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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/3495/2018

CAPH/132/2021 du 18.07.2021 sur JTPH/159/2020 ( OO ) , PARTIELMNT CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3495/2018-5 CAPH/132/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 18 JUILLET 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 23 avril 2020 (JTPH/159/2020), comparant par
Me Corinne ROCHAT POCHELON, avocate, Zellweger & Associés, rue de
la Fontaine 9, case postale 3781, 1211 Genève 3, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Manuel BOLIVAR, avocat, Bolivar de Morawitz , Batou Bobillier, rue des Pâquis 35, 1201 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur C______, domicilié ______, autre intimé, comparant par
Me Alexis ROCHAT, avocat, rue du Rhône 118, 1204 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/159/2020 du 23 avril 2020, le Tribunal des prud'hommes a notamment condamné A______ et C______ à verser à B______ la somme brute de 318'629 fr., sous déduction de la somme nette de 161'140 fr., avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 16 avril 2014 (chiffre 2 du dispositif), la somme brute de 106'705 fr. 50 avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er février 2018 (ch. 3), ainsi que la somme nette de 12'087 fr. avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er février 2018 (ch. 5), invité la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 4), condamné A______ et C______ à remettre à B______ un certificat de travail (ch. 6), ses fiches de salaires de juin 2010 à janvier 2018 (ch. 7), ainsi que ses certificats de salaire pour les années 2010 à 2018 (ch. 8), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 9).

Statuant sur les frais, le Tribunal a arrêté ceux de la procédure à 4'860 fr. (ch. 10), répartis à hauteur de 1'620 fr. à charge de B______ (mais provisoirement supportés par l'Etat de Genève) et de 3'240 fr. à charge de A______ et C______ (ch. 11-12), condamné ces derniers à verser la somme de 3'240 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de l'Etat de Genève (ch. 13), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 14) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 15).

B.            a. Par acte déposé au greffe universel de la Cour le 26 mai 2020, A______ forme appel de ce jugement, qu'elle a reçu le 27 avril 2020 et dont elle sollicite l'annulation en tant qu'il la concerne. Cela fait, elle conclut à ce que la Cour constate l'absence de contrat de travail entre elle-même et B______ et à ce que cette dernière soit déboutée de toutes autres ou contraires conclusions, avec suite de frais.

b. B______ a conclu à l'irrecevabilité de certains allégués de fait et griefs formulés par A______ et, au fond, au rejet de l'appel interjeté par l'intéressée et à la confirmation du jugement entrepris, sous suite de frais.

c. Pour sa part, C______ n'a pas fait usage de son droit de réponse.

d. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

e. B______ n'ayant pas fait usage de son droit de duplique, les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger, par avis du greffe de la Cour du 17 septembre 2020.

C. Les éléments suivants résultent du dossier:

a. En juin 2010, B______, née le ______ 1981, de nationalité mexicaine, dentiste de profession, a été engagée oralement par C______, pour une durée indéterminée, en qualité d'employée domestique. Son salaire (d'un montant mensuel initial de 2'000 fr. nets, porté ensuite à 2'500 fr. nets dès le mois de février 2015) lui a toujours été remis de mains à mains par C______. B______ a été congédiée le 22 novembre 2017, avec effet au 31 janvier 2018, mais a été libérée de son obligation de travailler dès le lendemain de son licenciement.

Au moment de l'engagement de B______, C______ vivait avec A______ (et le fils de celle-ci issu d'une précédente relation) dans un appartement sis à D______ [GE] (d'une surface de 250 m2). Le couple s'est ensuite séparé de manière temporaire depuis la fin de l'année 2010, A______ et son fils ayant alors déménagé dans un autre logement. A une date indéterminée, C______ et A______ ont repris leur relation, tout en conservant chacun son propre domicile. A fin octobre 2014, C______ et A______ ont décidé de s'établir ensemble dans une nouvelle habitation (d'une surface habitable estimée à 600 m2), située à E______ [GE], et ont eu un premier enfant commun, né en décembre 2014.

b. La question de savoir si A______ était également l'employeur de B______ est désormais litigieuse.

b.a Auditionnée par la police judiciaire le 13 mars 2019, B______ a notamment déclaré avoir été engagée par la famille A______/C______ en juin 2010 et avoir travaillé pour celle-ci jusqu'en novembre 2017. Lors d'un entretien qu'elle avait eu avec eux en juin 2010, ceux-ci lui avaient notamment donné la liste des tâches qu'elle aurait à effectuer.

b.b En première instance, C______ et A______ ont reconnu que B______ avait effectivement été à leur service durant sept ans (cf. ad 56 mémoire de duplique du 13 juin 2019).

b.c Il est d'ailleurs admis qu'entre juin et décembre 2010, B______ a travaillé tant pour C______ que pour A______.

Depuis le déménagement de A______ et son enfant en 2011 et jusqu'à octobre 2014, B______ a continué à travailler au service de C______ dans le logement de D______.

B______ a cependant affirmé que durant cette période, elle avait également effectué trois à quatre heures de ménage par semaine dans le nouvel appartement de A______. C______ et A______ ont en premier lieu contesté cet allégué, soutenant que l'intéressée ne travaillait alors que pour le premier nommé, mais ont admis par la suite que "les heures passées chez Mme A______ [ ] étaient payées et retranchées du temps qu'elle passait chez M. C______" (cf. ad 64 mémoire de duplique du 13 juin 2019).

Interrogé par les premiers juges, C______ a par ailleurs indiqué que lorsqu'il partait en vacances avec A______ et que la femme de ménage de celle-ci était absente, il demandait à B______ d'aller faire le ménage à son appartement pendant environ 4 heures, ceci plusieurs fois par année, mais une seule fois par période de vacances.

Egalement interrogée par le Tribunal, B______ a affirmé que quand bien même A______ vivait ailleurs, il arrivait à cette dernière, durant les absences de C______, de venir à l'appartement de celui-ci pour vérifier qu'elle s'y trouvait bien avec les chiens. A l'occasion de son audition par la police judiciaire, B______ a en outre exposé que durant la période où le couple A______/C______ ne faisait pas ménage commun, A______ était chargée de venir contrôler son travail lors des absences de C______.

Devant le Tribunal, B______ a de plus ajouté qu'elle-même n'avait pas la possibilité de prendre des vacances en même temps que C______, qui exigeait qu'elle reste à l'appartement. Cette dernière affirmation a été confirmée par le témoin F______, sœur de B______, selon laquelle cette dernière ne pouvait pas partir en vacances en même temps que A______ et C______, car elle avait l'obligation de rester à leur domicile pour s'occuper des animaux et effectuer un nettoyage plus approfondi de la maison.

b.d B______ est partie au Mexique pour voir sa famille de septembre 2014 à janvier 2015, puis de janvier à avril 2016, étant précisé qu'elle était remplacée par sa sœur, F______, durant ces périodes d'absence.

Cette dernière a d'ailleurs déclaré devant le Tribunal qu'elle avait travaillé pour A______ et C______ de juillet 2013 à janvier 2017.

Dans le cadre de leurs observations à l'Office cantonal de l'inspection et des relations du travail (OCIRT; cf. ci-dessous let. e), A______ et C______ ont notamment indiqué que B______ travaillait exclusivement pour C______ jusqu'au 31 octobre 2014 (date d'emménagement avec A______), mais ont également mentionné qu'ils avaient (tous deux) accepté que l'employée soit absente durant quatre mois à deux reprises, notamment de mi-septembre 2014 à mi-janvier 2015. Ils ont par ailleurs exposé qu'ils avaient engagé F______, la sœur de B______, au mois d'août 2013, en qualité de femme de ménage de remplacement. Ils ont précisé que F______ avait travaillé pour le couple A______/C______ du 1er octobre 2013 au 31 décembre 2017, et qu'elle avait notamment effectué une période de remplacement de septembre 2014 à janvier 2015.

b.e Le témoin G______, mère de A______, a déclaré que c'était sa fille et C______ qui définissaient la liste des tâches assignées à B______.

c. Durant une grande partie des rapports contractuels, B______ a été logée par C______ (et A______ à partir du moment où ils ont refait ménage commun).

d.a B______ a fait valoir qu'elle avait effectué de nombreuses tâches domestiques tout en étant constamment à la disposition de ses employeurs selon les horaires suivants:

- de juin 2010 à juin 2011: 09h00 à 20h00 du lundi au vendredi ainsi que 2 heures le dimanche, ce qui représentait 55 heures par semaine;

- de juillet 2011 à août 2014: 09h00 à 20h00 du lundi au vendredi (étant précisé que le jeudi, elle travaillait dans l'appartement de A______, de 10h00 à 13h00), le samedi de 09h00 à 15h00 et le dimanche durant 2 heures, soit un total de 53 heures par semaine;

- de février à décembre 2015: 09h00 à 22h00 du lundi au vendredi, puis de 09h00 à 15h00 le samedi, ce qui faisait 61 heures par semaine;

- de mai 2016 à août 2017: 09h00 à 22h00 du lundi au samedi, soit 78 heures par semaine;

- de septembre à novembre 2017: 09h00 à 21h00 du lundi au samedi, ce qui représentait 72 heures par semaine.

Elle a listé les tâches qu'elle devait effectuer chaque jour, soit entre autres, le nettoyage de la cuisine, de la salle à manger, du salon, des chambres, des salles de bains, du bureau, de la terrasse, faire la lessive, le repassage, nourrir et promener les chiens, etc. Elle remplaçait par ailleurs la nourrice lorsque celle-ci était absente, aidait le cuisinier s'il en avait besoin, servait le repas et était de service lorsque A______ et C______ organisaient des réceptions. Elle a précisé que son travail était plus important à partir du moment où ses employeurs ont résidé à E______, en raison de la taille de la villa, qui s'élevait sur plusieurs étages.

Pour leur part, C______ et A______ ont estimé que B______ travaillait environ 42h30 par semaine jusqu'à fin novembre 2014 (du lundi au vendredi), puis 46h45 par la suite, car elle effectuait une demi-journée de travail le samedi. D'après eux, B______ commençait à 9h00 et terminait sa journée de travail entre 19h00 et 19h30, avec deux heures de pause au cours de la journée (30 minutes le matin vers 10h00, 1 heure à midi et 30 minutes vers 16h00).

Dans leurs écritures, ils ont par ailleurs admis que B______ effectuait des heures supplémentaires à raison de 7 heures par mois depuis janvier 2015.

d.b Plusieurs témoins ont été entendus par le Tribunal, en particulier au sujet des horaires de travail de B______.

Les témoignages concordent sur le fait que l'intéressée commençait sa journée de travail à 9h00, du lundi au samedi, que ce soit dans l'appartement de D______ ou la villa de E______ (cf. notamment déclarations des témoins F______, sœur de B______, H______, employée comme nounou de 2015 à 2017, I______, remplaçante de la nounou et aide au ménage entre février et mai 2017, et J______, cuisinier, étant précisé que les deux premières nommées étaient également en litige avec C______ et A______ au moment de leur audition).

Selon le témoin F______, sa sœur terminait sa journée de travail vers 21h00 durant la semaine, dans l'appartement de D______. Elle l'avait constaté, car elle résidait également sur place depuis juillet 2013.

Dans la villa à E______, la journée de travail de B______ terminait à 22h00 ou 23h00 du lundi au vendredi (cf. témoins H______ et F______).

Selon les témoins H______ et F______, B______ travaillait jusque vers 15h00 ou 16h00 le samedi. A partir d'une période indéterminée, elle a dû travailler jusque vers 22h00 ou 23h00 également ce jour-là. Pour sa part, le témoin I______ (qui travaillait trois jours par semaine) a affirmé que lorsqu'elle partait les lundis et samedis à 18h00, elle savait que B______ continuait à travailler, même si elle ne le voyait pas directement.

Certains témoins ont affirmé que B______ prenait une seule pause par jour, aux environs de 13h00 à 14h00 (selon le témoin I______), de 13h30 à 14h00 (selon le témoin F______), vers 14h00 ou 14h30, ou alors vers 16h00 (selon le témoin J______).

Le témoin J______, employé en qualité de cuisinier par le couple A______/C______, a affirmé qu'environ 10 fois par mois, B______ l'aidait à débarrasser la table et nettoyer la cuisine, lorsqu'il y avait des invités ou qu'il était en retard. Le lave-vaisselle était démarré chaque soir. Le lendemain matin, lorsqu'il devait le remplir avec la vaisselle du déjeuner vers 10h00-10h30, il était déjà vide. Il supposait qu'il avait été vidé par B______ (ce qui a été confirmé par les témoins H______ et F______). Chaque fois que C______ et A______ mangeaient à la maison, B______ devait nettoyer le sol après le repas. Il savait qu'elle devait encore sortir les chiens avant d'aller se coucher.

Le témoin I______ a affirmé que le dimanche, qui était le jour de congé de B______, elle voyait celle-ci revenir de sa promenade avec les chiens lorsqu'elle-même arrivait sur son lieu de travail. Elle était ensuite libre, puis revenait vers 17h30-18h00. B______ devait sortir les chiens le dimanche soir et sortir les poubelles, et terminait en outre le nettoyage de la cuisine qu'elle avait commencé, car elle n'arrivait jamais à terminer avant de partir. Cela a été confirmé par le témoin F______, selon laquelle sa sœur devait s'occuper des chiens et effectuer quelques rangements le dimanche, et sortir les poubelles. Elle pouvait partir de la maison de 10h00 environ jusqu'à 18h00.

La mère de A______ a déclaré qu'il lui arrivait de se rendre chez sa fille une ou deux fois par semaine, à différentes heures de la journée. Elle voyait B______ faire le ménage et elle trouvait la maison "très très propre". Elle considérait que C______ était exigeant, sans être maniaque. Elle n'avait jamais vu B______ travailler après 20h00. Lorsqu'elle mangeait au domicile du couple, cette employée ne mettait pas la table et ne la débarrassait pas (ce qui a été contredit par le témoin F______), c'était le cuisinier qui s'en chargeait, ou elle-même. Elle n'avait jamais vu B______ nettoyer la cuisine, hormis le plan de travail. Elle ignorait si celle-ci travaillait le samedi.

d.c B______ a par ailleurs établi une liste décrivant en détail les nombreuses tâches qu'elle devait accomplir durant les absences de ses employeurs, soit notamment le lavage de tous les murs, des portes, de l'intérieur de chaque armoire et placard (après avoir sorti tout ce qui se trouvait à l'intérieur), des chaises, des lampes, du barbecue, nourrir les chiens et les promener trois fois par jour (pièce n° 11 dem.). Interrogée par le Tribunal, elle a précisé qu'elle parvenait à effectuer cela en une semaine, en travaillant à raison de 8 à 9 heures par jour, du lundi au samedi, lorsqu'il s'agissait de l'appartement de D______. Dans la villa de E______, qui était beaucoup plus grande, il lui fallait entre trois et quatre semaines (soit toute la période de vacances de C______ et A______), à raison de 8 heures par jour.

C______ et A______ ont, dans un premier temps, soutenu que B______ se trouvait de facto en vacances durant leur absence et qu'elle n'avait pas pour ordre de nettoyer "encore plus à fond qu'elle ne le faisait au quotidien". Leur seule instruction était que la maison devait être propre à leur retour.

Devant le Tribunal, C______ a cependant confirmé que ce qui figurait dans le document produit sous pièce 11 ci-dessus correspondait bien aux tâches qui étaient attendues de B______, tout en précisant que lorsqu'il s'absentait toutes les deux semaines, il n'exigeait pas qu'elle re-nettoie certaines choses, telles que l'intérieur des tiroirs. Il avait toujours été satisfait de la qualité du travail de cette employée.

e. En septembre 2017, H______, une autre employée du couple A______/C______, a dénoncé ceux-ci auprès de l'OCIRT.

L'OCIRT a alors initié un contrôle des conditions salariales de l'ensemble de leurs employés domestiques, afin de vérifier le respect des salaires minimaux obligatoires prévus par le contrat-type de travail applicable.

Par décision du 13 mai 2019, l'OCIRT a prononcé une amende de 18'000 fr. à l'encontre de A______ et C______ pour non-respect des salaires minimaux impératifs, en leur qualité d'employeurs de B______, entre autres.

f. Dans l'intervalle, par demande ordinaire déposée à l'office postal le 9 août 2018, B______ a assigné A______ et C______ en paiement, notamment, de la somme totale de 450'272 fr. 60, soit 350'954 fr. bruts à titre de salaire de base non versé pour les mois d'août, novembre, décembre 2017 et janvier 2018, sous déduction de la somme nette de  169'040 fr., avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er mars 2014 (date moyenne), 188'824 fr. 591 bruts à titre d'heures supplémentaires avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er mars 2014 (date moyenne), 53'260 fr. bruts à titre de salaire non perçu durant les vacances, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er mars 2014 (date moyenne), 24'174 fr. nets à titre d'indemnité de congé avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 novembre 2017.

g. Dans leur réponse, A______ et C______ ont notamment conclu à être condamnés à payer 58'564 fr. à B______, puisqu'ils reconnaissaient que le salaire versé à leur ancienne employée n'était pas conforme au contrat-type de travail applicable.

h. Les parties ont produit de nombreuses pièces, notamment les procès-verbaux d'audition de divers anciens employés du couple A______/C______ devant l'OCIRT et la police judiciaire.

Le Tribunal a par ailleurs entendu les parties à plusieurs reprises et procédé à l'audition de divers témoins, leurs déclarations ayant été retranscrites ci-dessus dans la mesure utile.

i. Le Tribunal a gardé la cause à juger le 19 février 2020.

EN DROIT

1.             1.1 Interjeté dans le délai utile et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 142, 143 et 311 CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), contre une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC) statuant sur un litige prud'homal dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La Chambre de céans revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). La valeur litigieuse étant supérieure à 30'000 fr., la présente procédure est soumise aux maximes des débats et de disposition (art.  55  CPC cum 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC et 58 CPC). La procédure ordinaire est applicable (art. 219 et 243 CPC).

1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit et/ou constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit.

2.             L'intimée soutient que l'appelante se serait prévalue de faits nouveaux irrecevables en seconde instance.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

2.2 En l'occurrence, l'intimée prétend que l'appelante aurait invoqué pour la première fois en appel que C______ était l'unique bénéficiaire de ses prestations durant la période de janvier 2011 à fin 2014 et qu'elle n'était pas son employeur durant la période considérée.

Cette affirmation est erronée, puisque dans le mémoire de réponse de l'appelante et de C______ du 5 novembre 2018, les intéressés ont affirmé que l'intimée avait "travaillé pour le seul M. C______ pendant 4 ans, soit de début 2011 à fin 2014" (cf. ad. 7, p. 4), de sorte qu'il ne s'agit pas d'un allégué nouveau. Au demeurant, savoir si deux personnes ont été liées par un rapport de travail est une question de droit et non de fait.

3.             L'appelante reproche au Tribunal d'avoir admis sa légitimation passive, faisant valoir qu'elle n'avait aucunement été l'employeur de l'intimée aux côtés de C______ durant les années 2010 à 2018.

3.1.1 La qualité pour agir (légitimation active) et la qualité pour défendre (légitimation passive) sont des questions de droit matériel, de sorte qu'elles ressortissent au droit privé fédéral s'agissant des actions soumises à ce droit (ATF 138 III 537; 130 III 417 consid. 3.1; 126 III 59 consid. 1a; 125 III 82 consid. 1a). Elles se déterminent selon le droit au fond et leur défaut conduit au rejet de l'action qui intervient indépendamment de la réalisation des éléments objectifs de la prétention litigieuse (ATF 126 III 59 consid. 1; 125 III 82 consid. 1a). Cette question doit en particulier être examinée d'office et librement (ATF 126 III 59 consid. 1a et les arrêts cités).

3.1.2 Par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d'après le temps ou le travail fourni (art. 319 al. 1 CO). Les éléments caractéristiques de ce contrat sont une prestation de travail, un rapport de subordination, un élément de durée et une rémunération (arrêts du Tribunal fédéral 4A_10/2017 du 19 juillet 2017 consid. 3.1 et 4A_200/2015 du 3  septembre  2015 consid. 4.2.1).

Le rapport de subordination revêt une importance primordiale dans la qualification du contrat de travail. Il s'agit de l'élément caractéristique essentiel du contrat de travail. Il présuppose que le travailleur est soumis à l'autorité de l'employeur pour l'exécution du contrat et cela au triple point de vue personnel, fonctionnel (organisation et contrôle), temporel (horaire de travail) et, dans une certaine mesure, économique (ATF 125 III 78 consid. 4 in SJ 1999 I p. 385; 121 I 259 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_553/2008 du 9 février 2009 consid. 4.1).

3.1.3 Il y a solidarité entre plusieurs débiteurs lorsqu'ils déclarent s'obliger de manière qu'à l'égard du créancier chacun d'eux soit tenu pour le tout (art. 143 al. 1 CO). A défaut d'une semblable déclaration, la solidarité n'existe que dans les cas prévus par la loi (art. 143 al. 2 CO). 

La solidarité peut résulter de rapports de société simple entre les débiteurs (art. 544 al. 3 CO). En l'absence de tels rapports, elle peut aussi résulter des circonstances, interprétées selon le principe de la confiance (ATF 116 II 707 consid. 1b in fine et consid. 3 et les références citées). Selon l'art. 530 al. 1 CO, la société simple est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d'unir leurs efforts ou leurs ressources en vue d'atteindre un but commun. Le but de la société simple peut être de conclure en commun un contrat; les moyens nécessaires pour atteindre le but social peuvent consister dans des prestations pécuniaires ou personnelles, qui ne seront pas nécessairement égales ni toujours prédéterminées. La conclusion d'un contrat de société simple peut résulter tacitement du comportement des parties, même si ces dernières ne sont pas conscientes de conclure un tel contrat (ATF
124 III 363 consid. II/2a; 116 II 707 consid. 2a).

Lorsque deux personnes emploient un salarié à plein temps dont elles déterminent l'occupation, en se répartissant, sur la base d'accords internes, leurs droits et obligations envers lui, il convient d'admettre qu'elles sont liées par un contrat de société simple, dont le but est l'utilisation des services du travailleur (arrêts du Tribunal fédéral 8C_130/2020 du 30 juin 2020 consid. 7.3; 4C_41/1999 du 12 juillet 2000 consid. 5b). Chacune d'elles a le droit d'administrer la société (art. 535 al. 1 CO) et de la représenter envers tout tiers, tel le salarié (art. 543 al. 3 CO), les associés étant solidairement responsables des engagements qu'ils ont assumés envers ledit tiers, singulièrement en agissant conjointement (art. 544 al. 3 CO; arrêt du Tribunal fédéral 4C_41/1999 précité consid. 5b).

3.1.4 Le juge établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées (art. 157 CPC).

L'appréciation des preuves par le juge consiste, en tenant compte du degré de la preuve exigé, à soupeser le résultat des différents moyens de preuves administrés et à décider s'il est intimement convaincu que le fait s'est produit, et partant, s'il peut le retenir comme prouvé. Lorsque la preuve d'un fait est particulièrement difficile à établir, les exigences relatives à sa démonstration sont moins élevées; elles doivent en revanche être plus sévères lorsqu'il s'agit d'établir un fait qui peut être facilement établi, en produisant par exemple un document officiel (arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2015 consid. 5.2).

3.2 En l'occurrence, il convient en premier lieu de relever les comportements contradictoires adoptés par l'appelante, puisqu'elle plaide, pour la première fois en appel, qu'elle n'aurait jamais été liée à l'intimée par un contrat de travail, alors même que cette question n'était pas litigieuse en première instance, ni d'ailleurs devant l'OCIRT, l'intéressée n'ayant jamais contesté qu'elle était l'employeur de l'intimée aux côtés de C______, étant rappelé qu'elle a même reconnu lui devoir (conjointement avec celui-ci) le montant de 58'564 fr., admettant que le salaire versé n'était pas conforme au contrat-type de travail applicable.

Quoi qu'il en soit, l'argumentation nouvellement développée par l'appelante pour remettre en cause sa légitimation passive dans la présente procédure doit être rejetée pour les motifs qui suivent.

Il n'est pas contesté que C______ a engagé oralement l'intimée en qualité d'employée domestique en juin 2010, alors qu'il vivait en concubinage avec l'appelante. Il résulte des déclarations de l'intimée devant la police que l'appelante était également présente lors de cet entretien, et que tant celle-ci que C______ ont fait part à l'intimée des tâches qui étaient attendues d'elle. Il est en outre admis que depuis juin 2010 et jusqu'au départ de l'appelante du domicile familial, l'intimée fournissait ses prestations pour l'ensemble de la famille. Il ressort par ailleurs du dossier, en particulier des enquêtes, que les instructions étaient données à l'employée tant par C______ que par l'appelante (cf. notamment déclarations de la mère de cette dernière, entendue en qualité de témoin), de sorte qu'il existait bien un rapport de subordination entre celle-ci et l'intimée.

Quand bien même A______ n'a plus fait ménage commun avec C______ pendant une période donnée entre 2011 et 2014 – durant laquelle ils ont néanmoins poursuivi ou du moins repris leur relation, puisqu'ils sont partis en vacances ensemble à plusieurs reprises et que la première nommée est tombée enceinte du second courant 2014 –, cela n'a pas eu d'incidence sur les rapports de travail qui ont lié l'intéressée à l'intimée. En effet, cette dernière devait effectuer des tâches domestiques tant au domicile de C______ qu'au nouveau logement de l'appelante. Par ailleurs, il résulte des déclarations de l'intimée devant la police que l'appelante se rendait chez C______ lorsque celui-ci était absent, aux fins de surveiller que les tâches assignées à la travailleuse étaient correctement exécutées. Pour le surplus, il y a lieu de rappeler que dans le cadre de leurs observations à l'OCIRT, l'appelante et C______ ont exposé qu'ils avaient engagé F______, la sœur de l'intimée, au mois d'août 2013, en qualité de femme de ménage de remplacement, ce qui tend à démontrer qu'ils étaient conjointement employeurs de leurs domestiques, quand bien même ils n'ont pas toujours été domiciliés au même endroit.

L'intimée était ainsi à disposition des deux employeurs, qui lui donnaient des instructions et qui, selon leurs besoins ayant varié au fil du temps, se répartissaient les prestations de la travailleuse. La circonstance que le salaire de l'intimée ait toujours été payé par C______ n'est pas de nature à remettre en cause ce qui précède, puisque les employeurs sont libres de répartir la charge salariale de leur employée en fonction d'accords internes.

Formant une société simple aux fins d'employer l'intimée depuis le mois de juin 2010 jusqu'à son licenciement courant 2017, l'appelante et C______ répondent solidairement des dettes de ladite société simple.

Par conséquent, c'est à juste titre que le Tribunal a admis la légitimation passive de l'appelante dans la présente procédure initiée par son ancienne employée.

4.             L'appelante conteste sa condamnation au paiement d'une indemnité pour licenciement abusif.

Dans la mesure où le seul grief développé en rapport avec ce pan du jugement concerne sa légitimation passive, laquelle a été admise à juste titre par le Tribunal (cf. supra consid. 3.2), l'appel sera déclaré irrecevable sur ce point, faute de motivation.

5. Invoquant une violation des règles relatives au fardeau de la preuve, l'appelante reproche au Tribunal de l'avoir condamnée à payer des heures supplémentaires à l'intimée.

5.1.1 A teneur de l'art. 321c CO, si les circonstances exigent des heures de travail plus nombreuses que ne le prévoit le contrat ou l'usage, un contrat-type de travail ou une convention collective, le travailleur est tenu d'exécuter ce travail supplémentaire, dans la mesure où il peut s'en charger et où les règles de la bonne foi permettent de le lui demander (al. 1). L'employeur est tenu de rétribuer les heures de travail supplémentaires qui ne sont pas compensées par un congé en versant un salaire normal majoré d'un quart au moins, sauf clause contraire d'un accord écrit, d'un contrat-type de travail ou d'une convention collective (al. 3).

Les heures supplémentaires au sens de cette disposition correspondent aux heures de travail effectuées au-delà de l'horaire contractuel. Elles se distinguent du travail supplémentaire, à savoir le travail dont la durée excède le maximum légal, soit 45 ou 50 heures selon la catégorie de travailleurs concernée (cf. art. 9 LTr; arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2018 du 12 septembre 2018 consid. 5).

L'art. 5 al. 1 du contrat-type de travail genevois du 30 mars 2004 pour les travailleurs de l'économie domestique à temps complet et à temps partiel (CTT-Edom, RSG J 1 50.03) dispose que la durée de la semaine de travail des travailleurs à temps complet est de 45 heures. Selon l'art. 7 al. 1 CTT-Edom, sont réputées heures supplémentaires les heures accomplies en sus du maximum quotidien ou hebdomadaire.

5.1.2 En application de l'art. 8 CC, il incombe au travailleur de prouver qu'il a effectué des heures supplémentaires et qu'elles ont été annoncées à l'employeur ou que celui-ci avait connaissance ou devait avoir connaissance de leur existence (ATF 129 III 171 consid. 2.4; Wyler, Droit du travail, 3e éd. 2014, p. 102).

Le travailleur doit aussi démontrer que lesdites heures supplémentaires ont été soit ordonnées par l'employeur, soit qu'elles étaient nécessaires à la sauvegarde des intérêts légitimes de ce dernier (arrêts du Tribunal fédéral 4A_40/2008 du 19 août 2008 consid. 3.3.1; 4C_177/2002 du 31 octobre 2002 consid. 2.1; Dunand, in Commentaire du contrat de travail, 2013, n. 47 ad art. 321c CO, p. 97; Wyler, ibid.).

D'après l'art. 10bis CTT-Edom, l'employeur tient un registre des heures de travail et des jours de repos effectifs. Le travailleur peut s'informer en tout temps sur ses heures de travail, jours de repos, jours fériés et vacances qui lui restent à prendre (al. 3). Si l'employeur faillit à son obligation de tenir un registre, l'enregistrement de la durée du travail faite par le collaborateur vaut moyen de preuve en cas de litige (al. 4).

Les heures supplémentaires exécutées par le travailleur sans demande expresse de l'employeur doivent être considérées avoir été accomplies en faveur de l'employeur lorsque ce dernier en avait ou devait en avoir connaissance et que le travailleur a pu déduire de bonne foi du silence de l'employeur que ce dernier en approuvait le principe (arrêt du Tribunal fédéral 4A_495/2007 du 12 janvier 2009 consid. 5.2; Dunand, op. cit., n. 17 ad art. 321c CO; Wyler, op. cit., p. 103). De même, les heures accomplies de la propre initiative du travailler en cas d'urgence et lorsque leur accomplissement est indispensable à la bonne marche de l'entreprise doivent être considérées comme accomplies en faveur de l'employeur (Dunand, ibid.).

S'il n'est pas possible d'établir le nombre exact d'heures supplémentaires effectuées, le juge peut, par application analogique de l'art. 42 al. 2 CO, en estimer la quotité. L'évaluation se fonde sur le pouvoir d'appréciation des preuves et relève donc de la constatation des faits (ATF 128 III 271 consid. 2b/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4A_338/2011 du 14 décembre 2011 consid. 2.2, in PJA 2012 282). Si l'art. 42 al. 2 CO allège le fardeau de la preuve, il ne dispense pas le travailleur de fournir au juge, dans la mesure raisonnablement exigible, tous les éléments constituant des indices du nombre d'heures supplémentaires accomplies (ATF 133 III 462 consid. 4.4.2; 122 III 219 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_482/2017 du 17 juillet 2018 consid. 2.1). 

Lorsque l'employeur n'a mis sur pied aucun système de contrôle des horaires et n'exige pas des travailleurs qu'ils établissent des décomptes, il est plus difficile d'apporter la preuve requise. L'employé qui, dans une telle situation, recourt aux témoignages pour établir son horaire effectif utilise un moyen de preuve adéquat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2018 précité consid. 3).

5.2 En l'occurrence, dès lors que les employeurs n'avaient pas tenu de registre des heures de travail alors qu'ils en avaient l'obligation, le Tribunal s'est fondé sur les heures de travail alléguées par l'intimée (sous déduction de deux heures de pause par jour), lesquelles paraissaient hautement vraisemblable au regard des nombreuses tâches qu'elle devait effectuer chaque jour, y compris durant l'absence de ses employeurs (cf. pièce n° 11 produite par l'intimée et dont le contenu a été admis par C______).

Les premiers juges ont ainsi retenu que l'intimée avait effectué les heures supplémentaires suivantes :

-          durant les mois de juin 2010 à juin 2011 : 45 heures par semaine dont 2 heures le dimanche, soit 0 heure supplémentaire ;

-          durant les mois de juillet 2011 à août 2014 : 53 heures par semaine dont 2 heures le dimanche, soit 8 heures supplémentaires par semaine ;

-          durant les mois de février à décembre 2015 : 61 heures par semaine, soit 16 heures supplémentaires par semaine ;

-          durant les mois de mai à août 2017 : 68 heures par semaine, soit 23 heures supplémentaires par semaine ; et

-          durant les mois de septembre à novembre 2017 : 62 heures par semaine, soit 17 heures supplémentaires par semaine.

L'appelante et C______ ont dès lors été condamnés à rémunérer ces heures supplémentaires à leur ancienne employée, à hauteur de 102'071 fr. 90 (montant auquel le Tribunal a ensuite ajouté 4'633 fr. 60 à titre de rétribution pour les jours fériés travaillés, ce qui revient au montant total de 106'705 fr. 50; cf. chiffre 3 du dispositif du jugement querellé).

Se plaignant d'une violation des règles relatives au fardeau de la preuve, l'appelante fait valoir que les premiers juges ne pouvaient pas se contenter de retenir que les horaires mentionnés par l'intimée étaient hautement vraisemblables sur la seule base de ses allégués.

Cette critique est infondée. En effet, à la lecture du jugement entrepris, l'on comprend que le Tribunal s'est implicitement fondé sur les témoignages recueillis en cours de procédure, ainsi que sur les autres éléments du dossier (en particulier la liste des tâches à effectuer chaque jour) pour établir les horaires de l'employée et estimer la quotité des heures supplémentaires effectuées. Les premiers juges n'ont dès lors pas renversé le fardeau de la preuve, mais ont procédé à une estimation des heures de travail sur la base des divers indices concluants figurant au dossier, tel que l'autorise l'art. 42 al. 2 CO.

L'appelante se borne ensuite à faire valoir - sans chercher à le démontrer de manière motivée - que les témoins entendus n'ont pas rendu vraisemblable l'étendue des heures de travail invoquées par l'intimée. Parmi les nombreuses déclarations des témoins, lesquelles font toutes état de nombreuses heures de travail effectuées chaque jour par l'intimée, l'appelante se contente d'en reproduire une seule, soit celle du cuisinier qui a affirmé que c'était en principe lui qui rangeait la vaisselle le soir et nettoyait la cuisine.

Or, cette seule affirmation ne suffit pas à remettre en cause l'estimation des heures supplémentaires à laquelle a procédé le Tribunal. La circonstance que la sœur de l'intimée et le témoin H______ étaient également en litige avec l'appelante et C______ ne suffit pas pour retenir que leurs déclarations seraient dépourvues de toute force probante, ce d'autant plus qu'elles sont cohérentes avec celles des autres témoins.

L'appelante fait ensuite valoir que les horaires de travail de l'intimée étaient allégés durant les périodes où elle-même partait en vacances avec C______, puisque les tâches quotidiennes étaient alors réduites (moins de ménage, de lessive et de repassage). Pour autant que cette critique soit suffisamment motivée, elle est infondée. En première instance, l'appelante avait reconnu que l'intimée effectuait chaque mois 7 heures supplémentaires, sans aucune réserve au sujet des périodes de vacances. Pour le surplus, l'appelante ne se fonde sur aucun élément concret du dossier pour étayer ses dires – au demeurant contredits par la pièce n° 11 citée ci-dessus, dont le contenu a été approuvé par C______ – et ne fournit aucune donnée permettant de calculer la quotité d'heures supplémentaires qu'il y aurait lieu de retrancher de celles retenues par le Tribunal. L'argumentation toute générale de l'appelante est dès lors impropre à remettre en question l'appréciation des premiers juges.

La quotité d'heures supplémentaires retenue par le Tribunal sera par conséquent confirmée.

6. L'appelante fait valoir que les heures supplémentaires effectuées par l'intimée ont été compensées par les semaines de congé dont elle a bénéficié en plus des vacances auxquelles elle avait droit.

6.1 Les heures supplémentaires sont compensées en nature ou payées en espèces. Avec l'accord du travailleur, elles peuvent être compensées par un congé d'une durée au moins égale, qui doit être accordé au cours d'une période appropriée (art. 321c al. 2 CO; ATF 123 III 84 consid. 5a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_381/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5.2). Cet accord peut être tacite ou conclu à l'avance, inclus dans le contrat individuel de travail ou dans une convention collective de travail (arrêts du Tribunal fédéral 4A_381/2020 précité consid. 5.2; 4C_32/2005 du 2 mai 2005 consid. 2.3).

Il y a lieu de tenir compte en la matière des besoins du travailleur. Le but de protection de cette règle peut être atteint de différentes manières, notamment par la compensation des heures supplémentaires par des congés regroupés, à l'instar des vacances (arrêt 4C_32/2005 précité consid 2.3).

6.2 En l'espèce, le Tribunal a retenu que l'intimée avait droit à 30 semaines et 3.5 jours de vacances pour l'ensemble de la période contractuelle, mais qu'elle avait bénéficié de 36 semaines de congé au total à l'occasion de ses deux séjours au Mexique. Les deux périodes de vacances ont été prises en compte dans leur intégralité dans le calcul du salaire dû pendant les rapports de travail (différence entre le salaire perçu et celui qui était dû selon le CTT-Edom; cf. consid. 3 du jugement entrepris).

L'appelante reproche aux premiers juges de ne pas s'être prononcés sur le sort des 5.5 semaines (recte: 5 semaines et 1 jour et demi) que l'intimée avait prises en trop. Elle fait valoir que les heures supplémentaires de la travailleuse auraient dû être compensées avec ces jours-là.

La critique de l'appelante sur ce point est fondée. En effet, dans la mesure où le Tribunal l'a condamnée, solidairement avec C______, à rémunérer l'intimée pour l'intégralité des périodes durant lesquelles elle était au Mexique, il apparaît justifié de considérer que les jours de vacances dont celle-ci a bénéficié en plus de ce qui est prévu par le CTT-Edom compensent une partie de ses heures supplémentaires.

Comme le Tribunal a retenu que l'intimée avait réalisé 16 heures supplémentaires par semaine entre les mois de février et décembre 2015, cela représente 762.08 heures pour la période considérée (16 heures x 4.33 x 11 mois). La durée de la semaine de travail de l'intimée étant de 45 heures, les jours de vacances pris en trop (qui seront imputés sur le séjour au Mexique de janvier à avril 2016) correspondent à 238.5 heures (45 heures x 5 semaines + 9 heures + 4.5 heures), qu'il y a dès lors lieu de déduire du total d'heures supplémentaires à rétribuer pour la période susmentionnée.

Le montant dû pour les heures supplémentaires effectuées entre février et décembre 2015 se monte dès lors à 13'325 fr. 10 ([762.08-238.5] x 20 fr. 36 de salaire horaire x 1.25 de majoration), soit 6'069 fr. 85 (19'394 fr. 95 – 13'325 fr. 10) de moins que retenu par le Tribunal.

La somme totale due au titre de rémunération des heures supplémentaires et des jours fériés se monte ainsi à 100'635 fr. 65 (106'705 fr. 50 – 6'069 fr. 85).

Le chiffre 3 du dispositif du jugement attaqué sera dès lors modifié en ce sens, mais uniquement en tant qu'il concerne l'appelante. C______ n'ayant pas formé appel, le jugement demeurera inchangé en ce qui le concerne.

7. 7.1 Lorsque l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Les frais judiciaires de première instance, dont le montant de 4'860 fr. n'est pas contesté par les parties, ont été répartis à hauteur de 1'620 fr. à charge de l'intimée et de 3'240 fr. à charge de l'appelante et C______. Compte tenu de l'issue de l'appel, il ne se justifie pas de modifier cette répartition.

7.2 Les frais judiciaires d'appel sont arrêtés à 3'200 fr. (art. 95, 96, 104 al. 1, 105 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 5 et 71 RTFMC) et mis à la charge de l'appelante, qui succombe dans une très large mesure. Ces frais seront compensés avec l'avance du même montant qu'elle a fournie, qui demeure acquise à l'État de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il n'est pas alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 5 :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel formé le 26 mai 2020 par A______ contre le jugement JTPH/159/2020 rendu par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/3495/2018.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif du jugement querellé en tant qu'il concerne A______ et cela fait, statuant à nouveau sur ce point:

Condamne A______ à verser à B______ la somme brute de 100'635 fr. 65 avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er février 2018.

Dit que A______ est solidairement responsable du paiement de cette somme avec C______, à concurrence de 100'635 fr. 65.

Confirme le jugement querellé pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 3'200 fr., les met à la charge de A______ et les compense entièrement avec l'avance de frais fournie, qui demeure acquise à l'État de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE CHAVANNE, présidente; Monsieur Michael RUDERMANN, juge employeur; Madame Shirin HATAM, juge salariée; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 


 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.