Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/22616/2021

ACPR/623/2023 du 09.08.2023 sur OTDP/1125/2023 ( TDP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE PÉNALE;OPPOSITION TARDIVE;FICTION DE LA NOTIFICATION;ADRESSE
Normes : CPP.354; CPP.356; CPP.85.al4

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/22616/2021 ACPR/623/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 9 août 2023

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______, agissant en personne,

recourant,

 

contre l'ordonnance rendue le 30 mai 2023 par le Tribunal de police,

 

et

LE TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715,
1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 13 juin 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 30 mai 2023, notifiée le 8 juin 2023, par laquelle le Tribunal de police a constaté l'irrecevabilité, pour cause de tardiveté, de l'opposition qu'il a formé à l'ordonnance pénale du 12 janvier 2022.

Le recourant demande un "réexamen" de son dossier et sollicite une audience afin de pouvoir s'expliquer de "vive voix".

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par courrier du 3 février 2021, distribué le 4 suivant, l'Office cantonal des véhicules (ci-après: OCV) a envoyé un rappel à A______ relatif à l'impôt et/ou l'émolument sur les véhicules à moteur et leurs remorques, restés impayés à ce jour, malgré un premier rappel du 21 décembre 2020.

b. Le 22 mars 2021, l'OCV a envoyé une deuxième et dernière sommation à A______.

c. Selon le rapport de renseignements établi le 24 septembre 2021, la police s'était rendue le 17 août 2021 à l'adresse de A______, soit c/o C______, rue 1______ no. ______, [code postal] Genève, afin de vérifier qu'elle était correcte, ce qui était le cas.

Au demeurant, cette adresse est également inscrite à l'Office cantonal de la population depuis 2018.

d. A______ n'a pas donné suite au mandat de comparution que lui a adressé la police le 16 août 2021, pour une audition le 17 septembre suivant.

e. Par lettre du 22 novembre 2021, le Ministère public a informé A______ qu'une procédure pénale avait été ouverte contre lui pour infraction à la loi sur la circulation routière. Il était invité à fournir, dans un délai échéant le 13 décembre 2021, ses explications. Il n'y a pas donné suite.

f. Par ordonnance pénale du 12 janvier 2022, le Ministère public a condamné A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à
50.-/jour pour usage abusif de permis et de plaques (art. 97 al. 1 let. b LCR).

Selon le suivi des plis recommandés de la Poste, le pli contenant l'ordonnance pénale, adressé par recommandé à l'adresse susmentionnée, n'a pas été retiré à la poste par son destinataire, qui a été avisé pour retrait le 18 janvier 2022. Le courrier a été retourné à l'expéditeur à l'issue du délai de garde, qui venait à échéance le 26 janvier 2022, avec la mention "non réclamé".

g. Par lettre envoyée au Ministère public le 17 avril 2023, A______ a formé opposition à l'ordonnance pénale. Il expliquait avoir eu un problème d'adresse "à la rue 1______ no. ______ à Genève". En effet, C______ lui avait confisqué son courrier, raison pour laquelle il n'avait pas pu recevoir ses convocations. Il avait porté plainte contre le précité à la gendarmerie de D______ [VD].

h. Le 12 juin 2023, A______ produira un extrait de ladite plainte pénale – déposée à une date que le dossier ne permet pas d'établir –, dans laquelle il expliquait avoir habité chez C______, entre juillet 2018 et le 29 juin 2019, "notamment" pour une durée de trois semaines. Après avoir déménagé, il avait "fait le nécessaire" pour récupérer son courrier directement à la Poste. Or il avait appris, postérieurement, que le précité recevait toujours son courrier et refusait de le lui remettre, à moins qu'il ne s'acquitte de la somme de CHF 600.-. Il avait refusé et, ce n'était qu'après une intervention policière, qu'il avait pu récupérer ses correspondances.

i. Par ordonnance du 8 mai 2023, le Ministère public, constatant la tardivité de l'opposition, a transmis la procédure au Tribunal de police afin que cette autorité statue sur la validité de ladite opposition.

j. Le Tribunal de police a invité A______ – à la nouvelle adresse indiquée –, le 17 mai 2023, à se prononcer par écrit sur la tardiveté apparente de l'opposition. Le précité n'a pas répondu.

C. Dans la décision querellée, le Tribunal de police retient que le pli recommandé contenant l'ordonnance pénale avait été envoyé à l'adresse officielle du prévenu, qui avait été avisé pour le retrait le 18 janvier 2022. L'ordonnance avait ainsi été valablement notifiée le 25 janvier 2022, de sorte que le délai d'opposition venait à échéance le 4 février 2022. L'opposition, formée hors délai, était donc tardive.

D. a. Dans son recours, A______ explique ne pas avoir reçu les courriers du 17 décembre 2020 [sic] et 12 janvier 2022 [soit l'ordonnance pénale du Ministère public] car on ne lui remettait pas son courrier. Il avait déposé plainte contre la personne responsable. Il souhaitait un nouveau départ dans la vie et cette affaire l'empêchait d'accéder facilement à un emploi. Il sollicite donc un réexamen de son dossier et demande à être entendu.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La juridiction de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les actes manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant sollicite une audience devant la Chambre de céans.

Toutefois, le recours fait l'objet d'une procédure écrite (art. 397 al. 1 CPP), les débats n'ayant qu'une nature potestative (art. 390 al. 5 CPP), et l'art. 29 al. 2 Cst. ne confèrant pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 et les références citées).

Il ne sera donc pas donné suite à cette demande, étant relevé que le recourant n'a pas saisi l'occasion que lui a donnée le Tribunal de police de faire part de ses observations devant cette instance.

4.             Le recourant conteste la validité de la notification tardive de l'ordonnance pénale.

4.1. À teneur de l’art. 354 CPP, le prévenu peut former opposition contre l'ordonnance pénale devant le ministère public, par écrit, dans les dix jours (al. 1). Si aucune opposition n'est valablement intervenue, cette ordonnance est assimilée à un jugement entré en force (al. 3).

Le Tribunal de police statue d'office sur la validité d’une telle opposition (art. 356 al. 2 CPP). Lorsque celle-ci n'est pas valable, notamment car elle est tardive, il n'entre pas en matière (Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification de la procédure pénale, FF 2006 1275 ad art. 360).

4.2. Quand un envoi expédié par lettre signature n'a pas été retiré dans les sept jours à compter de la tentative infructueuse de remise du pli, il est réputé notifié si la personne concernée devait s'attendre à une telle remise (art. 85 al. 4 let. a CPP).

Celui qui se sait partie à une procédure judiciaire et qui doit dès lors s'attendre à recevoir notification d'actes du juge, est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. À ce défaut, il est réputé avoir eu, à l'échéance du délai de garde, connaissance du contenu des plis recommandés que le juge lui adresse. Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 141 II 429 consid. 3.1 p. 431 s.; 139 IV 228 consid. 1.1 p. 230 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_723/2020 du 2 septembre 2020).

Il existe une présomption réfragable que l'employé de La Poste a dûment déposé l'avis de retrait d’un tel envoi dans la boîte aux lettres du destinataire. Dite présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve. Si le destinataire ne parvient pas à établir l'absence de dépôt dans sa boîte aux lettres au jour attesté par le facteur, la remise est censée être intervenue en ces lieu et date. Dès lors que la non-distribution d'une invitation à retirer un pli est un fait négatif, on ne peut naturellement guère en apporter la preuve formelle. La seule possibilité, toujours envisageable, d'une erreur de La Poste ne suffit toutefois pas à renverser la présomption. Il faut au contraire qu'il existe des indices concrets d'erreur (ATF 142 IV 201 consid. 2.3 p. 204 s.; arrêt du Tribunal fédéral 6B_517/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1.2).

4.3. En l'espèce, l'adresse à laquelle l'ordonnance pénale a été notifiée au recourant, en janvier 2022, avait précédemment fait l'objet d'une vérification par la police, en août 2021. Dans l'intervalle, le recourant n'a pas informé les autorités d'un changement d'adresse, comme il en avait l'obligation dès lors qu'il se savait faire l'objet d'une procédure pénale. Il devait donc s'attendre, au sens de l'art. 85 al. 4 CPP, à recevoir une communication de l'autorité, ce qu'il ne conteste du reste pas.

Il expose ne pas avoir pu former à temps opposition à l'ordonnance pénale car il n'avait pas pu prendre connaissance de cette dernière, en raison d'un litige l'opposant au locataire principal de son domicile de notification, lequel ne lui remettait pas son courrier. Il ressort toutefois de l'extrait de la plainte que le recourant a produite – dont on ignore au demeurant la date du dépôt – qu'il a cessé de vivre à cette adresse le 29 juillet 2021, de sorte qu'on ne voit pas, et il ne le précise pas, pour quelle raison il n'a pas pris ses dispositions, conformément aux obligations qui étaient les siennes, pour recevoir son courrier à sa nouvelle adresse, respectivement informer les autorités de son nouveau domicile de notification.

Ainsi, le pli contenant l'ordonnance pénale du 12 janvier 2022 a valablement été envoyé à l'adresse connue du Ministère public. Le destinataire ayant été informé le 18 janvier 2022 de l'avis de retrait, le délai pour recourir est venu à échéance le 4 février 2022. Formée le 17 avril 2023, l'opposition est tardive, ce que le Tribunal de police a constaté à bon droit.

5.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

6.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de procédure de recours, arrêtés à CHF 500.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, au Tribunal de Police et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/22616/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

Total

CHF

500.00