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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2958/2021

DCSO/16/2022 du 13.01.2022 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Minimum vital; revenus conjoints
Normes : lp.93
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2958/2021-CS DCSO/16/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 13 JANVIER 2022

 

Plaintes 17 LP (A/2958/2021-CS) formées en date des 8 septembre, 21 octobre et
22 novembre 2021 par A______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 13 janvier 2022
à :

-       A______

______

______, Genève.

 

-       B______ [la Banque]
______
______, Genève.

 

- ETAT DE GENEVE, ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

Service du contentieux
Rue du Stand 26
Case postale 3937
1211 Genève 3.

 

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A. a. Se fondant sur un acte de défaut de biens n° 1______ du 20 mai 2021, portant sur un montant de 71'919 fr. 85, la B______ (B______) a requis le 2 juin 2021 la continuation directe de la poursuite contre A______.

b. Le 10 juin 2021, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) a communiqué à A______ un avis de saisie pour le 20 août 2021.

c. Par courrier du 12 août 2021, A______ a répondu à l'Office qu'il refusait de déférer à la convocation, estimant que l'avis de saisie n'était aucunement justifié. Il était âgé de 82 ans et faisait l'objet, depuis 15 ans désormais, de poursuites fondées sur le fait qu'il avait cautionné un prêt bancaire de l'un de ses fils, tombé ensuite malade.

d. Le 20 août 2021, A______ a été entendu par l'Office, lequel a ensuite calculé le minimum vital et fixé la quotité saisissable à 3'517 fr. 50.

e. Le même jour, l'Office a adressé à la C______ un avis concernant la saisie de la rente LPP de A______ à hauteur de 3'515 fr. par mois (série n° 2______).

f. Le 4 octobre 2021, l'Office a établi un procès-verbal de saisie,
série n° 2______. La quotité saisissable du poursuivi s'élevait à 3'517 fr. 50 par mois selon le calcul du minimum vital effectué le 20 août 2021 (page 4 du procès-verbal). En page 3, le procès-verbal de saisie indiquait que la saisie portait sur 3'380 fr. par mois.

B. a. En date des 16 juillet et 27 septembre 2021, l'Administration fiscale cantonale a requis la continuation des poursuites nos 3______ et 4______ intentées contre A______.

b. Par courriers des 11 et 12 octobre 2021, l'Office a adressé à A______ deux avis de saisie dans les poursuites précitées, formant la série n° 5______.

c. Se fondant sur le calcul de la quotité saisissable effectué le 20 août 2021 dans la série n° 2______, l'Office a établi le 16 novembre 2021 un nouveau procès-verbal de saisie, série n° 5______, lequel reprenait le précédent calcul de la quotité saisissable (3'517 fr. 50; page 4 du procès-verbal), de même que, en page 3, l'indication selon laquelle la saisie portait sur 3'380 fr. par mois à compter du 20 août 2022, soit à l'expiration de la saisie précédente.

d. Dans l'intervalle, le 11 novembre 2021, l'Office a communiqué à la C______ un avis concernant la saisie de la rente LPP de A______ à hauteur de 3'380 fr. par mois (série n° 5______).

e. Par avis du 16 novembre 2021, annulant le précédent, l'Office a indiqué à la C______ que la saisie de la rente LPP de A______ se montait à 3'515 fr. par mois (série n° 5______).

C. a.a Par acte posté le 8 septembre 2021, complété les 21 et 27 septembre 2021ainsi qu'en date des 14 et 15 octobre 2021, A______ a formé plainte contre l'avis de saisie du 20 août 2021 et le procès-verbal de saisie du 4 octobre 2021, dans la série n° 2______ (cause n° A/2958/2021). La somme saisie ne reposait sur aucune évaluation sérieuse de sa situation. C'était en particulier à tort que la rente AVS de son épouse avait été prise en considération dans le calcul de son minimum vital.

a.b Aux termes de son rapport, l'Office a indiqué que lors de l'interrogatoire du poursuivi le 20 août 2021, celui-ci avait été avisé du fait que les revenus de son épouse étaient intégrés au calcul du minimum vital. Pour le surplus, l'Office a confirmé le calcul du minimum vital effectué et conclu au rejet de la plainte.

b.a Par acte du 21 octobre 2021, complété le 28 octobre et le 19 novembre 2021, A______ a formé plainte contre les saisies opérées en date des 11 et
12 octobre 2021, ainsi que contre le procès-verbal de saisie du 16 novembre 2021 dans la série n° 5______. Il a pour l'essentiel critiqué la prise en compte dans la détermination de la quotité saisissable des revenus de son épouse. Il a aussi relevé la confusion entretenue par l'Office s'agissant du calcul de la quotité saisissable (3'380 fr. contre 3'515 fr.).

b.b Dans son rapport, l'Office a indiqué que la saisie opérée dans la série
n° 5______ reposait sur le même calcul effectué dans la série précédente, n° 2______. L'erreur mentionnée en page 3 du procès-verbal de saisie du
4 octobre 2021, reprise par le procès-verbal de saisie du 16 novembre 2021, avait été corrigée, la quotité saisissable du poursuivi se montant à 3'515 fr.

c. Par acte du 22 novembre 2021, A______ a contesté l'avis envoyé à la C______ le 11 novembre 2021 dans la série n° 5______, en tant qu'il fixait la quotité saisissable à 3'380 fr. Cette plainte a été enregistrée sous A/6______/2021.

d. Par avis du 25 novembre 2021, la Chambre de céans a convoqué A______ et l'Office à comparaître à une audience fixée au 7 décembre 2021 concernant les deux séries considérées.

e. A______ a fait savoir, par courrier du 30 novembre 2021, qu'il ne comparaîtrait pas à l'audience, dès lors qu'il s'était largement exprimé par écrit. Il demandait une réduction substantielle de la quotité saisissable.

f. Sur ce, les causes ont été gardées à juger.


 

EN DROIT

1. Déposées en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi
(art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre de mesures de l'Office pouvant être attaquées par cette voie (art. 17 al. 1 LP), soit des avis de saisie et des procès-verbaux de saisie, et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), les plaintes sont recevables.

2. L'art. 70 LPA, applicable à la procédure devant la Chambre de surveillance en vertu de l'art. 9 al. 4 LaLP, permet, d'office ou sur requête, de joindre des procédures se rapportant à une situation identique ou à une cause juridique commune.

En l'occurrence, les trois plaintes concernent deux saisies successives fondées sur le même calcul du minimum vital, attaqué par le débiteur sur la base des mêmes griefs, de sorte qu'il se justifie de joindre les causes.

3. 3.1.1 L'autorité de surveillance constate les faits d'office (art. 20a al. 2 ch. 2 LP). Les parties intéressées à une procédure d'exécution forcée n'en sont pas moins tenues de collaborer à l'établissement des faits (cf. ATF 123 III 328); il en est ainsi, notamment, lorsque la partie saisit dans son propre intérêt les autorités de surveillance ou qu'il s'agit de circonstances qu'elle est la mieux à même de connaître ou qui touchent à sa situation personnelle, surtout lorsqu'elle sort de l'ordinaire (arrêt du Tribunal fédéral 7B.100/2004 du 4 août 2004, consid. 3.1). Il incombe notamment aux parties de renseigner l'autorité sur les faits essentiels et de produire les moyens de preuve dont elles disposent (ATF 123 III 328 consid. 3; 112 III 79 consid. 2).

3.1.2 1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital). Cette disposition garantit à ces derniers la possibilité de mener une existence décente, sans toutefois les protéger contre la perte des commodités de la vie; elle vise à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à leurs intérêts fondamentaux, les menace dans leur vie ou leur santé ou leur interdise tout contact avec le monde extérieur. Les besoins du poursuivi et de sa famille reconnus par la jurisprudence sont ceux d'un poursuivi moyen et des membres d'une famille moyenne, c'est-à-dire du type le plus courant. Ils doivent toutefois tenir compte des circonstances objectives, et non subjectives, particulières au poursuivi (ATF 134 III 323 consid. 2; 108 III 60 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_912/2018 du 16 janvier 2018 consid. 3.1).

Pour fixer le montant saisissable - en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c) - l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les directives de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse (BlSchK 2009, p. 196 ss), respectivement, à Genève, sur les Normes d'insaisissabilité édictées par l'autorité de surveillance en vigueur lors de l'exécution de la saisie (ci-après : NI-2020; Ochsner, Le minimum vital (art. 93 al. 1 LP), in SJ 2012 II p. 119 ss, 123; Collaud, Le minimum vital selon l'article 93 LP, in RFJ 2012 p. 299 ss, 303; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).

Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles la nourriture, les frais de vêtement, les soins corporels et de santé, les assurances privées, les frais culturels, etc. D'autres charges indispensables, comme les frais de logement (art. II.1 et II.3 NI-2020) ou les primes d'assurance-maladie obligatoire (art. II.3 NI-2020), doivent être ajoutés à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement payées (Ochsner, in CR-LP, n° 82 ad art. 93 LP). Les impôts ne constituent pas des charges indispensables au sens de l'art. 93 al. 1 LP et ne peuvent en conséquence être pris en compte pour déterminer la quotité saisissable des revenus du débiteur (ATF 140 III 337
consid. 4.4).

3.1.3 Selon l'art. 92 al. 1 ch. 9a LP, les rentes versées au titre de l'Assurance vieillesse et survivants sont insaisissables. L'art. 93 al. 1 LP prévoit en revanche que les rentes versées par des institutions de prévoyance professionnelle peuvent être saisies, déduction faite de ce que l'Office estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital) (ATF 120 III 71 consid. 4).

Dans les cas où les revenus du débiteur comprennent, outre des revenus relativement saisissables au sens de l'art. 93 al. 1 LP, une rente absolument insaisissable en vertu de l'art. 92 al. 1ch. 9a LP, il convient d'ajouter le montant de cette dernière aux autres sources de revenu pour calculer la part saisissable (ATF135 III 20 consid. 5.1).

3.1.4 Le calcul du minimum vital d'un débiteur marié vivant en couple prend en compte les charges du couple ainsi que les revenus des deux conjoints, afin de déterminer la part respective des conjoints à leur minimum vital, selon la formule suivante : (minimum vital du couple x revenus du poursuivi) ÷ (revenus du poursuivi + revenus du conjoint) = minimum vital du poursuivi. La quotité saisissable du débiteur résulte ensuite de la soustraction des revenus du débiteur de la part du poursuivi au minimum vital commun du couple (ATF 114 II 12 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 6B_390/2011 du 6 octobre 2011 consid. 3 et 7B.240/2001 du 18 décembre 2001; DCSO/210/2012 du 31 mai 2012 consid. 6.1).

3.2. En l'espèce, c'est à juste titre que, dans son calcul du minimum vital, l'Office a tenu compte des revenus du couple, composés de la rente de 2ème pilier du plaignant (5'337 fr.) et des rentes AVS des deux conjoints (1'785 fr. et 1'679 fr.), quand bien même celles-ci sont insaisissables, soit un revenu total du ménage en 8'801 fr. 05. En effet, pour les couples mariés, il est tenu compte aussi bien des revenus des deux conjoints que des charges du couple (supra 3.1.4).

L'Office a pris en considération, s'agissant des charges du ménage, du montant de base pour un couple (1'700 fr.), du loyer (1'376 fr.), des primes d'assurance-maladie des conjoints (516 fr. 05 et 522 fr. 25) et de leurs frais médicaux non couverts (170 fr. par mois chacun), pour un total de 4'454 fr. 30. Le plaignant ne soutient pas que d'autres charges auraient dû être intégrées à ce calcul et ne fournit aucun élément à cet égard.

Le minimum vital du poursuivi se détermine ainsi selon le calcul suivant :
(4'454 fr. 30 x 7'122 fr. 05) ÷ 8'801 fr. 05 = 3'604 fr. 55. La quotité saisissable résulte de la soustraction du minimum vital ainsi établi du revenu du plaignant, soit 7'122 fr. 05 - 3'604 fr. 55 = 3'517 fr. 50

Le calcul de l'Office, qui a fixé la quotité saisissable dans les deux séries considérées à 3'515 fr. n'est donc pas critiquable, étant précisé que l'Office a reconnu avoir commis une erreur en mentionnant le montant de 3'380 fr. en page 3 des deux procès-verbaux de saisie querellés. Il a en outre annulé l'avis envoyé à l'institution de prévoyance le 11 novembre 2021 (faisant état de 3'380 fr.) qu'il a remplacé par un avis du 16 novembre 2021 mentionnant correctement 3'515 fr.

Mal fondés, les plaintes seront par conséquent rejetées.

4. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Ordonne la jonction des causes A/2958/2021, A/7______/2021 et A/6______/2021 sous A/2958/2021.

Déclare recevables les plaintes formées par A______ en date des 8 septembre,
21 octobre et 22 novembre 2021 contre les décisions prises par l'Office cantonal des poursuites dans l'exécution des saisies, séries nos 2______ et 5______.

Au fond :

Les rejette.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseur(e)s; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

La présidente : La greffière :

 

Verena PEDRAZZINI RIZZI Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.