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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/5461/2023

ACPR/57/2024 du 24.01.2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : DISJONCTION DE CAUSES
Normes : CPP.29; CP.30

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5461/2023 ACPR/57/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 24 janvier 2024

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,


contre l'ordonnance de disjonction rendue le 9 novembre 2023 par le Ministère public,

et

D______, représenté par Me E______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 16 novembre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 9 précédent, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a ordonné la disjonction de la procédure P/1______/2023 de la P/5461/2023.

Le recourant conclut, sous suite de frais, à l'annulation de cette ordonnance et à la répétition de tous les éventuels actes d'instruction qui auraient été effectués sans sa participation.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et D______ sont soupçonnés d'avoir notamment, le 9 mars 2023, empêché F______ de sortir du véhicule dans lequel elle était entrée, de l'avoir conduite de force jusqu'à un parking et, de concert avec un tiers non identifié, l'avoir contrainte à subir trois fois de suite un rapport sexuel complet, à tour de rôle.

Pour ces faits, F______ a déposé plainte le 9 mars 2023.

b. Entendus par la police le 10 mars 2023, A______ et D______ ont contesté les faits.

c. Le lendemain, le Ministère public a auditionné individuellement les deux précités et les a mis au bénéfice de la défense d'office, nommant à ce titre Me C______ pour A______.

d. Les 16 et 27 mars 2023, le Ministère public a tenu deux autres audiences en présence de A______ et D______, lesquels ont continué de nier les faits, expliquant, en substance, que F______ était montée, ivre mais de son plein gré, dans leur véhicule et qu'ils n'avaient pas eu de rapports sexuels avec elle.

e. Lors de cette dernière audience, le Ministère public a proposé à A______ et D______ des mesures de substitution, étant précisé qu'ils ont été placés en détention provisoire depuis le 12 mars 2023.

Parmi lesdites mesures figurait l'obligation de déférer à toute convocation du pouvoir judiciaire.

f. Le 9 novembre 2023, le Ministère public a ordonné la jonction de la procédure avec la P/17156/2023, dans laquelle A______ est prévenu de violation grave des règles de la circulation, pour un excès de 39 km/h par rapport à la vitesse autorisée sur le tronçon considéré.

g. Le même jour, le Ministère public a tenu une audience à laquelle, bien que dûment convoqué, A______ ne s'est pas présenté.

Le conseil d'office du précité, invoquant le secret professionnel, n'a pas précisé s'il avait eu des contacts avec son client, ni s'il connaissait l'endroit où se trouvait ce dernier.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que l'instruction de la procédure touchait à sa fin concernant D______ alors qu'elle n'était pas terminée pour A______. Ce dernier ne s'était, en effet, pas présenté à l'audience du jour-même en dépit des mesures de substitution prononcées à son encontre et de nouveaux faits devaient être instruits le concernant à la suite de la jonction de la procédure P/17156/2023. Compte tenu encore de l'incertitude face à l'absence d'informations sur la localisation actuelle de A______, le principe de célérité justifiait de permettre à la procédure d'aller de l'avant au sujet de D______.

D. a. Dans son recours, A______ soutient que D______ pourrait le mettre en cause concernant la plainte de F______. Il était donc "inadmissible" que lui et son conseil ne puissent pas participer aux futures auditions de son co-prévenu. Ce dernier risquait également de solliciter des réquisitions de preuve une fois l'avis de prochaine clôture notifié et la disjonction aurait pour conséquence de le priver, lui, de participer aux actes qui en découleraient. Il était ainsi "inopportun" de disjoindre les causes.

b. Le Ministère public persiste dans les termes de son ordonnance, précisant qu'il restait sans nouvelles de A______ depuis l'audience du 9 novembre 2023.

c. Dans ses observations, D______ s'oppose aux conclusions du recours. Il n'avait pas à "pâtir" du non-respect des mesures de substitution par A______.

d. A______ n'a pas répliqué.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP; Y. JEANNERET / A. KUHN / C.  PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénales suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 4 in fine ad art. 30) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant estime que la disjonction des causes serait inopportune.

2.1. À teneur de l'art. 29 al. 1 CPP, les infractions sont poursuivies et jugées conjointement lorsqu'un prévenu a commis plusieurs infractions (let. a) ou lorsqu'il y a plusieurs coauteurs ou participation (let. b).

Le principe d'unité de la procédure découle déjà de l'art. 49 CP et, sous réserve d'exceptions, s'applique à toutes les situations où plusieurs infractions, respectivement plusieurs personnes, doivent être jugées ensemble (Y. JEANNERET / A.  KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 1 ad art.  29). Ce principe tend à éviter les jugements contradictoires quant à l'état de fait, l'appréciation juridique ou la quotité de la peine. Il sert en outre l'économie de la procédure (ATF 138 IV 214 consid. 3; 138 IV 29 consid. 3.2).

2.2. Selon l'art. 30 CPP, si des raisons objectives le justifient, le Ministère public et les tribunaux peuvent ordonner la disjonction de procédures pénales. Elle sert, avant tout, à garantir la rapidité de la procédure et à éviter un retard inutile. Ces raisons objectives excluent en revanche de se fonder sur de simples motifs de commodité (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds.), op. cit., n. 2 ad art. 30).

À titre d'exemples de cas d'application de l'exception de l'art. 30 CPP, l'on peut citer la violation du principe de célérité ou le fait que certains prévenus soient sur le point d'être jugés et pas d'autres (ATF 138 IV 214 consid. 3.2; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Code de procédure pénale - Petit commentaire, 2ème édition, Bâle 2016, n. 3 ad art. 30 CPP).

2.3. En l'espèce, les faits reprochés au co-prévenu du recourant sont, selon le Ministère public, en l'état d'être jugés.

À l'inverse, de nouveaux soupçons pèsent sur le recourant, sans lien avec ceux découlant de la plainte du 9 mars 2023. À propos de ces nouvelles charges, qui concernent une éventuelle violation grave des règles de la circulation, le précité n'a pu être entendu. Bien que dûment convoqué, il ne s'est, en outre, pas présenté à l'audience du 9 novembre 2023, privant le Ministère public de l'entendre une dernière fois sur la prévention de viol notamment.

L'instruction concernant les deux co-prévenus n'étant pas au même stade, il se justifie de disjoindre les causes pour permettre au Ministère public d'aller de l'avant dans celle susceptible de l'être, sans attendre celle ou des actes d'instruction complémentaires sont à prévoir.

De surcroît, la disjonction s'avère nécessaire en l'occurrence puisque le recourant n'a pas respecté son obligation de déférer à toute convocation des autorités judiciaires, qu'il a disparu sans laisser d'adresse et que son conseil d'office n'allègue pas être en mesure d'affirmer que son client réapparaîtra dans un futur plus ou moins proche. Dans ces circonstances, la suite de l'instruction le concernant apparaît fortement compromise, ce qui ne doit pas porter préjudice à la situation de son co-prévenu.

Les arguments contraires invoqués par le recourant pour s'opposer à la disjonction sont inefficaces. Ils sont, en tout état, infondés dans la mesure où il pourrait participer à la procédure P/5461/2023 en qualité de personne appelée à donner des renseignements (art. 178 let. f CPP) et demander l'audition de D______.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             L'indemnisation des conseils d'office sera fixée une fois la procédure close (art. 135 al. 2 CPP).

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, arrêtés à CHF 300.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 300.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et à D______, soit pour eux leurs conseils respectifs, ainsi qu'au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/5461/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

205.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

300.00