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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/6363/2022

ACPR/331/2022 du 06.05.2022 sur OTMC/1177/2022 ( TMC ) , ADMIS

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE COLLUSION;RISQUE DE FUITE;SÛRETÉS;MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION
Normes : CPP.221; CPP.237; CPP.238

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/6363/2022 ACPR/331/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 6 mai 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, comparant par Me C______, avocat, D______, rue ______, Genève,

recourant,

contre l'ordonnance rendue le 12 avril 2022 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 25 avril 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 12 avril 2022, notifiée le lendemain, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a prolongé sa détention provisoire jusqu'au 12 juin 2022.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance précitée et à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement moyennant le paiement de sûretés en CHF 20'000.-.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant français né le ______ 2004, a été interpellé le 20 mars 2022 et placé en détention provisoire par ordonnance du TMC le 22 suivant, jusqu'au 12 avril 2022, soit le temps nécessaire pour procéder à sa confrontation avec E______ et à une première analyse des données de son téléphone portable, ainsi que de déterminer si les charges contre lui se confirmaient.

b. À teneur du rapport d'arrestation, les policiers ont, le soir du 20 mars 2022, repéré deux individus – A______ et E______ – au comportement suspect, à savoir qu'ils semblaient observer des scooters parqués à la rue 1______ [GE]. L'un d'eux – A______ – s'était éloigné et était revenu au guidon d'un scooter, en sens inverse de la circulation.

Lors de son interpellation, A______ s'est légitimé avec le patronyme de sa mère, alors que son nom officiel est F______, celui de son père.

La police a par ailleurs trouvé sur E______ un boîtier électronique permettant le démarrage de scooters de marque G______ (ci-après : G______) modèles 2015 à 2022.

En outre, le deux-roues conduit par A______ était immatriculé au nom d'un tiers [E______ dira que cet engin avait été volé dans la journée, en France, mais A______ n'est pas prévenu pour ces faits].

c. Au moment de son arrestation, A______ était fortement soupçonné d'avoir, dans les circonstances précitées, de concert avec E______, tenté de dérober un motocycle pour se l'approprier (art. 22 al. 1 cum 139 CP), circulé à contre-sens au guidon d'un scooter (art. 90 al. 1 LCR) et pénétré en Suisse sans être, par négligence, en possession d'une pièce d'identité valable indiquant sa nationalité (art. 115 al. 1 let. a et al. 3 LÉI).

d. Entendu sur ces faits par la police et le Ministère public, A______ a reconnu l'infraction à la LCR et l'entrée illégale par négligence, mais contesté toute tentative de vol. Il était venu à Genève avec E______ pour se "promener" et ignorait que celui-ci détenait le boîtier susmentionné.

e. Lors de son audition par la police, E______, mineur, a expliqué être venu à Genève avec A______ pour voler un scooter G______, ce qu'il s'apprêtait à faire au moment de leur interpellation. Un mois plus tôt, il avait déjà dérobé un scooter de la marque précitée, dans le quartier des L______, de concert avec le dénommé I______ [lors de son audition ultérieure par le Juge des mineurs, il dira toutefois "A______"]. Les vols des scooters G______ étaient commandés par son fournisseur de haschich, en France, dénommé J______ ; les engins étaient ensuite, selon sa compréhension, revendus à un Lyonnais. En échange du vol qu'il s'apprêtait à commettre le 20 mars 2022, il aurait dû être rémunéré sous la forme d'une annulation d'une dette de haschich, et A______ devait recevoir EUR 300.-. Ce dernier n'avait encore jamais volé de G______ pour J______, qu'il ne connaissait pas.

f. À teneur du rapport de renseignements établi le 21 mars 2022, les inspecteurs mentionnent avoir constaté une recrudescence de vols de scooters G______ depuis le début de l'année 2022.

Les vérifications préliminaires effectuées dans le téléphone portable de A______ avaient établi une conversation entre le précité et un dénommé "H______." [identifié comme étant H______], sur l'application Telegram, les 9 et 10 mars 2022, semblant porter sur la commande d'un scooter.

Un rapport complémentaire [qui ne figure pas encore au dossier] serait établi à la fin de l'analyse de l'extraction des données du téléphone portable. Par mandat d'acte d'enquête du 5 avril 2022, le Ministère public requerra l'analyse du contenu du téléphone portable de A______.

g. Une demande de surveillance rétroactive des télécommunications a, par ailleurs, été autorisée par le TMC le 23 mars 2022, à la demande du Ministère public, sur le raccordement de A______.

Par mandat d'acte d'enquête du 4 avril 2022, le Ministère public a demandé à la police d'entendre A______ sur les données téléphoniques rétroactives ainsi obtenues.

h. Lors de la confrontation devant le Ministère public, le 5 avril 2022, entre A______ et E______, ce dernier a rectifié sa déclaration au Juge des mineurs s'agissant du vol de scooter commis aux L______. Cette fois-là, il était avec I______ et non avec A______. La mention de ce dernier au procès-verbal procédait d'une erreur.

Après avoir été interrogé sur son échange de messages avec H______, A______ a été prévenu du vol d'un scooter G______, dans la nuit du 8 au 9 mars 2022, à l'avenue de 2______ à Genève, de concert avec E______. Il a admis les faits et expliqué que le vol avait été réalisé par le précité, qui avait une dette de haschich et devait pour cela procurer un scooter à I______. Lui-même s'était tenu à proximité lors des faits. Dans sa conversation sur Telegram avec H______, il était question de vendre ce scooter-là.

E______ a confirmé ces explications, ajoutant qu'ils étaient trois ce soir-là, I______ ayant aussi été présent.

A______ a alors expliqué avoir oublié de préciser qu'en arrivant à Genève, I______ était déjà sur place. E______ et I______ avaient pris le scooter, tandis qu'il se tenait à l'écart.

E______ est alors intervenu pour dire que la version de A______ n'était "pas bonne" et a donné la sienne.

Questionné par le Procureur sur le fait que A______ s'était exprimé sur le vol de l'avenue 2______ (du 8-9 mars 2022) tandis que E______ décrivait celui des L______ (en février 2022), ce dernier a répondu : "il est exact que A______ a confondu les vols".

A______ a alors maintenu n'avoir commis qu'un seul vol, sans pouvoir dire où car il ne connaissait pas le nom des rues de Genève.

i. Le 8 avril 2022, le Ministère public a requis la prolongation de la détention provisoire de A______ pour une durée de deux mois. Depuis l'ordonnance du TMC, ce dernier était désormais prévenu de deux autres vols, soit celui de février 2022 aux L______ (avec E______ et I______) et celui du 8-9 mars 2022 à l'avenue 2______ (avec E______). L'examen sommaire de son téléphone portable avait révélé, le lendemain du vol de l'avenue 2______ de messages avec H______ pour la revente d'un scooter G______. Lors de l'audience du 5 avril 2022, A______ avait admis ce vol et, "de manière quelque peu confuse [ ] – finalement – indiqué que le dénommé I______ y avait aussi participé, confondant ce vol avec celui des L______".

Le Procureur a retenu des risques de fuite, ainsi que de collusion "à l'égard de E______ et de toutes les autres personnes impliquées dans ces vols de scooters, en particulier I______". La durée de la prolongation de deux mois était nécessaire pour obtenir le rapport de police sur les données téléphoniques rétroactives (mandat d'acte d'enquête du 4 avril 2022), avant de décider de la suite de la procédure.

j. S'agissant de sa situation personnelle, A______, domicilié à K______ (France), a déclaré avoir suivi une formation pour obtenir un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) de carrossier mais ne pas l'avoir terminée, ayant été "viré". Depuis, il n'a pas d'activité. Ses parents sont séparés et il n'a pas de relation étroite avec son père. Il vit chez sa mère et le nouveau compagnon de celle-ci, avec ses trois frère et sœurs cadets, dont il dit s'occuper beaucoup. Sa mère serait en congé maternité. Il dit ne pas percevoir de prestations sociales et être intégralement à la charge de sa mère. Il serait très proche de ses grands-parents maternels, qu'il dit voir tous les jours.

À teneur de l'extrait du casier judiciaire, il n'a pas d'antécédents judiciaires en Suisse, mais a déclaré avoir "eu des problèmes quand [il] étai[t] mineur", en France.

C.           Dans son ordonnance querellée, le TMC a retenu, en sus de l'existence de charges suffisantes et graves, des risques de collusion et fuite. L'instruction se poursuivait pour circonscrire l'ampleur de l'activité délictuelle de A______, en particulier par l'analyse des données téléphoniques rétroactives de son raccordement, à laquelle il devrait être confronté, avant que le Ministère public détermine la suite de la procédure.

Le risque de fuite pourrait, à terme, être contenu par des mesures de substitution comprenant le dépôt d'une caution – tel que proposé par le prévenu –, laquelle devrait être exhaustivement documentée.

Le risque de collusion était tangible à l'égard de E______ et des autres personnes impliquées dans ces vols de scooters, au vu du mode opératoire utilisé, en particulier les dénommés I______, J______ et H______. A______ ne devait pas pouvoir les avertir ni les influencer dans leurs déclarations, voire faire disparaître des preuves par leur entremise.

Aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre le but de la détention, au vu des risques retenus, et le principe de la proportionnalité demeurait respecté.

D.           a. Dans son recours, A______ conteste avoir participé au vol de février 2022 aux L______ ainsi qu'à la tentative de vol du 21 mars 2022, mais admet le vol du 8-9 mars 2022 à l'avenue 2______ avec E______ et I______.

Il conteste l'existence d'un risque de fuite. Les liens l'unissant à sa famille excluraient selon lui d'emblée toute intention de fuir. Il produit une promesse d'embauche – datée du 19 avril 2022 – d'un restaurant de K______ (France), valable dès sa sortie de prison, pour un salaire mensuel de EUR 1'786.23, en qualité de serveur et livreur, qu'il estime être une garantie supplémentaire qu'il ne fuira pas. En outre, son grand-père maternel se dit disposé, dans une attestation du 22 avril 2022, à verser une caution de CHF 20'000.-. Ce montant représenterait, selon le recourant, un effort financier considérable pour sa famille, dont le versement garantirait qu'il défère aux convocations et respecte les mesures ordonnées.

S'agissant du risque de collusion, il estime avoir pleinement collaboré depuis le début de l'enquête, en particulier lors de son audition par la police le 4 avril 2022 [dont le procès-verbal ne figure pas au dossier remis à la Chambre de céans]. Il conteste les faits ne reposant que sur les déclarations de E______, dont les explications étaient confuses. Le risque de collusion à l'égard de celui-ci était inexistant, la confrontation ayant déjà eu lieu. La crainte évoquée par le Ministère public à l'égard de H______, I______ et J______ était infondée, puisque E______ était en liberté depuis le début de l'enquête et pouvait ainsi s'entretenir avec les concernés. Il s'engageait toutefois à s'abstenir de tout contact avec son co-prévenu et les autres personnes mentionnées par l'ordonnance querellée.

En n'ordonnant pas de mesures de substitution à la détention, le TMC avait violé le principe de la proportionnalité.

b. Dans ses observations, le Ministère public dit attendre le rapport d'exécution de son mandat d'acte d'enquête du 4 avril 2022, soit l'audition par la police de A______ sur les données téléphoniques rétroactives, avant de décider de la suite de la procédure. Le risque de fuite était important et le seul engagement de comparaître aux audiences, insuffisant. Le risque de collusion à l'égard de E______ était concret, A______ pouvant tenter de l'influencer pour qu'il revienne sur ses déclarations. Il en allait de même à l'égard des autres personnes impliquées dans "ces vols de scooters", en particulier H______ et I______, étant précisé que l'examen des données rétroactives du téléphone du recourant était susceptible de révéler d'autres vols d'engins.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance et renonce à formuler des observations.

d. Le recourant a répliqué.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant conteste une partie des charges.

2.1.       Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2.       En l'espèce, les charges se sont alourdies depuis l'ordonnance de mise en détention provisoire, puisque non seulement les soupçons concernant la tentative de vol du 20 mars 2022 ont été confirmés par la confrontation avec E______, mais le recourant a été confondu par le contenu de son téléphone portable pour le vol du 8-9 mars 2022, qu'il a fini par reconnaître. Ses dénégations sur le vol de février 2022 – pour lequel il est également mis en cause par son co-prévenu – n'ont dès lors aucune portée, les charges étant à ce stade suffisantes pour justifier une détention provisoire au sens de la disposition légale précitée.

3. Le recourant conteste le risque de collusion.

3.1. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion (art. 221 al. 1 let. b CPP), l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

3.2. Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (art. 237 al. 2 let. g CPP). La liste des mesures de substitution énoncée à l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du 7 décembre 2011 consid. 4.2).

3.3. En l'espèce, c'est en vain que le recourant prétend avoir collaboré à la procédure. Les motifs invoqués pour expliquer sa présence à la rue 1______ [GE] le 20 mars 2022 ne concordent pas avec les observations de la police, et il n'a admis le vol de l'avenue 2______ qu'après avoir été confronté aux messages échangés avec H______. Ses prétendues bonnes dispositions lors de l'audition à la police du 4 avril 2022 ne sont en l'état pas vérifiables, le procès-verbal d'audition n'étant – en l'état – pas versé à la procédure.

Cela étant, le recourant a déjà été confronté à E______ sur les faits qu'il conteste, soit la tentative de vol du 20 mars 2022 et le vol d'un scooter aux L______ en février 2022. Compte tenu des différentes versions livrées par E______ – à la police, au Juge des mineurs puis au Ministère public – sur le nom de ses comparses lors du vol des L______, on ne voit pas qu'une discussion entre les prévenus, hors procédure, pourrait davantage enrayer la manifestation de la vérité sur ce point.

L'ordonnance querellée invoque en outre un risque de collusion avec : le troisième participant présumé des vols – I______ – ; l'auteur des messages en lien avec le vol du 8-9 mars 2022 – H______ – ; et le commanditaire présumé des vols – J______ –. Dans sa requête, le Ministère public n'avait mentionné que I______ et, dans ses observations sur le recours, I______ et H______.

Quoi qu'il en soit, on ne voit pas, à l'égard du présumé commanditaire, quel moyen de preuve serait susceptible d'être menacé par la libération du recourant, puisque le Ministère public ne mentionne pas son intention d'identifier cet intervenant, ni a fortiori de l'auditionner, et que, même dans cette hypothèse, le maintien en liberté de E______ depuis plus d'un mois paraît avoir déjà réalisé le risque de collusion.

On ne voit pas non plus, et le Ministère public ne le dit pas, en quoi consisterait le risque de collusion avec H______, puisque le recourant, après avoir été confronté aux messages échangés avec celui-ci, a admis le vol du 8-9 mars 2022.

Quant à I______, sa confrontation avec le recourant, qui n'est au demeurant ni fixée ni annoncée par le Ministère public, au sujet du vol des L______ paraît moins probante – compte tenu des échanges que le précité a pu avoir à ce sujet avec E______ depuis plus d'un mois –, que la confrontation du prévenu aux données téléphoniques rétroactives de son téléphone portable, lesquelles ne sont pas susceptibles d'être modifiées par son éventuelle mise en liberté.

Le Ministère public invoque encore, pour justifier le maintien en détention du recourant, la détermination de l'ampleur de son activité délictuelle, mais il faut tenir compte du fait que celui-ci était, avant le 10 février 2022, mineur.

Il s'ensuit que le maintien du prévenu en détention provisoire en raison d'un risque relatif de collusion pour un vol (à une date non établie en février 2022) et une tentative de vol (le 20 mars 2022) de scooters ne respecte pas le principe de la proportionnalité. Ce risque peut être pallié par l'interdiction de contact prévue à l'art. 237 al. 2 let. g CPP, étant rappelé que le prévenu s'expose à une nouvelle détention provisoire s'il ne devait pas respecter les obligations à lui imposées (art. 237 al. 5 CPP).

4.             Le recourant conteste l'existence d'un risque de fuite, qu'il estime pouvoir être pallié par le versement de sûretés.

4.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

4.2. À teneur de l'art. 238 CPP (par renvoi de l'art. 237 al. 2 let. a CPP), le tribunal peut, s'il y a danger de fuite, astreindre le prévenu au versement d'une somme d'argent afin de garantir qu'il se présentera aux actes de procédure et se soumettra à l'exécution d'une sanction privative de liberté (al.1). Le montant des sûretés dépend de la gravité des actes reprochés au prévenu et de sa situation personnelle (al. 2).

Selon la jurisprudence, le caractère approprié de la garantie doit être apprécié notamment "par rapport à l'intéressé, à ses ressources, à ses liens avec les personnes appelées à servir de cautions et pour tout dire à la confiance qu'on peut avoir que la perspective de perte du cautionnement ou de l'exécution des cautions en cas de non-comparution à l'audience agira sur lui comme un frein suffisant pour éviter toute velléité de fuite" (ATF 105 Ia 186 consid. 4a, citant l'arrêt CourEDH Neumeister c. Autriche du 27 juin 1968, Série A, vol. 7, par. 14; cf. arrêt 1P.165/2006 du 19 avril 2006 consid. 3.2.1, publié in SJ 2006 I p. 395 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_220/2020 du 26 mai 2020 consid. 5.1). Si la caution doit être fournie par un tiers, il y a lieu de prendre en considération les relations personnelles et financières du prévenu avec cette personne (arrêt 1P.690/2004 du 14 décembre 2004 consid. 2.4.3 et les références).

4.3. En l'espèce, dans la mesure où le recourant est de nationalité française et domicilié en France, où il allègue vouloir travailler, il est indubitable qu'il quittera le territoire suisse en cas de libération.

Pour garantir sa présence aux futurs actes d'instruction et à l'audience de jugement, le recourant propose le versement d'une caution en CHF 20'000.- par son grand-père maternel. À l'instar du TMC, la Chambre de céans retient que le versement de sûretés, d'un montant à déterminer en fonction des capacités financières de la personne servant de caution, est de nature à garantir la représentation du recourant aux actes de la procédure.

Aucun élément propre à déterminer le montant adéquat et l'origine des fonds n'ayant cependant été produit devant la Chambre de céans, la cause sera renvoyée au TMC pour qu'il instruise ce point et statue à nouveau.

5.             Le recours sera ainsi admis.

6.             Le recourant, qui obtient gain de cause, ne supportera pas de frais.

7.             La procédure n'étant pas terminée, il n'y a pas lieu d'indemniser, à ce stade, le défenseur d'office (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Admet le recours, annule l'ordonnance attaquée et renvoie la cause au Tribunal des mesures de contrainte pour nouvelle décision au sens des considérants.

Ordonne, dans l'intervalle, le maintien de A______ en détention.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant (soit pour lui son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.