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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/18267/2022

ACPR/462/2023 du 16.06.2023 sur ONMMP/4532/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;LÉSION CORPORELLE PAR NÉGLIGENCE;LÉSION CORPORELLE GRAVE;LÉSION CORPORELLE SIMPLE
Normes : CPP.310; CP.125; CP.229; CP.230; CP.31

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/18267/2022 ACPR/462/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 16 juin 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me Butrint AJREDINI, avocat, Saint-Jean Avocats, rue de Saint-Jean 15, case postale 23, 1211 Genève 13,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 14 décembre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 23 décembre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 14 précédent, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte.

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et à l'ouverture d'une instruction.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 900.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 30 août 2022, A______, née le ______ 1964, a déposé plainte contre B______ et C______ des chefs de lésions corporelles graves par négligence (art. 125 CP), violation des règles de l'art de construire (art. 229 CP) et omission d'installer des appareils protecteurs (art. 230 CP).

Alors qu'elle marchait sur le trottoir à la rue 1______ (D______ [GE]), le 3 novembre 2021, et que B______ et C______ procédaient à l'installation de lumières au moyen d'une nacelle élévatrice mobile, sans avoir délimité de périmètre de sécurité, elle avait été renversée, lors d'une manœuvre de recul, par ledit véhicule, qui avait ensuite roulé sur ses pieds. Les lésions subies avaient nécessité une hospitalisation de douze jours et elle en conservait encore des séquelles, tant physiques que psychologiques. Elle n'était également plus en capacité de travailler et subissait un "préjudice ménager".

b. Il ressort des pièces produites par A______, à l'appui de sa plainte, les éléments suivants:

- auparavant, elle cumulait trois activités lucratives, soit vendeuse sur les marchés, employée du E______ et indépendante dans un cabinet F______;

- à la suite des évènements, son pied gauche présentait une "fracture intra-articulaire peu déplacée de la malléole interne gauche avec déplacement latéral millimétrique" et son pied droit de "multiples fractures non déplacées des os naviculaires, cunéiforme latéral et 3ème métatarse, sans signe de luxation de Lisfranc" avec un "arrangement antéro-latéral du tibia en faveur d'une lésion de la syndesmose antérieure";

- son hospitalisation a duré du 3 au 14 novembre 2021. Le diagnostic principal était une "fracture de la malléole interne de la cheville G par écrasement", n'ayant pas nécessité d'intervention chirurgicale. À sa sortie, elle avait porté une attelle jambière et des cannes anglaises pour six semaines. Un arrêt de travail a été prononcé jusqu'au 26 décembre 2021;

- selon des notes de suite de traitement du 15 décembre 2021, elle était suivie pour "fracture malléole interne, fracture cunéiforme latéral, fracture os naviculaire, fracture M3, arrachement antéro-latéral du tibia". Dans l'anamnèse, il était retenu qu'elle avait des douleurs dans le pied, à la cheville, au genou gauche ainsi qu'au poignet gauche, "connu selon la patiente en péjoration depuis l'utilisation des cannes". Elle rêvait de son traumatisme, avec "des épisodes de larmoiements et d'angoisse". L'examen clinique avait montré, à la cheville gauche: "plage nécrose établie stable, sans signe de surinfection. Tuméfaction modérée. Trouble de la sensibilité de la face médiale de la jambe et de la cheville en regard de la zone d'écrasement. Perte de sensibilité de la coque talonnière". Pour le genou gauche: "pas d'épanchement. Pas de laxité dans le plan sagittal. Dans le plan frontal laxité en varus avec arrêt dur symétrique au genou D. flexion-extension non limité";

- l'anamnèse du 13 janvier 2022 retenait une "persistance de douleurs sous forme de lancée, moins la nuit. Douleurs mal systématisées du pied et cheville. Décrit également des douleurs des deux mains et poignets";

- selon un rapport de consultation ambulatoire initiale du 16 février 2022, elle décrivait "l'apparition de douleurs aux pouces bilatéralement (identiques des deux côtés) évoluant depuis environ une année. Elle ne rapporte pas d'élément déclencheur, notamment pas de traumatisme". La synthèse médicale retenait que "la douleur diffuse dans les deux mains" ne pouvait pas "être directement corrélée à une pathologie spécifique";

- le 10 mars 2022, il n'y avait, selon l'anamnèse, "pas de différence avec les douleurs", malgré la physiothérapie, "pas d'amélioration". L'examen clinique avait montré: "Pied droit: pas de plaie. Mobilisation OK sans douleur. Gène à la palpation du 1er rayon"; "Pied gauche: pas de tuméfaction importante du pied mais persistance d'une tuméfaction en regard de la malléole interne [ ] Douleur généralisée au pied et cheville à la palpation";

- la synthèse médicale du rapport de consultation du 16 mai 2022 retenait, au vu de la symptomatologie et de l'examen clinique, une "probable étiologie d'algoneurodystrophie" de la cheville et du pied;

- l'IRM effectuée le 16 mai 2022 également permettait de conclure à un "aspect consolidé des fractures connues avec trait de fracture malléolaire interne encore visible et minime atteinte chondrale en regard de celui-ci. Le reste des cartilages est préservé. Aspect fin et cicatriciel du ligament talo-fibulaire antérieur. Tendinopathie fissuraire du court fibulaire".

c. Le 28 septembre 2022, la police a entendu B______, qui a expliqué avoir été le conducteur de l'engin le jour en question. Il installait l'éclairage de Noël, sur mandat donné par la commune de D______ [GE] à son employeur. Il ne semblait pas que des cônes de signalisation eussent été installés autour du périmètre. En raison de plusieurs angles morts et malgré un contrôle visuel, il n'avait pas vu A______ alors qu'il effectuait une manœuvre. Il avait immédiatement informé son employeur et l'assurance de ces faits. Celle-ci avait expliqué que le sinistre se réglerait à l'amiable, sans difficulté.

d. Le 10 octobre 2022, la police a entendu C______, qui a relaté s'être éloigné de la nacelle peu avant "l'accident", si bien qu'il n'en avait rien vu. Aucun cône de signalisation n'avait été installé dans le périmètre.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que la plainte de A______ pour lésions corporelles par négligence était tardive. Par ailleurs, les infractions visées aux art. 229 et 230 CP n'étaient pas applicables au cas d'espèce.

D. a. Dans son recours, A______ soutient que sa plainte pour lésions corporelles par négligence n'était pas tardive, dès lors que lesdites lésions devaient être considérées comme graves. Depuis les évènements du 3 novembre 2021, elle était en incapacité totale de travailler, en raison des "importantes fractures au pied et des douleurs subséquentes" mais aussi en raison de "son traumatisme". Ces atteintes, attestées médicalement, étaient d'autant plus graves qu'elle suivait un traitement psychiatrique. Les art. 229 et 230 CP pouvaient s'appliquer en l'occurrence.

b. Par ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours. Les lésions corporelles graves visaient une diminution ou une perte d'une faculté humaine de manière permanente, c'est-à-dire durable et non limitée dans le temps, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

c. Dans ses observations, A______ conteste ce raisonnement et précise avoir requis une rente de l'assurance-invalidité.

Elle joint une lettre de l'Office cantonal des assurances sociales (ci-après: OCAS) du 5 janvier 2023, lui demandant différentes pièces pour l'instruction de son dossier.

 

 

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours a été interjeté selon la forme et – les réquisits de l'art. 85 al. 2 CPP n’ayant pas été respectés – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), à l’encontre d’une ordonnance de non-entrée en matière, décision sujette à contestation auprès de la Chambre de céans (art. 310 al. 2 cum 322 al. 2 CPP; art. 393 al. 1 let. a CPP).

Il émane de la plaignante qui se plaint d'une atteinte à son intégrité corporelle, bien juridique protégé par les infractions concernées (cf.  DUPUIS/ L. MOREILLON/ C. PIGUET/ S. BERGER/ M. MAZOU/ V. RODIGARI (éds), Petit commentaire du CP, Bâle 2017, n. 1 ad art. 229 et M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Basler Kommentar, Strafrecht I, 4ème éd., 2019, n. 6 ad art. 230), si bien qu'elle dispose – a priori – d'un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. La pièce nouvelle produite par la recourante devant la Chambre de céans est également recevable (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.1).

2.             La recourante reproche au Ministère public de n'être pas entré en matière sur sa plainte.

2.1. Selon l'art. 310 al. 1 CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis (let. a).

Selon la jurisprudence, cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore" (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1456/2017 du 14 mai 2018 consid. 4.1 et les références citées). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 1 CPP en relation avec les art. 309 al. 1, 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91) et signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'un acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de se prononcer (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243; 138 IV 86 consid. 4.1.2 p. 91).

Une non-entrée en matière doit également être prononcée lorsqu'il existe un empêchement de procéder, par exemple si le délai pour déposer plainte prévu par l'art. 31 CP n'a pas été respecté (arrêt du Tribunal fédéral 6B_848/2018 du 4 décembre 2018 consid. 1.5).

2.2. L'art. 125 al. 1 CP punit celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à son intégrité corporelle ou à la santé. L'infraction se poursuit d'office en cas de lésions corporelles graves (art. 125 al. 2 CP), sur plainte, en présence de lésions corporelles simples (art. 125 al. 1 CP).

Le résultat typique de l'art. 125 CP se définit en référence aux art. 122 et 123 CP.

2.3.1. Des lésions corporelles sont graves si l'auteur a blessé une personne de façon à mettre sa vie en danger (art. 122 al. 1 CP), a mutilé le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou causé à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou a défiguré une personne d'une façon grave et permanente (art. 122 al. 2 CP) ou encore a fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale (art. 122 al. 3 CP).

Dans tous ces cas, la loi vise une diminution ou une perte d'une faculté humaine subie par la victime, liée à des atteintes d'ordre physique ou psychique. L'atteinte doit être permanente, c'est-à-dire durable et non limitée dans le temps; il n'est en revanche pas nécessaire que l'état soit définitivement incurable et que la victime n'ait aucun espoir de récupération. L'al. 3 de cette disposition définit pour sa part une clause générale destinée à englober les lésions du corps humain ou les maladies qui ne sont pas prévues par les al. 1 et 2, mais qui revêtent une importance comparable et qui doivent être qualifiées de graves dans la mesure où elles impliquent plusieurs mois d'hospitalisation, de longues et graves souffrances ou de nombreux mois d'arrêt de travail (ATF 124 IV 53 consid. 2 p. 56; arrêt du Tribunal fédéral 6B_491/2021 du 23 mai 2022 consid. 2.1.1). Il faut procéder à une appréciation globale: plusieurs atteintes, dont chacune d'elles est insuffisante en soi, peuvent contribuer à former un tout constituant une lésion grave (ATF 101 IV 383; B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd., Berne 2010, n. 12 ad art. 122 CP). Il faut tenir compte d'une combinaison de critères liés à l'importance des souffrances endurées, à la complexité et la longueur du traitement (multiplicité d'interventions chirurgicales, etc.), à la durée de la guérison, respectivement de l'arrêt de travail, ou encore à l'impact sur la qualité de vie en général (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), op.cit., n. 15 ad art. 122 CP).

2.3.2. Les lésions corporelles simples sont celles qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP, mais qui vont au-delà de l'atteinte physique ne causant pas de dommage à la santé qui caractérise les voies de fait (art. 126 CP).

Sont concernées, outre les blessures ou les lésions internes (fractures sans complications, contusions, commotions cérébrales), la provocation ou l'aggravation d'un état maladif et les pathologies psychiques, lorsqu'elles revêtent une certaine importance. Sur ce dernier point, afin de déterminer ce qu'il en est, il y a lieu de tenir compte, d'une part, du genre et de l'intensité de l'atteinte et, d'autre part, de son impact sur le psychisme de la victime. S'agissant en particulier des effets de l'atteinte, ils ne doivent pas être évalués uniquement en fonction de la sensibilité personnelle de la victime; il faut bien plutôt se fonder sur les effets que l'atteinte peut avoir sur une personne de sensibilité moyenne placée dans la même situation. Les circonstances concrètes doivent néanmoins être prises en considération; l'impact de l'atteinte ne sera pas nécessairement le même suivant l'âge de la victime, son état de santé, le cadre social dans lequel elle vit ou travaille, etc. (ATF 134 IV 189 consid. 1.4 p. 192).

2.3.3. Dans la casuistique, ont été retenues comme lésions corporelles simples:

- un écrasement des doigts par une porte d'ascenseur, ayant occasionné la fracture des os de la dernière phalange (ATF 111 IV 124);

- un accident de circulation entre un véhicule et un cycliste, ayant entrainé, pour ce dernier, une fracture de l'omoplate, une commotion cérébrale, une hospitalisation d'un jour et des séquelles sous la forme d'acouphènes et de douleurs à l'épaule nécessitant des séances d'ostéopathie (arrêt du Tribunal fédéral 6B_276/2019 du 15 mai 2019);

- un accident de même nature, ayant causé une fracture des cervicales, un traumatisme crânien, une hospitalisation de "quelques jours", le port d'une minerve pendant six semaines et une limitation, pour la victime, trois ans après les faits, des activités en raison d'une impossibilité de porter des charges de plus de cinq kilogrammes et de pertes de mémoire (AARP/110/2023 du 31 mars 2023);

- un choc entre un véhicule et un motocycle, entrainant, pour le conducteur du second, une fracture-luxation de la hanche droite, nécessitant une intervention chirurgicale puis une hospitalisation de huit jours, ainsi que l'usage de cannes anglaises durant deux mois (AARP/84/2023 du 16 mars 2023).

2.4. L'art. 229 CP punit celui qui a enfreint les règles de l'art en dirigeant ou en exécutant une construction ou une démolition et aura par-là, intentionnellement (al. 1) ou par négligence (al. 2), mis en danger la vie ou l'intégrité corporelle des personnes.

Par construction, on entend la réalisation totale ou partielle d'un ouvrage au sol, y compris les extensions, les transformations et les rénovations. La notion de construction doit être interprétée au sens large. Sont notamment compris les bâtiments et les installations techniques liés au sol, au-dessus ou au-dessous de la surface, comme les maisons, les voies ferrées, les routes et les canaux, ainsi que les parties de ces ouvrages, à condition qu’elles leur soient liées de manière fixe ou liées de manière fixe au sol (ponts, tunnels, conduites, escaliers, ascenseurs) (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 8 ad art. 229 et les références citées).

2.5. L'art. 230 réprime celui qui, intentionnellement, aura endommagé, détruit, supprimé, rendu inutilisable ou mis hors d'usage un appareil destiné à prévenir les accidents dans une fabrique ou une autre exploitation, ou les accidents de machine (al. 1) ou celui qui, contrairement aux prescriptions applicables, aura intentionnellement omis d'installer un tel appareil et aura, par là, sciemment mis en danger la vie ou l'intégrité corporelle des personnes (al. 2).

Cette infraction trouve application exclusivement dans le monde du travail et tend à éviter que l'employeur fasse des économies au détriment de la sécurité de ses employés (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), op.cit., n. 2 ad art. 230; B. CORBOZ, op. cit., n. 1 ad art. 230 CP).

2.6. Aux termes de l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois. Le délai court du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction.

2.7. En l'espèce, les infractions visées par les art. 229 et 230 CP peuvent d'emblée être exclues.

Au moment du heurt, les prévenus installaient les décorations de Noël, soit des dispositifs lumineux sommairement fixés sur des supports préexistants et qui ont vocation à être retirés une fois la période festive terminée. Cela ne saurait être retenu comme un ouvrage, ni comme une construction (art. 229 CP). Par ailleurs, la recourante et les prévenus ne sont pas liés dans un rapport employé/employeur (art. 230 CP).

Il n'est pas contesté que la recourante a subi une atteinte, provoquée par l'écrasement de ses pieds par la nacelle pilotée par l'un des prévenus, lui causant différentes fractures, notamment de la malléole. Comme le montre la casuistique, de telles lésions ne suffisent pas – per se – pour être définies comme graves.

La prise en charge immédiate de la recourante n'a pas requis d'intervention chirurgicale et son hospitalisation a duré douze jours, ce qui, sans minimiser l'atteinte, reste sans comparaison avec la période de "plusieurs mois" évoquée pour l'application de la clause générale de l'art. 122 al. 3 CP.

Les différents documents médicaux versés au dossier ne permettent pas de conclure que la guérison s'avérerait grandement compromise, malgré les douleurs persistantes alléguées par la recourante. Il n'y est pas question de séquelles de nature handicapante laissant cette dernière invalide, ou même grandement limitée dans sa vie quotidienne. Ses problèmes de santé périphériques, comme les douleurs aux mains, semblent être antérieurs à l'hospitalisation et avoir été qu'accentués par l'usage des cannes anglaises et ne sont, en tout état, pas en lien de causalité directe avec les faits reprochés.

Par ailleurs, la recourante allègue être en arrêt de travail depuis lors, mais seul un certificat figure parmi ses pièces, lequel a pris fin le 27 décembre 2021. Le fait d'avoir saisi l'OCAS ne permet pas d'établir que son arrêt de travail a perduré au-delà de cette date, ni que sa requête en prise de charge sera acceptée, son dossier étant actuellement à l'examen.

En tout état, même en tenant compte d'une éventuelle prolongation de l'incapacité de travail et des conséquences sur l'état psychologique de la recourante, le cas d'espèce ne présente pas de particularité permettant de retenir une gravité accrue au regard des exemples jurisprudentiels susmentionnés.

Partant, c'est à raison que le Ministère public a considéré comme simples les lésions corporelles subies par la recourante. Il s'ensuit que la poursuite de l'infraction visée à l'art. 125 CP – la condition de la négligence n'étant pas remise en cause – nécessitait le dépôt d'une plainte et que celle déposée plus de neuf mois après les faits dénoncés était tardive.

Il existe donc bien un empêchement de procéder.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/18267/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

900.00