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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/25090/2022

ACPR/216/2023 du 22.03.2023 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 14.04.2023, rendu le 24.04.2023, IRRECEVABLE, 1B_201/2023
Descripteurs : MOYEN DE DROIT;CITATION À COMPARAÎTRE
Normes : CPP.393; CPP.201

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25090/2022 ACPR/216/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 22 mars 2023

 

Entre

 

A______, domicilié ______, France, comparant en personne,

recourant,

 

contre les mandats de comparution décernés les 12 janvier et 22 février 2023

 

et

 

LA POLICE CANTONALE, case postale 236, 1211 Genève 8,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.

 


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 27 janvier 2023, A______ recourt contre le mandat de comparution que lui a décerné la police le 12 janvier 2023.

Il demande l’effet suspensif, la constatation de la nullité de l’acte et l'assistance judiciaire.

b. Le recours étant dépourvu de référence, le greffe a invité A______ à produire l’acte attaqué. Le pli recommandé est revenu en retour sans explication de la Poste française.

c. Par acte expédié le 6 mars 2023, A______ recourt contre un second mandat de comparution que lui a décerné la police, le 22 février 2023.

Il prend les mêmes conclusions que dessus.

d. Copie des deux mandats a été requise et obtenue auprès de la police.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par suite de plaintes de B______ [établissement de droit public], la police, sur demande du Ministère public, a décerné successivement deux mandats de comparution à A______, à son domicile de C______ (France).

b. A______ prétend avoir reçu le premier mandat le 19 janvier 2023 et le second, le 4 mars 2023.

c. Selon la teneur, identique, de ces documents, A______ était invité à convenir d’une date d’audition au sujet de violations de domicile dans le bâtiment D______. Il était avisé qu’à l’issue de sa comparution, il pourrait être mis à la disposition du Ministère public. S’il ne donnait pas suite à la convocation, il encourrait un mandat d’amener. Il lui était loisible de se faire accompagner, à ses frais, d’un avocat.

C. a. À l'appui de ses recours, de teneurs identiques à l’exception des dates pertinentes, A______ conteste la validité formelle des mandats, qui :

·           n’indiqueraient ni la date ni l’heure de sa comparution ;

·           violeraient son droit au silence pour lui imposer de contacter, lui, la police aux fins de convenir d’une date d’audition ;

·           feraient référence à une plainte en violation de domicile non valable de la part de B______ dès lors que les locaux [de] B______ étaient libres d’accès ;

·           le menaceraient indûment, faute de validité, d’un mandat d’amener s’il ne donnait pas suite aux convocations ;

·           ne l’aviseraient pas de son droit à une défense d’office ;

·           seraient disproportionnés, en ce sens que l’infraction visée, si elle était réalisée, ne l’exposerait qu’à une peine pécuniaire ; et

·           auraient pu être évités, si le Ministère public avait prononcé d’emblée une ordonnance pénale ou, « à la limite », l’avait convoqué avec mention de date, d’heure et de lieu.

b. À réception, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT :

1.             Le recours est ouvert contre un mandat de comparution décerné par la police, i.e. contre un acte de procédure de celle-ci, y compris lorsqu’elle agit sur instruction du Ministère public (art. 393 al. 1 let. a CPP ; DCPR/21/2011 du 8 mars 2011 consid. 2.1. ; ACPR/642/2016 du 7 octobre 2016 consid. 1.1. ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 43 ad art. 201, n. 7a ad art. 206 et n. 10 [p. 2483] ad art. 393). En l'espèce, les deux actes de recours sont recevables pour avoir été déposés selon la forme et – faute de preuve de notifications à d’autres dates que celles alléguées par le recourant – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP). Ils émanent de leur destinataire qui, comme tel, jouit d'un intérêt juridiquement protégé à leur modification ou annulation (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Vu leur connexité, les recours seront joints, et il sera statué par une seule décision.

3.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

4.             L'objet du litige est circonscrit à la contestation des mandats de comparution. Toutes les critiques que le recourant exprime au sujet des conditions d'application de l'art. 186 CP n’y ont pas leur place, d’autant moins que son audition vise, précisément, à lui donner l’occasion de faire valoir son point de vue. Il en irait de même si le Ministère public rendait l’ordonnance pénale que le recourant paraît tenir pour préférable aux acte attaqués.

5.             Le recourant estime illégaux les deux mandats de comparution successivement émis contre lui.

5.1.       Selon l’art. 201 CPP, le mandat de comparution est l’acte écrit par lequel le ministère public, notamment, cite une personne à comparaître, avec l’indication de la qualité en laquelle celle-ci doit participer à l’acte de procédure annoncé. Il implique la comparution personnelle de son destinataire, même contre la volonté de celui-ci (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., n. 3 et n. 24 ad art. 201). Quiconque est cité à comparaître par une autorité pénale est tenu de donner suite au mandat de comparution (art. 205 al. 1 CPP). Cette obligation vaut indépendamment du droit de garder le silence (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., n. 1 ad art. 205). La police est une autorité pénale (art. 12 let. a CPP). Durant l’investigation policière, elle peut citer des personnes sans formalité ni délai particuliers dans le but de les interroger (art. 206 al. 1 CPP ; mandats de comparution « informels », cf. A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., n. 2 ad art. 206). Elle cherchera, dans la mesure du possible, à tenir compte de manière appropriée des disponibilités de la personne citée (op. cit., n. 23 ad art. 201) ; si les mentions de lieu, date ou heure manquent, la bonne foi oblige celle-ci à la contacter (op. cit., n. 30 ad art. 201). Celui qui ne donne pas suite à un mandat de comparution de la police peut faire l’objet d’un mandat d’amener décerné par le ministère public, s’il a été menacé par écrit de cette mesure (art. 206 al. 2 CPP). Lorsque la police agit sur délégation du ministère public, un tel mandat doit, en tout état, comporter cette commination (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), op. cit., n. 8 ad art. 206).

5.2.       Dans la systématique de la loi, le mandat de comparution apparaît comme une mesure de contrainte (cf. intitulé du titre 5 du CPP). Comme tel, il est soumis au principe de proportionnalité (art. 197 al. 1 let. c CPP). Suivant la jurisprudence (ATF 142 I 76 consid. 3.5.1 p. 84), ce principe exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité); en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée d'intérêts; ATF 113 I 110 consid. 7.1 p. 123 = SJ 2008 I p. 25).

5.3.       À l’aune de ces principes, on ne voit pas de quel vice formel souffriraient les deux mandats attaqués.

Leur notification en France n’est, à juste titre, pas critiquée, puisque l'art. X de l'Accord franco-suisse du 28 octobre 1996 complétant la Convention européenne d'entraide en matière pénale (RS 0.351.934.92) l’autorise directement par voie postale, sur le territoire français.

Le recourant sait en quelle qualité il était convoqué (« prévenu ») et pour quelle infraction (« violations de domicile dans les bâtiments de D______ »).

Sans doute la date et l’heure de sa comparution ne sont-elles pas mentionnées ; mais il perd de vue que, sous cette rubrique, la possibilité lui est expressément offerte de convenir avec l’enquêteur des date et heure de son audition. En d’autres termes, cette souplesse lui est favorable. On ne saurait même pas parler d’une informalité.

À ce stade, le recourant n’a pas à être avisé de son droit à obtenir, le cas échéant, une défense d’office. La loi ne prévoit rien de tel. Au demeurant, le recourant possède des connaissances suffisantes de la procédure pénale suisse sur cette question, en raison de procédures antérieures (cf. ACPR/214/2023 du 22 mars 2023 ; plus précisément, en matière d’assistance judiciaire le concernant : ACPR/396/2022 du 3 juin 2022, ACPR/177/2018 du 23 mars 2018). Il ne prétend pas que l’infraction sur laquelle il devait être interrogé le placerait en situation de défense obligatoire, au sens de l’art. 130 CPP, ni – à juste titre (arrêt du Tribunal fédéral 1B_464/2022 du 10 novembre 2022 consid. 1.3.2 ; ACPR/539/2022 du 9 août 2022 consid. 3.2.) – que la police eût dû se charger de lui désigner, ou faire désigner, un avocat. La mention, sur les deux mandats, que le recourant pourrait déposer, mais à ses frais, avec l’assistance d’un défenseur n’est donc ni irrégulière ni trompeuse. Au demeurant, si le Ministère public, compétent à ce stade pour la désignation d’un défenseur d’office (art. 61 let. a et 133 al. 1 CPP), entrait en matière sur ce point, un effet rétroactif à la date de dépôt de la demande est de règle (art. 5 al. 1 RAJ ; ACPR/911/2020 du 16 décembre 2020 consid. 2.1.).

Quant à elle, la commination relative à un mandat d’amener – à décerner par le Ministère public – en cas de défaillance non excusée du recourant est conforme au droit.

Sous l’angle du principe de la proportionnalité, on peine à suivre le recourant, lorsqu’il soutient, si on le comprend bien, qu’une ordonnance pénale rendue d’emblée par le Ministère public lui eût été plus favorable. De même, la loi ne hiérarchise pas les infractions pouvant donner lieu à mandat de comparution : toutes le peuvent, y compris les contraventions (art. 201 al. 1 CPP). Qu’en l’occurrence le recourant ne soit exposé, comme il le prétend, qu’à une peine pécuniaire est donc sans pertinence.

6.             Les recours s’avèrent infondés en totalité. Partant, la requête d’effet suspensif qu’ils comportent n’a plus d’objet.

7.             À la lumière de ce qui précède, la cause était dénuée de chance de succès, de sorte que le recourant ne saurait être mis au bénéfice de l’assistance judiciaire. En effet, un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'un plaideur raisonnable et de condition aisée renoncerait à engager la procédure en raison des frais qu'il s'exposerait à devoir supporter (ATF 133 III 614 consid. 5 p. 616; 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 135).

8.             Le recourant, qui succombe dans les conclusions de son recours, supportera les frais envers l'État, arrêtés au total à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, à la police cantonale et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/25090/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

-

CHF

Total

CHF

800.00