Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal pénal

1 resultats
P/9062/2021

JTDP/770/2023 du 13.06.2023 sur OPMP/1681/2022 ( OPOP ) , JUGE

Normes : LAVS.87; LEI.117
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

 

Chambre 4


13 juin 2023

 

MINISTÈRE PUBLIC

contre

Monsieur X______, né le _____1977, domicilié ______[GE], prévenu


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut au maintien de son ordonnance pénale.

X______ conclut à un verdict de culpabilité s'agissant de l'infraction à la LAVS, à son acquittement d'infraction à la LEI, à ce que le nombre et le montant du jour-amende soient revus à la baisse, à ce qu'il soit renoncé à une amende à titre de sanction immédiate.

*****

Vu l'opposition formée le 21 avril 2022 par X______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 28 février 2022 ;

Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public du 16 août 2022 ;

Vu l'art. 356 al. 2 et 357 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition ;

Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP ;

EN FAIT

A.           Par ordonnance pénale du 28 février 2022, valant acte d'accusation, il est reproché à X______ une infraction aux articles 117 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI) et 87 al. 2 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS) pour avoir, à Genève, à tout le moins depuis février 2015 jusqu'en avril 2018, employé, dans son ménage privé, A______, ressortissante des Philippines, alors qu'elle ne disposait d'aucune autorisation d'exercer une activité lucrative en Suisse, et d'avoir, dans ce contexte, éludé son obligation de s'acquitter de l'intégralité des cotisations sociales y afférentes.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. Le 26 avril 2021, le C______ (ci-après : C______) a dénoncé au Ministère public les agissements de X______ suite au dépôt, le 23 avril 2018, par A______ d'un formulaire de régularisation « Papyrus », intitulé « Informations relatives à l'emploi dans un ménage privé » et signé par ses soins, à teneur duquel il ressortait qu'elle avait travaillé, sans autorisation, en tant qu'employée de maison pour le compte de X______ à raison de 45 heures par semaine pour un revenu mensuel net de CHF 3'000.-.

En avril 2019, C______ a procédé auprès de X______ à un contrôle du respect des salaires minimaux obligatoires prévus par le Contrat-type de travail de l'économie domestique (ci-après CTT-Edom) et a constaté, sur la base des éléments recueillis, que le précité ne respectait pas vis-à-vis de A______ le salaire minimal prévu par le CTT-EDom. En effet, la sous-enchère salariale brute s'élevait au total à CHF 40'879.- et a conduit au non-versement des cotisations sociales y relatives.

a.b. A l'appui de sa dénonciation, C______ a versé une copie de son dossier, duquel il ressort notamment les éléments suivants :

- les 13 mai 2019 et 21 novembre 2019, X______ a, entre autres, remis à C______ les attestations de salaire concernant A______ pour les années 2013 à 2018, signées par l'intéressé et destinées à l'Office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS), les fiches de salaire mensuelles, contresignées par A______, pour les années 2013 à 2018, janvier à mars 2019 et septembre à novembre 2019, ainsi que les factures rectificatives établies par l'OCAS le 21 novembre 2019, pour les années 2013 à 2018, pour le rattrapage du paiement des cotisations sociales de A______ d'un montant total de CHF 5'341.70 ;

- par courriel du 17 décembre 2019, C______ a informé X______ que le montant final du rattrapage net dû à A______ s'élevait à CHF 34'632.- et lui a, pour ce faire, octroyé un arrangement de payement trimestriel, le premier versement devant intervenir le 31 mars 2020 ;

- le 31 mars 2020, X______ a versé sur le compte bancaire de A______ un montant de CHF 4'000.- ;

- par courriel du 25 juin 2020 X______ s'est excusé pour le retard de paiement et a informé C______ être confronté à des problèmes financiers et de santé suite à une tentative de suicide qu'il avait faite un mois et demi auparavant ;

- par courriel du 29 juin 2020, C______ a prolongé le délai de paiement de la seconde échéance au 31 juillet 2020 ;

- par courrier du 9 février 2021, C______ a donné un ultime avertissement à X______ afin de verser, d'ici au 19 février 2021, le solde du montant dû à A______, l'intéressé n'ayant versé que CHF 4'000.- ;

- le 22 mars 2021, C______ a rendu une décision administrative à l'encontre de X______, prononçant une amende de CHF 7'925.- à son encontre, retenant en substance que ce dernier n'avait pas respecté le salaire minimal prévu par le CTT-EDom et n'avait pas régularisé la situation auprès de son ancienne employée, dans la mesure il lui devait encore à titre de rattrapage de son salaire un solde de CHF 30'632.34.

b.a. Le 11 février 2022, par l'intermédiaire de son conseil de l'époque, X______ s'est déterminé sur la dénonciation de C______. Il a en substance expliqué avoir été surpris et navré d'apprendre, dans le cadre de la procédure de régularisation de A______, que le salaire net qu'il versait à cette dernière, ne respectait pas le salaire minimal. En effet, il n'avait jamais eu l'intention de la sous-payer, puisqu'il la considérait comme faisant partie de sa famille. Il l'avait même encouragée dans son souhait régulariser sa situation en Suisse.

Dès qu'il avait eu connaissance du fait que le salaire qu'il versait à A______ ne respectait pas le CTT-EDom, il avait régularisé la situation auprès de la caisse de compensation AVS et avait commencé à rembourser A______ pour le salaire manquant en effectuant un premier versement de CHF 4'000.-.

Il n'avait pas été en mesure de s'acquitter du solde dû à la précitée, dans la mesure où il avait perdu son emploi et se trouvait dans une situation financière difficile, devant se résoudre à utiliser l'entier de ses économies pour subvenir à ses besoins et ceux de ses enfants. Il avait dû aussi se séparer de A______ qui était retournée vivre aux Philippines.

Il avait agi par négligence et souhaitait toujours rembourser l'entier de sa dette.

b.b. Sur invitation du Ministère public, X______ a également déposé un formulaire relatif à sa situation personnelle et financière ainsi que les pièces y relatives.

A teneur du formulaire de situation personnelle qu'il a remis au Ministère public, X______ n'a pas fait état d'autre fortune mobilière que ses comptes bancaires auprès de la BCGE et UBS. Il a allégué une fortune immobilière consistant en un terrain au H______ d'une valeur d'environ CHF 500'000.- et d'un terrain en G______ d'une valeur d'environ CHF 2mio.

A l'appui de ses déclarations écrites, X______ a remis un extrait de ses comptes bancaires BCGE et UBS, un jugement de divorce, des documents relatifs à son bail, ses primes d'assurance maladie obligatoire, la carte grise de son véhicule et un avis de taxation pour l'année 2019.

b.c. Le 28 février 2022, le Ministère public a condamné X______ par ordonnance pénale pour infraction aux art. 117 al. 1 LEI et 87 al. 2 LAVS.

b.d. Entendu sur opposition par le Ministère public, X______ a expliqué contester l'ordonnance pénale en raison de la quotité de la peine uniquement.

Il n'avait pas été en mesure de rembourser, même partiellement, le solde des montants dûs ainsi que l'amende prononcée par C______ en raison de sa situation financière difficile, laquelle l'avait conduit en 2020 à faire une tentative de suicide et à suivre une thérapie durant six mois.

En 2016, il avait cessé de travailler, alors qu'il exerçait un emploi dans le domaine bancaire. Il a expliqué avoir placé de l'argent dont il avait hérité, ce dont il espérait pouvoir vivre. Ses placements avaient été fructueux jusqu'en 2019, année à partir de laquelle il avait commencé à ne plus obtenir de revenus.

Il avait alors cherché un emploi mains uniquement en questionnant son réseau et en se limitant au domaine financier, sans succès. Il n'avait pas poursuivi ses recherches et avait repris des études pour devenir enseignant. Il souhaitait prioriser l'éducation de ses enfants, étant précisé qu'il disposait d'une "nounou" à temps plein.

Il n'avait pas changé de logement, considérant que, vu ses poursuites, il n'en trouverait pas un autre. Il payait en temps et en heure son loyer.

Afin de pouvoir payer ses charges courantes, il avait dû vendre des actifs de famille, notamment des bijoux, des meubles et des tableaux. En 2019, il avait ainsi pu obtenir CHF 123'860.- de la vente de ses biens. Il était également le bénéficiaire d'une fondation de famille qui l'aidait à payer les frais de parascolaire et de formation pour ses enfants, ses frais de formation pour ses études de lettres ainsi que ses factures médicales, en dehors des primes d'assurance maladie.

S'agissant de ses placements, le prévenu a commencé par dire s'agissant de la nature de ses placements qu'il avait placé "un peu plus de CHF 8'000'000.-" dans la société immobilière D______ et dans un projet immobilier au H______.

Au cours de l'audition, interrogé sur sa fortune mobilière arrêtée à CHF 6'743'477.- à teneur de son avis de taxation pour l'année 2019, le prévenu a expliqué qu'il s'agissait d'actifs immobilisés, qu'il avait investi une partie de cet argent dans une société immobilière et qu'il en avait perdu "une partie". Il n'avait pas de pièces à produire attestant de ses prétendues pertes.

Interrogé sur le fait qu'à teneur de son avis de taxation pour l'année 2019, sur les CHF 6'743'477.- de fortune mobilière, seuls CHF 4'300'000.- correspondaient au "compte D______", le prévenu a expliqué qu'il avait également investi de l'argent dans un projet au H______.

Le prévenu a toutefois et contradictoirement concédé que l'argent qu'il avait investi au H______ l'avait été dans un terrain et qu'il ne s'agissait dès lors pas de fortune mobilière mais de fortune immobilière.

Interrogé encore sur la nature de ses investissements, le prévenu a ajouté à ses précédentes déclarations qu'en sus de l'investissement mobilier dans D______ et l'achat d'un terrain au H______, il avait également investi CHF 700'000.- auprès d'une société immobilière en Suisse: cette somme était "bloquée", il s'agissait d'un prêt participatif.

Interrogé toujours sur ses investissements, le prévenu a concédé qu'il avait aussi investi dans une société basée aux USA en contrepartie de quoi il avait reçu des actions.

S'agissant du montant total investi initialement, le prévenu a tantôt dit qu'il s'agissait d'"un peu plus de CHF 8'000'000.-" et tantôt de 7.8mio, tout en soutenant qu'il disposait alors d'une fortune de 9mio sur un compte.

Le prévenu a soutenu ne pas avoir de document relatif à l'état de sa fortune plus récent que ceux datant de 2019 qu'il avait fournis à l'autorité fiscale. Il avait été taxé d'office en 2020 et n'avait pas encore rendu sa déclaration fiscale 2021.

Son but actuellement était de pouvoir liquider ses actifs afin de rembourser ses dettes. Il comptait vendre son terrain en G______ mais pour cela il devait entamer des procédures judiciaires à l'encontre de personnes qui s'étaient substituées à lui au registre foncier. Cependant, il n'avait pas d'argent pour financer ces démarches.

b.e. A l'issue de l'audience du Ministère public, un délai a été imparti à X______ pour produire tout document à même d'étayer ses déclarations. Dans le délai imparti, X______ n'a produit qu'un extrait des poursuites le concernant.

b.f. Les éléments suivants ressortent des documents versés par X______ par devant le Ministère public:

- une attestation du Dr E______ du 12 mai 2022, certifiant avoir commencé à suivre X______ le 2 juin 2020 suite à son hospitalisation à la clinique F______ pour une tentative de suicide dans un contexte de rupture amoureuse et de difficultés financières, alors qu'il présentait un syndrome anxio-dépressif ;

- un avis de taxation du 9 avril 2021, concernant les impôts cantonaux et communaux 2019, retenant un revenu annuel net total de CHF 0.00, étant précisé que X______ a déclaré un revenu de CHF 123'860.-, une fortune mobilière brute de CHF 6'743'377.-, une fortune immobilière brute de CHF 216'380.-, soit une fortune totale brute de CHF 6'966'288.- ;

- un extrait du registre des poursuites de Genève du 16 juin 2022, à teneur duquel il ressort que X______ faisait l'objet de 106 poursuites enregistrées à son nom ;

- les relevés bancaires du compte bancaire privé BCGe, n°1______, ouvert au nom de X______, présentant au 30 septembre 2021 un total de montant crédité de CHF 3'880.- et un solde de CHF 14'297.-, au 31 octobre 2021 un total de montant crédité de CHF 6'400.- et un solde de CHF 9'703.46, et au 30 novembre 2021 un total de montant crédité de CHF 43'770.- et un solde de CHF 13'608.31.

C. a. Suite au courrier du Tribunal du 25 avril 2023 lui impartissant un délai au 20 mai 2023 pour fournir les pièces en lien avec sa situation financière, X______ a produit à l'audience de jugement les pièces suivantes :

- un formulaire de situation personnelle dans lequel il a indiqué:

Son revenu mensuel estimé à CHF 6'250.- (CHF 75'000.- annuel) plus allocations familiales de CHF 600.-;

Ses charges, soit: son loyer (CHF 3'826.35) et les primes d'assurance maladie obligatoire pour lui-même et ses enfants (total de CHF 474.45 par mois);

Ses biens immobiliers, soit: un terrain en G______ (sans mention de valeur), un terrain au H______ pour une part estimée à environ CHF 500'000.- et un terrain agricole à I______ (sans mention de valeur), lequel fait l'objet d'une saisie;

- les relevés bancaires du compte personnel UBS, n°2______, ouvert au nom de X______, présentant au 31 mai 2023 un montant total crédité de CHF 1'800.- et un solde de CHF 2'323.84 ;

- les relevés bancaires du compte bancaire privé BCGe, n°1______, présentant au 31 mai 2023 un montant total crédité de CHF 2'404.85 et un solde de CHF 1'599.51 ;

- un avis de taxation du 8 mars 2023, concernant les impôts cantonaux et communaux 2021, retenant un revenu annuel net total de CHF 118'845, une fortune mobilière brute de CHF 2'365'699.- et une fortune immobilière brute de CHF 216'380.-, soit une fortune total brute de CHF 2'582'217 ;

- un extrait du registre des poursuites de Genève du 6 juin 2023, à teneur duquel il ressort que X______ a fait l'objet de 120 poursuites enregistrées à son nom;

- deux procès-verbaux de saisie des 20 février 2023 et 10 mars 2023 adressés à X______, concernant les groupes n°3______ et 4______ et retenant une saisie de gains indépendant de CHF 1'341.- par mois du 22 octobre 2022 au 30 juin 2023 et du 1er juillet 2023 au 27 janvier 2024 en prenant en considération une perception de gains mensuel de CHF 7'408.- sur la base des mouvements bancaires pour l'année 2022, et un minimum vital de CHF 6'066.35, étant précisé que l'Office des poursuites a imparti un délai au 1er août 2023 à X______ pour réduire ses frais de logement ;

b. Lors de l'audience de jugement, X______ a rappelé ne pas contester les faits et leur qualification juridique mais la peine prononcée.

Le Ministère public avait rendu une décision sur la base d'un avis de taxation d'office qui ne reflétait pas sa situation financière actuelle. Il essayait de s'en sortir et de se mettre à jour financièrement mais la décision du Ministère public aggravait économiquement sa situation.

Il a toutefois précisé que s'agissant de l'infraction à la LEI, il souhaitait être acquitté en raison de l'application par analogie de la jurisprudence de la CPAR, selon laquelle l'étranger qui s'annonce dans le cadre de l'opération « Papyrus » ne saurait se voir reprocher une infraction à la LEI. En effet, il était à l'origine des démarches entreprises pour régulariser la situation de A______ dans le cadre de cette opération.

Il n'avait toujours pas remboursé A______ même s'il avait souhaité pouvoir le faire avant le jour de l'audience de jugement. Il avait néanmoins privilégié le paiement de ses frais courants pour maintenir son train de vie au remboursement de son dû à la précitée, respectivement à C______.

Il souhaitait à présent résoudre cette histoire et payer ce qu'il devait à C______.

D. X______ est un ressortissant suisse, né le ______ 1977 à Genève. Il est divorcé et père de deux enfants, âgés de 11 et 15 ans, qui vivent avec lui et qui sont à sa charge.

Il a expliqué en audience de jugement qu'il exerçait une activité indépendante en tant que conseiller en finance et en immobilier et réalisait un revenu annuel oscillant entre CHF 30'000.- et CHF 40'000.-.

Depuis l'année précédente, il vendait des certificats d'actions à hauteur de CHF 10'000.- à 20'000.- le certificat. Il en avait une dizaine à l'origine et il lui en restait 4 ou 5.

Il ne vendait plus d'actifs de famille, dans la mesure où il n'en avait plus.

Au nombre de ses revenus, il bénéficiait encore de l'aide financière d'une fondation de famille qui prenait en charge ses frais médicaux (hors prime d'assurance-maladie), ses frais de formation et les frais de scolarité de ses enfants.

Le revenu de CHF 7'408.- retenu par l'Office des poursuites pour calculer son minimum vital ne prenait pas en compte les ventes d'actions susvisées, ledit office s'étant basé sur ses déclarations fiscales et ses entrées d'argent sur ses comptes bancaires. Les revenus de son activité professionnelle n'avaient pas changé depuis que l'Office avait arrêté ceux-ci dans le cadre du calcul de son minimum vital.

Rendu attentif au fait qu'il avait néanmoins allégué un revenu annuel net de CHF 6'250.- par mois dans le formulaire de situation personnelle adressé au Tribunal (soit CHF 75'000.- par an) – montant dont il a dit qu'il tenait compte des ventes d'action – le prévenu a contradictoirement soutenu que son revenu professionnel était fluctuant.

S'agissant de ses charges, il s'est référé au calcul de son minimum vital opéré par l'Office des poursuites.

Il était toujours propriétaire du terrain en G______ pour lequel il devait refaire une estimation de la valeur vu le temps écoulé. Concernant le terrain au H______, il était sur le point d'être vendu mais il se heurtait à des formalités administratives.

Sa fortune se limitait désormais à ces deux terrains, aux actions susvisées ainsi qu'à des parts dans une société participative qu'il ne pourrait réaliser que dans deux ans, soit une fortune mobilière brute de CHF 2'365'699.- et une fortune mobilière immobilière brute de CHF 216'380.-.

A teneur de son extrait de casier judiciaire, le prévenu est sans antécédent.

 

EN DROIT

1.             1.1. Selon l'art. 329 al. 1 let. c CPP, la direction de la procédure examine s'il existe des empêchements de procéder. Les alinéas 4 et 5 de cette disposition prévoient en outre que, lorsqu'un jugement ne peut définitivement pas être rendu, le tribunal classe la procédure, après avoir accordé le droit d'être entendu aux parties ainsi qu'aux tiers touchés par la décision de classement. Si la procédure ne doit être classée que sur certains points de l'accusation, l'ordonnance de classement peut être rendue en même temps que le jugement.

1.2. L'action pénale se prescrit par sept ans si la peine maximale encourue est une autre peine que les peines privatives de liberté de trois ans, et plus, décrites aux let. a à c de cette disposition (art. 97 al. 1 let. d CP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 § 2 CEDH et, sur le plan interne, par l'art. 32 al. 1 Cst. et l'art. 10 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c et 2d).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a; 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c).

3. 3.1.1. L'art. 117 al. 1 LEI (anciennement LEtr) prescrit que quiconque, intentionnellement, emploie un étranger qui n'est pas autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse ou a recours, en Suisse, à une prestation de services transfrontaliers d'une personne qui n'a pas l'autorisation requise est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.

L'employeur est soumis à un devoir de diligence arrêté à l'art. 91 LEI (M. S. NGUYEN / C. AMARELLE [éds], Code annoté de droit des migrations: Loi sur les étrangers (LEtr), n. 11 ad art. 117). Selon cet article (dont la teneur est également restée inchangée depuis les faits litigieux), avant d'engager un étranger, l'employeur doit s'assurer qu'il est autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse en examinant son titre de séjour ou en se renseignant auprès des autorités compétentes.

L'employeur ne peut s'exonérer de cette obligation de diligence en se réfugiant derrière une éventuelle tromperie de tiers. Il appartient à chaque employeur de procéder au contrôle. La simple omission de procéder à l'examen du titre de séjour ou de se renseigner auprès des autorités compétentes constitue déjà une violation du devoir de diligence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_357/2009 du 16 novembre 2009 consid. 5.1 et 5.3).

3.1.2. L'opération dite « Papyrus », qui a pris fin au 31 décembre 2018, a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes d'un pays de l'UE/AELE, bien intégrées et répondant à différents critères (AARP/118/2023 du 27.03.2023 consid. 2.1.4 et les références citées).

Aux termes de l'art. 5 al. 3 Cst., les organes de l'État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. De ce principe général découle notamment le droit fondamental du particulier à la protection de sa bonne foi dans ses relations avec l'État, consacré à l'art. 9 in fine Cst. ; ce principe est également rappelé à l'art. 3 al. 2 let. a CPP qui prévoit que les autorités pénales s'y conforment (AARP/118/2023 du 27.03.2023 consid. 2.1.5 et les références citées).

Le principe de la bonne foi protège ainsi le justiciable dans la confiance légitime qu'il place dans sa relation avec les autorités. A cet égard, dans le cadre d'une opération de régularisation comme « Papyrus », et ce pour la période pénale couverte par celle-ci, dans le contexte particulier où des étrangers sans autorisation sont invités par l'État à dévoiler leur situation irrégulière dans l'espoir de se voir octroyer un permis, il parait conforme au principe de la bonne foi que les autorités pénales, qui n'auraient pas eu connaissance du séjour illégal sans la révélation volontaire de l'administré, ne le poursuive pas si celui-ci n'adopte aucun comportement frauduleux à l'égard des autorités. Cela se justifie également au regard de la règle selon laquelle nul ne peut être contraint de s'auto-incriminer, qui constitue un principe général applicable à la procédure pénale, découlant de l'art. 32 Cst., de l'art. 14 al. 3 let. g du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Pacte ONU II ; RS 0.103.2) et du droit à un procès équitable au sens de l'art. 6 ch. 1 CEDH (ATF 142 IV 207 consid. 8.3) (AARP/118/2023 du 27.03.2023 consid. 2.1.5 et les références citées).

3.1.3. L'art. 87 al. 2 LAVS prescrit que celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, aura éludé, en tout ou en partie, l'obligation de payer des cotisations, sera puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus lourde.

3.2. En l'espèce, il est établi et admis que le prévenu a employé, du 1er février 2015 au mois d'avril 2018, A______ qui n'était pas autorisée à exercer une activité lucrative en Suisse.

Il est également établi et admis par le prévenu que ce dernier a, durant la même période, omis de s'acquitter de l'intégralité des cotisations sociales de A______, soit celles afférentes à la différence entre le salaire effectivement versé (annoncé à l'OCAS) et celui qui aurait dû l'être en vertu de la CTT-EDom.

Ces faits sont prescrits pour la période du 1er février 2015 au 12 juin 2016 visée par l'ordonnance pénale, de sorte qu'ils feront l'objet d'un classement s'agissant de cette période.

Pour la période non-prescrite, soit du 13 juin 2016 au mois d'avril 2018, le Tribunal relève qu'au regard de la doctrine susvisée, il était du devoir du prévenu, en sa qualité d'employeur, de se renseigner sur le droit de son employée de travailler en Suisse. Le Tribunal retiendra à cet égard que le prévenu ne pouvait pas ignorer la situation administrative de A______, dès lors qu'il a soutenu que cette personne était comme un membre de sa famille.

Le Tribunal ne saurait par ailleurs suivre le raisonnement du prévenu, lequel explique qu'il ne peut lui être reproché une infraction à l'art. 117 al. 1 LEI dans la mesure où il aurait prétendument entrepris lui-même des démarches pour régulariser la situation de son ancienne employée dans le cadre de l'opération « Papyrus ».

En effet, aucun élément figurant à la procédure ne permet de retenir que le prévenu aurait spontanément annoncé avoir employé une personne n'ayant pas d'autorisation d'exercer une activité lucrative en Suisse. Au contraire, il ressort de la dénonciation de C______ que c'est "A______ [qui] a rempli et signé le 23 avril 2018 le formulaire de régularisation "Papyrus"" duquel il ressortait qu'elle avait travaillé pour le prévenu et que ça n'était qu'ensuite que le prévenu avait été approché par C______ pour que ce dernier fournisse des informations complémentaires.

En tout état, si le principe de la bonne foi impose de ne pas sanctionner les étrangers s'étant annoncé à l'autorité dans le cadre de l'opération "Papyrus", vu la finalité-même de cette opération – soit de régulariser certains étrangers séjournant sans autorisation et répondant à des critères déterminés –, sans quoi l'effet dissuasif de la perspective d'une sanction empêcherait l'opération d'atteindre son but, il n'en va pas de même en ce qui concerne les employeurs fautifs, lesquels ne sont pas visés par ladite opération.

Ainsi, le prévenu sera reconnu coupable d'infractions à l'art. 117 al. 1 LEI et à l'art. 87 al. 2 LAVS.

4. 4.1. Les faits reprochés au prévenu se sont déroulés pour partie avant le 1er janvier 2018, date d'entrée en vigueur du nouveau droit des sanctions.

Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale). Cependant, en vertu de l'art. 2 al. 2 CP, une loi nouvelle s'applique aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior).

4.2. En l'espèce, le nouveau droit apparaît plus favorable au prévenu, de sorte que le droit en vigueur depuis le 1er janvier 2018 s'appliquera.

5. 5.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

5.1.2. Si en raison d'un ou plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines du même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois pas excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (art. 49 al. 1 CP).

5.1.3. Selon l'art. 34 al. 1 CP, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur.

En règle générale, le jour-amende est de 30 francs au moins et de 3000 francs au plus. Le juge peut exceptionnellement, lorsque la situation personnelle et économique de l'auteur le justifie, réduire le montant du jour-amende à concurrence d'un minimum de 10 francs. Il peut dépasser le montant maximal du jour-amende lorsque la loi le prévoit. Il fixe le montant du jour amende selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (art. 34 al. 2 CP).

5.1.4. Pour calculer le montant du jour-amende, le législateur a retenu un processus laissant une très large part au pouvoir d'appréciation du juge, en énumérant simplement et de manière non exhaustive, un certain nombre de critères à prendre en considération (Y. JEANNERET, CR CP, éd. 2021, n°10 ad. art. 34).

Le montant du jour-amende doit être fixé en partant du revenu que l'auteur réalise en moyenne quotidiennement, quelle qu'en soit la source, car c'est la capacité économique réelle de fournir une prestation qui est déterminante. Constituent des revenus, outre ceux d'une activité lucrative dépendante ou indépendante, notamment les revenus d'une exploitation industrielle, agricole ou forestière, ainsi que les revenus de la fortune (loyers et fermages, intérêt du capital, dividendes, etc.), les contributions d'entretien de droit public ou privé, les prestations d'aide sociale ainsi que les revenus en nature (arrêt du Tribunal fédéral, 6B_845/2009, du 11 janvier 2010, consid. 1.1.1 et les références citées).

Ce qui est dû en vertu de la loi ou ce dont l'auteur ne jouit pas économiquement doit en être soustrait. Il en va ainsi des impôts courants, des cotisations à l'assurance-maladie et accidents obligatoire, ou encore des frais nécessaires d'acquisition du revenu (arrêt du Tribunal fédéral, 6B_845/2009, du 11 janvier 2010, consid. 1.1.1 et les références citées). Si l'auteur est l'objet de saisies au sens des articles 89ss LP, notamment sur son salaire, il y a également lieu, en principe, d'en tenir compte en imputant les montants saisis chaque mois sur le revenu déterminant (Y. JEANNERET, CR CP, éd. 2021, n°30 ad. art. 34).

Le minimum vital que le juge doit prendre en considération est inférieur à celui qui est prévu par l'article 93 LP, qui comprend des sommes déjà prises en compte par le juge pénal. De plus, le minimum vital établi par la LP inclut un certain montant à titre de loisirs, qui ne saurait être soustrait au paiement de la peine pécuniaire (FF 1999 1787 1826).

Si les revenus fluctuent fortement, il est nécessaire de se référer à une moyenne représentative des dernières années, sans que cela remette en cause le principe selon lequel la situation déterminante est celle existant au moment où statue le juge du fait (art. 34 al. 2 deuxième phrase CP). Cette règle ne signifie en effet rien d'autre que le tribunal doit établir de manière aussi exacte et actuelle que possible la capacité économique de l'intéressé, en tenant compte si possible de la période durant laquelle la peine pécuniaire devra être payée. Il s'ensuit que les augmentations ou les diminutions attendues du revenu doivent être prises en considération. Elles ne doivent toutefois l'être que si elles sont concrètes et imminentes (arrêt du Tribunal fédéral, 6B_845/2009, du 11 janvier 2010, consid. 1.1.1 et les références citées).

La loi mentionne encore la fortune comme critère d'évaluation. Il s'agit de la substance même du patrimoine, les fruits de ce dernier constituant déjà des revenus. Cette dernière ne doit donc être prise en compte qu'à titre subsidiaire pour fixer la quotité du jour-amende, lorsque la situation patrimoniale, particulière, contraste avec un revenu comparativement faible. En d'autres termes, elle demeure significative lorsque l'auteur vit de toute façon de la substance même de sa fortune. Cette dernière constitue un élément pertinent dans la mesure où l'auteur en tire sa subsistance quotidienne (arrêt du Tribunal fédéral, 6B_845/2009, du 11 janvier 2010, consid. 1.1.2 et les références citées).

Le critère du niveau de vie fournit un argument supplémentaire, lorsque la situation sur le plan des revenus doit être évaluée parce qu'elle ne peut être établie avec exactitude ou que l'auteur ne fournit que des informations insuffisantes ou imprécises. Une augmentation de la quotité du jour-amende est alors justifiée lorsqu'un train de vie ostensiblement élevé contraste avec des revenus significativement bas (arrêt du Tribunal fédéral, 6B_845/2009, du 11 janvier 2010, consid. 1.1.3 et les références citées).

Enfin, si l'accusé a le droit de ne pas collaborer à l'instruction et de refuser de fournir au juge les informations relatives à sa situation patrimoniale, le juge dispose cependant alors d'un large pouvoir d'appréciation lui permettant de procéder à une estimation du montant du jour-amende en fonction des informations dont il dispose. L'accusé ne peut dans ce cas se prévaloir du principe in dubio pro reo (arrêt du Tribunal fdéral 6P.155/2006 du 28 décembre 2006, consid. 10.3; AARP336/2022 du 2 novembre 2022, consid. 4.1.3).

5.1.5. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

5.1.6. Aux termes de l'art. 44 al. 1 CP, si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans.

5.1.7. Selon l'art. 42 al. 4 CP, le juge peut prononcer, en plus d'une peine avec sursis, une amende conformément à l'art. 106 CP.

Ce type de peine entre surtout en ligne de compte lorsqu'on souhaite accorder à l'auteur de l'infraction l'exécution avec sursis de la peine pécuniaire ou privative de liberté; toutefois, dans certaines situations, on aimerait lui infliger une sanction dont il se souviendra en lui imposant une peine pécuniaire dont il doit s'acquitter, ou une amende. Le cumul des peines sert ici des buts de prévention spéciale. La peine privative de liberté ou la peine pécuniaire assorties du sursis sont d'importance prépondérante tandis que la peine pécuniaire cumulée sans sursis ou bien l'amende n'ont qu'une signification secondaire. Cela résulte de la place de l'art. 42 al. 4 CP dans la systématique du Code, laquelle justifie la qualification de peine accessoire de la peine pécuniaire ferme. La peine pécuniaire cumulée ne doit pas conduire à une augmentation de la peine ou permettre une peine supplémentaire. Elle permet uniquement de prononcer une sanction appropriée aux faits et à l'auteur tout en restant dans les limites d'une peine adaptée à la culpabilité de l'auteur (ATF 135 IV 188 consid. 3.3, traduit in JdT IV 2011 p. 57ss).

Pour tenir compte du caractère accessoire des peines cumulées, il se justifie en principe d'en fixer la limite supérieure à un cinquième, respectivement à 20%, de la peine principale (ATF 135 IV 188 consid. 3.4.4, traduit in JdT IV 2011 p. 57ss).

5.1.8. Sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de 10'000 francs (art. 106 al. 1 CP). Le juge prononce dans son jugement, pour le cas où, de manière fautive, le condamné ne paie pas l'amende, une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus (art. 106 al. 2 CP). Le juge fixe l'amende et la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (art. 106 al. 3 CP).

5.2.1. En l'espèce, la faute du prévenu est importante.

Il a transgressé la législation en vigueur en matière d'assurances sociales et de migration, plus précisément les règles régissant les conditions d'admission des étrangers à l'exercice d'une activité lucrative et le paiement par l'employeur des cotisations sociales de l'employé.

Alors qu'il jouissait d'une fortune de plusieurs millions, il a sous-payé une employée et l'a ce faisant lésée du paiement intégral des cotisations sociales qui lui revenaient.

Cette précarisation de son employée choque d'autant plus que cette dernière côtoyait quotidiennement l'aisance dans laquelle le prévenu vivait puisqu'elle travaillait pour lui à plein temps.

L'absence de considération du prévenu pour son employée heurte d'autant plus qu'il a décrit la considérer comme un membre de sa famille.

Le prévenu, mû par des motifs égoïstes, a agi sur une période pénale s'étendant sur plusieurs années.

Sa situation personnelle ne justifie pas ses agissements. Il lui aurait été loisible d'agir autrement, en engageant une personne pourvue des autorisations de travail requises et en la payant selon les normes en vigueur, ce d'autant plus qu'à l'époque des faits le prévenu disposait d'une situation financière aisée.

La collaboration du prévenu, à l'instar de sa prise de conscience, est mauvaise. Il a certes admis les faits mais il eût cependant été difficile de les contester vu les preuves objectives (fiches de salaire, déclarations de son employées, relevé OCAS etc). En revanche, il a tenté de se dédouaner en laissant entendre qu'il était à l'origine des démarches de régularisation de son ancienne employée et en rechignant à renseigner de façon exhaustive tant les autorités pénales et qu'administratives sur sa situation financière réelle. Il n'a pas pris conscience de la gravité de son comportement, dès lors qu'il n'a fourni qu'un effort financier avorté, afin de rembourser la somme due à son ancienne employée, quoiqu'il en eût les moyens, expliquant à l'audience de jugement utiliser le produit de la vente de ses actions afin de maintenir son train de vie, en particulier un appartement au loyer démesuré au vu de sa situation financière.

Il y a concours d'infractions, facteur d'aggravation de la peine.

Le prévenu n'a pas d'antécédent judiciaire, facteur neutre au niveau de la peine.

Au vu de l'ensemble des circonstances susmentionnées, une peine pécuniaire entre en considération, laquelle sera fixée à 100 jours-amende pour l'infraction à l'art. 117 al. 1 LEI, abstraitement la plus grave, et augmentée dans une juste proportion de 50 jours-amende (peine hypothétique de 70 jours-amende) pour tenir compte de l'infraction à l'art. 87 al. 2 LAVS.

5.2.2. Le prévenu sera mis au bénéfice du sursis, dont il remplit les conditions, assorti d'un délai d'épreuve de trois ans.

Une amende lui sera cependant infligée à titre de sanction immédiate, vu sa faute et à des fins de prévention spéciale vu son attitude à la procédure.

5.2.3. S'agissant du montant du jour-amende, le Tribunal observe que le prévenu n'a pas renseigné à satisfaction sur sa situation financière réelle, malgré les multiples demandes qui lui ont été faites de documenter ses allégations, et qu'il a fourni des informations contradictoires.

5.2.3.1. Quant à sa fortune, le prévenu a varié dans ses explications s'agissant du montant initial de ses investissements et sur leur nature et ne les a pas documentés.

Le Tribunal observe par ailleurs une nette diminution entre la fortune brute alléguée par le prévenu en 2006 (CHF 9mio) et celle retenue par l'autorité fiscale en 2016 (CHF 6'966'288.-) puis en 2021 (CHF 2'582'217.-), sans que le prévenu n'ait été en mesure de l'expliquer autrement que par des "pertes" et de documenter cette évolution autrement que par la production de ses avis de taxation.

En tout état, la fortune nette du prévenu telle que retenue par l'administration fiscale pour l'année fiscale 2021 et dont le prévenu s'est prévalu à l'audience de jugement était de CHF 1'749'818.-. Dans la mesure où la fortune immobilière brute déclarée pour cet exercice est de CHF 216'380.- elle ne tient à l'évidence pas compte de tous les terrains dont le prévenu a dit être propriétaire (soit au H______ [CHF 500'000.- environ], en G______ [CHF 2mio environ] ainsi qu'à I______), biens immobiliers qui seront intégralement pris en compte dans l'appréciation de la fortune du prévenu.

5.2.3.2. Le prévenu a par ailleurs expliqué utiliser la substance de sa fortune pour assurer son train de vie. Il l'a dit au Ministère public s'agissant de l'année 2019 durant laquelle il a admis avoir vendu des bijoux, des meubles et des tableaux pour un montant total de CHF 123'860.-. C'est également le cas pour l'année 2022 dans la mesure où le prévenu a dit en audience de jugement qu'il avait à l'origine une dizaine de certificats d'actions qu'il avait commencé à vendre l'année précédente – soit en 2022 – pour CHF 10'000.- à 20'000.- le certificat afin assurer son train de vie et qu'il lui restait désormais quatre ou cinq certificats d'action. En 2022, le prévenu a dès lors obtenu de sa fortune mobilière CHF 6'250.- par mois en moyenne (5 certificats valant en moyenne 15'000.- vendus sur une période de 12mois = CHF 75'000.-). Il sera dès lors tenu compte de la vente à venir des actions restantes du prévenu comme d'un élément de revenu (CHF 6'250.-/mois).

5.2.3.3. Quant à son revenu, à teneur des avis de saisie produits par le prévenu en audience de jugement et des explications de ce dernier, son revenu mensuel net moyen arrêté par l'Office des poursuites – sur la base d'une analyse de ses déclarations fiscales et de ses comptes bancaires – était de CHF 7'408.-, montant ne tenant pas compte des ventes ponctuelles des certificats d'actions (CHF 6'250.- par mois en moyenne).

Le prévenu a précisé en audience que depuis ce calcul opéré par l'Office des poursuites, ses revenus n'avaient pas connu de changement notable.

Pourtant, à teneur du formulaire de situation personnelle produit en audience de jugement et des explications données par le prévenu, celui-ci a fait état d'un revenu mensuel net de CHF 6'850.-, allocations familiales (CHF 600.-) et vente de certificats d'action (CHF 6'250.- par mois en moyenne) compris, tout en soutenant retirer un revenu annuel moyen de CHF 30'000.- à 40'000.- (soit CHF 2'916.- par mois en moyenne) de son activité indépendante.

Le Tribunal considère dès lors que les déclarations du prévenu s'agissant de son revenu sont contradictoires, peu étayées et, partant, peu crédibles.

5.2.3.4. Confronté à une situation financière peu claire dans la mesure où le prévenu n'a pas renseigné suffisamment et de manière documentée sur sa situation financière réelle, le Tribunal fera usage du large pouvoir d'appréciation que lui reconnait la jurisprudence dans ce cas et fixera le montant du jour-amende sur la base des informations dont il dispose en tenant compte du train de vie du prévenu d'une part et de sa fortune importante d'autre part vu le contraste important entre cette dernière et les revenus allégués.

Afin de déterminer son revenu, il convient de se baser tant sur une estimation du produit de son activité professionnelle indépendante que sur le prix de vente des actions encore en possession du prévenu, ce dernier ayant indiqué assurer son niveau de vie au moyen de celles-ci. Dans cette mesure, le Tribunal retiendra un revenu mensuel total de CHF 13'658.-, comprenant un produit de l'activité indépendante de CHF 7'408.-, tel qu'arrêté par l'Office des poursuites après analyse des comptes bancaires et des déclarations fiscales du prévenu, montant non-contesté par ce dernier, ainsi que CHF 6'250.- correspondant au produit mensuel moyen retiré par le prévenu de la substance de sa fortune.

En ce qui concerne les charges du prévenu qu'il convient de déduire du revenu mensuel ainsi obtenu, le Tribunal relève que le prévenu n'a pas produit de documents permettant d'étayer l'ensemble de ses charges, lesquelles ne peuvent ainsi être établie de façon exhaustive, de sorte que le Tribunal procédera également à une estimation de celles-ci.

Dans cette mesure, il s'écartera du minimum vital retenu par l'Office des poursuites, lequel est supérieur à celui liant le juge pénal, et arrêtera les charges du prévenu à CHF 5'736.36, comprenant entre autres son loyer (CHF 3'826.35) et sa prime d'assurance maladie pour lui-même et ses enfants (CHF 474.45). En revanche, le Tribunal ne prendra pas en considération la saisie sur revenu dont le prévenu fait l'objet, puisque ce dernier dispose d'une fortune mobilière et immobilière qu'il pourrait réaliser afin de solder ses dettes, les obstacles à la vente de ses terrains en particulier n'ayant pas été étayés malgré les demandes de l'autorité en cours de procédure. C'est d'autant plus vrai que le prévenu a dit au Tribunal qu'hormis d'ultimes obstacles administratifs, la vente de son terrain au H______ était imminente.

Il apparaîtrait en effet choquant que le prévenu puisse tirer profit de son manque de volonté de s'acquitter de ses dettes au moyen de la vente de ses terrains pour se voir infliger un jour-amende d'un montant moindre. Sur cette base, le montant du jour-amende sera dès lors arrêté à CHF 260.- l'unité (CHF 13'658.- - CHF 5'736.36 = CHF 7921.64, puis CHF 7'921.64/30 = CHF 264.05).

Par ailleurs, compte tenu de l'absence totale de prise de conscience du prévenu qui n'a pas mesuré le sérieux de ses transgressions, une amende de CHF 7'800.- (correspondant à 20% de CHF 39'000.-) sera prononcée à titre de sanction immédiate.

6. 6.1. A teneur de l'art. 426 al. 1 CP, le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné. Font exception les frais afférents à la défense d'office; l'art. 135 al. 4, est réservé.

Lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 al. 2 CP).

6.2. En l'espèce, le prévenu sera condamné à la totalité des frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'009.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 10 al. 1 let. e RTFMP), dans la mesure où il a provoqué fautivement l'ouverture de la procédure, le classement prononcé s'expliquant uniquement en raison de la prescription de l'action pénale.

Vu l'annonce d'appel du présent jugement motivé, un émolument de jugement complémentaire de CHF 600.- sera fixé et mis à la charge du prévenu conformément à l'art. 9 al. 2 RTFMP.

7. 7.1.1. Selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

7.1.2. Selon l'art. 430 al. 1 let. a CPP, l'autorité pénale peut réduire ou refuser l'indemnité ou la réparation du tort moral lorsque le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l'ouverture de la procédure ou a rendu plus difficile la conduite de celle-ci.

Cette disposition est le pendant de l'art. 426 al. 2 CPP en matière de frais. Une mise à charge des frais selon l'art. 426 al. 1 et 2 CPP exclut en principe le droit à une indemnisation. La question de l'indemnisation doit être tranchée après la question des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation. Il en résulte qu'en cas de condamnation aux frais, il n'y a pas lieu d'octroyer de dépens ou de réparer le tort moral (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 p. 357).

7.2. En application de ce qui précède, les conclusions en indemnisation du prévenu seront rejetées.

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant sur opposition :

Déclare valables l'ordonnance pénale du 28 février 2022 et l'opposition formée contre celle-ci par X______ le 21 avril 2022.

et statuant à nouveau et contradictoirement :

Classe la procédure s'agissant des infractions aux articles 87 al. 2 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS) et 117 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI) pour les faits antérieurs au 13 juin 2016 (art. 329 al. 5 CPP).

Déclare X______ coupable d'infraction aux articles 87 al. 2 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS) et 117 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI).

Condamne X______ à une peine pécuniaire de 150 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 260.-.

Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne X______ à une amende de CHF 7'800.- (art. 42 al. 4 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 30 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Rejette les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).

Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'009.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).

 

La Greffière

Meliza KRENZI

Le Président

Cédric GENTON

 

 

Vu l'annonce d'appel formée par le prévenu, laquelle entraîne la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP) ;

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

Fixe un émolument complémentaire de jugement de CHF 600.-.

Le met à la charge de X______.

 

La Greffière

Meliza KRENZI

Le Président

Cédric GENTON

 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

 

 

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

600.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

45.00

Frais postaux (convocation)

CHF

7.00

Emolument de jugement

CHF

300.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

7.00

Total

CHF

1009.00

==========

Emolument de jugement complémentaire

CHF

600.00

==========

Total des frais

CHF

1609.00

 

Notification à X______
Par voie postale

Notification au Ministère public
Par voie postale