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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/22072/2021

ACPR/259/2023 du 06.04.2023 sur OTMC/756/2023 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : BLANCHIMENT D'ARGENT;ESCROQUERIE;DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE COLLUSION;PROPORTIONNALITÉ
Normes : CPP.221; CPP.237

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/22072/2021 ACPR/259/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 6 avril 2023

 

Entre

 

A______, actuellement détenu à la prison de B______, comparant par Me Razi ABDERRAHIM, avocat, Place d'Armes 19, 1227 Carouge GE,

recourant,

 

contre l'ordonnance de mise en détention provisoire rendue le 15 mars 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

 

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 27 mars 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 15 mars 2023, notifiée sur-le-champ, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a ordonné sa mise en détention provisoire jusqu'au 13 mai 2023.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance précitée et à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement sous les mesures de substitution qu'il énumère.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant du Kosovo né en 1976, est titulaire d'un permis d'établissement. Il est le père, notamment, de C______.

À teneur de l'extrait du Registre du commerce genevois, A______ a été associé de la société D______ Sàrl – dont son fils était l'associé gérant –, du ______ 2019, date de l'inscription de la société au Registre, à février 2020 ; il en a, ensuite, été l'associé gérant avec signature individuelle, d'avril 2021 à janvier 2022.

C______ est, en outre, associé gérant de la société E______ Sàrl, inscrite au Registre du commerce de Genève.

b. Le 15 novembre 2021, le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS) a relayé deux communications reçues de [la banque] F______ par suite de soupçons de fraude aux crédits COVID-19 par les sociétés D______ Sàrl et E______ Sàrl, dont les ayant droits économiques des relations étaient C______ et A______.

c. Le Ministère public a ouvert une instruction contre C______ et ordonné des séquestres auprès de F______ et divers ordres de dépôts auprès de l'Administration fiscale cantonale, la CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHÔMAGE, le Département de l'économie et de l'emploi (DEE), l'Office cantonal des assurances sociales (OCAS) et l'Office des poursuites.

d. Selon les rapports de renseignements établis le 25 novembre 2022 par la Brigade financière de la police judiciaire, les mouvements bancaires établissaient l'utilisation douteuse des crédits COVID-19 octroyés à E______ Sàrl et D______ Sàrl, notamment pour des dépenses personnelles.

Les analyses complémentaires en lien avec la documentation reçue de l'OCAS et du DEE ont révélé des problématiques en lien avec l'obtention d'indemnités de réduction d'horaire de travail (RHT), au regard des différences entre le nombre d'employés annoncés à l'OCAS et ceux annoncés à la CAISSE CANTONALE DE CHÔMAGE, ainsi qu'en lien avec le travail d'employés sans autorisation de travail et/ou de séjour.

L'examen des comptes bancaires a en outre mis en évidence l'utilisation par C______ des prêts sur ses comptes personnels (notamment un compte bancaire à G______ [Kosovo]), de même que la réception en 2021 de prestations de la SUVA et de [l'assurance] H______ alors qu'il percevait un salaire.

L'analyse des comptes de son père, A______, a permis de déterminer que ce dernier bénéficiait de l'aide de l'Hospice général en 2020 alors qu'il percevait parallèlement des sommes de E______ Sàrl et D______ Sàrl, notamment sur sa carte de crédit F______. Le précité ne semblait pas avoir avisé l'Hospice général des différentes entrées de fonds.

e. Par ordonnance du 6 mars 2023, le Ministère public a étendu l'instruction à A______ pour blanchiment d'argent (art. 305bis CP), emploi d'étrangers sans autorisation (art. 117 al. 1 LEI) et escroquerie (art. 146 al. 1 CP), subsidiairement obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale au sens de l'art. 148a chiffre 1 CP.

Il lui est reproché d'avoir, à Genève :

S'agissant des montants reçus de E______ Sàrl

-          procédé à des prélèvements en espèces au débit du compte bancaire de la société E______ Sàrl ouvert auprès de [la banque] F______ (compte bancaire pour lequel il est au bénéfice d'un pouvoir de signature) pour un montant de CHF 64'000.- en 2020, sans justification apparente, et alors qu'il savait que les valeurs ainsi prélevées en espèces provenaient d'infractions commises au préjudice de ladite banque et/ou au préjudice d'autres entités (assurances, État), interrompant de la sorte toute trace documentaire possible et entravant l'identification, la découverte et la confiscation par la justice pénale de ces montants;

-          bénéficié sur sa carte bancaire F______ de 57 virements de CHF 500.- ou supérieurs, pour un montant total de CHF 81'300.- entre le 12 janvier et le 7 avril 2021, depuis le compte bancaire de la société E______ Sàrl ouvert auprès de F______ (compte pour lequel il est au bénéfice d'un pouvoir de signature), sans qu'il n'y ait une justification apparente, et alors qu'il savait que les valeurs ainsi reçues provenaient d'infractions commises au préjudice de F______ et/ou d'autres entités (assurances, État), entravant l'identification, la découverte et la confiscation par la justice pénale de ces montants;

S'agissant de la LEI

-          en sa qualité d'associé gérant de la société D______ Sàrl, respectivement de détenteur de contrôle, de concert avec C______, également associé-gérant, employé plusieurs personnes dépourvues d'autorisation de séjour et de travail sur le territoire suisse;

S'agissant de l'Hospice général

-          en 2020, régulièrement trompé, de manière astucieuse, l'Hospice général sur sa situation familiale financière et personnelle depuis le mois de janvier 2020 à tout le moins, en indiquant notamment dans le formulaire "demande de prestations d'aide sociale financière" signé le 28 janvier 2020 n'avoir pas de revenus (alors qu'il avait reçu de l'argent à hauteur de plusieurs milliers de francs sur son compte F______ lié à sa carte de crédit durant l'année 2020), dans le but de toucher indûment des prestations financières et de s'enrichir sans droit à concurrence d'un montant devant encore être déterminé.

f. Les domiciles respectifs de C______ et A______ ont fait l'objet d'une perquisition, le 13 mars 2023.

g. Entendu par la police le 13 mars 2023 et par le Ministère public le lendemain, A______ a contesté le caractère pénal des faits reprochés. Hormis quelques transports de marchandises, il n'exerçait aucune activité pour le compte de la société D______ Sàrl. Il touchait l'aide sociale depuis janvier 2020. Il ne se souvenait pas d'avoir entendu le nom de la société E______ Sàrl, dans laquelle il n'avait joué aucun rôle. Il ne savait pas pourquoi il était au bénéfice d'une procuration sur le compte de cette société, auprès de F______, et ignorait que son épouse, I______, en avait été l'associée gérante. Il ne savait pas non plus dans quel domaine sa belle-fille, J______, avait travaillé au sein de D______ Sàrl ni à quel titre elle avait perçu un salaire. Les prélèvements en espèces effectués par ses soins, au débit du compte de E______ Sàrl, durant l'année 2020, avaient pour but de payer les ouvriers, sur demande de son fils, ou en vue de l'achat de matériel. Il ignorait qu'une partie des sommes prélevées provenait d'indemnités RHT versées par la CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHÔMAGE ou du crédit COVID. S'agissant des 57 transferts du compte E______ Sàrl sur une carte de crédit F______ à son nom, il a exposé que la carte appartenait en réalité à D______ et son fils y avait mis son nom car il avait confiance. Les sommes reçues de E______ Sàrl et D______ Sàrl en 2020, au même moment que les prestations perçues de l'Hospice général étaient au bénéfice de son fils C______ et non pour lui-même. Il n'était pas au courant de la problématique de travail sans autorisation des employés de D______ Sàrl.

h. Le Ministère public a requis du TMC la mise en détention provisoire de A______, pour une durée de deux mois, en raison des besoins de l'instruction, et des risques de fuite et collusion.

La Brigade financière devait encore analyser la documentation saisie lors des perquisitions du 13 mars 2023, ainsi que celle faisant l'objet de mandats d'actes d'enquête non encore exécutés dans leur entier. De la documentation allait par ailleurs être recueillie dans les jours suivants, laquelle devrait aussi être examinée. En marge de ces analyses, C______ et A______ devaient être entendus en détail sur les faits et confrontés aux pièces du dossier, ainsi qu'à leurs déclarations réciproques. Une audience de confrontation serait agendée dans les jours suivants.

Il y avait également lieu de procéder aux auditions de deux personnes mentionnées par C______ (K______ et L______), aux fins de comprendre leur activité pour le compte des sociétés E______ Sàrl et D______ Sàrl, et de les confronter aux prévenus. En outre, les membres de la famille [de] A______ ayant eu un rôle / une activité pour le compte de E______ Sàrl et D______ Sàrl seraient entendus, en particulier I______ (épouse de A______), M______ (autre fils de A______) et J______ (belle-fille de A______).

Au vu des liens étroits unissant ces derniers au prévenu, il existait un risque de collusion concret. De plus, bien que A______ expliquât avoir de fortes attaches avec la Suisse, il voyageait régulièrement au Kosovo, pays dans lequel il déclarait avoir des comptes bancaires, de sorte qu'il existait un risque de fuite.

C.           Dans l'ordonnance querellée, le TMC a admis les besoins de l'instruction. Le risque de fuite, certes ténu, ne pouvait être exclu, pour les motifs exposés par le Ministère public. Le risque de collusion était tangible, en particulier à ce stade de l'instruction, à l'égard des personnes devant être entendues, en particulier les membres de la famille proche du recourant.

Aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre les mêmes buts que la détention, au vu des risques retenus. L'état de santé psychique fragile du prévenu ne s'opposait pas à sa mise en détention, sachant qu'il pourrait être pris en charge par le service médical de la prison. Deux mois étaient nécessaires au Ministère public pour accomplir les actes d'instruction annoncés et cette durée respectait le principe de la proportionnalité.

D.           a. À l'appui de son recours, A______ conteste les charges. Sa seule implication résidait dans le fait que son nom aurait été utilisé au sein des sociétés E______ Sàrl et D______ Sàrl, dont son fils C______ était le gérant. Il ne connaissait rien à la première, si ce n'est qu'il avait payé les ouvriers lorsque son fils n'était pas en capacité de le faire. Son nom n'était d'ailleurs pas inscrit au Registre du commerce. Quant à la seconde, il en avait "uniquement été associé, sans signature" en septembre 2019. Il se retrouvait dans une affaire qui le dépassait, dont il n'avait aucune connaissance et dont les protagonistes étaient son fils C______ et les fiduciaires chargées des différentes sociétés. La seule charge qui pouvait être retenue contre lui était celle d'avoir eu son nom utilisé par les sociétés précitées en vue de l'obtention de crédits COVID. Or, il était intolérable qu'un père de famille en mauvaise santé soit mis en détention pour des faits commis par son entourage et à son insu.

Non seulement le risque de collusion invoqué pourrait être évité par d'autres moyens (interdiction d'entretenir des relations avec les personnes concernées), mais il n'existait aucun indice concret pour le retenir. De plus, les auditions annoncées ne le concernaient pas, puisqu'il n'était qu'un prête-nom, et devaient se terminer le 14 avril 2023, de sorte que, tout au plus, sa libération devrait être accordée à cette date.

Au vu de ses importantes attaches familiales en Suisse, il n'y avait pas de risque de fuite, lequel pourrait au besoin être pallié par d'autres mesures.

La détention était disproportionnée, en raison de son état de santé (diabète, problèmes cardiaques et d'articulations, dépression), qui risquait de s'aggraver en prison.

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours. À ce stade de l'enquête, les charges pesant sur A______ n'étaient pas en lien avec l'obtention des crédits COVID, mais avec les faits ressortant de l'ordonnance d'extension de l'instruction. L'instruction n'allait pas prendre fin le 14 avril 2023. Il avait certes ordonné, ce jour-là, l'audition de l'épouse du recourant, de son fils M______ et de sa belle-fille J______, mais d'autres personnes (notamment K______ et L______) devaient être confrontées aux prévenus. D'autres actes d'instruction étaient en cours d'exécution. Les prévenus avaient déjà été confrontés (les 22 et 28 mars 2023) et d'autres audiences étaient prévues (les 31 mars, 12 et 14 avril 2023), sans compter la confrontation à des tiers. Dans l'intervalle, le risque de collusion demeurait.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance et renonce à formuler des observations.

d. Le recourant n'a pas répliqué.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant conteste l'existence de charges suffisantes.

2.1.       Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2.       En l'espèce, les documents bancaires établissent l'existence de prélèvements en espèces, au moyen de la carte bancaire du recourant, au débit du compte de la société E______ Sàrl auprès de [la banque] F______, sur lequel il bénéficiait de la signature ; en outre, 57 versements ont été effectués sur sa carte bancaire F______, depuis le compte bancaire de cette même société. Le recourant est soupçonné d'avoir, par ces démarches, entravé l'identification, par la justice pénale, de sommes provenant d'infractions commises au préjudice de la banque précitée et/ou d'autres entités.

Le recourant allègue que ces actes auraient été accomplis à son insu, par son fils. Toutefois, le fait qu'il soit titulaire d'une carte bancaire – et ait donc signé les documents y relatifs – lui octroyant l'accès au compte de la société avec laquelle il prétend n'avoir aucun lien permet de retenir, en l'état, une prévention suffisante de sa participation aux actes précités.

Il est en outre soupçonné d'avoir perçu un revenu de D______ Sàrl – dont il a été l'associé gérant durant plusieurs mois et non seulement, comme il l'allègue, en septembre 2019 – sans avertir l'Hospice général, dont il émargeait.

Ces charges suffisent, à elles seules, à justifier, au sens de l'art. 221 al. 1 CPP, une détention provisoire, sans besoin d'y ajouter les infractions soupçonnées à la LEI.

3.             Le recourant conteste l'existence d'un risque de collusion.

3.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. b CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

3.2.       En l'espèce, l'instruction ne fait que commencer à l'égard du recourant et il y a lieu de permettre la collecte d'informations, et la confrontation du prévenu aux résultats de celles-ci, sans qu'il n'ait eu l'occasion de parler avec les autres personnes concernées. Or, ces personnes sont, pour la plupart, membres du cercle étroit de sa famille, de sorte que le risque de collusion avec elles, pour établir une version commune, est très important. Il l'est aussi à l'égard des personnes liées aux sociétés fiduciaires mentionnées par son fils, puisqu'elles pourraient le mettre en cause. Ainsi, tant que le recourant n'aura pas été confronté à sa femme, à son autre fils et à sa belle-fille, ainsi qu'aux personnes mentionnées par le Ministère public, sa mise en liberté ferait courir un trop grand risque de compromettre l'avancement de l'enquête.

4.             Le risque de collusion étant réalisé, l'autorité de recours peut se dispenser d'examiner si un autre risque – alternatif – l'est également (arrêt du Tribunal fédéral 1B_51/2021 du 31 mars 2021 consid. 3.1 et la jurisprudence citée et la jurisprudence citée).

5.             Le recourant propose des mesures de substitution.

5.1.       Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (al. 2 let. g).

5.2. En l'occurrence, la mesure de substitution proposée par le recourant, sous la forme d'une interdiction d'entrer en contact avec les personnes devant être prochainement entendues, est insuffisante au regard de l'importance de l'intérêt en jeu pour lui à ce stade précoce de l'instruction. La mesure proposée paraît en outre particulièrement difficile à contrôler, au vu des liens étroits du recourant avec certaines des personnes à auditionner, et ne permettrait pas, en l'état, de pallier l'important risque d'atteinte à l'avancement de l'enquête. Aucune autre mesure ne paraît apte à éviter ce risque.

6.             Le recourant invoque une violation du principe de la proportionnalité.

6.1.       À teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte, afin que la détention provisoire ne dure pas plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. Selon une jurisprudence constante, la possibilité d'un sursis, voire d'un sursis partiel, n'a en principe pas à être prise en considération dans l'examen de la proportionnalité de la détention préventive (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2 p. 281-282 ; 125 I 60 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_750/2012 du 16 janvier 2013 consid. 2, 1B_624/2011 du 29 novembre 2011 consid. 3.1 et 1B_9/2011 du 7 février 2011 consid. 7.2).

6.2.       En l'espèce, compte tenu de la peine menace et concrètement encourue si les faits retenus contre le recourant devaient être confirmés, la mise en détention provisoire pour une durée de deux mois ne viole pas le principe de la proportionnalité.

Le recourant demande à être tout au plus libéré après l'audition des membres de sa famille, le 14 avril 2023, mais, comme retenu ci-dessus, le risque de collusion à l'égard des autres personnes mentionnées par le Ministère public ne sera pas écarté à cette date.

Il invoque par ailleurs son état de santé, mais ne démontre pas qu'il serait incapable de subir la détention provisoire pour des motifs très sérieux de santé, ni qu'un traitement administré en milieu carcéral ne serait pas de nature à atténuer les effets de celle-ci.

7.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

8.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/22072/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

795.00

 

-

CHF

 

 

Total

CHF

900.00