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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/25938/2022

AARP/83/2024 du 12.03.2024 sur JTDP/405/2023 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Normes : LPG11D
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25938/2022 AARP/83/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 12 mars 2024

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE], comparant par Me B______, avocat,

appelant principal et intimé sur appel joint,

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé sur appel principal et appelant joint,

 

contre le jugement JTDP/405/2023 rendu le 3 avril 2023 par le Tribunal de police,

 

et

LE SERVICE DES CONTRAVENTIONS, chemin de la Gravière 5, 1227 Les Acacias,

intimé.


EN FAIT :

A. a.a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 3 avril 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté d'infraction à l'art. 11D de la loi pénale genevoise (LPG) et rejeté ses conclusions en indemnisation, frais à la charge de l'État.

a.b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant, sous suite de frais et dépens, à l'octroi d'une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits dans la procédure préliminaire et de première instance ainsi que pour celle d'appel.

a.c. Le Ministère public (MP) conclut au rejet de l'appel principal et forme appel joint, requérant que A______ soit reconnu coupable d'infraction à l'art. 11D LPG et condamné à une amende de CHF 500.-, ses prétentions en indemnisation rejetées et les frais de procédure mis à sa charge.

b. Selon l'ordonnance pénale du Service des contraventions (SDC) du 29 mars 2022, il est reproché à A______ d'avoir, le 9 mars 2022 à 2h42, commis un excès de bruit nocturne à l'avenue 1______ no. ______, à Genève.

B. Il convient de se référer aux faits retenus par le premier juge, lesquels seront complétés dans la mesure nécessaire à l'appréciation juridique, de la manière suivante :

a.a. Aux date, heure et lieu précités, l'intervention de la police a été requise en raison du bruit fait par un chien dans un appartement.

a.b. À teneur du rapport de contravention, à leur arrivée, les policiers avaient constaté que le bruit excessif provenait de l'appartement de A______. Ce dernier étant injoignable, de même que ses proches, ils avaient fait appel à un serrurier pour pénétrer dans l'appartement. A______ et son conjoint, qui dormaient, avaient été réveillés par leur présence. L'intéressé avait expliqué avoir le sommeil lourd, raison pour laquelle ni les coups sur la porte, ni les manœuvres du serrurier ne l'avaient réveillé. Il avait été informé de ce qu'il ferait l'objet d'un rapport de contravention.

b.a. Dans son opposition, A______ a évoqué le caractère contradictoire et lacunaire du rapport. Le jour des faits, il était rentré à son domicile à 22h45, avait sorti ses chiens puis s'était couché aux alentours de 00h45. L'un des inspecteurs lui avait d'ailleurs affirmé, sur place, avoir dû mettre son oreille contre la porte pour déterminer si le chien pleurait ou aboyait. Depuis son arrivée dans l'immeuble, il faisait l'objet de remarques agressives et infondées de ses voisins du dessous. Le jour en question, son conjoint et lui étaient malades, raison pour laquelle l'intervention des policiers ne les avait pas réveillés.

b.b. Invité à se déterminer suite à l'opposition de A______, le gendarme C______ a maintenu son rapport de contravention, relevant que l'intervention du serrurier avait entraîné le réveil de plusieurs voisins.

c.a.a. En première instance, A______ a précisé que le soir des faits, son conjoint et lui étaient rentrés vers 21h30-22h à leur domicile, où ils avaient mangé puis sorti les chiens, avant d'aller se coucher aux alentours de minuit. À ce moment-là, ses animaux étaient calmes. De manière générale, ses chiens n'avaient pas pour habitude d'aboyer, hormis lorsque quelqu'un sonnait à la porte et que son conjoint ou lui étaient présents dans l'appartement. Il avait pu vérifier au moyen des caméras intérieures qu'il avait installées que lorsque quelqu'un sonnait à la porte en son absence et celle de son conjoint, les chiens pouvaient tout au plus couiner. Il ne pouvait pas exclure que le jour des faits, le plus jeune eût pleuré, dès lors qu'il était malade. Cela étant, si les aboiements avaient été de nature à déranger le voisinage, il se serait réveillé malgré son sommeil lourd, ou à tout le moins tel aurait été le cas de son conjoint. Il ne pouvait expliquer la raison pour laquelle les coups sur la porte puis l'intervention du serrurier ne l'avaient pas réveillé, précisant que dans la mesure où la porte d'entrée était dotée d'une protection anti-feu, il arrivait parfois que son conjoint et lui n'entendent pas que l'on frappait. Les policiers avaient indiqué que l'affaire se résoudrait par le simple dépôt d'une main courante. On l'avait toutefois rappelé ultérieurement pour l'informer de ce que, sur ordre du Commissaire, il allait recevoir une contravention. Différentes mesures avaient été prises par ses soins pour réduire le bruit causé par ses chiens, soit l'installation d'une caméra pour les surveiller, l'affichage d'une note à côté de la sonnette demandant aux visiteurs d'appeler plutôt que de sonner et la pose de tapis.

c.a.b. A______ a produit des images issues de la caméra installée à son domicile, qui le montrent le jour des faits à 23h50 en compagnie de son conjoint ainsi que de ses deux chiens, lesquels apparaissent calmes.

c.b. C______ a confirmé la teneur de son rapport. À son arrivée sur les lieux, il avait lui-même pu constater les aboiements de chiens sans avoir besoin de coller son oreille contre la porte, car ils étaient relativement forts, de nature à déranger le voisinage. Son collègue et lui avaient sonné et frappé à la porte de A______ à plusieurs reprises, tenté sans succès de l'appeler, puis avaient discuté par téléphone avec son ex-conjoint et tenté de contacter sa mère. Durant toutes ces démarches, les chiens avaient aboyé en continu. L'intervention du serrurier avait duré quatre ou cinq minutes et provoqué énormément de bruit, ce qui avait interpellé d'autres habitants de l'immeuble. Lorsqu'ils étaient entrés dans l'appartement, l'un des chiens avait continué à aboyer, étant précisé qu'il se trouvait dans une pièce fermée. A______ était sorti de sa chambre et une autre personne s'était aussi présentée. Ses collègues et lui n'avaient eu aucune suspicion quant à la consommation d'alcool ou de drogue par l'intéressé qui était encore "endormi", étonné et désolé de la situation. C______ comprenait, cela étant, difficilement comment il était possible que ce dernier ne se fut réveillé qu'à ce moment-là. Il était exact que sur place, ils avaient informé A______ de ce que l'affaire serait réglée par le dépôt d'une main courante, mais que le Commissaire en avait décidé autrement.

C. a.a. Aux débats d'appel, A______ a déclaré que le jour en question, l'un des chiens se trouvait au salon et l'autre, jeune au moment des faits, était enfermé dans la cuisine pour des raisons d'hygiène, car il était un peu malade. Il n'avait pas l'habitude d'être isolé dans une pièce, mais avait pleuré uniquement en fin de soirée car il avait besoin de sortir, non lorsque son conjoint et lui l'avaient enfermé, au moment d'aller se coucher. Aucun des chiens n'avait aboyé en leur présence ce soir-là. Le mot sur la porte invitant les visiteurs à ne pas sonner avait été mis à titre préventif, dès lors qu'ils avaient emménagé depuis peu et qu'il avait lui-même rencontré des ennuis dans son précédent logement. A______ a réitéré que son conjoint et lui n'avaient pas entendu d'aboiement, n'ayant pas été réveillés par cela. Invité à décrire la disposition de son appartement, il a expliqué que la cuisine se situait au fond de l'appartement, à une quinzaine de mètres de la porte d'entrée, laquelle était distante d'une vingtaine de mètres de la chambre à coucher, située sur la droite. Son appartement avait une superficie totale d'environ 70m2.

L'assistance d'un avocat lui avait semblé nécessaire, dès lors qu'il avait été très stressé par le fait d'être mis en contravention, après qu'on lui ait initialement indiqué qu'il ne serait pas sanctionné. En sa qualité de ______ au sein d'une juridiction ______, il avait par ailleurs craint de perdre ses moyens au moment de devoir se défendre devant ses pairs. Il avait ainsi eu besoin d'un soutien en raison de sa fonction, mais également d'un appui juridique.

a.b. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions.

Il émettait des doutes quant au fait que les chiens auraient causé un excès de bruit. Si toutefois cette hypothèse devait être retenue, il convenait de conclure que l'intention faisait défaut, considérant qu'il était endormi au moment des faits et que les chiens, qui n'étaient au demeurant pas de nature bruyante et venaient d'avoir été promenés, étaient calmes lorsque son conjoint et lui étaient allés se coucher. Aussi, rien ne laissait présager qu'ils feraient du bruit. Au vu des mesures concrètes prises de manière générale pour éviter les nuisances sonores causées par ses animaux, aucune faute ne pouvait lui être imputée.

Ses prétentions en indemnisation étaient justifiées. Outre que la cause n'était vraisemblablement pas si simple compte tenu de ce que les policiers avaient initialement renoncé à le sanctionner, puis s'étaient ravisés, l'assistance d'un avocat était nécessaire au vu de la fonction de ______ de l'appelant et de son appréhension à l'idée d'être confronté directement à des personnes avec lesquelles il était amené à avoir des contacts réguliers.

b. Le MP persiste dans ses conclusions.

Sur le plan des faits, l'existence de bruits excessifs de nature à déranger le voisinage était établie par le rapport de contravention, qui était explicite et avait été confirmé à deux reprises par son auteur, dont les déclarations étaient claires et constantes. Il n'y avait par ailleurs pas lieu de douter de ce que les voisins avaient effectivement appelé la police en raison d'aboiements intempestifs. L'appelant avait pour sa part livré des déclarations fluctuantes et contradictoires, notamment au sujet de ses horaires.

À rigueur de droit, l'intention était réalisée, à tout le moins sous l'angle du dol éventuel. En effet, A______ avait failli au devoir qui lui incombait de faire en sorte que ses animaux ne troublent pas le sommeil de ses voisins. Le fait qu'il ne se fut pas réveillé n'était pas déterminant, dès lors que le simple fait d'avoir laissé aboyer ses chiens en pleine nuit réalisait l'infraction considérée. Du reste, l'appelant savait que son chien était souffrant et qu'il risquait d'aboyer, ce d'autant plus que le jeune animal n'avait pas l'habitude d'être enfermé, ce qui pouvait constituer pour lui une source de stress. Les dimensions de l'appartement telles que décrites par l'appelant étaient invraisemblables et il était patent que les aboiements s'étaient faits entendre à l'extérieur de l'appartement.

Le prononcé d'une amende de CHF 500.- se justifiait considérant que la faute de A______, qui avait porté atteinte à la tranquillité de son voisinage, n'était pas anodine, que sa participation à la procédure avait été mauvaise et sa prise de conscience nulle, le prévenu s'étant déchargé de sa responsabilité en invoquant la fausseté du rapport de contravention. Le montant de l'amende était proportionné à sa situation personnelle.

Même en cas d'acquittement, il se justifiait de mettre les frais de procédure à la charge de l'appelant, lequel avait en tout état contrevenu à l'art. 257f al. 1 du code des obligations (CO).

Ses conclusions en indemnisation devaient être rejetées. L'appelant, qui avait connaissance de l'existence d'une procédure ouverte à son encontre avant de recevoir l'ordonnance pénale, n'avait fait valoir aucun développement juridique. Le déroulement d'une procédure pénale ne lui était par ailleurs pas inconnu, vu sa fonction. À supposer qu'une indemnité devait lui être octroyée, celle-ci devait être limitée à CHF 2'000.-, l'activité alléguée étant indécemment surestimée, étant en particulier relevé que certains postes avaient été amplifiés en cours de procédure, tandis que d'autres étaient facturés à double.

c. Après l'intervention du MP, A______ a encore expliqué que les dimensions de son appartement avaient été fournies à titre d'estimation et donc sans garantie de leur exactitude. S'il avait varié sur les horaires dans son récit, cela était en raison du temps écoulé depuis les faits.

d. Le SDC conclut au rejet de l'appel.

D. a.a. A______, ressortissant suisse né le ______ 1982, est marié, sans enfant. Il exerce la profession de ______ et perçoit à ce titre un salaire mensuel net de CHF 6'800.-, versé 13 fois l'an. Il s'acquitte mensuellement d'un loyer de
CHF 1'800.- et de sa prime d'assurance-maladie, en CHF 473.-. Il est copropriétaire d'un appartement acheté au prix de CHF 1'375'000.-, dont son ex-conjoint a la jouissance exclusive et pour lequel il n'assume aucun frais, hormis une participation au fond de rénovation.

a.b. À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, il est sans antécédent.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]). Il en va de même de l'appel joint (401 CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance
(art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404
al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

1.2. Conformément à l'art. 129 al. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire (LOJ), lorsque des contraventions font seules l'objet du prononcé attaqué et que l'appel ne vise pas une déclaration de culpabilité pour un crime ou un délit, la direction de la procédure de la juridiction d'appel est compétente pour statuer.

1.3. En matière contraventionnelle, l'appel ne peut être formé que pour le grief selon lequel le jugement est juridiquement erroné ou l'état de fait a été établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite (art. 398 al. 4 CPP).

Le pouvoir d'examen de l'autorité d'appel est ainsi limité dans l'appréciation des faits à ce qui a été établi de manière arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_362/2012 du 29 octobre 2012 consid. 5.2). Le libre pouvoir de cognition dont elle dispose en droit confère à l'autorité cantonale la possibilité, si cela s'avère nécessaire pour juger du bien-fondé ou non de l'application d'une disposition légale, d'apprécier des faits que le premier juge a omis d'examiner, lorsque ceux-ci se révèlent être pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1247/2013 du 13 mars 2014 consid. 1.3).

2. 2.1.1. Au sens de l'art. 11D al. 1 LPG, se rend coupable de trouble à la tranquillité publique celui qui, par la voix, au moyen d'un instrument ou d'un appareil produisant ou amplifiant des sons, avec un instrument ou un appareil dont le fonctionnement ou la manipulation sont bruyants, ou de quelque autre manière, aura troublé la tranquillité publique.

2.1.2. Le règlement sur la salubrité et la tranquillité publiques (RSTP) détermine plus spécifiquement les comportements bruyants interdits (art. 11D al. 2 LPG) et précise notamment que tout acte perpétré entre 21h et 7h de nature à troubler la tranquillité nocturne, soit notamment le repos des habitants, est interdit (art. 17 RSTP), peu importe que l'excès de bruit prenne naissance sur le domaine privé ou public (art. 16 al. 2 RSTP). Conformément à l'art. 43 RSTP, les personnes chargées de surveiller des animaux doivent prendre les mesures nécessaires pour que ceux-ci ne troublent pas la tranquillité publique, notamment par leurs cris.

2.2. L'art. 12 CP, applicable aux contraventions par renvoi de l'art. 104 CP, prévoit que sauf disposition contraire de la loi, est seul punissable l'auteur d'un crime ou d'un délit qui agit intentionnellement (al. 1). Agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté. L'auteur agit déjà intentionnellement lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait (al. 2).

2.3. En l'espèce, se fondant sur le rapport de contravention et les déclarations de l'agent intervenu sur les lieux, le premier juge a retenu que le jour des faits, les chiens de l'appelant avaient aboyé suffisamment fort pour troubler la tranquillité publique. Aucun élément du dossier ne permet de qualifier ce constat d'arbitraire. Sans évoquer d'erreur grossière, l'appelant ne conteste d'ailleurs le bruit excessif que dans la mesure où il s'étonne que son conjoint et lui n'en eussent pas été réveillés. Or, il est établi qu'ils étaient profondément endormis au moment des faits, de telle manière que l'intervention du serrurier, notoirement bruyante, ne les a pas non plus tirés de leur sommeil.

Il n'y a pas non plus lieu de mettre en doute le fait que l'appelant n'a pas concrètement eu conscience de l'existence de ces aboiements excessifs dès lors qu'il était endormi au moment des faits, étant précisé que l'hypothèse d'une prise de substances de nature à abaisser sa vigilance a été exclue par le premier juge, ce qui ne prête pas flanc à la critique.

Cela étant, de l'aveu même de l'appelant, le plus jeune des chiens était malade le jour en question. Alors même que l'animal n'avait pas l'habitude d'être isolé, il a été enfermé dans la cuisine pour la nuit, par crainte des troubles digestifs ou des déjections.

Dans ces circonstances, l'appelant ne pouvait qu'envisager que son chien manifesterait son mécontentement ou son désarroi, ce d'autant plus qu'il avait déjà pleuré au cours de la soirée pour exprimer son besoin de sortir se soulager.

L'appelant n'ignorait d'ailleurs pas que son chien pouvait avoir une tendance à aboyer, évoquant lui-même la situation où des individus sonnaient à la porte et son conjoint et lui se trouvaient dans l'appartement. Le fait qu'ils eussent jugé nécessaire de mettre un mot à côté de leur porte invitant les visiteurs à appeler plutôt qu'à sonner, quand bien même il s'agirait d'une mesure préventive, ne fait que confirmer cette thèse.

On relèvera encore que bien conscient d'avoir le sommeil lourd comme il l'a répété à plusieurs reprises durant la procédure, l'appelant aurait notamment pu, afin de se conformer à son obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que son animal ne trouble la tranquillité publique, l'enfermer dans une pièce adjacente à la chambre à coucher, voire faire usage d'un dispositif transmetteur de sons du type "babyphone", ou encore encourir le risque de devoir nettoyer le matin venu. Or, l'appelant n'en a rien fait.

Aussi, il convient de retenir qu'il a accepté les nuisances sonores excessives causées par son chien et les désagréments ainsi causés à ses voisins pour le cas où ils se produiraient. Son comportement ne relève ainsi pas de la négligence, comme retenu par le TP, mais du dol éventuel.

Compte tenu de ce qui précède, le jugement querellé sera réformé et l'appelant condamné du chef d'infraction à l'art. 11D al. 1 LPG.

3. 3.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

3.1.2. À teneur de l'art. 106 CP, sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de CHF 10'000.- (al. 1). Celle-ci, de même que la peine privative de liberté de substitution, doit être fixée en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (al. 3). À l'instar de toute autre peine, l'amende doit donc être fixée conformément à l'art. 47 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_337/2015 du 5 juin 2015 consid. 4.1). Le juge doit ensuite, en fonction de la situation financière de l'auteur, fixer la quotité de l'amende de manière qu'il soit frappé dans la mesure adéquate (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 in JdT 2005 IV p. 215). La situation économique déterminante est celle de l'auteur au moment où l'amende est prononcée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_547/2012 du 26 mars 2013 consid. 3.4).

3.2. En l'espèce, la faute de l'appelant doit être qualifiée de légère. L'intensité des nuisances sonores ne saurait être négligée. Quant à leur durée, elle doit être circonscrite à deux ou trois heures, considérant que le dossier ne contient aucun élément permettant de les déterminer précisément, si bien qu'il convient de retenir la version de l'intéressé selon lequel aucun aboiement n'est intervenu avant que son conjoint et lui n'aillent se coucher, aux alentours de minuit. Il s'agissait cela étant selon toute vraisemblance d'un événement isolé, intervenu dans des circonstances inhabituelles, soit une maladie de l'animal qui avait exceptionnellement, mais à mauvais escient, été enfermé.

La collaboration de l'appelant à la procédure n'a pas été mauvaise. Il s'est certes étonné à plusieurs reprises de ne pas avoir été réveillé par les démarches entreprises par les policiers sur son palier et a expliqué qu'il était inhabituel pour ses chiens d'aboyer. Il n'a toutefois pas formellement contesté les nuisances causées, bien qu'il ait tenté de les minimiser, et a fourni de nombreux détails sur la soirée précédant les faits.

La prise de conscience est présente, l'agent intervenu sur les lieux ayant notamment relevé qu'il s'était montré désolé de la situation. Les mesures prises pour limiter, au quotidien, le bruit causé par ses chiens, soit en particulier la pose de tapis au sol et l'installation d'une caméra pour les surveiller en son absence, témoignent d'ailleurs de ce que la tranquillité publique et le respect de ses voisins ne sont pas, d'une manière générale, étrangers à ses préoccupations.

Au vu de ce qui précède, l'amende sera réduite à CHF 100.-, montant qui apparaît proportionné et adéquat au regard de la faute de l'appelant et de sa situation personnelle.

Le jugement querellé sera dès lors réformé sur ce point également.

4. 4.1.1. Selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP, le prévenu au bénéfice d'un acquittement a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Encore faut-il que l'assistance d'un avocat ait été nécessaire compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit et que le volume de travail de l'avocat était justifié, les démarches superflues, abusives ou excessives n'étant pas indemnisées (ATF 142 IV 45 consid. 2.1).

4.1.2. Dans le cadre de l'examen du caractère raisonnable du recours à un avocat, il doit être tenu compte, outre de la gravité de l'infraction et de la complexité de l'affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1105/2014 du 11 février 2016 consid. 2.1). Dans les cas juridiquement simples, l'activité de l'avocat peut se limiter au minimum, à savoir tout au plus à une simple consultation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_2/2021 du 25 juin 2021 consid. 1.1.2).

En matière de contraventions, l’assistance d’un mandataire professionnel sera indemnisée si les circonstances du cas d’espèce la rendaient nécessaire, étant entendu qu’il ne faut pas trop se montrer exigeant sur ce point. Le recours aux services d’un avocat peut ainsi être indemnisé notamment lorsque l’enjeu individuel et subjectif présente une certaine importance. Tel sera à l’évidence le cas si une mesure est envisagée, en cas d'inscription de la condamnation au casier judiciaire, ou lorsque l'affaire pourrait avoir de lourdes conséquences en matière d’assurances sociales ou de responsabilité civile. La jurisprudence admet généralement avec bienveillance le recours aux services d’un avocat dans les procédures contraventionnelles, notamment en relation avec la circulation routière, lorsque le prévenu a pris connaissance des charges par le biais de la notification d’une ordonnance pénale (Y. JEANNERET / A. KHUN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 31-31a ad. art. 429 CPP).

4.2. En l'espèce, l'appelant soutient que l'assistance d'un avocat lui était indispensable pour se défendre dans le cadre de la présente procédure et conteste dès lors le rejet de ses conclusions en indemnisation prononcé par le premier juge.

Au-delà du verdict de culpabilité retenu en appel, qui amène en tout état à rejeter les prétentions en indemnisation élevées en lien avec la procédure préliminaire et de première instance, on relèvera que la gravité de l'infraction en cause, soit une contravention, est légère, de même que la sanction encourue.

L'affaire ne présentait aucune complexité, que ce soit en fait ou en droit, la question litigieuse étant de savoir si l'appelant avait laissé aboyer ses chiens de manière à troubler la tranquillité nocturne de ses voisins, ce qui ne nécessitait aucun développement juridique particulier, l'intéressé devant uniquement faire valoir sa propre version des faits.

Si l'on peut comprendre que l'appelant a pu ressentir un certain malaise du fait d'être confronté à la justice pénale, sa situation professionnelle tendait plutôt à l'avantager, dès lors qu'en sa qualité de ______, il était mieux placé que tout un chacun pour saisir les enjeux et le déroulement d'une telle procédure.

Pour le surplus, l'appelant ne s'est pas prévalu d'un impact négatif que ladite procédure, dont la durée s'est révélée relativement courte et l'enjeu est demeuré simple, aurait eu sur sa vie personnelle ou professionnelle. Aucune des hypothèses évoquées par la doctrine citée ci-dessus n'est d'ailleurs réalisée.

Partant, l'appel sera rejeté.

5. 5.1. À teneur de l'art. 428 al. 1 première phrase CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. Si l'autorité pénale d'appel rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce d'office sur les frais fixés par l'autorité inférieure, selon l'art. 428 al. 3 CPP.

5.2.1. En l'espèce, l'appelant succombe intégralement dans son appel. Il bénéficie toutefois d'une réduction de peine et résiste en ce sens très partiellement à l'appel joint du MP, lequel sollicitait sa condamnation à une amende de CHF 500.-.

Considérant ce qui précède, l'intéressé sera condamné au 4/5ème des frais de la procédure d'appel, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

5.2.2. Considérant le verdict de culpabilité retenu en appel, les frais de première instance seront intégralement mis à sa charge.

6. 6.1.1. Les considérations relatives à l'art. 429 al. 1 let. a CPP (cf. supra consid. 3) sont aussi applicables à la procédure d'appel par renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, étant en outre relevé que la décision sur le sort des frais de la procédure préjuge de celle sur l'octroi éventuel d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2).

6.1.2. En application de l'art. 453 al. 1 CPP, les recours formés contre les décisions rendues avant l'entrée en vigueur du présent code sont régis par l'ancien droit de procédure, de sorte que l'art. 429 al. 3 CPP, en vigueur depuis le 1er janvier 2024, n'est pas applicable à la présente cause.

6.1.3. La Cour de justice applique un tarif horaire de CHF 450.- au chef d'étude (ACPR/279/2014 du 27 mai 2014) et de CHF 150.- aux avocats-stagiaires (ACPR/187/2017 du 22 mars 2017).

6.2. L'appel principal est rejeté, si bien que l'activité y consacrée ne sera pas indemnisée. Il en va en revanche différemment de l'activité déployée pour la défense de l'appelant face à l'appel joint du MP, cette hypothèse constituant d'ailleurs un cas de défense obligatoire (art. 130 let. d CPP).

Aussi, seule l'activité déployée postérieurement au dépôt de l'appel joint sera analysée. Celle-ci apparaît toutefois largement excessive au regard de la nature contraventionnelle de l'affaire, si bien qu'elle sera réduite au minimum, tous les postes superflus étant retranchés, étant au surplus souligné que la seule question sur laquelle le prévenu l'emporte n'a pas même été plaidée.

Tous les postes afférents à l'incident de non-entrée en matière sur l'appel joint (11.09.23 - 07.11.23) rejeté par AARP/381/2023 du 6 novembre 2023, frais à la charge de l'intéressé, qui totalisent deux heures d'activité de chef d'étude et
25 minutes d'activité d'avocat-stagiaire, seront par ailleurs écartés.

Seront ainsi comptabilisées la prise de connaissance de l'appel joint (23.08.23 ; chef d'étude) réduite à dix minutes et la transmission de celui-ci à l'appelant (23.08.23 ; chef d'étude) réduite à cinq minutes, la prise de connaissance de la convocation à l'audience et sa transmission à l'appelant (06.12.23 ; chef d'étude) réduites ensemble à cinq minutes, une conférence avec le client (23.02.24 ; avocat-stagiaire) durant
20 minutes, la rédaction du courrier à la CPAR du 26 février 2024 (avocat-stagiaire) réduite à dix minutes, la prise de connaissance du complément de motivation du jugement du TP (27.02.24 ; chef d'étude) durant 15 minutes et la transmission de celui-ci au client (27.02.24 ; chef d'étude) réduite à cinq minutes, ainsi que la préparation de l'audience (29.02.24 ; avocat-stagiaire) réduite à 30 minutes. À ces postes seront ajoutées 40 minutes d'activité d'avocat-stagiaire pour l'audience d'appel, correspondant aux deux tiers de la durée des débats pour tenir compte uniquement du temps consacré à la défense sur appel joint.

La facturation admise sera partant arrêtée à CHF 593.95, correspondant à 40 minutes d'activité de chef d'étude au tarif de CHF 450.-/heure (CHF 300.-) ainsi qu'une heure et 40 minutes d'activité d'avocat-stagiaire au tarif de CHF 150.-/heure (CHF 250.-), auxquelles s'ajoutent l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% jusqu'au 31 décembre 2023 (CHF 11.55) et 8.1% à compter du 1er janvier 2024 (CHF 32.40).

L'indemnité due à l'appelant pour les dépenses occasionnées par la procédure d'appel sera toutefois limitée, pour suivre le sort des frais, à 1/5ème de ce montant, soit
CHF 118.80.

Cette indemnité sera compensée, à due concurrence, avec la créance de l'État à son égard en lien avec les frais de procédure (cf. art. 442 al. 4 CPP ; ATF 143 IV 293 consid. 1).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE
DE LA CHAMBRE PÉNALE D'APPEL ET DE RÉVISION :

Reçoit l'appel et l'appel joint formés par A______ et le Ministère public contre le jugement JTDP/405/2023 rendu le 3 avril 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/25938/2022.

Admet très partiellement l'appel.

Admet partiellement l'appel joint.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable d'infraction à l'art. 11D LPG.

Le condamne au paiement d'une amende de CHF 100.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution d'un jour.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance (art. 426 al. 1 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 429 CPP al. 1 let. a CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'345.-.

Met 4/5ème de ces frais, soit 1'076.-, à la charge de A______ et laisse le solde de ceux-ci à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP).

Alloue à A______ une indemnité de CHF 118.80 pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel (art. 436 al. 1 et 2 CPP et 429 al. 1 let. a CPP).

Compense à due concurrence la créance de l'État portant sur les frais de la procédure avec cette indemnité (art. 442 al. 4 CPP).

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

588.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

220.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

50.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'345.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

1'933.00