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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/9477/2023

ACPR/710/2023 du 13.09.2023 sur ONMMP/2830/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : SOUPÇON;ASSISTANCE JUDICIAIRE
Normes : CPP.310; CPP.136

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/9477/2023 ACPR/710/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 13 septembre 2023

 

Entre

A______, sans domicile fixe, représenté par Me Matthieu GISIN, avocat, Renold Gabus-Thorens & Associé(e)s, boulevard des Philosophes 15, 1205 Genève,

recourant,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 17 juillet 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 28 juillet 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 17 juillet 2023, communiquée par pli simple et reçue selon lui le lendemain, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte contre B______.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de ladite décision et au renvoi de la cause au Ministère public pour ouverture d'une instruction contre le prénommé pour tentative de meurtre ou à tout le moins lésions corporelles, dommages à la propriété, menaces, injures et voies de fait ainsi qu'à l'audition des témoins cités dans sa plainte. Préalablement, il sollicite d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire et que son conseil soit désigné comme défenseur d'office.

b. Le recourant a été dispensé de verser des sûretés.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 3 mai 2023, A______ a déposé plainte contre B______, alias B______ pour deux complexes de faits :

a.a. Le 19 mars 2023, il se trouvait dans le parc situé à côté du musée D______. Il y avait rencontré un ami, E______ (actuellement détenu à F______), un dénommé "G______" et B______, qu'il connaissait de vue. À un moment donné, ce dernier l'avait soudainement agressé en le frappant à coups de poing au visage, ce qui l'avait fait chuter, avant de s'asseoir sur lui, l'étrangler en lui disant "je vais te tuer, je vais te tuer" et l'insulter dans sa langue (le diouala). Il avait réussi à se dégager et à repousser l'individu qui était ensuite parti. Ses vêtements avaient été maculés de sang et étaient irrécupérables. Depuis cette agression, il dormait par ailleurs très mal. Ces faits étaient selon lui constitutifs de tentative de meurtre, à tout le moins de lésions corporelles, ainsi que de dommages à la propriété.

À teneur du certificat médical daté du même jour produit, il souffrait d'une plaie délabrante frontale gauche. Aucun stigmate de strangulation n'avait été mis en évidence et le status neurologique était normal.

a.b. Le 20 avril 2023, il se trouvait dans le même parc avec des amis, dont un dénommé "H______" (tél : 1______). B______ était arrivé, s'était dirigé vers lui et l'avait attrapé par la veste. Il l'avait secoué dans tous les sens – ce qui avait déchiré sa veste – en lui ordonnant de se battre avec lui et en l'insultant copieusement en diouala. Lui-même était resté calme. Le prénommé l'avait par ailleurs menacé de mort. Après ces faits, il était sous le choc. Ceux-ci semblaient constitutifs de menaces, injures, voies de fait et dommages à la propriété. Depuis cette deuxième agression, il dormait encore plus mal et avait peur de recroiser son antagoniste.

Il sollicitait d'ores et déjà d'être mis au bénéfice de l'assistance juridique.

b. Entendu par la police comme prévenu le 13 juin 2023, B______ a contesté les faits reprochés. Il connaissait le plaignant sous le nom de "I______", qui était un dealer de drogues. Il venait du même village que lui. Selon lui, "I______" était jaloux de sa situation stable. Il n'avait pas assisté à la première agression, étant arrivé au parc juste après. Il avait alors vu que le précité saignait du front et que sa veste était abîmée. Il ignorait qui était l'agresseur.

c. À teneur du rapport de renseignements du 11 juillet 2023, la police avait tenté de joindre téléphoniquement E______, en vain. Celui-ci étant sans domicile fixe (et non pas détenu à la prison de F______, comme indiqué dans la plainte), aucun mandat de comparution n'avait pu lui être adressé. Aucune image de vidéosurveillance n'avait en outre enregistré les faits.

C. Dans son ordonnance querellée, le Ministère public constate que les déclarations des parties sont contradictoires et qu'aucun témoin objectif ou élément matériel ne permet de privilégier une version plutôt qu'une autre.

D. a. À l'appui de son recours, A______ se prévaut tout d'abord du constat médical produit, à teneur duquel il présentait une plaie délabrante frontale gauche. Ensuite, il avait cité dans sa plainte plusieurs témoins des faits, qui n'avaient pas été entendus. Ceux-ci se réunissaient régulièrement dans le parc dans lequel les agressions avaient eu lieu, de sorte qu'il ne semblait pas impossible de les retrouver. Enfin, ses propos étant cohérents et pas moins crédibles que ceux de B______ – au demeurant connu des services de police –, le Ministère public aurait dû ouvrir une action pénale.

b. La cause a été gardée à juger à réception.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification n'ayant pas été remplies (art. 85 al. 2 CPP) –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Selon la jurisprudence, cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage in dubio pro duriore (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1456/2017 du 14 mai 2018 consid. 4.1). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 1 CPP en relation avec les art. 309 al. 1, 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2) et signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 ; 138 IV 86 consid. 4.1.2). Face à des versions contradictoires des parties, il peut être exceptionnellement renoncé à une mise en accusation lorsqu'il n'est pas possible d'apprécier l'une ou l'autre version comme étant plus ou moins plausible et qu'aucun résultat n'est à escompter d'autres moyens de preuve (arrêt du Tribunal fédéral 6B_174/2019 du 21 février 2019 consid. 2.2).

2.2. En l'espèce, le mis en cause nie les faits reprochés.

Si l'existence d'une plaie au visage du recourant est établie par le constat médical du 19 mars 2023, ce document n'est pas de nature à démontrer que l'auteur en serait le mis en cause et encore moins que celui-ci aurait tenté d'étrangler le plaignant, faute de marque mise en évidence lors de la consultation.

Les témoins des faits cités dans sa plainte – dont le recourant n'a fourni que des diminutifs – sont des connaissances à lui, de sorte que leurs déclarations, à supposer qu'elles puissent être recueillies, pourraient ne pas être objectives, vu les liens les unissant. Partant, peu importe que la police ait seulement tenté de joindre, mais en vain, E______.

Enfin, que B______ soit apparemment connu des services de police ne constitue pas un élément suffisant pour le désigner comme auteur des faits dénoncés.

Faute d'éléments concrets au dossier en faveur de la thèse du recourant, c'est donc à bon droit que le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur sa plainte.

3. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée. Le recours, qui s'avère mal fondé, pouvait être rejeté sans échange d'écritures ni débats (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

4. Le recourant sollicite l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours.

4.1. À teneur de l'art. 136 al. 1 CPP, la direction de la procédure accorde entièrement ou partiellement l'assistance judiciaire à la partie plaignante pour lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles lorsqu'elle est indigente (let. a) et que l'action civile ne paraît pas vouée à l'échec (let. b). La cause ne devant pas être dénuée de toute chance de succès, l'assistance peut être refusée lorsqu'il apparaît d'emblée que la position du requérant est juridiquement infondée (arrêt du Tribunal fédéral 1B_254/2013 du 27 septembre 2013 consid. 2.1.1. et les références citées).

4.2. En l'occurrence, si l'indigence du recourant semble établie, celui-ci étant sans profession et sans domicile fixe, le recours était voué à l'échec, pour les motifs exposés plus haut, de sorte que les conditions pour l'octroi de l'assistance judiciaire ne sont pas remplies.

La demande sera, partant, rejetée.

5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

Le refus d'octroi de l'assistance juridique gratuite est rendu sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/9477/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

Total

CHF

900.00