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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/465/2024

ACPR/165/2024 du 07.03.2024 sur OTMC/370/2024 ( TMC ) , REFUS

Recours TF déposé le 26.03.2024, rendu le 23.04.2024, REJETE, 7B_371/2024
Descripteurs : DÉTENTION(INCARCÉRATION);VIOL;SOUPÇON;RISQUE DE FUITE;MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/465/2024 ACPR/165/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 7 mars 2024

 

Entre

A______, détenu à la prison de B______, représenté par Me Tano BARTH, avocat, Pont-Rouge Avocats, route des Jeunes 9, 1227 Les Acacias,

recourant,

 

contre l’ordonnance de refus de mise en liberté rendue le 9 février 2024 par le Tribunal des mesures de contrainte

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève – case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.

 


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 9 février 2024, A______ recourt contre l’ordonnance rendue le jour même par le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après, TMC), qui a rejeté sa demande de libération.

Le recourant conclut, avec suite de frais et dépens, à sa libération immédiate, subsidiairement sous des mesures de substitution consistant, pour l’essentiel, à s’abstenir de tout contact avec la victime présumée et les témoins potentiels, voire à offrir une caution de CHF 10'000.-.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.        A______ est un ressortissant colombien s’affirmant à la fois domicilié en Colombie (acte de recours) et vivant en Équateur (p.-v. du TMC du 9 février 2024), où il tire ses revenus d’un hôtel (déclaration à la police du 8 janvier 2024 p. 4). C______ est une ressortissante colombienne sans titre de séjour en Suisse et ayant travaillé dans une crèche.

Ils ont passé la soirée du 6 janvier 2024 au bar D______, à Genève, buvant et flirtant, avec des allées et venues aux toilettes de l’établissement.

Après leur dernier passage aux toilettes, ils se sont rendus dans un local technique, attenant à l’établissement. C______ prétend y avoir été violée. Elle déclare avoir ensuite gagné la voiture de A______, stationnée non loin dans la rue, s’en être échappée peu après qu’il eut pris le volant et avoir pris un taxi pour rentrer chez elle.

b.        A______ conteste l’avoir violée. Prévenu de viol (art. 190 CP), il est en détention provisoire depuis le 9 janvier 2024 (échéance fixée au 8 avril 2024).

c.         Des photos de C______ laissent deviner des éraflures aux mains, genoux et avant-bras. Aucune vidéo de l’intérieur [du bar] D______ n’existe. Les images disponibles le sont pour l’extérieur et montrent A______ et C______ qui cheminent, le 7 janvier 2024 à 4h., vers l’automobile du premier, puis dix minutes plus tard, la prénommée qui en sort pour se diriger vers un taxi. Le pantalon et la culotte portés par C______ ce soir-là sont en mains de la police technique et scientifique, pour analyse.

d.        La police a été chargée le 9 janvier 2024 d’auditionner le directeur [du bar] D______, un agent de sécurité, le chauffeur de taxi et l’infirmière qui a reçu C______ aux HUG, et de fournir des photos des lieux présumés de survenance des faits.

Le chauffeur de taxi a expliqué avoir pris en charge C______, qui s’était assise d’elle-même à l’avant droit de son véhicule alors qu’une cliente s’était déjà installée à l’arrière. Il l’avait conduite à E______ [GE], après avoir déposé la première passagère. Sa déposition correspond aux premières déclarations de C______.

Le directeur [du bar] D______ et l’employé préposé, ce soir-là, à l’accueil ont précisé que A______ avait travaillé dans l’établissement comme « extra » à la mi-décembre 2023, semble-t-il à la suggestion du second, qui le connaissait déjà. La nuit des faits, ils avaient observé des allées et venues aux toilettes de C______ et A______ ; leurs déclarations sur l’apparence d’imbibition de la jeune femme ne sont pas concordantes. Le directeur avait indiqué verbalement à la police le 7 janvier 2024 que A______ était, par ailleurs, un client régulier de la discothèque et que, le soir des faits litigieux, il avait passé plus de dix minutes aux toilettes avec une jeune femme. Ces dépositions correspondent aux premières déclarations de C______, qui avait signalé que A______ lui avait dit avoir travaillé [au bar] D______ et qu’il semblait bien en connaître le personnel.

L’infirmière a expliqué que, pendant la consultation, C______ avait reçu un appel téléphonique de la sœur de A______, dont elle-même avait pu comprendre la teneur parce qu’elle parle l’espagnol, et lors duquel la patiente s’était fait traiter de menteuse et menacer d’expulsion. Sa déposition correspond, elle aussi, aux premières déclarations de C______.

e.         Dans sa plainte à la police, C______ a précisé que, après qu’elle eut bu son cinquième gin tonic, elle s’était levée pour aller aux toilettes, mais ne marchait pas droit, et que, en passant vers le vestiaire, « un homme du bar » avait ri à son sujet avec A______. Revenue au bar, elle avait à peine touché son sixième gin tonic, puis avait accepté la suggestion de A______ de retourner aux toilettes. Celui-ci avait demandé pour elle sa veste « à la personne du vestiaire ». Ce vêtement sur le bras, elle s’était rendue avec lui aux toilettes ; après quoi, il l’avait entraînée derrière une porte, puis dans un local situé en haut d’une échelle métallique, où il avait commencé à l’embrasser, puis à la violer.

f.          Les 22, 30 et 31 janvier 2024, le défenseur de A______, se fondant sur ces passages de la plainte, a présenté et réitéré deux réquisitions de preuve « particulièrement urgentes », soit les auditions de « la personne au bar » et de « la personne au vestiaire » [du bar] D______ ; il conviendrait aussi selon lui de convoquer une confrontation avec C______ (et de l’enregistrer) avant le 12 février 2024. Sans réponse, il a déposé le 5 février 2024 un recours, pendant, contre « l’inaction » du Ministère public.

g.        Dans l’intervalle, le 1er février 2024, A______ a demandé sa mise en liberté, contestant, en bref, l’existence de charges suffisantes et s’affirmant victime d’une dénonciation calomnieuse. Une éventuelle caution de CHF 10'000.- à réunir par sa famille à Genève (sa mère et le mari de celle-ci, sa sœur) était proposée. À l’audience du TMC, il a persisté dans ses moyens et conclusions, expliquant que les revenus – estimés au maximum à USD 600.- par mois – qu’il tirait de biens immobiliers et de l’hôtel en Équateur étaient consacrés à l’entretien des trois frères trisomiques de son [défunt] père.

C. Dans l’ordonnance querellée, le TMC a suivi le préavis négatif du Ministère public. Les charges étaient suffisantes. La victime présumée s’était rapidement rendue à la police, vainquant sa crainte liée à sa présence illégale en Suisse, et avait donné un récit clair et détaillé, sans paraître chercher de bénéfice secondaire dans la présente procédure. Ses dermabrasions et des images vidéo prises aux alentours [du bar] D______ corroboraient ses explications, notamment un changement d’attitude entre son arrivée et son départ. A______ se livrait à une appréciation des preuves qui n’avait pas lieu d’être à ce stade. L’instruction suivait son cours, même si le Ministère public n’avait pas encore statué sur les demandes du prévenu [cf. let. B.f. supra], qui n’apparaissaient pas dénuées de pertinence. Le Ministère public saurait convoquer rapidement une confrontation. Les risques de fuite et de collusion étaient concrets et très élevés. Notamment, le prévenu disposait d’un billet de retour pour le 8 février 2024. Aucune mesure de substitution ne saurait pallier les risques susmentionnés.

D. a. À l’appui de son recours, prolixe, A______ se plaint d’avoir été placé en détention sur la seule foi des déclarations de C______. Le Ministère public se refusait à instruire à décharge et s’était focalisé sur les personnes énoncées dans le mandat d’acte d’enquêtes, alors que les témoignages qu’il requérait, lui, étaient « bien plus importants » et démontreraient son innocence. Les soupçons retenus par le TMC ne devaient pas seulement être suffisants, mais forts. Les principes d’égalité des armes et d’égalité de traitement commandaient un équilibre. Or, le Ministère public privilégiait des accusations sur lesquelles pesaient des soupçons, forts ici, de dénonciation calomnieuse. Les risques de fuite et de collusion étaient plus élevés contre C______ que contre lui-même, qui était en détention, « mais pas elle » (sic), sans que « personne » ne tranche « au moins une fois » cette problématique.

Pour le surplus, A______ conteste tout risque de fuite ou de collusion. Un retour en Amérique du Sud, nécessairement par la voie des airs, était moins aisé qu’à travers l’Europe. Le TMC retenait, en violation de son obligation de motivation, qu’il disposerait de beaucoup d’argent. Il ne connaissait aucune des personnes dont le TMC tenait l’audition pour nécessaire. Cas échéant, le Ministère public disposait de « tout l’arsenal des mesures secrètes », au sens des art. 269 ss. CPP, pour démontrer le risque de collusion.

b. Le TMC s’en tient à sa décision.

c. Le Ministère public se range à l’avis du premier juge, dont il cite abondamment la décision. Il observe que A______ s’était bien gardé de dire qu’il avait travaillé un soir [au bar] D______, alors que, selon le directeur de l’établissement, chacun qui y a travaillé sait que le local de commission des faits n’est pas fermé à clé. Il ajoute que la confrontation demandée se tiendrait le 22 février 2024.

d. A______ réplique abondamment, non sans avoir demandé une prolongation du délai pour ce faire. Il enjoint à la Chambre de céans de visionner les vidéos des entrées et sorties [du bar] D______. L’instruction était bâclée, et on ne voyait pas ce qui convaincrait un tribunal d’entrer en voie de condamnation.

Produisant un relevé de carte de crédit de son beau-père, il met en évidence un montant de EUR 956.28 qui représenterait le coût de son billet d’avion. Il soutient que les membres de sa parenté à Genève pourraient témoigner de leur condition financière.

E. Lors de l’audience du 22 février 2024, C______ a été entendue contradictoirement et a détaillé sa version des faits, depuis sa rencontre avec A______ jusqu’à la commission du viol.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé dans les forme et délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 222 et 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant estime, en bref, qu’aucun « fort soupçon » de viol ne pèserait sur lui.

2.1.       À teneur de l'art. 221 al. 1 CPP, la détention provisoire suppose que le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit. Selon la jurisprudence, il n'appartient pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1). L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention provisoire n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 143 IV 316 consid. 3.2). En d'autres termes, les soupçons doivent se renforcer plus l'instruction avance et plus l'issue du jugement au fond approche. Si des raisons plausibles de soupçonner une personne d'avoir commis une infraction suffisent au début de l'enquête, ces motifs objectifs doivent passer de plausibles à vraisemblables (arrêt du Tribunal fédéral 7B_8853/2023 du 4 décembre 2023 consid. 3.2.). Il faut ainsi pour reprendre la jurisprudence relative au degré de preuve requis dans un procès, que des éléments parlent en faveur de la culpabilité du prévenu, et ce même si le juge envisage l'éventualité que tel ne soit pas le cas (ATF 140 III 610 consid. 4.1).

Cependant, il n'appartient pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale ; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 143 IV 330 consid. 2.1. ; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2.       En l’occurrence, le recourant se livre à une interprétation personnelle des déclarations de la plaignante, qu’il affirme émaillée de contradictions, ainsi que des autres indices relevés contre lui. Ce n’est pourtant pas le lieu d’anticiper la décision du juge du fond en disant ici quelle version est la plus crédible.

On peut observer qu’en ayant été employé ponctuellement par le bar en décembre 2023 – ce que la plaignante a signalé spontanément (plainte p. 7), c’est-à-dire avant que le directeur ne le confirme, ajoutant elle-même qu’il semblait bien connaître le personnel –, le recourant pourrait avoir acquis une connaissance préalable des coins et recoins de l’établissement qui lui aurait facilité, la nuit des faits, son éloignement en compagnie de la partie plaignante, pour ensuite abuser d’elle à l’abri des regards. Qu’il ait préalablement su « par hasard » que l’accès au local n’était pas fermé à clé n’est nullement incompatible avec une mise à profit ultérieure de cette circonstance.

Pour le surplus, on peut renvoyer (art. 82 al. 4 CPP) à la motivation, exhaustive et convaincante, du premier juge sur la première des conditions au maintien de la détention provisoire : les charges sont aussi suffisantes que graves.

Que le recourant réclame d’autres auditions, « plus importantes » (comprendre selon toute vraisemblance : à décharge), que celles auxquelles la police a déjà procédé n’y change rien. Par ailleurs, la confrontation qu’il réclamait aussi a eu lieu, et on n’y décèle aucun affaiblissement des accusations portées contre lui par la partie plaignante.

3.             Le recourant estime qu’aucun risque de fuite ne peut lui être opposé.

3.1.       Conformément à la jurisprudence, ce risque doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable (ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée). La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, mais permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70; 108 Ia 64 consid. 3). Le risque de fuite s'étend également au risque de se soustraire à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en tombant dans la clandestinité à l'intérieur du pays (ATF 143 IV 160 consid. 4.3 p. 167).

3.2.       En l’espèce, le recourant ne conteste pas n’avoir aucun titre de séjour en Suisse et avoir possédé un billet pour son retour en Amérique du Sud le 8 février 2024. Le risque qu’il cherche à se soustraire aux actes ultérieurs de la procédure est d’autant plus aigu qu’il conteste avec force les déclarations de la plaignante ; qu’il a déposé plainte contre celle-ci en dénonciation calomnieuse ; qu’il affirme même, si on le comprend bien, que la présumée victime devrait être en prison à sa place ; et qu’il exprime sa défiance sur la façon – qu’il estime uniquement à charge – dont le Ministère public conduit son enquête. Or, l’accusation de viol est un crime, et la jurisprudence, certes sous l’angle du risque de réitération, classe les infractions contre l’intégrité sexuelle au rang de celles d’une particulière gravité (cf. ATF 146 IV 326 consid. 3.1).

Dans ces circonstances, c’est à juste titre que le premier juge a qualifié le risque de fuite de très élevé.

4.             De jurisprudence constante, si l'un des motifs prévus aux lettres a à c de l'art. 221 al. 1 CPP est réalisé, il n'y a pas lieu d'examiner si un autre risque entre également en considération (arrêt du Tribunal fédéral 7B_1013/2023 du 9 janvier 2024 consid. 4.5).

5.             Le recourant décline sous six intitulés identiques diverses conclusions subsidiaires, consistant, en bref, en l’énumération de mesures de substitution. La plupart ayant trait au risque de collusion, non retenu ici, il convient de s’attarder sur celles qui pallieraient le risque de fuite, au premier rang desquelles il propose (dans le quatrième regroupement de ses conclusions subsidiaires) des sûretés, en CHF 10'000.-. Il fait valoir que ce montant permettrait de contenir le risque de fuite et serait considérable au regard de la situation de sa parenté à Genève et qu'il ne prendrait pas le risque de plonger ceux-ci dans une situation financière précaire.

5.1.       Conformément au principe de la proportionnalité ancré à l'art. 36 al. 3 Cst., il convient d'examiner les possibilités de mettre en œuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention. Cette exigence est concrétisée par l'art. 237 al. 1 CPP, qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. Selon l'art. 237 al. 2 CPP, font notamment partie des mesures de substitution la fourniture de sûretés (let. a) ou la saisie des documents d'identité (let. b). Cette liste est exemplative et le juge de la détention peut également, le cas échéant, assortir les mesures de substitution de toute condition propre à en garantir l'efficacité (ATF 145 IV 503 consid. 3.1).

Selon l'art. 238 CPP, s'il y a danger de fuite, le tribunal peut astreindre le prévenu au versement d'une somme d'argent afin de garantir qu'il se présentera aux actes de procédure et qu'il se soumettra à l'exécution d'une sanction privative de liberté (al. 1); le montant des sûretés dépend de la gravité des actes reprochés au prévenu et de sa situation personnelle (al. 2) ; les sûretés peuvent consister en un dépôt d'espèces ou en une garantie fournie par une banque ou une assurance établie en Suisse (al. 3). La libération moyennant sûretés implique un examen approfondi, qui demande une certaine collaboration de la part du prévenu, dès lors que le caractère approprié de la garantie doit être apprécié notamment au regard des ressources du prévenu, de ses liens avec des personnes pouvant lui servir de caution – respectivement des possibilités financières de celles-ci (cf. arrêt du Tribunal fédéral 7B_645/2023 du 13 octobre 2023 consid. 3.2.2.) – et de la confiance qu'on peut avoir que la perspective de perdre le montant agira comme un frein suffisamment puissant pour écarter toute velléité de fuite (cf. ATF 105 Ia 186 consid. 4a).

5.2.       En l’espèce, le recourant tente, certes, de documenter les capacités financières des membres de sa parenté qui, à Genève, réuniraient sur leurs deniers les sûretés qu’il propose. Contrairement à ce qu’il affirme en réplique, rien n’établit cependant que les EUR 956.28 payés par son beau-père représenteraient l’avance (ou le cadeau) du coût de son propre billet d’avion pour venir d’Amérique du Sud et y retourner ; que le créancier ainsi payé soit une agence de voyage en Espagne ne prouve rien non plus.

Mais point n’est besoin d’interroger cette parenté au stade du recours.

En effet, pour ce qui est de sa situation professionnelle – déterminante –, il se contente d’affirmations non étayées pour tenter de persuader les autorités pénales que l’exploitation de son hôtel en Amérique du Sud ne lui rapporterait que de maigres revenus, qu’il a chiffrés en audience du TMC à quelques centaines USD par mois. Par surcroît, ses prétendues charges d’assistance envers trois handicapés frères de son père, également alléguées à l’audience, ne sont appuyées par aucun justificatif.

Voulût-on admettre, sur la base des quelques pièces qu’il a produites, un sacrifice financier de sa famille à Genève, que ses revenus affichés, parce qu’ils ne sont pas étayés et pourraient même être minorés, doivent être appréciés avec beaucoup de circonspection. Dans sa déclaration-plainte, la partie plaignante a d’ailleurs relaté que le recourant lui avait confié – ce qu’il n’a pas démenti par la suite – qu’en Équateur, où il travaillait, il bénéficiait de rentrées d’argent qui lui permettaient de « vivre bien ». Enfin, et surtout, le recourant est particulièrement mal venu de voir une motivation déficiente du premier juge sur ce point, puisque c’est lui-même qui a expliqué avoir hérité de son père et avoir « beaucoup d’argent » à sa disposition
(p.-v. du 8 janvier 2024 p. 4).

Or, on répète que l’accusation de viol est un crime. L’hypothèse d’un sursis – que le recourant aurait, semble-t-il, évoquée devant le TMC (cf. ordonnance attaquée p. 4 in fine), mais qu’il ne reprend quoi qu’il en soit pas dans son recours – n’a rien d’acquis à ce stade.

Par conséquent, la perspective d’un procès, conjuguée à la propension du recourant, comme on l’a vu, à accabler la partie plaignante et à fustiger l’instruction, fait qu’une caution de CHF 10'000.- fournie par des tiers n’aurait aucun effet dissuasif sur lui, d’autant moins que sa comparution aux actes ultérieurs de la procédure se trouverait encore compliquée par son défaut de titre de séjour.

À cet égard, ses suggestions, en sus, de déposer ses papiers d’identité, de se rendre – à des fins non précisées – au Service de probation et d’insertion, de se présenter périodiquement à un poste de police postulent, toutes, que le recourant aurait le droit de continuer à séjourner sur le territoire suisse, cas échéant jusqu’à son procès. Ce qui n’est pas le cas. Ces suggestions, si elles étaient suivies, reviendraient donc à perpétuer, si ce n'est à faire valider un séjour illégal, c'est-à-dire la commission d'une infraction, sous le contrôle ou avec l’aval d'une autorité chargée de la constater, ce qui ne se peut (ACPR/359/2019 du 15 mai 2019 consid. 5.).

6.             Le recours doit dès lors être rejeté.

7.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

 

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit pour lui son défenseur), au Tribunal des mesures de contrainte et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/465/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00