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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/10649/2019

ACPR/519/2023 du 04.07.2023 sur OPMP/2275/2023 ( MP ) , ADMIS

Descripteurs : RETARD INJUSTIFIÉ
Normes : CPP.396.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10649/2019 ACPR/519/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 4 juillet 2023

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______, France, comparant par Me C______, avocat,

recourant,

 

pour déni de justice

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 8 mars 2023, A______ recourt pour déni de justice en raison de l'inactivité du Ministère public depuis plusieurs mois.

Il conclut au constat d'un retard injustifié et de la violation du principe de la célérité ; à ce que le Ministère public soit invité à rendre une décision dans un délai de soixante jours, en particulier à statuer sur ses réquisitions de preuve complémentaires ; à indemniser l'activité de son conseil ; et à l'allocation, à son défenseur d'office, d'une "équitable indemnité de dépens", en CHF 900.-, pour la procédure de recours.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Il est reproché à A______ d'avoir séjourné illégalement sur le territoire suisse entre 2016 et le 25 février 2019 (art. 115 LEI), d'avoir falsifié son permis de séjour (art. 251 ch. 1 CP) et d'avoir opposé de la résistance lors de son interpellation (art. 286 CP).

b. Le prévenu a été entendu par le Ministère public une seule fois, le 10 mai 2021.

c. Par avis de prochaine clôture, du 11 novembre 2021, le Ministère public l'a informé de son intention de rendre une ordonnance pénale pour les faits susmentionnés et lui a imparti un délai pour présenter ses éventuelles réquisitions de preuve.

d. Par lettre de son conseil, du 14 décembre 2021, A______ a formulé des réquisitions de preuves complémentaires et déposé la note d'honoraire de son conseil.

e. Il a relancé le Ministère public par lettres des 23 septembre 2022 et 8 mars 2023.

f. Aucune réponse n'a été apportée par le Ministère public à ces courriers.

C. a. Dans son recours, A______ déplore l'inactivité du Ministère public, dans une procédure dénuée de complexité. L'absence d'activité durant près de quinze mois constituait une carence choquante et un retard injustifié, qui imposaient le constat de la violation du principe de la célérité.

b. Dans ses observations du 29 mars 2023, le Ministère public a annoncé avoir notifié, le 14 mars 2023, l'ordonnance pénale annoncée dans son avis de prochaine clôture du 11 novembre 2021. Partant, le recours "pourrait" avoir perdu son objet.

c. Le recourant n'a pas répliqué.

D. Le 27 mars 2023, A______ a formé opposition à l'ordonnance pénale. La procédure est actuellement pendante devant le Ministère public.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours, formé pour déni de justice et constatation de la violation du principe de célérité, soit des griefs invocables en tout temps (art. 396 al. 2 CPP), a été déposé selon la forme prescrite (art. 393 et 396 al. 1 CPP), par le prévenu, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP).

1.2. Si l’acte est devenu sans objet concernant le premier grief – le Ministère public ayant rendu, le 14 mars 2023, la décision attendue – le recourant conserve toutefois un intérêt (art. 382 CPP) à ce qu'il soit statué sur le second.

2. 2.1. Les art. 29 al. 1 Cst féd. et 5 CPP garantissent à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable; ils consacrent le principe de célérité et prohibent le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou celui que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable. Le caractère approprié de ce délai s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes. Des périodes d'activité intense peuvent compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires. L'on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure; lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut. Selon la jurisprudence, apparaît comme une carence choquante une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_172/2020 du 28 avril 2020 consid. 5.1 et les références citées).

2.2. In casu, le Ministère public n’a accompli aucun acte d’instruction entre le 11 novembre 2021 et le 14 mars 2023, pas plus qu’il n’a répondu aux missives du recourant, laissant le dossier – dénué de toute complexité – de côté durant plus de quinze mois.

Partant, la procédure a accusé un retard injustifié, ce qu'il y a lieu de constater.

3. Le recourant, qui a gain de cause, n'assumera pas de frais judiciaires (art. 428 al. 1 CPP).

4. Il n'y a pas lieu d'indemniser à ce stade (cf. art. 135 al. 2 CPP) le défenseur d'office, la procédure n'étant pas terminée.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Admet le recours.

Constate un retard injustifié à statuer, au préjudice de A______ dans la conduite de la procédure P/10649/2019.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).