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Décisions | Chambre de surveillance

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C/14762/1995

DAS/94/2016 du 12.04.2016 sur DTAE/5365/2015 ( PAE ) , REJETE

Recours TF déposé le 25.05.2016, rendu le 06.10.2016, CONFIRME, 5A_391/2016
Descripteurs : CURATELLE
Normes : CC.423
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14762/1995-CS DAS/94/2016

DÉCISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 12 AVRIL 2016

 

Recours (C/14762/1995-CS) formé en date du 22 janvier 2016 par Madame A______, domiciliée ______, Genève, comparant en personne.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 14 avril 2016 à :

- Madame A______.

- Monsieur B______
c/o Me Ghislaine de MARSANO-ERNOULT, avocate
Rue du Tunnel 15, 1227 Carouge.

- Madame ______
Madame ______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Case postale 5011, 1211 Genève 11.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.           a) B______, né le ______ 1967, célibataire, souffre d'une schizophrénie paranoïde. Il est au bénéfice d'une rente invalidité et de prestations complémentaires; il n'a pas de fortune.

Par ordonnance du 10 mai 2006, le Tribunal tutélaire (désormais le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, ci-après : le Tribunal de protection) a prononcé l'interdiction de B______ et lui a désigné une tutrice, en la personne de la Tutrice ______ auprès du Service du Tuteur général.

B______ et sa sœur, A______, chez laquelle il vivait et vit toujours, se sont opposés à la désignation de la Tutrice ______ aux fonctions de tutrice de B______ et ont conclu à la désignation de A______.

Par arrêt du 15 décembre 2006, la Cour de justice a annulé l'ordonnance du 10 mai 2006, institué une curatelle volontaire au profit de B______ et retourné la cause au Tribunal tutélaire pour la désignation du curateur.

Par ordonnance du 16 avril 2007, le Tribunal tutélaire a désigné A______ aux fonctions de curatrice de son frère.

b) Par ordonnance du 17 décembre 2014, le Tribunal de protection a transformé en une mesure de curatelle de représentation avec gestion la mesure de protection de l'ancien droit instaurée en faveur de B______ et a confirmé A______ aux fonctions de curatrice, la chargeant de représenter son frère dans ses rapports juridiques avec les tiers, de veiller à la gestion de ses revenus et de sa fortune et de le représenter en matière d'assistance personnelle, notamment dans le domaine médical.

B. a) Le 16 juillet 2015, B______ a été hospitalisé contre son gré à la Clinique ______. Sa curatrice s'est opposée à cette privation de liberté à des fins d'assistance et le Tribunal de protection a ordonné une expertise psychiatrique.

Il ressort du rapport du 6 août 2015 établi par le Centre universitaire romand de médecine légale que B______ a fait l'objet de neuf hospitalisations, engendrées par des comportements hétéro-agressifs pouvant se produire à l'égard d'inconnus rencontrés par hasard ou de sa sœur. Le 24 juillet 2015 un entretien de réseau avait été organisé en présence de A______. Les soignants avaient relevé l'attitude étrange adoptée par cette dernière, dont le ton était agressif et qui avait nié la maladie de son frère, affirmant qu'il avait été gazé ou empoisonné. Selon elle, il ne convenait pas de lui prescrire un traitement antipsychotique, mais plutôt homéopathique. Elle souhaitait par ailleurs qu'il puisse sortir le plus rapidement possible de la Clinique ______ afin de l'emmener se reposer à la campagne, où il ne serait plus empoisonné. A______ avait prétendu avoir elle-même été exposée au gaz, mais être plus résistante que son frère.

S'agissant de B______, l'expert a confirmé le diagnostic de schizophrénie et la nécessité de son hospitalisation, intervenue suite à un épisode agressif à l'égard de tiers, les soins ambulatoires ne permettant pas une protection efficace d'autrui. L'expert a en outre relevé qu'il n'était pas parvenu à obtenir des précisions sur la nature et la fréquence des soins que recevait l'expertisé avant son hospitalisation. Sa sœur et curatrice, A______, ne semblait plus partager la vision thérapeutique des soignants, puisqu'elle rejetait le diagnostic de psychose, pensant que tous deux faisaient l'objet d'un empoisonnement.

b) Le Tribunal de protection a tenu une audience le 11 août 2015, au cours de laquelle A______ a été entendue. Celle-ci a reconnu que son frère devait encore rester hospitalisé, jusqu'à ce qu'il se stabilise et que les doses de médicaments puissent être réduites. Elle a expliqué avoir constaté une péjoration de l'état de santé de son frère durant le mois de juillet 2015, selon elle en raison d'une cabale dont ils étaient victimes et d'émanations de gaz. Elle avait trouvé dans son appartement des traces de ces émanations, qu'elle avait signalées aux pompiers et à la police, sans être entendue. Quelqu'un avait cherché à instrumentaliser son frère, afin qu'il lui nuise, sachant que le gaz au moyen duquel il avait été intoxiqué rend agressif. Depuis le mois d'avril 2014, son frère était suivi par le Dr C______, homéopathe. En raison de la cabale dont son frère et elle-même étaient les victimes, elle avait préféré renoncer à l'aide des intervenants à domicile, mais avait pris des dispositions pour trouver deux remplaçants. Pour le surplus, A______ a expliqué être économiste et styliste indépendante. Elle travaillait à son domicile, mais était à la recherche d'un emploi.

Selon le médecin de la Clinique ______ présent à l'audience, la collaboration avec A______ était bonne.

A l'issue de l'audience, A______ a retiré le recours interjeté contre la décision de placement à des fins d'assistance concernant B______.

c) Le 14 août 2015, le Chef de clinique de l'unité ______ a sollicité la prolongation de l'hospitalisation de B______.

Lors de l'audience du 20 août 2015, le Dr D______ a expliqué que le cas de ce patient était complexe. Il souffrait de troubles psychotiques sévères, la médication avait des effets limités et les gestes hétéro-agressifs étaient quasi quotidiens. L'équipe médicale était également inquiète au sujet des décisions de A______. Celle-ci était certes très présente et investie, mais ses prises de position étaient empreintes d'une certaine paranoïa à l'égard des médecins; elle aurait souhaité qu'un traitement homéopathique soit administré à son frère.

Egalement entendue, A______ a admis que l'hospitalisation de son frère devait se poursuivre. Elle a expliqué vivre avec lui depuis onze ans. Deux accompagnants s'occupaient de lui durant la journée et parfois durant la nuit. Il avait fait de gros progrès, notamment en cuisine. Elle n'était pas opposée aux médicaments, mais ceux-ci étaient inefficaces sur son frère sur le moyen et le long terme, tout en ayant leur utilité en période de crise. L'homéopathie et la phytothérapie lui convenaient mieux et avaient fait régresser ses délires.

Par ordonnance du 20 août 2015, le Tribunal de protection a prolongé pour une durée indéterminée la mesure de placement à des fins d'assistance prononcée en faveur de B______.

d) Par courrier du 15 septembre 2015, A______ a informé le Tribunal de protection du fait que pour la période allant du 31 mars 2013 au 31 mars 2015, elle avait constaté "qu'une personne" avait procédé à des retraits injustifiés sur le compte de son frère, alors qu'elle-même effectuait des déplacements professionnels. Elle sollicitait du Tribunal de protection qu'il l'autorise à déposer une plainte pénale pour ces faits.

e) Le 2 octobre 2015, une audience a eu lieu devant le Tribunal de protection, dans le but d'envisager la sortie de B______ de la Clinique ______ compte tenu de l'amélioration de son état de santé. S'agissant de la collaboration avec A______, le Dr E______ a précisé qu'au fil du temps l'équipe médicale avait constaté qu'elle était ouverte aux propositions, que son comportement était adéquat et qu'elle s'était montrée fiable, de sorte que la collaboration avait été harmonieuse; elle s'était par ailleurs montrée plus ouverte au traitement.

A______ a expliqué avoir été souvent absente à partir d'août 2014 jusqu'au début de l'année 2015. Or, l'un des accompagnants de son frère était en possession de la carte _____ donnant accès au compte de ce dernier, sur lequel des prélèvements indus avaient été opérés pour un montant total de 6'700 fr. Elle envisageait de ne plus voyager à titre professionnel et vérifiait désormais les comptes de son frère mensuellement. Elle s'appliquait à être plus précise et rigoureuse. Elle ne remettait plus de carte bancaire aux accompagnants de son frère et leur donnait les sommes nécessaires au fur et à mesure. Elle s'en voulait d'avoir été naïve.

f) Par ordonnance du Tribunal de protection du 13 octobre 2015, la levée du placement à des fins d'assistance en faveur de B______ a été prononcée.

C. a) Le 29 octobre 2015, la division Révision et Contrôle au sein du Tribunal de protection a relevé que B______ percevait mensuellement 2'411 fr. au titre de rente invalidité et pour impotent, 1'536 fr. du Service des prestations complémentaires, 185 fr. du service social de la Ville de Genève et, en moyenne, depuis le mois d'août 2014, 2'700 fr. d'aide de l'AVS pour payer ses accompagnants. Entre avril 2013 et juillet 2014, il y avait eu des retraits pour un total de 15'250 fr. dont la cause était inexpliquée; les retraits inexplicables s'élevaient à 22'000 fr. entre 2014 et mars 2015. Les aides perçues de l'AVS n'avaient pas été déclarées au Service des prestations complémentaires et aucune épargne n'avait été constituée. La situation était un peu plus claire depuis que les accompagnants avaient été déclarés à l'AVS, car auparavant A______ gérait tout elle-même au moyen de retraits bancaires et de sa caisse, dont aucun relevé n'avait été produit et qui était gérée de façon illisible.

b) Par ordonnance DTAE/5365/2015 du 27 novembre 2015, notifiée le
15 décembre 2015 et reçue le 28 décembre par A______, le Tribunal de protection a relevé A______ de ses fonctions de curatrice de son frère B______ s'agissant des tâches de gestion et de représentation dans les domaines administratif et financier et réservé l'approbation de ses rapports et comptes finaux (ch. 1 et 2 du dispositif), désigné deux intervenantes en protection de l'adulte aux fonctions de curatrices (ch. 3), chargé A______ de veiller au bien-être social de B______ et de le représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre et de veiller à son état de santé, mettre en place les soins nécessaires et en cas d'incapacité de discernement, le représenter dans le domaine médical (ch. 4), chargé les deux autres curatrices de veiller à la gestion des revenus et de la fortune de B______, d'administrer ses biens et d'accomplir les actes juridiques en lien avec cette gestion, de le représenter dans ses rapports juridiques avec les tiers en matière de logement, affaires sociales, administratives, juridiques et sauvegarder au mieux ses intérêts (ch. 5), dit que les intervenantes en protection de l'adulte pouvaient se substituer l'une à l'autre (ch. 6), autorisé les curatrices à prendre connaissance de la correspondance de B______ dans les limites de leur mandat respectif (ch. 7) et mis à la charge de B______ un émolument de décision de 200 fr. (ch. 8).

Le Tribunal de protection a considéré que les craintes exprimées par les médecins concernant les prises de position de A______ concernant la pathologie de son frère et les traitements nécessaires pouvaient être écartées. Le traitement mis en œuvre lors du dernier séjour de B______ à la Clinique ______ semblait donner de bons résultats et A______ s'était déclarée prête à veiller à ce qu'il soit poursuivi. Les tâches d'assistance personnelle et de représentation dans le domaine médical étaient par conséquent remplies par A______, dont l'engagement avait permis d'éviter le placement de son frère dans une institution spécialisée. En revanche et en ce qui concernait les aspects gestion et représentation, le Tribunal constatait que les rapports et comptes présentés par A______ ne permettaient aucune lisibilité et étaient largement défaillants. Des débits nombreux et importants n'étaient pas justifiés et ce dans une proportion largement plus importante que celle alléguée par la curatrice comme devant faire l'objet d'une plainte pénale. Ce n'était d'ailleurs qu'au moment de préparer le rapport périodique que la curatrice avait constaté certains retraits qu'elle ne pouvait justifier, ce qui dénotait un manque de suivi, de maîtrise de la situation et de contrôle tout au long de la période concernée. Des allocations particulières avaient été obtenues afin de rémunérer les personnes engagées à domicile pour accompagner B______. Toutefois, ces revenus supplémentaires n'avaient pas été déclarés au Service des prestations complémentaires, lequel, une fois informé, allait réduire ses prestations et réclamer un rétroactif important que la personne protégée risquait de ne pas pouvoir rembourser, faute d'épargne. La situation était par conséquent grave et devait être reprise en mains par des professionnels, les promesses faites par A______ d'opérer à l'avenir une gestion plus rigoureuse ne pouvant suffire. Dès lors, il se justifiait de retirer à cette dernière les tâches de gestion administrative et financière et de les confier à deux représentantes désignées au sein du Service de protection de l'adulte.

D. a) Le 22 janvier 2016, A______ a recouru contre cette décision. Elle a contesté s'être montrée défaillante dans la gestion des revenus de son frère et a affirmé avoir documenté tous les mouvements bancaires et postaux. S'agissant des retraits injustifiés portant sur la période allant d'avril 2013 à juillet 2014, ils s'élevaient à 7'647 fr. 70 et non à 15'250 fr. En ce qui concernait la période d'août 2014 à mars 2015, ils étaient de 13'254 fr. 81 et non de 22'000 fr. En tenant compte des prélèvements abusifs opérés par les accompagnants de B______ en 6'700 fr., les dépenses injustifiées ne s'élevaient plus qu'à 6'684 fr. Pour le surplus, la recourante a exposé continuer d'habiter avec son frère, lequel est accompagné dans ses activités de loisir par des assistants de vie durant la semaine et parfois également le week-end, lesquels n'avaient pas systématiquement fourni les justificatifs de leurs dépenses, qui portaient sur des frais de nourriture et de boissons, d'activités en extérieur et de salon-lavoir. La recourante a affirmé avoir informé le Service des prestations complémentaires par courrier du 16 juillet 2014 du fait qu'une aide de l'ordre de 2'700 fr. par mois lui avait été accordée par l'AVS. A l'appui de cette allégation, la recourante a produit une copie d'un pli simple daté du 16 juillet 2014 adressé au "DES SPC Mutations, 54 rte de Chêne", cette communication n'ayant eu aucun impact sur les prestations versées. La recourante a toutefois admis qu'un montant devrait vraisemblablement être remboursé et a affirmé qu'un arrangement avait déjà été proposé. Elle avait cessé de voyager à des fins professionnelles depuis le mois de mars 2015, ce qui lui permettait d'assurer un meilleur suivi de la gestion des revenus de son frère. La nomination de deux curatrices externes ne convenait pas à la situation, puisque l'accompagnement au quotidien de son frère requérait le versement d'avances pour des activités qui ne pouvaient être planifiées à l'avance.

b) B______, représenté par un conseil, a appuyé le recours formé par sa sœur, déclarant craindre que la nomination de mandataires institutionnels n'altère sa prise en charge, rendant impossible les activités spontanées organisées au jour le jour en fonction de son état de santé.

c) Le Tribunal de protection a persisté dans les termes de sa décision.

d) La cause a été mise en délibération le 24 mars 2016.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet, dans les trente jours, d'un recours écrit et motivé, devant le juge compétent, à savoir la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 et al. 3 et 450b CC; art. 126 al. 3 LOJ; art. 53 al. 1 et 2 LaCC).

Ont qualité pour recourir les personnes parties à la procédure et les proches (art. 450 al. 2 ch. 1 CC). Le recours doit être dûment motivé et interjeté par écrit auprès du juge (art. 450 al. 3 CC).

En l'espèce, le recours a été formé dans le délai utile et suivant la forme prescrite par la loi, devant l'autorité compétente, par la sœur et curatrice de la personne protégée.

Il est, partant, recevable.

1.2 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC).

1.3 Les maximes inquisitoire et d'office sont applicables, en première et en seconde instance (art. 446 CC).

2. La recourante reproche au Tribunal de protection de l'avoir relevée à tort de ses fonctions de curatrice de son frère s'agissant des tâches de gestion et de représentation dans les domaines administratif et financier.

2.1.1 A teneur de l'art. 400 al. 1 CC, l'autorité de protection nomme curateur une personne physique qui possède les connaissances et les aptitudes nécessaires à l'accomplissement des tâches qui lui sont confiées, qui dispose du temps nécessaire et qui les exécute en personne. Plusieurs personnes peuvent être désignées, si les circonstances le justifient. Celles-ci peuvent accomplir cette tâche à titre privé, être membre d'un service social privé ou public, ou exercer la fonction de curateur à titre professionnel. La loi, à dessein, n'établit pas de hiérarchie entre les personnes pouvant être désignées, le critère déterminant étant celui de leur aptitude à accomplir les tâches confiées. La complexité de certaines tâches limite d'ailleurs le recours à des non-professionnels, même si ceux-ci sont bien conseillés et accompagnés dans l'exercice de leur fonction (Message du Conseil fédéral, FF 2006, p. 6682/6683).

2.1.2 Lorsque la personne concernée propose une personne comme curateur, l'autorité de protection de l'adulte accède à son souhait pour autant que la personne proposée remplisse les conditions requises et accepte la curatelle (art. 401 al. 1 CC). L'autorité de protection de l'adulte prend autant que possible en considération les souhaits des membres de la famille ou d'autres proches (art. 401 al. 2 CC). Elle tient compte autant que possible des objections que la personne concernée soulève à la nomination d'une personne déterminée (art. 401 al. 3 CC).

2.1.3 A teneur de l'art. 423 CC, l'autorité de protection de l'adulte libère le curateur de ses fonctions s'il n'est plus apte à remplir les tâches qui lui sont confiées (al. 1 ch. 1) ou s'il existe un autre motif de libération (al. 1 ch. 2).

L'art. 423 CC permet la libération du mandataire indépendamment de sa volonté. Comme pour l'art. 445 al. 2 aCC, c'est la mise en danger des intérêts de la personne à protéger qui est déterminante et non le fait qu'il y ait eu un dommage ou non (Rosch, in Commentaire du droit de la famille, Protection de l'adulte, 2012, ad art. 423 CC).

L'autorité de protection dispose d'un pouvoir d'appréciation étendu aussi bien lorsqu'elle examine l'aptitude du mandataire (art. 400 CC) que lorsqu'elle le libère pour inaptitude. La notion d'aptitude est relative et doit être appréciée par rapport aux tâches du mandataire. Le mandataire peut aussi être libéré de ses fonctions sur la base d'un autre juste motif. Dans ce cas également, l'accent sera mis sur les intérêts de la personne à protéger. Il sera aussi tenu compte de motifs axés plus nettement sur la confiance envers l'administration, comme le devoir de fidélité dans les rapports de service de droit public (Rosch, op. cit., ibidem).

L'application de l'art. 423 CC est gouvernée par le principe de proportionnalité. Les autorités de protection doivent exiger une sérieuse mise en danger des intérêts ou du bien-être de la personne protégée pour prononcer la libération du curateur. Dans le cadre de l'application de l'art. 423 al. 1 ch. 2 CC, on pense notamment à la grave négligence dans l'exercice du mandat, à l'abus dans l'exercice de sa fonction, à l'indignité du mandataire et de son comportement, à son défaut de paiement en particulier. Tous ces motifs doivent avoir pour résultante la destruction insurmontable des rapports de confiance ("Unüberwindbare Zerrüttung des Vertrauensverhältnisses" Fassbind, Erwachsenenschutz, 2012, p. 273).

2.2 Il ressort du rapport de la division Révision et Contrôle du Tribunal de protection que les retraits non justifiés sur les comptes de B______ se sont élevés à plus de 37'000 fr. entre les mois d'avril 2013 et de mars 2015, ce qui correspond, sur vingt-quatre mois, à environ 1'550 fr. par mois. La recourante, bien qu'elle ait contesté les chiffres retenus par la division Révision et Contrôle du Tribunal de protection, a toutefois admis être dans l'incapacité de justifier certains prélèvements, qu'elle a évalués, pour la même période, à environ 20'900 fr., soit à 870 fr. par mois, somme qui ne saurait être considérée comme négligeable. Il est par conséquent établi que la recourante n'a pas fait preuve, dans la gestion des ressources de son frère, de toute la rigueur attendue d'un curateur. Ceci est d'autant plus vrai qu'elle a confié à l'un ou l'autre des accompagnants de son frère une carte bancaire ou postale et n'a vérifié que tardivement l'utilisation qui en était faite. La recourante n'a par ailleurs pas établi avoir informé le Service des prestations complémentaires du fait que son frère recevait, depuis l'été 2014, une aide substantielle servant à rémunérer ses accompagnants, la pièce versée à la procédure étant une simple copie d'un courrier prétendument envoyé en pli simple, dont rien ne permet de confirmer qu'il a effectivement été posté. La recourante a par ailleurs admis qu'un montant devrait probablement être remboursé au Service des prestations complémentaires et a affirmé avoir d'ores et déjà pris contact avec celui-ci, sans toutefois l'établir. Les manquements de la recourante ont par ailleurs porté sur une période de deux ans à tout le moins et ne sauraient être justifiés par les déplacements professionnels, au demeurant non établis. La recourante a certes expliqué qu'elle entendait désormais porter une attention plus soutenue et régulière à la comptabilité de son frère et que les accompagnants de ce dernier n'étaient plus en possession d'aucune carte bancaire ou postale. Cette prise de conscience tardive ne paraît toutefois pas suffisante, le contenu du dossier ne permettant pas de retenir que la recourante a les compétences suffisantes pour exercer l'activité de curatrice dans le domaine financier.

Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le Tribunal de protection a relevé A______ de ses fonctions de curatrice de son frère s'agissant des tâches de gestion et de représentation dans les domaines administratif et financier, tout en relevant le dévouement dont elle faisait preuve. Le Tribunal de protection a ainsi confirmé, à raison, la recourante dans ses fonctions de curatrice de son frère en ce qui concerne son bien-être social et sa santé, en dépit des propos étranges qu'elle a pu tenir par moments.

L'intervention de curatrices externes dont la tâche sera de veiller à la gestion des revenus de B______ et de le représenter dans ses rapports juridiques avec les tiers en matière notamment d'affaires sociales et administratives n'aura aucun impact négatif sur sa vie au quotidien. Des solutions, à mettre en œuvre avec les curatrices, pourront en effet être trouvées pour que les accompagnants de B______ puissent recevoir ou prélever sur un compte ouvert à cet effet les petites sommes nécessaires aux activités pratiquées avec lui.

La décision querellée, parfaitement fondée, sera confirmée.

3. Les frais de la procédure, arrêtés à 300 fr., seront mis à la charge de la recourante, qui succombe. Ils sont entièrement couverts par l'avance de frais qu'elle a effectuée, laquelle est acquise à l'Etat.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 22 janvier 2016 par A______ contre l'ordonnance DTAE/5365/2015 rendue le 27 novembre 2015 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/14762/1995-1.

Au fond :

Le rejette et confirme l'ordonnance querellée.

Sur les frais :

Arrête les frais de la procédure à 300 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

Le président :

Cédric-Laurent MICHEL

 

La greffière :

Carmen FRAGA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.