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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/15964/2021

ACPR/568/2023 du 24.07.2023 sur ONMMP/4381/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;VIOL
Normes : CP.190; CPP.319

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15964/2021 ACPR/568/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 24 juillet 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, France, comparant par Me Raphaël JAKOB, avocat, Étude Santamaria & Jakob, rue François-Versonnex 7, 1207 Genève,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 9 décembre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 23 décembre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 9 décembre 2022, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte pénale du 13 août 2021.

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision attaquée, en tant qu'elle concerne les infractions de contrainte et de viol, et au renvoi de la procédure au Ministère public pour l'ouverture d'une instruction, notamment afin qu'il procède à tout acte d'instruction nécessaire à l'établissement des faits. Elle sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours.

b. Par suite du rapport du Greffe de l'assistance juridique ayant nié l'indigence de la recourante, la Chambre de céans a, par ordonnance du 8 février 2023, astreint celle-ci à verser des sûretés en CHF 1'000.-, ce qu'elle a fait.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 13 août 2021, A______ a déposé plainte pénale contre B______, qu'elle appelait "B______", notamment des chefs de contrainte et de viol.

Elle a exposé être danseuse au sein de C______ de Genève depuis août 2015. Elle avait débuté, en octobre 2016, une relation amoureuse avec un danseur de la troupe, B______. En mai 2017, B______ s’était montré violent avec elle lors d’une dispute au domicile de ce dernier à D______, en France, en l’empoignant par les épaules ainsi qu’en la jetant sur un canapé. Il l’avait également insultée. En mars 2018, elle avait informé B______ qu’elle souhaitait mettre un terme à leur relation, mais il ne l'avait pas accepté et avait continué de se comporter comme s'ils étaient en couple. Elle avait alors débuté "en cachette" une relation amoureuse avec E______, un autre danseur de la compagnie. Au début du mois d’avril 2018, à F______, en Allemagne, lors d’une tournée de la troupe et tandis qu'elle avait, à nouveau, expliqué à B______ qu'elle ne souhaitait plus être avec lui, celui-ci l’avait physiquement empêchée de quitter leur chambre d’hôtel, en s'y enfermant avec elle et en menaçant de la faire passer pour folle si elle sortait dans cet état, soit en pleurs. De retour de tournée, B______ avait continué de refuser que leur relation prenne fin. Elle lui avait alors annoncé qu'elle fréquentait E______. B______ s'en était pris physiquement au précité, au domicile de ce dernier, à G______, en France. Après cet épisode, B______ avait écrit à E______, le menaçant de le frapper à nouveau ou de détruire sa carrière s'il s'approchait d'elle. B______ l'avait suppliée de faire semblant qu'ils étaient toujours ensemble jusqu'à la fin de la saison, en juin, pour éviter de devoir assumer cette rupture devant les autres, ce qu'elle avait accepté par crainte de représailles. C'est pourquoi, elle avait continué à partager une chambre avec lui lors des tournées de la troupe. À la mi-avril 2018, à H______, en Russie, dans leur chambre d’hôtel, alors qu'ils s'étaient couchés dans le même lit double, B______ avait commencé à la toucher. Elle lui avait dit "non" et demandé d'arrêter, en vain. Il l'avait bloquée sous lui, avait immobilisé ses mains dans les siennes et l'avait pénétrée. Elle avait pleuré et été tétanisée. À la fin du mois d’avril 2018, lors d’une tournée d’une dizaine de jours à I______, aux États-Unis, ils avaient continué à dormir dans la même chambre, dans la mesure où B______ lui faisait craindre de se suicider si elle ne continuait pas à faire semblant d'être en couple avec lui. À cette occasion, B______ lui avait fait subir, à plusieurs reprises, des rapports sexuels non consentis. Cependant, elle s'était "laissée faire" afin qu’il la laisse tranquille et qu’elle puisse se reposer la nuit avant les spectacles. Cela s'était aussi produit, quelques fois, en mai 2018, au cours d'une tournée en Espagne. Enfin, B______ l'avait forcée à coucher avec lui, une dernière fois, en juin 2018, à Genève, après avoir insisté pour dormir chez elle, à Genève, à l'issue de la dernière représentation de la saison.

b. À l'appui de ses dires, A______ a produit de très nombreux messages, dont notamment:

i) des échanges entre elle-même et B______, avant et après les faits dénoncés. Il en ressort ce qui suit :

· Entre le 18 mars et le 18 juin 2018, A______ et B______ se sont échangés de nombreux messages, où ils se questionnent sur l'évolution de leur relation et sur la relation entre la première et E______. L'usage de sobriquets (tels que "ma courgette", "mon petit doigt", "mon petit chou", "mon trésor"), ainsi que de termes marquant leur affection réciproque, est courant et le ton amical des messages ne change pas durant l'entier de cette période.

· Dans la nuit du 18 au 19 mars 2018, B______ affirme notamment "[ ] j'ai mal et pense qu'on doit se séparer avant que ce soit trop dure on ne se comprend pas vraiment" (sic), ce à quoi A______ répond "Moi aussi j'ai mal j'en demande sûrement trop à tes yeux mais je changerai pas tu as raison on s'aime mais on ne se comprend pas vraiment. [ ]". B______ poursuit "De toute façon si ma vie ne se trace pas d'ici peu, je me tuerais. Je me bats pour rien et les hommes sont des cons, salle race" (sic). A______ lui répond "Arrête courgette.. tu parles sur la colère et tu veux me faire culpabiliser", ce à quoi B______ rétorque "Non tu est ce que tu es je ne t'en veux pas, mais je suis fatigué par la vie tout court" (sic).

· Le 5 avril 2018, A______ dit qu'elle fera tout ce qu'elle peut pour retrouver l'amour qu'elle ressentait pour lui et lui demande de la laisser libre si elle n'y arrive pas. B______ est heureux qu'elle lui laisse une "toute petite chance".

· Le 6 mai 2018, à la suite de leur tournée à I______, A______ affirme "[ ] Je n'oublierai jamais ces super moments à I______ ni les autres d'ailleurs. Je suis là pour toi aussi. [ ]"

· Le 15 juin 2018, à 09h58, B______ écrit le message suivant:

"Mon pti chou Que dire ? J’espère que nous pourrons vivre encore de si beaux moments tous les deux. On a fait un travail inouï, qui restera gravé en moi pour l’éternité. Ton charisme, ta beauté intérieure et extérieure ( ) J ne cesserons jamais de me toucher du plus profond de mon cœur. Pardon pour avoir était si excité hier soir dans ton lit. C’est pas facile de ne pas avoir envie de te faire l’amour. J’aurais dû certainement rentrer chez moi hier soir car maintenant je me sens un peu ridicule d’avoir gâché ça par un petit assouvissement sexuel. Je préfère quand tu as envie de moi et regrette de l’avoir fait. Pour ça, je te demande pardon. En plus, il n’était pas en super forme ! L C pour ça que dimanche dernier je voulais dormir chambre à part, de peur de t’embêter à ce niveau là. Je te souhaites un excellent week-end mon trésor. Tu vas me manquer" (sic).

· Le même jour, à 13h41, A______ lui répond :

"Merci ma courgette pour ton message. Moi aussi j’espère passer d’autres moments comme ceux-ci ensemble. Je pense qu hier soir c’était une grande réussite et ça continuera qu en mieux ! J’espère pouvoir danser avec toi toute ma vie. Tkt pas pour hier soir. J’espère que tu te reposeras bien avant cette semaine de folie à J______/K______ [France]. Bon week end à toi aussi bisous mon petit doigt".

· Le 18 juin, A______ prend spontanément de ses nouvelles : "Coucou courgette, j’espère que tu es bien arrivé à J______ et que ça s’est bien passé avec L______. Ca fait bizarre de pas te voir dans le studio prends soin de toi."

ii) des échanges entre B______ et E______. Il en ressort ce qui suit :

· Le 15 avril 2018, B______ demande à E______, dans un long message, après avoir appris sa liaison avec A______, de ne plus l'approcher ou de lui écrire, expliquant qu'ils allaient essayer de "recoller les morceaux". Il lui fait, en outre, part de sa colère face à cette "trahison", en usant d'expressions telles que "je vais te manger tout cru" ou "je te vomis sans cesse" et admet s'être rendu à son domicile pour lui "mettre un coup de tronche".

· Le 18 avril 2018, E______ lui a répondu de la façon suivante:

"[ ] Je comprends ta colère. Je t'ai déjà présenté mes excuses et je ne peux malheureusement rien faire d'autre. En revanche, je n'accepte pas de recevoir de menace ni d'intimidation."

iii) des échanges entre elle-même et E______. Il en ressort ce qui suit:

· Le 5 avril 2018, elle explique que "B______" l'a privée de sortie: "J'ai pas eu le droit de sortir de ma chambre". Lorsque E______ lui demande si elle a écouté B______, elle répond "oui", "J'ai pas eu le choix", "Ce soir c'était très dur ".

· Le 3 mai 2018, A______ exprime sa peur que B______ s'en prenne à E______, lequel lui répond sur le ton de la plaisanterie: "Il manquerait plus qu'il me casse la gueule dans un aéroport! Ha ha ! ;)" (sic).

c. Entendue par la police le 15 novembre 2021, A______ a confirmé sa plainte et précisé certains points; elle n'avait, en particulier, pas estimé nécessaire de se faire examiner par un médecin à la suite de la dispute survenue à D______ [France], en mai 2017, ni de se confier à quelqu'un dans l'immédiat. S'agissant des faits s'étant déroulés en Allemagne, elle s'était disputée avec B______, car elle voulait partager sa chambre avec une amie qu'elle avait informée de sa rupture avec le précité. Il s'était mis en travers de son chemin pour lui barrer la route. Elle avait tenté de le pousser et de le contourner, tout en lui demandant de s'écarter, sans succès. Elle pleurait. Il lui avait alors dit "tu ne vas pas sortir dans cet état, on dirait une folle, je ne vais pas te laisser faire ce cinéma". Elle avait finalement cessé de "lutter" car il était "trop fort" pour elle, précisant que le mis en cause avait pratiqué la boxe MMA. Elle n'avait pas été blessée ni n'avait crié ou hurlé. Une fois celui-ci endormi, elle était sortie et avait rencontré E______. Elle lui avait alors dit qu'il ne fallait plus qu'ils se voient, craignant d'éventuelles représailles de B______. Ce dernier l'avait du reste convaincue de redonner une chance à leur couple. En effet, à ce moment, elle s'accrochait à leurs projets professionnels communs, pour se dire que leur relation pouvait - peut-être - fonctionner. À la suite de l'altercation entre B______ et E______, ni ce dernier ni elle-même n'avaient osé dire clairement à B______ qu'ils souhaitaient être ensemble. S'agissant du viol dénoncé, ayant eu lieu en Russie, elle avait proposé au mis en cause de venir dormir dans le lit, alors qu'il s'était installé par terre. En effet, ils devaient être en forme le lendemain, en vue de leur représentation. Il avait alors commencé à la toucher, à lui caresser les seins, puis le sexe, en la doigtant. Elle lui avait dit qu'elle n'avait pas envie et qu'elle voulait qu'il arrête. Il ne l'avait pas écoutée et, alors qu'elle était sur le dos, l’avait bloquée sous lui, en immobilisant ses mains avec les siennes, et lui avait imposé une pénétration vaginale. Elle était dans "un état de sidération totale" et n'avait pas bougé, "en attendant que ça s'arrête". Ils n'avaient par la suite pas évoqué ce qui s'était passé. Elle n'avait pas été examinée par un médecin. La situation était très compliquée, lors de leur tournée à I______, car le mis en cause voulait beaucoup parler de leur situation et menaçait de se jeter par la fenêtre si elle ne restait pas avec lui jusqu'à la fin de la saison. Dans ce contexte, il avait encore voulu entretenir des relations sexuelles avec elle. Elle s'était alors exprimé en ces termes: "Je ne voulais pas. Je lui ai clairement dit. Mais là encore, il ne s'est pas arrêté, sans pour autant se montrer violent, mais insistant. Je ne sais plus s'il m'a caressée, mais il m'a pénétrée de la même manière qu'en Russie, sauf qu'il ne s'est pas servi de ses mains pour immobiliser les miennes, et que je ne pleurais pas. Je n'ai pas résisté". Elle souhaitait que ça se termine pour pouvoir se reposer avant la représentation et ne plus devoir parler jusqu'au bout de la nuit. Cela s'était produit presque tous les soirs. En Espagne, B______ lui avait encore fait subir, à tout le moins à cinq reprises, des rapports sexuels non voulus, mais qu’elle avait laissé faire, car elle voulait "être tranquille". Il avait aussi exercé des pressions psychologiques, par le biais de ses menaces de suicide. Elle avait également eu peur de perdre sa place au sein de la troupe et souhaitait pouvoir continuer à travailler avec lui, aimant ce qu'il faisait professionnellement. Il ne l'avait pas contrainte, en usant de violence. Finalement, elle s'était soumise au dernier rapport sexuel non consenti mentionné dans sa plainte par épuisement psychologique. Il n'y avait pas eu de violence physique, même si elle avait tenté de le repousser, au début en disant "non". Par la suite, ils ne s'étaient presque plus revus. Au mois de mai 2021, elle avait appris qu'un contrat de maître de ballet au sein de C______ avait été proposé au mis en cause. Elle avait ressenti un énorme stress en l'apprenant et avait décidé d'informer les ressources humaines de la situation. Il n'avait pas été engagé. Elle était suivie par une psychologue, ce qui lui avait permis de réaliser qu'elle souffrait de stress post-traumatique. Le temps écoulé entre les faits dénoncés et son dépôt de plainte s'expliquait par le fait que les "viols" avaient été commis dans des pays étrangers et qu'elle pensait devoir déposer plainte dans ces pays, ce qu'elle ne se voyait pas faire. Elle craignait, en outre, les conséquences d'une dénonciation.

Par ailleurs, elle avait expliqué ses messages des 15 et 18 juin 2018 adressés à B______ et retranscrits supra sous lettre b. i), par le fait qu'elle ne voulait pas "faire d'histoire" afin d'être sûre qu'il lui "rende sa liberté". S'agissant du second message, elle espérait pouvoir encore danser avec lui et pensait pouvoir séparer la personne de l'artiste.

d. Auditionné par la police, B______ a catégoriquement contesté les faits qui lui étaient reprochés. Il n’avait jamais été violent ni menaçant, que ce soit verbalement ou physiquement, avec A______. Au contraire, il avait toujours fait son possible pour la préserver, la protéger et l’épargner. Il ne lui avait jamais imposé de relations sexuelles non consenties. A______ avait toujours eu du plaisir durant leurs rapports sexuels et l’avait manifesté. Il n’avait jamais senti de sa part une quelconque résistance ou une absence de consentement. Entre les mois de décembre 2017 et janvier 2018, il avait subi une opération de l'épaule et du biceps. C'était donc sa dernière saison en tant que danseur au sein de C______. À son retour, A______ lui avait annoncé avoir eu une liaison avec son meilleur ami, E______. Il l'avait mal pris et avait donné "un coup de boule" au précité à son domicile, en France. Sa relation avec A______ avait continué alors qu'il savait qu'elle voyait E______ car il était fou amoureux d'elle et espérait qu'elle le choisirait. Ils avaient donc poursuivi leur tournée normalement, avec quelques tensions dans la compagnie car il ne parlait plus à E______. À I______, A______ et lui-même avaient prolongé leur séjour, dans un logement loué par cette dernière, pour faire du tourisme. Leur relation s'était terminée à la fin de la saison, en juillet 2018, lorsqu'il avait compris qu'elle n'entendait pas se détacher de E______.

Confronté au contenu de son message du 15 juin 2018, B______ a expliqué avoir senti que A______ n’avait pas trop envie de faire l’amour, mais qu'il ne l’avait compris qu'après, de par son manque d’enthousiasme. À aucun moment, elle ne l’avait repoussé ou lui avait fait comprendre qu’elle ne voulait pas. Ce message montrait qu’il était sensible, bienveillant et qu’il s’inquiétait lorsqu’il avait l’impression de faire faux.

e. E______ a été interrogé par la police, en qualité de personne appelée à donner des renseignements. Il a expliqué avoir travaillé entre 2012 et 2018 pour C______ de Genève. Il n'y avait pas de hiérarchie parmi les danseurs. A______ et lui-même étaient tombés amoureux, en mars 2018, et étaient, à ce jour, fiancés. Au début, leur relation était compliquée, car A______ était en couple avec B______, qui était un ami. A______ était sous l'emprise de ce dernier. Elle admirait le talent de B______ qui la considérait comme sa muse. Elle n'avait pas quitté le susnommé plus tôt car elle voyait en lui la possibilité d’une carrière. Elle savait que, si elle mettait un terme à leur relation, elle risquait de tout perdre. Le 9 avril 2018, A______ avait annoncé à B______ leur relation, et il s'en était pris physiquement à lui. Il avait alors, sous la contrainte, accepté de ne plus voir A______. Il n'était pas allé consulter un médecin et avait renoncé à déposer plainte, n'en ressentant pas le besoin. B______ avait également exigé de A______ qu'elle se comporte comme s'ils étaient toujours en couple, craignant que sa réputation ne soit entachée par leur rupture. Après leur séparation "effective", A______ s'était confiée à lui et lui avait raconté avoir été agressée sexuellement par B______, lors d'une tournée en Russie en 2018. Cela s'était reproduit au cours d'une tournée à I______ et également une fois chez elle, à Genève, en juin 2018. Le lendemain du "viol" survenu en Russie, il avait remarqué que A______ semblait "éteinte et triste". Elle lui avait dit avoir enduré cela par gain de paix et par peur de menaces ou de représailles. Il n'avait ni encouragé ni dissuadé A______ à déposer plainte contre B______. C'était lorsqu'elle avait appris que celui-ci était susceptible d'être à nouveau engagé [à] C______ qu'elle avait décidé de le dénoncer.

f. Selon le rapport de police du 18 avril 2022, tant des photographies – avec horodatage et géolocalisation – que des échanges de messages entre A______ et B______ ont pu être extraits du téléphone mobile de ce dernier et versés à la procédure. Il ressort des constatations policières que A______ et B______ paraissaient en couple sur les photographies prises durant la période en cause. De surcroît, les messages échangés semblaient mettre en évidence "une relation amoureuse, tendre et bienveillante".

C. Dans son ordonnance querellée, le Ministère public a considéré, s'agissant des infractions de viol et de contrainte, que les déclarations des parties étaient contradictoires et qu'il n'existait aucune raison légitime de considérer la version de la plaignante comme étant la plus crédible. En effet, aucun élément objectif n'avait permis d'appuyer les déclarations de A______, à commencer par les messages de la victime adressés à "son prétendu violeur", à teneur desquels elle ne montrait aucun signe de détresse ou de peur face à lui, alors même que les viols auraient eu lieu, à de nombreuses reprises, peu de temps auparavant. Le fait que la plaignante accepte, à réitérées reprises, de partager une chambre avec le prévenu, après avoir été, selon ses dires, violée, ne corroborait pas non plus les faits dénoncés. En outre, la version de la plaignante – soit qu'elle n'avait pas opposé de résistance, afin que le mis en cause la laisse tranquille pour qu'elle puisse se reposer – ne mettait en évidence aucun moyen de contrainte au sens de la loi et de la jurisprudence, en lien avec les faits rapportés comme pouvant être constitutifs de viol commis aux États-Unis, en Espagne et en Suisse. En effet, une situation de pression psychologique d'une intensité comparable à l'usage de la violence ou de la menace qui rendait sa soumission compréhensible n'était, dans ces circonstances, pas établie. Partant, les probabilités de condamnation n'apparaissaient pas plus élevées ni équivalentes aux probabilités d'acquittement, de sorte qu'un refus d'entrer en matière sur les faits dénoncés par la plaignante devait être prononcé.

Par ailleurs, aucun acte d'instruction n'était propre à confirmer l'un ou l'autre des récits.

D. a. À l'appui de son recours, A______ reproche au Ministère public d'avoir violé le principe "in dubio pro duriore". Toutes les conditions pour l'ouverture d'une instruction étaient réunies. La version du mis en cause n'était pas plausible. Les propos tenus par celui-ci dans son message du 15 juin 2018 attestaient de sa culpabilité, dans la mesure où il s'excusait pour avoir, la veille, passé outre son refus d'entretenir une relation sexuelle avec lui. Les déclarations de son nouveau compagnon, lequel avait recueilli ses confidences, le mettaient d'ailleurs en cause. De plus, durant la période des viols dénoncés, elle se trouvait sous l'emprise du mis en cause, qui lui faisait subir une "extrême pression psychologique", tant en menaçant de se suicider si elle le quittait, que par le biais d'un chantage professionnel, celui-ci étant très influent dans le monde de la danse. L'intéressé avait, en outre, violenté son nouveau compagnon, ce qui lui faisait craindre une récidive si elle ne faisait pas ce qu'il voulait. Ces éléments – dont l'autorité intimée n'avait pas tenu compte – ressortaient des nombreux messages versés à la procédure et retranscrits dans son écriture. Dans ce contexte, la contrainte était réalisée.

En tout état, le Ministère public ne pouvait, à ce stade de la procédure, établir de manière indubitable que les infractions n'étaient pas réalisées. D'autres actes d'instruction auraient pu être effectués, notamment les auditions de ses proches, qu'elle avait sollicitées.

b. Dans ses observations, le Ministère public persiste dans ses précédents développements et conclut au rejet du recours. La version de la recourante était peu crédible, notamment au vu des messages adressés par celle-ci au mis en cause. En outre, même si l'éventuelle insistance du mis en cause, ou du moins la situation, avaient pu constituer une source d'angoisse pour la recourante, ces éléments ne suffisaient pas à établir l'existence d'une contrainte, au sens de l'art. 190 CP. Dans ce contexte, il ne paraissait guère possible d'établir une prévention pénale suffisante à l'égard du mis en cause, peu importe les actes d'instruction entrepris. Les actes requis par la recourante n'étaient d'ailleurs pas susceptibles d'apporter des éléments pertinents. Les messages retranscrits à l'appui du recours n'étaient, de plus, pas de nature à modifier sa conviction. Sa décision, conforme au principe "in dubio pro duriore", était par conséquent justifiée.

c. Dans sa réplique, A______ persiste dans les termes de son recours. Ses explications étaient cohérentes et crédibles. La contrainte ne devait pas nécessairement être violente. Quoiqu'il en soit, le premier viol décrit était caractérisé par une immobilisation physique. Enfin, le Ministère public passait sous silence l'épisode de la séquestration dans une chambre d'hôtel, en Allemagne, faits pourtant établis par les messages produits. En tout état, le principe "in dubio pro duriore" imposait que cette affaire fasse l'objet d'une instruction.

À l'appui de sa réplique, elle a versé un rapport psychothérapeutique, établi le
23 février 2022, par M______, psychologue, attestant d'un suivi depuis le 20 mai 2021 et faisant, en particulier, état de crises d'angoisse et de crainte de représailles, de troubles du sommeil et d'un manque de concentration, d'un sentiment d'impuissance exprimé par un sentiment de dévalorisation de soi et de honte, ainsi que d'une perte de confiance dans les relations humaines.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la partie plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à voir poursuivre les auteurs des prétendues infractions commises contre son intégrité sexuelle (art. 115 et 382 al. 1 CPP).

1.2. Les pièces nouvelles produites devant la juridiction de céans sont recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.2).

2. La recourante estime qu’il existe contre le mis en cause une prévention suffisante de contrainte et de viol.

2.1. Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Cette disposition doit être interprétée à la lumière du principe "in dubio pro duriore", selon lequel un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés que quand il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables. Ainsi, la procédure doit se poursuivre quand une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou que les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'infractions graves. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, à ce sujet, d'un pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 du 10 juin 2021 consid. 2.1).

Dans les procédures où l'accusation repose essentiellement sur les déclarations de la victime, auxquelles s'opposent celles du prévenu, le principe "in dubio pro duriore" impose, en règle générale, que ce dernier soit mis en accusation. Cela vaut en particulier lorsqu'il s'agit de délits commis typiquement "entre quatre yeux" pour lesquels il n'existe souvent aucune preuve objective (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité, consid. 2.2). Concernant plus spécialement la poursuite des infractions contre l'intégrité sexuelle, les déclarations de la partie plaignante constituent un élément de preuve qu'il incombe au juge du fond d'apprécier librement, dans le cadre d'une évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires figurant au dossier (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité, consid. 3.2 in fine).

Il peut toutefois être renoncé à une mise en accusation si : la victime fait des dépositions contradictoires, rendant ses accusations moins crédibles; une condamnation apparaît, au vu de l'ensemble des circonstances, a priori improbable pour d'autres motifs; il n'est pas possible d'apprécier l'une ou l'autre des versions opposées des parties comme étant plus ou moins plausible et aucun résultat n'est à escompter d'autres moyens de preuve (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité, consid. 2.2).

2.2.1. Enfreint l'art. 181 CP celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.

2.2.2. La contrainte peut donc être réalisée lorsque l'auteur entrave sa victime "de quelque autre manière" dans sa liberté d'action. Cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive. N'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas. Il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action. Il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 141 IV 437 consid. 3.2.1). On vise ici une forme de pression psychologique qui peut, par exemple, consister en la perspective de porter atteinte à un bien particulier, comme la santé, mais aussi à des acquis immatériels, tels l'avenir économique, les chances de carrières, l'honneur, la considération et l'intégrité d'une personne ou encore la réputation auprès de la clientèle d'une entreprise (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand du Code pénal II, 2e éd., Bâle 2017, n. 13 ad art. 181 et les références citées).

2.3.1. Se rend coupable de viol (art. 190 CP), quiconque, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d’ordre psychique ou en la mettant hors d’état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l’acte sexuel.

2.3.2. Sur le plan objectif, il faut, pour qu'il y ait contrainte, que la victime ne soit pas consentante, que le prévenu le sache ou accepte cette éventualité et que celui-ci déjoue, en utilisant un moyen efficace, la résistance que l’on peut attendre de celle-là (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité, consid. 3.1).

En introduisant la notion de "pressions psychiques", le législateur a voulu viser les cas où l'auteur provoque chez la victime des effets tels que la surprise, la frayeur ou le sentiment d'une situation sans espoir, propres à la faire céder, sans pour autant recourir à la force physique ou à la violence (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité). Pour être qualifiées de contrainte, ces pressions doivent atteindre une intensité particulière (ATF 131 IV 167 consid. 3.1) et rendre la soumission de la victime compréhensible (arrêt du Tribunal fédéral 6B_159/2020 du 20 avril 2020 consid. 2.4.3).

En cas de pressions d'ordre psychique, il n'est pas nécessaire que la victime ait été mise hors d'état de résister (ATF 124 IV 154 consid. 3b p. 158 s.). La pression exercée doit néanmoins revêtir une intensité particulière, comparable à celle d'un acte de violence ou d'une menace (ATF 133 IV 49 consid. 6.2 p. 55). Au vu des circonstances du cas et de la situation personnelle de la victime, on ne doit pas pouvoir attendre d'elle de résistance, ni compter sur une telle résistance, de sorte que l'auteur peut parvenir à son but sans avoir à utiliser de violence ou de menace (ATF 131 IV 167 consid. 3.1 p. 170 s.). L'exploitation de rapports généraux de dépendance ou d'amitié ou même la subordination comme celle de l'enfant à l'adulte ne suffisent en règle générale pas pour admettre une pression psychologique au sens de l'art. 190 al. 1 CP (ATF 131 IV 107 consid. 2.2 p. 109; ATF 128 IV 97 consid. 2b/aa et cc p. 99 s.; arrêt du Tribunal fédéral 6B_583/2017 du 20 décembre 2017 consid. 3.1).

2.3.3. Le Tribunal fédéral a rappelé qu'une interprétation de l'art. 190 CP comme rendant punissable tout acte sexuel non consensuel (définition du consentement selon l'adage "oui c'est oui") n'était pas conforme au droit pénal en vigueur (cf. ATF 148 IV 234).

2.4.1. En l'espèce, les parties s’accordent à dire qu’elles ont entretenu, à plusieurs reprises, des rapports intimes mais livrent chacune une version – de la relation qui les liait et des évènements dénoncés – en opposition l'une avec l'autre. En particulier, leurs déclarations sont contradictoires sur la question décisive du consentement de la recourante et de la conscience du prévenu de l'éventuelle contrainte de sa partenaire.

Lorsqu'il s'agit d'un délit commis "entre quatre yeux", pour lequel il n'existe aucune preuve objective, comme c'est le cas en l'occurrence – aucun témoin n'ayant assisté à la scène – la jurisprudence impose la mise en accusation du prévenu, sauf si les déclarations de la partie plaignante sont contradictoires au point de les rendre moins crédibles.

Or, l'analyse du dossier met en lumière certaines contradictions et incohérences dans la version que la recourante soutient. Elle considère avoir été sous l'emprise du mis en cause et avoir fait l'objet de pressions psychologiques de sa part. Aucun élément matériel ne permet toutefois de l'étayer. Si les messages produits à l'appui de sa plainte démontrent, certes, des difficultés entre eux, mais aussi une longue interrogation de sa part quant à l'opportunité de rompre, le moment pour le faire et les conséquences de cet acte, ces échanges n'apportent aucun élément de nature à conforter l'existence de la contrainte dénoncée. Au contraire, durant la période en cause, la recourante est ambiguë dans ses messages, quasi quotidiens, au mis en cause usant régulièrement de surnoms affectueux, tels que, "ma courgette" et "mon petit doigt", et employant des termes chaleureux, comme "bisous" ou "prends soin de toi", ce à quoi le mis en cause répond sur le même ton. Le discours du précité n'est ni agressif ni menaçant, et la plaignante ne le soutient du reste pas. Ces messages et les photographies versées à la procédure ne permettent en outre pas d'exclure – contrairement à ce qu'affirme la plaignante – la possibilité que leur relation ait réellement perduré jusqu'à la fin de la saison, la recourante ayant continué, lors des tournées, à partager sa chambre avec le mis en cause, lui proposant, elle-même, en Russie, de partager son lit. En tout état, l'on peine à discerner en quoi le fait que la recourante et le mis en cause auraient ou non fait semblant d'être en couple serait pertinent pour établir les éléments constitutifs des infractions à l'intégrité sexuelle dénoncées.

La recourante fonde encore sa "peur de représailles" sur le fait que le mis en cause s'en serait pris physiquement à son nouveau compagnon et se serait montré violent avec elle lors d'une dispute en mai 2017. Toutefois, les atteintes physiques alléguées n'ont fait l'objet d'aucun constat médical, ni d'un dépôt de plainte. Il en va de même d'un éventuel chantage au suicide, lequel ne ressort pas du dossier, le mis en cause lui ayant – au contraire – dit qu'il ne lui en voulait pas [cf. échange de messages durant la nuit du 18 au 19 mars 2019]. Ces violences alléguées ne permettent donc pas d'établir des pressions psychologiques de nature à empêcher la plaignante de repousser les avances du mis en cause.

De même, l'audition de E______, auquel la plaignante s'est confiée, ne permet pas de démontrer l'existence d'une contrainte, ses déclarations se limitant à la version des faits relatée par celle-ci, sans porter sur les éléments subjectifs de l'infraction. Il sera néanmoins relevé que la recourante ne semble pas lui avoir fait part des viols qu'elle allègue être survenus en Espagne, celui-ci ne les évoquant pas. Il ne confirme en outre pas l'existence d'une hiérarchie entre les danseurs, au sein de la compagnie, qui aurait pu expliquer la dépendance professionnelle alléguée par la plaignante pour justifier un moyen de pression, étant précisé qu'une telle dépendance ne suffirait pas, selon la jurisprudence, pour admettre une pression psychologique au sens de l'art. 190 al. 1 CP.

Il s'ensuit que la crédibilité du récit de la recourante est mise à mal, affaiblissant dans la même mesure les soupçons qui pèsent sur le prévenu, qui est demeuré constant dans ses dénégations.

De plus, il ne ressort pas du dossier qu'elle aurait – ni avant, ni pendant – clairement exprimé son refus des actes non consentis. Selon ses propres termes, elle se serait "laissée faire" et n'avait "pas résisté". S'agissant de l'acte subi en Russie, elle ne dépeint pas de comportement du mis en cause de nature à lui faire craindre un préjudice sérieux pour sa personne, propre à la faire céder. Il n'existe pas de traces cliniques de lésions traumatiques, la recourante n'ayant pas consulté de médecin après les faits incriminés. La recourante s'est peu exprimée sur les gestes de défense qu'elle lui aurait opposés, se limitant à affirmer lui avoir dit qu'elle n'avait pas envie et qu'elle voulait qu'il arrête. Elle n'expose enfin pas avoir crié ou protesté verbalement. L'existence de pressions d'ordre psychique, suffisamment fortes pour briser toute résistance de la part de la recourante, n'est pas non plus établie, tel que développé ci-dessus.

Bien que le contenu du message que le mis en cause lui a adressé, le 15 juin 2018, soit équivoque, le précité s'est montré cohérent dans ses explications lors de son audition à la police. Il convient également de ne pas perdre de vue le contexte évoqué supra et la réponse de la plaignante à ce message, dans laquelle elle ne fait en aucun cas état d'un abus et relativise la gravité des faits "Tkt pas pour hier soir" (sic), tout en se montrant prévenante dans ses propos "J'espère pouvoir danser avec toi toute ma vie", prenant même des nouvelles du concerné trois jours plus tard.

Dans ces circonstances, il ne peut être établi que le mis en cause aurait intentionnellement passé outre le consentement de la recourante, ni qu'il aurait pu déduire du comportement de celle-ci non seulement ses réticences, mais surtout son opposition.

En conséquence, les éléments constitutifs de l'infraction de viol n'apparaissent pas réunis.

Les auditions sollicitées de témoins indirects ne seraient pas à même de démontrer l'inverse. La pertinence de l'intervention des proches de la recourante est restreinte à la version des faits relatée par celle-ci. Or, cette version est déjà connue. En outre, le rapport psychothérapeutique produit par l'intéressée demeure un avis émis sur la base de ses seules déclarations, recueillies au demeurant plusieurs années après les agressions alléguées. Il est enfin évident que le temps écoulé depuis le déroulement des faits intimes en cause ne permet pas d'envisager d'autres actes d'enquêtes susceptibles de les établir.

C'est donc à raison que le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière, ce qui dispense d'examiner la compétence ratione loci des autorités pénales suisses pour les faits survenus à l'étranger.

2.4.2. La recourante reproche également à son ex-compagnon de l'avoir restreinte dans sa liberté de mouvement, en l'empêchant de sortir de leur chambre d'hôtel "en lui barrant la route", lors de leur séjour en Allemagne, ce que le mis en cause conteste. Or, hormis ses déclarations, le dossier ne recèle aucun élément probant qui viendrait étayer ses accusations.

Quoiqu'il en soit, l'entrave alléguée n'atteindrait pas le degré admis par la jurisprudence pour être constitutive de contrainte. En effet, contrairement à ce que soutient la recourante, le fait que le mis en cause lui aurait "barr[é] la route", dans les circonstances ressortant du dossier, ne semble pas propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne ni à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action. En effet, la plaignante n'a pas argué qu'un verrouillage de la porte l'aurait empêchée de partir, ni qu'il aurait utilisé la force physique ni que cet acte aurait eu une certaine durée. Elle a d'ailleurs pu quitter la chambre, une fois le mis en cause endormi, et a, de son propre chef, choisi d'y retourner. De plus, elle avait, le jour-même des faits, écrit au mis en cause, qu'elle ferait tout son possible pour retrouver l'amour qu'elle ressentait pour lui, ce qui paraît contredire les faits qu'elle dénonce.

Aucun acte d'enquête ne permettrait de fournir des informations pertinentes sur ces faits, étant relevé que les messages échangés avec E______ à ce sujet, ne permettent pas de modifier ce constat, dès lors que le précité n'a pas directement assisté à la scène et s'est borné à réagir aux propos de la recourante.

Le Ministère public était donc fondé à ne pas entrer en matière sur ces accusations, pour autant que sa compétence ratione loci ait été donnée.

3. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4. La recourante sollicite l'assistance judiciaire pour le recours.

4.1. L'art. 136 al. 1 CPP soumet le droit à l'assistance judiciaire à la partie plaignante à deux conditions : la partie plaignante doit être indigente (let. a) et l'action civile ne doit pas paraître vouée à l'échec (let. b).

4.2. En l'espèce, la recourante ne remplit déjà pas la condition de l'indigence, à teneur du rapport du Greffe de l'assistance juridique et, vu l'issue du recours, l'action civile était de toute manière vouée à l'échec.

La requête ne peut dès lors qu'être rejetée.

5. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), étant précisé que la demande de refus de l'assistance judiciaire est rendue sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et
Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/15964/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1000.00