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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/36/2023

ACPR/528/2023 du 11.07.2023 ( PSPECI ) , ADMIS

Descripteurs : EXÉCUTION DES PEINES ET DES MESURES;ALLÉGEMENT;MESURE DISCIPLINAIRE;RÉGIME DE LA DÉTENTION
Normes : CP.75; CP.76

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/36/2023 ACPR/528/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 11 juillet 2023

 

Entre

A______, actuellement détenu à l'Établissement de B______, comparant par Me C______, avocat,

recourant,

contre la décision rendue le 17 mars 2023 par le Service de l'application des peines et mesures,

et

LE SERVICE DE L'APPLICATION DES PEINES ET MESURES, case postale 1629, 1211 Genève 26,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 27 mars 2023, A______ recourt contre la décision du 17 mars 2023, par laquelle le Service de l'application des peines et mesures (ci-après : SAPEM) a révoqué ses décisions de passage en milieu ouvert du 21 mai 2019 (ch. 1 du dispositif) et d'octroi d'une sortie et d'un congé du 9 mars 2023 (ch. 3 du dispositif) et ordonné son placement en milieu fermé (ch. 2 du dispositif).

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision querellée, à ce que la décision de passage en milieu ouvert du 21 mai 2019 soit "immédiatement applicable" et à ce qu'il soit ordonné au SAPEM de lui trouver immédiatement une place dans un établissement pénitentiaire lui offrant la possibilité de travailler dans une activité agricole. Préalablement, il sollicite l'assistance judiciaire et la désignation de son conseil comme défenseur d'office pour la procédure de recours.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, né le ______ 1967, ressortissant suisse, se trouve actuellement en exécution de peine, après avoir été condamné, par arrêt du Tribunal criminel du 1er juin 2012, confirmé par la Chambre pénale d'appel et de révision du 8 février 2013, à une peine privative de liberté de seize ans, dont à déduire 1'386 jours de détention préventive, pour assassinat.

b. Il a été incarcéré du 24 avril 2009 au 8 décembre 2014 à la prison de D______, puis du 8 décembre 2014 au 17 février 2021 aux Établissements de E______, date de son transfert à l'Établissement pénitentiaire de F______, où il a été incarcéré jusqu'au 21 mars 2023. Depuis cette date, il est à nouveau incarcéré dans le canton de Genève.

c. Les deux tiers de la peine ont été atteints le 22 décembre 2019, tandis que la fin de peine est fixée au 22 avril 2025.

d. Par décision du 21 mai 2019, le SAPEM a autorisé le passage en milieu ouvert de l'intéressé, qui a ainsi été transféré de la colonie fermée à la colonie ouverte de E______, le 3 juin 2019, puis au sein du secteur ouvert de F______,
le 17 février 2021.

La dernière évaluation criminologique du Service de probation et d'insertion (ci-après : SPI) du 28 août 2018 qualifiait le risque de récidive spécial comme faible tandis que le risque de récidive violente et le risque de récidive générale étaient qualifiés de moyens. Le risque de récidive en cas de passage en milieu ouvert était jugé faible et le risque de fuite comme faible également, ce qui permettait d'être "rassuré sur la dangerosité de l'intéressé". Les conditions posées par le bilan de phases 1 et 2 du plan d'exécution de la sanction (ci-après : PES), qui prévoyaient notamment "n'avoir aucun comportement transgressif au sens du règlement sur le droit disciplinaire", étaient remplies.

e. Par jugement du 19 décembre 2019, le TAPEM a refusé d'octroyer la liberté conditionnelle à A______, la jugeant prématurée en l'absence d'observation dans le cadre de congés, compte tenu notamment de la gravité des faits pour lesquels il avait été condamné. Le SAPEM était invité à mettre rapidement en œuvre deux congés, puis à établir un bilan de phases, voire "organiser un passage" à la Commission d'évaluation de la dangerosité (ci-après : CED), afin de permettre un nouvel examen sur la libération conditionnelle.

f. Le 29 mai 2020, la CED a considéré que A______ ne présentait pas de dangerosité pour la collectivité dans le cadre de congés, lesquels devraient se dérouler dans un premier temps sous la forme de deux congés de 12 heures, dès que ceux-ci pourraient être mis en œuvre au regard de la situation sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19.

g. Le 11 juin 2020, le SAPEM a octroyé à l'intéressé un congé de 24 heures pour les 18 et 19 juin 2020, fractionné en deux fois 12 heures.

h. D'autres allègements lui ont été accordés par la suite sous forme de sorties de 5 heures les 29 octobre 2021, 17 décembre 2021, 23 février 2023 et 27 février 2023 ainsi qu'un congé de 24 heures le 26 novembre 2021.

i. Le 9 mars 2023, le SAPEM lui a octroyé une sortie de 5 heures en date du 14 mars 2023 et un congé de 36 heures pour les 18 et 19 mars 2023, subordonnés à certaines conditions, dont notamment "adopter un comportement conforme au cadre de l'établissement et ne pas faire l'objet de sanctions disciplinaires".

À teneur de la décision, l'intéressé avait demandé à pouvoir prélever la somme de CHF 300.- sur son compte libre pour la sortie du 14 mars 2023 ainsi que les montants de CHF 500.- du compte libre et CHF 1'000.- du compte d'affectation pour le congé du 18 au 19 mars 2023, destinés à l'achat d'habits et chaussures ainsi qu'à manger au restaurant avec sa famille et des connaissances. Compte tenu des importantes sommes d'argent sollicitées, l'établissement pénitentiaire avait proposé au SAPEM de demander les reçus des achats à A______ et de prélever la moitié de la somme totale du compte libre et l'autre moitié du compte d'affectation. Le SAPEM n'avait pas de contre-indication à cette proposition et il appartiendrait à l'établissement pénitentiaire de vérifier la disponibilité des montants sollicités avant la sortie et le congé.

Il ressortait en outre de la décision que l'intéressé avait, depuis le dernier PES de F______ du 14 novembre 2022, fait l'objet de "six" (recte : cinq) sanctions disciplinaires pour violation du règlement intérieur de l'établissement, menaces envers le personnel et des tiers, et pour avoir refusé de travailler, la dernière sanction remontant au 6 septembre 2022. Cela étant, son comportement général était globalement adéquat et il faisait montre d'un bon comportement dans le cadre de son travail à l'écurie. En outre, aucun incident "critique" n'avait été relevé par l'établissement, de sorte que son comportement était en l'état compatible avec les allègements sollicités.

Enfin, le risque de récidive avait été évalué dans ses précédentes décisions d'allègement, la dernière fois le 21 février 2023. Aucun élément au dossier ne permettait de remettre en question cette appréciation. Les sorties et congés précédemment octroyés s'étaient bien déroulés.

j. À teneur d'un rapport du 13 mars 2023 de F______, G______, collaborateur de l'établissement pénitentiaire, avait convenu avec le SAPEM, soit pour lui H______, que A______ ne pourrait pas utiliser CHF 1'000.- du compte d'affectation pour le congé du 18 au 19 mars 2023 mais seulement CHF 500.- de chacun des comptes libre et d'affectation pour acheter des vêtements. Cette décision venait du SAPEM, qui prohibait l'achat de vêtements au travers du compte d'affectation. Partant, G______ avait fait la proposition de partage moitié compte libre et moitié compte d'affectation. Il en avait fait part à l'intéressé, qui était parti du principe que "tout venait de [lui]" et lui avait écrit une lettre datée du 9 mars 2023 dans laquelle il l'accusait de s'être immiscé dans sa vie privée et d'être un "menteur pathologique" en plus d'un "manipulateur mal intentionné", un "méprisable petit mécréant", un "bon à rien" etc. Dite lettre était insultante et remettait en question les bases de leur collaboration.

k. Selon un rapport du 14 mars 2023 de F______, la veille, A______, qui se trouvait dans un état d'excitation manifeste, s'était approché de G______ en se montrant menaçant et en lui déclarant être "à deux doigts" de lui mettre un coup de poing au visage. Un autre collaborateur avait été témoin de la scène et avait rejoint les précités "pour assurer la protection" de son collègue.

l. Par décision du jour même, A______ a fait l'objet d'une sanction d'arrêt disciplinaire en cellule de sécurité pour une durée de 8 jours. F______ a également demandé son transfert dans un autre établissement le plus rapidement possible.

m. Invité par le SAPEM à se déterminer sur les évènements et l'éventualité d'une révocation de la décision de passage en milieu ouvert du 21 mai 2019, A______ a, par l'entremise de son conseil, indiqué qu'il lui avait semblé que G______ avait pris seul la décision de réduire sa demande de prélèvement à CHF 500.-, sans motivation et sans base légale, le SAPEM n'ayant émis aucune contre-indication à sa demande, à teneur de la décision du 9 mars 2023. Lors de sa première sortie, il avait eu honte de son accoutrement, qui avait suscité des remarques de son entourage et des clients du restaurant, raison pour laquelle il avait souhaité dépenser CHF 1'000.- pour l'achat de nouveaux vêtements et de chaussures. En deux ans, il n'avait sauf erreur sollicité qu'une fois CHF 50.- pour s'acheter des baskets. La décision de G______ ne répondait à aucune logique et était purement vexatoire. Il l'avait vécue comme une provocation. Il regrettait son emportement. Il admettait avoir eu de la peine à maîtriser ses émotions et s'être exprimé de façon désagréable dans son courrier du 9 mars 2023. Il relevait par ailleurs que G______ n'avait pas fait appel à la sécurité, ce qui démontrait qu'il ne s'était pas senti menacé. Il sollicitait qu'il soit renoncé à révoquer son passage en milieu ouvert. Au surplus, il souhaitait être transféré à I______.

C. Dans sa décision querellée, le SAPEM relève que malgré son transfert à F______, A______ avait toujours eu du mal à respecter les règlements, faisant l'objet de plusieurs procédures disciplinaires. En l'absence d'incident "critique", il avait néanmoins considéré que son comportement était compatible avec la poursuite du régime progressif, l'intéressé se conformant, d'une manière générale, au règlement de la vie quotidienne en prison et adoptant un bon comportement dans le cadre de son travail. Les récents évènements (lettre du 9 mars 2023 et épisode du 13 mars 2023) démontraient cependant que son comportement s'était aggravé, F______ ayant relevé, dans sa décision du 14 mars 2023, que le prénommé avait fait l'objet de plusieurs sanctions disciplinaires durant l'année écoulée, notamment pour "comportement inapproprié ou menaçant envers le personnel". Partant, l'intéressé ne remplissait plus les conditions d'un passage en milieu ouvert. En outre, ces comportements étaient disproportionnés et inquiétants au regard de la gravité de l'infraction commise et du risque de récidive violente et générale mis en exergue dans l'évaluation criminologique du SPI du 28 août 2018. La décision du 21 mai 2019 était révoquée, tout comme celle d'octroi d'une sortie et d'un congé du 9 mars 2023.

D. a. Dans son recours, A______ excipe d'un abus du pouvoir d'appréciation. En 14 ans de détention, il n'avait jamais commis d'acte hétéro-agressif. Le seul reproche qu'on pouvait lui faire était son vocabulaire peu châtié et un ton pouvant être perçu comme agressif. F______ avait admis qu'il se comportait de manière générale conformément aux règles. Le bilan de phase du PES de mars 2020 relevait son côté "bourru" tout en soulignant qu'il était toujours adéquat dans la relation et à l'écoute des remarques, tandis que la CED notait, en mai 2020, que malgré ses attitudes verbales "peu filtrées" il faisait preuve d'une grande maîtrise de lui-même. La décision querellée, en n'en faisant pas état, se fondait sur un complexe de faits incomplets. Il avait toujours donné satisfaction dans son travail à la ferme, en particulier avec les animaux. L'empêcher de se réaliser dans ce travail agricole était contreproductif. La décision querellée devait être révoquée afin qu'il puisse purger le solde de sa peine en milieu ouvert. Dans ce cadre, il lui appartiendrait de déposer de nouvelles demandes de congé.

b. Dans ses observations du 12 mai 2023, le SAPEM rappelle que le recourant, dans un contexte de frustration lié à un refus partiel de sa demande de prélever une somme de ses comptes en vue d'une sortie et d'un congé, a présenté sur plusieurs jours un comportement menaçant à l'encontre de G______ (lettre du 9 mars 2023 et évènement du 13 mars 2023). Il se référait au surplus à sa décision querellée, qui restait d'actualité.

c. Le recourant réplique et produit des échanges de courriels entre son conseil et le SAPEM à teneur desquels F______ était prêt à le reprendre pour autant qu'il présente ses excuses à G______.

EN DROIT :

1.             1.1. Conformément à l'art. 128 al. 2 let. a et al. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ ; RS E 2 05), la Chambre de céans exerce les compétences que le CPP et la loi d'application du Code pénal suisse et d'autres lois fédérales en matière pénale du 27 août 2009 (LaCP ; RS E 4 10) lui attribuent.

1.2. En vertu de la délégation figurant à l'art. 439 CPP, le législateur genevois a attribué à la Chambre pénale de recours la compétence de statuer sur les recours dirigés contre les décisions rendues par le Département de la sécurité et de l'économie (DSE), ses offices et ses services, les art. 379 à 397 CPP s'appliquant par analogie (art. 42 al. 1 let. a LaCP).

1.3. En l'espèce, le recours est recevable pour être dirigé contre une décision rendue par le SAPEM (art. 5 al. 2 let. e et 40 al. 1 LaCP ; art. 11 al. 1 let. e Règlement sur l'exécution des peines et mesures du 19 mars 2014 [REPM ; RS E 4 55.05]), avoir été déposé dans la forme et le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al 1 CPP) et émaner du condamné visé par la décision déférée et qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision entreprise (art. 382 al. 1 CPP).

1.4. Les faits et moyens de preuve nouveaux sont recevables devant l'instance de recours (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2020 du 19 novembre 2022 consid. 2.1).

2. Le recourant conteste exclusivement la révocation de son placement en milieu ouvert.

2.1. Selon l'art. 75 al. 1 CP, l'exécution de la peine privative de liberté doit améliorer le comportement social du détenu, en particulier son aptitude à vivre sans commettre d'infractions. Elle doit correspondre autant que possible à des conditions de vie ordinaires, assurer au détenu l'assistance nécessaire, combattre les effets nocifs de la privation de liberté et tenir compte de manière adéquate du besoin de protection de la collectivité, du personnel et des codétenus.

Les peines privatives de liberté sont exécutées dans un établissement fermé ou ouvert (art. 76 al. 1 CP). Le détenu est placé dans un établissement fermé, ou dans la section fermée d'un établissement ouvert, s'il y a lieu de craindre qu'il ne s'enfuie ou ne commette de nouvelles infractions (art. 76 al. 2 CP).

2.2. En l'espèce, il est admis que c'est en réaction à l'annonce par un collaborateur de F______ qu'il ne pourrait pas prélever CHF 1'000.- sur son compte d'affectation mais seulement la moitié, pour s'acheter des vêtements et chaussures, lors du congé accordé pour les 18 et 19 mars 2023, que le recourant a insulté par écrit le précité, le tenant pour responsable de cette "réduction". Or, selon le collaborateur en question, ce serait le SAPEM qui aurait interdit d'affecter un tel montant du compte d'affectation à l'achat de vêtements, lui-même ayant alors proposé d'en prélever au moins une partie. Le recourant a été sanctionné disciplinairement par l'établissement pénitentiaire pour ces faits, ainsi que pour avoir menacé verbalement quelques jours plus tard le même collaborateur.

Le recourant ne remet pas en cause la révocation de la sortie et du congé accordés, à bon droit, dits allègements étant, à teneur de la décision du 9 mars 2023, incompatibles avec le prononcé de sanctions disciplinaires.

La question d'une révocation du passage en milieu ouvert se pose toutefois en termes différents.

À teneur du dossier, l'intéressé, qui est détenu en milieu ouvert depuis le 3 juin 2019, d'abord à la colonie ouverte de E______ puis au sein du secteur ouvert de F______, a fait l'objet de cinq sanctions disciplinaires entre le 14 avril et le 6 septembre 2022 au sein de ce second établissement pénitentiaire. Ce nonobstant, le SAPEM a considéré, au gré des différentes demandes d'allègements qui lui avaient été soumises, que le précité, malgré ces sanctions, se comportait globalement de manière adéquate et faisait montre d'un bon comportement dans le cadre de son travail. Aucun incident critique n'avait en outre été relevé par l'établissement pénitentiaire. Le SAPEM considère toutefois que le ton injurieux du courrier du 9 mars 2023 – admis par le recourant – et le comportement menaçant du 13 mars 2023 – contesté par le recourant – dénotent une aggravation du comportement de l'intéressé, ce d'autant que ce dernier avait été plusieurs fois sanctionné disciplinairement pour des comportements similaires au cours de l'année écoulée. Le recourant ne se détermine pas sur ce point, arguant que jusqu'ici F______ avait toujours admis qu'il se comportait de manière générale aux règles.

Quand bien même la fréquence des sanctions disciplinaires prononcées par F______ à l'endroit du recourant aurait augmenté, cela ne signifie pas encore qu'elles seraient, aujourd'hui, suffisamment graves pour faire échec à la poursuite du régime progressif en milieu ouvert, vu les derniers allègements accordés le 9 mars 2023. S'agissant des injures et menaces proférées ou supposément proférées par le recourant les 9 et 13 mars 2023, elles n'auraient, à teneur des courriels produits par l'intéressé, pas fait obstacle à son retour en milieu ouvert à F______, ce qui semble relativiser la gravité de ces actes. Partant, il est hasardeux de voir dans ces évènements – qui ont une origine unique – le point culminant d'une aggravation du comportement du recourant susceptible de remettre en cause l'opportunité de son maintien en milieu ouvert.

Le SAPEM met ensuite en avant le risque de récidive violente et générale relaté dans l'évaluation du SPI du 28 août 2018. Or, c'est précisément en se fondant sur cette analyse que le SAPEM a autorisé le passage en milieu ouvert, le 21 mai 2019, le risque de récidive qualifié de faible dans le cadre d'un tel régime rassurant sur la dangerosité de l'intéressé. La CED, dans son rapport du 29 mai 2020, est parvenue à la même conclusion en excluant toute dangerosité pour la collectivité dans le cadre de congés. Les allègements sous formes de sorties et congés qui ont ensuite été accordés au recourant se sont du reste bien déroulés. Le SAPEM n'explique pas en quoi les incidents des 9 et 13 mars 2023 feraient renaître un tel risque.

Au vu de ce qui précède, il sera admis que la décision querellée, qui ordonne la révocation de la décision de passage en milieu ouvert du 21 mai 2019, procède d'un abus du pouvoir d'appréciation. Partant, elle sera annulée.

Par contre, il n'appartient pas à la Chambre de céans de se prononcer sur le futur lieu de placement envisagé, tel élément constituant une modalité d'exécution de la peine, qui relève de la seule compétence de l'autorité d'exécution (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_705/2015 du 22 septembre 2015 consid. 1.4.1, avec référence à l'arrêt 6B_629/2009 du 21 décembre 2009 consid. 1.2.3 et à l'ATF 130 IV 49 consid. 3.1 p. 51).

3. Le recours est par conséquent admis.

4. Le recourant, qui a gain de cause, ne supportera pas de frais (art. 428 al. 4 CPP).

5. Le recourant demande la nomination d'office de son avocat.

5.1. Après la condamnation, le droit de faire appel à un avocat est reconnu mais n’est pas conçu comme la base d’une reconnaissance pour des interventions systématiques d’un défenseur pendant l’application d’une peine ou d’une mesure privative de liberté.

Conformément à l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès; elle a droit en outre à l'assistance judiciaire gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert (arrêt du Tribunal fédéral 1B_74/2013 du 9 avril 2013 consid. 2.1 avec référence aux ATF 128 I 225 consid. 2.5.2 p. 232 s. = JdT 2006 IV 47; 120 Ia 43 consid. 2a p. 44).

5.2. L'art. 135 al. 1 CPP prévoit que le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération et du canton du for du procès. À Genève, le tarif des avocats est édicté à l'art. 16 RAJ et s'élève à CHF 200.- de l'heure pour un chef d'étude (al. 1 let. c).

5.3. En l'occurrence, le recourant, détenu dans le cadre de l'exécution d'une peine, est très vraisemblablement indigent et la difficulté de la cause justifiait le recours à l'assistance d'un avocat. Partant, Me C______ sera désigné à cette fin pour la procédure de recours.

Le recourant n'a pas déposé d'état de frais de son défenseur (art. 17 RAJ).

Eu égard à l'activité déployée pour le recours (9 pages, page de garde et conclusions comprises) et une brève réplique, l'indemnité allouée sera fixée, ex aequo et bono, à CHF 861,60, TVA à 7.7% comprise.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Admet le recours.

Annule les points 1 et 2 du dispositif de la décision du SAPEM du 17 mars 2023.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Désigne Me C______ comme avocat d'office de A______ dans la présente procédure de recours.

Alloue à Me C______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 861,60 (TVA à 7.7% incluse).

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au SAPEM.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juge; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).