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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/1137/2022

ACPR/553/2023 du 20.07.2023 sur JTPM/214/2023 ( TPM ) , REJETE

Recours TF déposé le 14.09.2023, rendu le 31.10.2023, REJETE, 7B_609/2023
Descripteurs : TRAITEMENT AMBULATOIRE;SOLDE DE LA PEINE;RISQUE DE RÉCIDIVE;RÉINTÉGRATION DANS UN ÉTABLISSEMENT
Normes : CP.63.leta

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/1137/2022 ACPR/553/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 20 juillet 2023

 

Entre

 

A______, comparant par Me B______, avocat,

recourant,

contre le jugement rendu le 30 mars 2023 par le Tribunal d’application des peines et des mesures,

 

et

 

LE TRIBUNAL D’APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 11 avril 2023, A______ recourt contre le jugement du 30 mars 2023, notifié le lendemain, par lequel le Tribunal d’application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a prononcé la levée du traitement ambulatoire ordonné par le Tribunal correctionnel le 21 janvier 2019 et la levée des règles de conduite et de l’assistance de probation ordonnées par le TAPEM le 5 novembre 2021, ainsi que sa réintégration dans l’exécution d’un solde de peine de 8 mois et 5 jours pour lequel il avait été libéré conditionnellement.

Le recourant conclut à l’annulation du jugement attaqué, à la poursuite du traitement ambulatoire, au maintien des règles de conduite, à la non-réintégration du solde de peine ainsi qu’à la prolongation pour six mois du délai d’épreuve de la libération conditionnelle. Sa requête d’effet suspensif a été admise par ordonnance du 13 avril 2023.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par jugement du Tribunal correctionnel du 21 janvier 2019, A______, né le ______ 1991, a été condamné à une peine privative de liberté d'ensemble (après la révocation du sursis partiel accordé par le Tribunal correctionnel du canton de Genève le 10 janvier 2014) de 5 ans, sous déduction de 559 jours de détention avant jugement, pour brigandages et prise d'otage. Un traitement ambulatoire au sens de l’article 63 CP a également été ordonné.

b. Dans le cadre de cette procédure pénale, une expertise psychiatrique a été rendue par le Centre universitaire romand de médecine légale (CURML) le 20 avril 2018. L'expert-psychiatre a diagnostiqué A______ comme souffrant d'intoxication alcoolique aiguë (F10.0), de consommation d'alcool : utilisation nocive pour la santé (F10.1), d'intoxication aiguë à la cocaïne (F14.0), de consommation de cocaïne : utilisation nocive pour la santé (F14.1) et de consommation de cannabis : utilisation nocive pour la santé (F12.1). Le rapport d'expertise a indiqué que l'intéressé présentait un faible niveau de psychopathie et un risque moyen de récidive violente qui ne serait pas négligeable si le prénommé se trouvait confronté aux facteurs environnementaux qui lui avaient été préjudiciables par le passé comme l'isolement affectif, l'influence du groupe et la consommation de toxiques. Pour diminuer ce risque, l'expert a préconisé une mesure ambulatoire, comprenant un suivi psychothérapeutique et des contrôles de consommations d'alcool et de stupéfiants.

c. Par jugement du 5 novembre 2021, le TAPEM a ordonné la libération conditionnelle de A______, en fixant la durée du délai d'épreuve à 1 an, échéant au 6 novembre 2022. Il a ordonné le maintien du traitement ambulatoire. Il a fait obligation à A______, en tant que règles de conduite, de rester abstinent aux stupéfiants, de se soumettre à des contrôles réguliers de son abstinence pendant le délai d'épreuve, ainsi que de suivre un traitement médical et une thérapie visant à traiter ses problèmes d'addiction. Enfin, le TAPEM a ordonné une assistance de probation durant le délai d'épreuve.

d. Dans un rapport d'évaluation criminologique du 4 février 2022, le Service de probation et d'insertion (ci-après : SPI) indique que, bien que A______ dispose d'un certain nombre de facteurs protecteurs (famille, travail et diplôme obtenu en détention), il présente un nombre élevé de facteurs criminogènes. Il était l’auteur de nombreux faits de violence ou de comportements antisociaux, de surcroît apparus précocement, avec une gravité exponentielle. L'importance de son inadaptation durant la jeunesse et ses graves antécédents de consommation d'alcool et de stupéfiants ont également été des éléments prépondérants pour l'évaluation. Le SPI identifie également des problèmes de surveillance du fait que A______ s'était soustrait à la justice suisse pour fuir à l'étranger durant deux ans.

e. Il ressort du rapport médical du Service d'addictologie des HUG du 21 avril 2022 que le recourant est suivi au centre ambulatoire d'addictologie psychiatrique (ci-après : CAAP) D______ depuis le 27 janvier 2022 et qu'il a annulé deux rendez-vous au motif qu'il travaillait. Les résultats des contrôles toxicologiques révèlent une abstinence pour la totalité des substances testées, à l'exception du cannabis.

f. Par courriers des 5 et 24 mai 2022, le Service de l'application des peines et mesures (ci-après : SAPEM) a invité A______ à se déterminer sur son comportement inapproprié, notamment concernant l'annulation de deux rendez-vous et ses consommations de produits cannabiques et d'alcool. Aucune réponse de la part du recourant n'est parvenue au SAPEM.

g. Le 4 août 2022, le rapport médical du Service d'addictologie des HUG indique que A______ est collaborant en entretien. Les résultats toxicologiques montrent toujours une abstinence pour la totalité des substances testées, à l'exception du cannabis (THC). Dans sa profession, il serait obligé de tester les huiles thérapeutiques et autres produits contenant du CBD. Toutefois, les résultats des tests ne permettent pas d'affirmer s'il consomme ou non du cannabis. S'agissant de l'alcool, il rapporte une consommation modérée et contrôlée d'alcool, mais peine à quantifier ce qu'il boit. Il semble détaché quant aux inquiétudes du CAAP, mais se déclare néanmoins sensible aux commentaires et à l'opinion de sa compagne sur ses changements de comportements lorsqu'il boit.

h. Dans un rapport du 8 août 2022, le Service des mesures institutionnelles
(ci-après : SMI) constate que A______ semble bien investir, et bénéficier de, son suivi psychothérapeutique, bien que l'introspection ne soit que partielle à l'heure actuelle. Son état psychique est stable. Il semble sincèrement désireux de mettre en place des stratégies qui lui éviteront de retourner en prison. Ainsi, la mesure est utile, semble porter ses fruits et doit être maintenue.

i. Le 12 août 2022, le SPI relève que A______ souhaite quitter Genève, sinon il risquerait d'être incarcéré. L’intéressé indique que son père doit le récupérer le soir-même pour se rendre en Angleterre. Il dit avoir rempli le formulaire annonçant son départ et l'avoir envoyé à l'OCPM. Il a en sa possession l'attestation de rupture de contrat qu'il joindra. Il va mettre en place le suivi du traitement et des analyses en Angleterre et téléphonera au SPI pour les entretiens. Pour ce qui est du travail, il devrait obtenir un contrat via sa famille. Il a précisé que son projet était mûrement réfléchi et qu'il se mettrait dans une mauvaise posture s'il restait à Genève avec ses fréquentations, les qualifiant de malsaines.

j. Selon un courriel du Service d'addictologie des HUG du 17 octobre 2022, A______ n'a plus repris contact avec le CAAP D______ depuis son dernier rendez-vous, le 12 août 2022.

k. Le 20 octobre 2022, un rapport du SPI indique que A______ a été collaborant et ponctuel lors de son suivi probatoire jusqu'au dernier rendez-vous du 12 août 2022. Par courriel du 11 août 2022, il a expliqué notamment que "cette ville de Genève est un vrai poison" et qu'il voulait s'en éloigner, car s'il restait cela engendrerait des conséquences qu'il allait regretter. Le SPI a invité A______ à effectuer une demande officielle auprès du SAPEM afin d'expliquer sa situation et de demander formellement une levée de ses injonctions pénales vu son départ à l'étranger (ce qu'il n'a jamais fait). Le 12 août 2022, lors de son entretien au SPI, il était toujours déterminé à quitter au plus vite Genève pour rejoindre sa famille en Angleterre, à sortir de son réseau relationnel délétère et à ne plus subir une situation amoureuse en dents de scie qui arrivait en bout de parcours. Le SPI lui a fait part des conséquences d'un départ précipité qui pourrait être considéré comme une inobservation de sa règle de conduite et de son assistance de probation. A______ a déclaré qu'il en était conscient, mais que pour lui il était nécessaire de partir et de se mettre à l'abri d'une éventuelle récidive. Le 12 août 2022, le SPI lui a demandé de transmettre divers documents afin de démontrer qu'il s'était bien établi en Angleterre. Par message du 31 août 2022, A______ a indiqué qu'il était très heureux d'avoir pris la décision de quitter "l'atmosphère néfaste de Genève", qu'il avait pris contact avec son ancien employeur, à G______, pour y travailler comme agent de sécurité, qu'il allait demander sa carte de résident et qu'il transmettrait tous les documents nécessaires. Par message du 20 octobre 2022, il a expliqué être à G______, y effectuer des petits boulots, et entreprendre les démarches pour obtenir sa carte de résident. Il a vu une psychologue en précisant que, pour le moment, il ne pouvait pas payer ses consultations, ni les tests toxicologiques. Le SPI mentionne n’avoir reçu aucun document de la part de A______. Le SPI conclut que, dans la mesure où le recourant ne se soumet pas à l'assistance de probation à laquelle il est astreint, il n'est pas en mesure d'assumer le mandat qui lui a été confié.

l. Dans son préavis du 26 octobre 2022, le SAPEM relève que A______ a volontairement précipité son départ du territoire suisse sans l’en informer directement et en faisant fi de ses injonctions pénales. Bien que dûment informé par le SPI des enjeux d'un départ soudain à l'étranger, il n'a pas pris la peine d'expliquer sa situation à l'ensemble des acteurs du réseau et de définir un projet de vie concret à l'étranger, et ce sans avoir obtenu au préalable une levée de ses obligations pénales auprès du TAPEM. En substance, il ne s'est guère enquis de sa situation pénale avant de quitter le territoire suisse et s'est soustrait à ses obligations pénales. Le SAPEM propose dès lors le constat que les règles de conduite, l'assistance de probation et le traitement ambulatoire ne peuvent pas être exécutés, la révocation des règles de conduite, la levée de l'assistance de probation, la levée du traitement ambulatoire, le constat d'échec de la mise à l'épreuve de la libération conditionnelle, la révocation de celle-ci et la réintégration de A______ dans l'exécution de la peine privative de liberté.

m. Par requête du 4 novembre 2022 adressée au TAPEM, le Ministère public fait siens le préavis et les conclusions du SAPEM.

n. Par courriel du 22 novembre 2022, le SAPEM a transmis au TAPEM un échange de courriels entre le recourant et son intervenant socio-judiciaire du SPI, duquel il ressort que A______ a l'intention de s'établir durablement à l'étranger, où il aurait trouvé du travail et obtenu une carte de résident.

o. Par courrier de son avocat du 20 décembre 2022, A______ a indiqué que, depuis septembre 2022, il réside dans la commune espagnole de E______, à la frontière avec G______, qu'il est au bénéfice d'un contrat de bail (dont il a caviardé l'adresse) et est enregistré dans le registre de la commune (produisant à l'appui de cette allégation non pas une attestation d'enregistrement dans la commune mais uniquement son numéro d'identification des étrangers [N.I.E.]), qu'il est employé par une entreprise de sécurité privée à G______, travaille 48h par semaine et est rémunéré à hauteur de £ 10.- de l'heure, sans disposer pour l'instant d'un contrat de travail écrit raison pour laquelle il ne l'a pas transmis au SPI, qu'il a pris contact avec un psychothérapeute, soit F______ à H______ [Espagne] qui est d'accord de le recevoir hebdomadairement, qu'il a d'ores et déjà un rendez-vous pour le 21 décembre 2022 et qu'il s'engage à faire parvenir régulièrement des attestations de suivi, qu'il a effectué le 20 décembre 2022 un test d'urine, dont les résultats sont négatifs, y compris pour le cannabis, qu'il est déterminé à se maintenir dans le droit chemin et à démontrer qu'il est prêt à déployer tous les efforts nécessaires.

p. Par courriers de son conseil des 22 décembre 2022, 17 janvier 2023, 25 janvier 2023, 31 janvier 2023, 21 février 2023 et 10 mars 2023, le recourant a produit les documents suivants :

-          3 copies d’attestations des psychologues précités des 21 décembre 2022, 25 janvier 2023 et 30 janvier 2023 ;

-          5 copies d’analyses d’urines des 4 janvier 2023, 24 janvier 2023, 30 janvier 2023, 2 mars 2023 et 10 mars 2023 mentionnant que les examens sont négatifs aux stupéfiants ;

q. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à quatre reprises, soit :

-          le 17 avril 2012, par le Tribunal correctionnel de la Côte (VD), à une peine privative de liberté de 15 mois, avec sursis 5 ans (révoqué le 10 janvier 2014), et à une amende de CHF 300.-, pour vol, dommages à la propriété, violation de domicile, violation grave de la loi sur la circulation routière, vol d'usage, usage abusif de plaques ou de permis et consommation de stupéfiants,

-          le 14 février 2013, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine privative de liberté de 6 mois pour injure, dommages à la propriété et contrainte,

-          le 10 janvier 2014, par le Tribunal correctionnel de Genève, à une peine privative de liberté de 3 ans, dont 24 mois, avec sursis 5 ans (non révoqué) et une règle de conduite, pour brigandage,

-          le 21 janvier 2019, par le Tribunal correctionnel de Genève, à une peine privative de liberté de 5 ans pour brigandage et prise d’otage, avec un traitement ambulatoire,

-          il fait en outre l’objet de deux nouvelles enquêtes pour des nouvelles infractions des chefs de lésions corporelles simples et de conduite se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, taux d’alcool qualifié dans le sang ou dans l’haleine).

C. Dans son jugement, le TAPEM retient que le recourant a commencé à se soustraire à ses obligations dès le début de l’année 2022. Par la suite, dès le 12 août 2022, le recourant n’a plus respecté les mesures ordonnées, décidant unilatéralement de quitter son emploi et la Suisse. Sa fuite devait être mise en lien avec les nouvelles procédures pénales ouvertes contre lui en avril et octobre 2022. Par ailleurs, le TAPEM relève ne rien savoir des circonstances du suivi en Espagne et constate qu’aucun contrat de travail n’a été produit sur le prétendu emploi exercé dans ce pays.

Au vu de ces éléments, du comportement inadéquat du recourant, de son absence de prise de conscience et de son abandon de suivi, le TAPEM juge que le traitement ambulatoire et les règles de conduites devaient être levés (art. 63a al. 2 let. b et 95 ch. 4 CP) et que le solde de la peine devait être exécuté (art. 95 ch. 5 CP).

D. a. À l’appui de son recours, A______ allègue que le TAPEM a omis de prendre en compte les éléments positifs des rapports de suivi figurant au dossier qui démontraient sa prise de conscience et sa volonté de réinsertion, et a relativisé à tort les documents espagnols, mettant en doute l’existence d’un emploi en Espagne. Il relève également que le TAPEM aurait dû prendre en compte les raisons de son départ, à savoir sa volonté de réduire un risque de récidive. Il allègue enfin qu’il pourra continuer son suivi lors de son retour à Genève et que la réintégration du solde de peine viole le principe de proportionnalité.

Il n’a produit aucune pièce nouvelle, en particulier aucun document avec l’existence alléguée de son emploi.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

c. Les 10 mai, 7, 20 et 27 juin et 14 et 19 juillet 2023, A______ a encore produit des résultats de tests et attestations médicales en provenance d’Espagne.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision judiciaire ultérieure indépendante au sens de l'art. 393 CPP sujette à recours auprès de la Chambre de céans (arrêt du Tribunal fédéral 6B_293/2012 du 21 février 2013 consid. 2; ACPR/421/2013) et émaner du condamné qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP). Les pièces nouvelles produites sont par ailleurs recevables.

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Afin d’examiner si l’exécution du solde de peine est nécessaire, il convient d’examiner si le traitement ambulatoire, d’une part, et l’assistance de probation, d’autre part, sont voués à l’échec.

3.1.       Selon l’art. 63a al. 2 let. b CP, l’autorité compétente ordonne l’arrêt du traitement ambulatoire si sa poursuite paraît vouée à l’échec. Il en va ainsi lorsque l'auteur n'est pas – ou plus – soignable ou que le traitement n'est plus apte à prévenir la commission de nouvelles infractions. L'échec de la mesure peut résulter de l'insuffisance de possibilités thérapeutiques, du manque de respect des avis ou recommandations des thérapeutes ou du refus d'un traitement. Le traitement n'est voué à l'échec que s'il est définitivement inopérant; une simple crise de l'intéressé ne suffit pas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_660/2019 du 20 août 2019 consid. 4.1). Il est reconnu que les crises et les rechutes font régulièrement partie du tableau clinique des personnes dépendantes. La maîtrise de leur addiction nécessite souvent un long processus, parsemé de rechutes, lesquelles ne doivent donc pas nécessairement conduire à admettre l'échec d'une mesure. En revanche, le comportement non coopératif ou indiscipliné de l'intéressé peut, notamment, justifier un tel constat (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1147/2022 du 26 avril 2021 consid. 3.3.2 et 6B_460/2011 du 16 septembre 2011 consid. 2.6). Si la mesure ambulatoire est levée, l’art. 95 al. 3 à 5 CP est ensuite applicable, si l’auteur se soustrait à l’assistance de probation ou viole les règles de conduites.

3.2.       En l’espèce, force est de constater que le recourant, déjà lourdement condamné à plusieurs reprises, a choisi de ne pas coopérer dans le cadre de son suivi ambulatoire en choisissant de partir à l’étranger, alors même que le SPI l’avait informé des conséquences d’un tel choix. Son départ à l’étranger n’est pas une rechute momentanée, mais s’inscrit dans la durée. Sa collaboration à cet égard est mauvaise : il a fourni des pièces caviardées au TAPEM pour ne pas révéler son adresse et n’a transmis ni au TAPEM, ni à l’appui de son recours, un contrat de travail ou une attestation de son employeur. Le recourant a ainsi adopté un comportement non coopératif qui doit amener au constat que la poursuite du traitement ambulatoire est vouée à l’échec. Les éléments positifs ressortant du dossier avant sa fuite ne changent pas ce constat car ils sont antérieurs. Si le recourant avait rencontré des difficultés à Genève, il aurait dû solliciter l’appui de son encadrement médical, et non quitter abruptement la Suisse, comme il l’a fait. Il a en outre cessé de donner des informations entre le 31 août 2022 et le 20 octobre 2022, ce qui démontre son absence de collaboration. Sa volonté, annoncée dans son recours, de reprendre son suivi lors de son retour à Genève, n’est fondée sur aucun élément concret et est contradictoire avec ses propres allégués sur sa volonté de s’installer durablement en Espagne, pays qu’il a rejoint après avoir annoncé qu’il résidait en Grande-Bretagne et à l’intérieur duquel il a sensiblement bougé, après avoir prétendu travailler à G______, matérialisée par son courriel du 22 novembre 2022. La levée de l’assistance de probation prononcée par le TAPEM est dès lors conforme au droit, sans qu’il ne soit nécessaire de se prononcer sur la force probante des attestations médicales espagnoles.

4.                  4.1. Selon l'art. 95 al. 3 CP, si le condamné se soustrait à l'assistance de probation, s'il viole les règles de conduite ou si l'assistance de probation ou les règles de conduite ne peuvent pas être exécutées ou ne sont plus nécessaires, l'autorité compétente présente un rapport au juge ou à l'autorité d'exécution. L'al. 4 de cette même norme précise que, dans ces cas, le juge ou l'autorité d'exécution peut : prolonger le délai d'épreuve jusqu'à concurrence de la moitié de sa durée (let. a), lever l'assistance de probation ou en ordonner une nouvelle (let. b), modifier les règles de conduite, les révoquer ou en imposer de nouvelles (let. c). Les mesures supplémentaires prévues par cet article doivent être ordonnées lorsqu'elles peuvent encore contribuer à la réussite de la mise à l'épreuve (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 6 ad. art. 95). Le juge peut aussi révoquer le sursis ou ordonner la réintégration dans l'exécution de la peine ou de la mesure s'il est sérieusement à craindre que le condamné ne commette de nouvelles infractions (al. 5). L'art. 95 al. 5 CP est applicable en dernier recours, lorsque la perspective de probation pour le condamné s'est détériorée pour une raison quelconque pendant le délai d'épreuve, au point que seule l'exécution de la peine semble la sanction la plus efficace (ACPR/649/2016 du 12 octobre 2016 et les références).

4.2.       En l’occurrence, les règles de conduite et l’assistance de probation sont vouées à l’échec pour les mêmes motifs que ceux qui ont conduit à la confirmation de la levée du traitement ambulatoire. Il peut donc y être renvoyé (cf. supra consid. 3.2).

4.3.       S’agissant de la réintégration, force est de constater que le recourant fait l’objet de deux nouvelles procédures pénales, dont l’une en particulier pour des actes de violence. Il fait par ailleurs l’objet de quatre condamnations définitives inscrites au casier judiciaire, pour des infractions graves. Son parcours judiciaire montre une gradation inquiétante à cet égard. Sa décision de quitter la Suisse dénote dès lors en réalité un refus de se soumettre aux mesures d’encadrement ordonnées par la justice et une absence de prise de conscience de la nécessité de respecter un cadre. Il ne s’agit par ailleurs pas d’une crise limitée dans le temps au vu de la durée du silence du recourant entre les 31 août et 20 octobre 2022 et son courriel du 22 novembre 2022 où il indique ne pas vouloir revenir en Suisse alors qu’il a été mis en garde sur les conséquences de ses choix. L’attitude du recourant dans la présente procédure dénote en outre une absence de collaboration qui n’est pas mitigée par l’envoi d’attestations diverses. Une réintégration est ainsi la seule issue envisageable. Celle-ci est enfin conforme au principe de proportionnalité car le recourant a disposé de plusieurs semaines pour se reprendre et revenir en Suisse ; ne serait-ce qu’aux rendez-vous qui lui étaient fixés. Dès lors que le recourant a choisi de se soustraire unilatéralement aux mesures en place, seule l’exécution du solde de peine permettra d’éviter un risque de récidive, qui n’est pas négligeable comme cela ressort de l’expertise psychiatrique figurant au dossier.

5.             Justifié, le jugement querellé sera donc confirmé.

6.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

7.             Le défenseur d'office conclut à des dépens, qu'il n'a pas chiffrés.

La procédure étant ici close (art. 135 al. 2 CPP), il sera entré en matière.

L'art. 135 al. 1 CPP prévoit que le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération et du canton for du procès. À Genève, le tarif des avocats est édicté à l'art. 16 RAJ et s'élève à CHF 200.- de l'heure pour un chef d'étude (al. 1 let. c).

Eu égard à l'activité déployée pour le recours, soit un mémoire de 10 pages, dont 3 pages de droit, et à l'absence de difficultés juridiques, l'indemnité allouée sera fixée, ex aequo et bono à CHF 800.- TTC.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Alloue à Me B______, à la charge de l’État, une indemnité de CHF 800.- TTC.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au TAPEM et au Ministère public.

Le communique, pour information, au SAPEM et au SPI.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ, juge, et Monsieur Stéphane GRODECKI, juge suppléant ; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PM/1137/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

Total

CHF

985.00