plaignante, qu’une suite de confrontation contradictoire s’est tenue à ces fins, à l’issue de laquelle il a déclaré n’avoir plus de question à poser à celle-ci.

Il convient de rappeler que la citée n’a pas à se faire dicter la manière ou le tempo selon lesquels elle entend conduire son instruction ou poser ses questions (ACPR/783/2023 du 10 octobre 2023 consid. 3.2. ; ACPR/677/2023 du 30 août 2023 consid. 3.2. ; ACPR/575/2021 du 27 août 2021 consid. 2.4. ; ACPR/239/2020 du 22 avril 2020 consid. 5.2. ; ACPR/661/2019 du 30 août 2019 consid. 2.2. ; ACPR/273/2013 du 13 juin 2013 consid. 3.1. ; ACPR/53/2013 du 7 février 2013 consid. 3. ; ACPR/309/2012 du 2 août 2012 consid. 3.2.). Admettre le contraire reviendrait, en quelque sorte, à autoriser le prévenu revendicatif, irritable ou simplement enclin à imposer ses orientations à la procédure, à choisir son procureur et à en faire changer lorsque celui-ci ne satisferait pas ses demandes, ce qui ne se peut (ACPR/783/2023, précité, consid. 3.2. et la référence).

En d’autres termes, rien, dans le déroulement de l’audience du 22 février 2024, ne démontre de parti pris de la citée contre le requérant, dont les multiples lettres préalables accusant celle-ci de manquer à son serment et/ou à son devoir d’instruire équitablement (art. 6 al. 2 CPP) prennent toutes les apparences de pressions répétées pour l’amener à se conformer strictement à ses vues.

4.3.       Il s’ensuit que les autres griefs soulevés dans la requête ne s’inscrivent pas dans la configuration dite de la « goutte d'eau qui fait déborder le vase ». En effet, si – comme le Tribunal fédéral l’a déjà jugé (p. ex. arrêt 1B_163/2022 du 27 février 2023 consid. 3.1.) – plusieurs occurrences fondent seulement ensemble un motif de récusation et que celle-ci peut être demandée lorsque, de l'avis de l'intéressé, la dernière de ces occurrences est la « goutte d'eau qui fait déborder le vase », l'examen des événements passés, dans le cadre d'une appréciation globale, n'est admis que si la dernière occurrence constitue en elle-même un motif de récusation ou, à tout le moins, un indice en faveur d'une apparence de prévention.

Cependant, même s'il est admis que la partie qui demande la récusation d'un magistrat puisse se prévaloir, au moment d'invoquer une suspicion de prévention, d'une appréciation globale des erreurs qui auraient été commises en cours de procédure, il ne saurait, pour autant, être toléré, qu'une répétition durable de l'accusation de partialité apparaisse comme un moyen de pression sur le magistrat pour l'amener progressivement à se conformer aux seules vues de la partie (ibid.).

Comme on vient de le voir, c’est exactement ce qui s’est passé en l’espèce.

5.             La requête sera par conséquent rejetée.

6.             Le requérant, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 59 al. 4 CPP), fixés en totalité à CHF 1'000.-.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette la requête.

Condamne A______ aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______ (soit, pour lui, son défenseur) et à C______.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/22/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur récusation (let. b)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00