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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/3738/2016

CAPH/49/2017 du 28.03.2017 sur JTPH/405/2016 ( OS ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 20.04.2017, rendu le 27.04.2017, IRRECEVABLE, 4A_195/2017
Descripteurs : COMPÉTENCE; SIMULATION; COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE ; CONTRAT DE TRAVAIL ; MANDAT ; RAPPORT DE SUBORDINATION
Normes : CPC.59; CO.18
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3738/2016-4 CAPH/49/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 28 mars 2017

 

Entre

Madame A.______, domiciliée ______, France, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 3 novembre 2016 (JTPH/405/2016), comparant en personne,

d'une part,

et

B.______ SA, ayant son siège ______, intimée, comparant en personne,

d'autre part.


EN FAIT

A.                Par jugement JTPH/405/2016 du 3 novembre 2016, notifié à A.______ le 9 novembre 2016, le Tribunal des prud'hommes a déclaré irrecevable la demande formée le 11 avril 2016 par A.______ contre B.______ SA (chiffre 1 du dispositif) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2).

B.                a. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 28 novembre 2016, A.______ forme appel contre ce jugement. Elle ne prend pas de conclusions formelles, si ce n'est qu'elle indique souhaiter une reconsidération de son dossier.

Elle produit plusieurs pièces nouvelles, soit une copie de son permis G délivré le ______ 2013, un document intitulé "Investissement", non daté, et un extrait Internet du Registre du commerce de Genève concernant la raison individuelle C.______ du 3 juillet 2014.

b. Par réponse expédiée au greffe de la Cour le 19 décembre 2016, B.______ SA conclut au déboutement de l'appelante de "toutes les demandes concernant de prétendues créances salariales, d'indemnités ou dommages et intérêts". Subsidiairement, elle conclut à la comparution personnelle des parties.

d. Par pli du 1er février 2017, la Cour a communiqué aux parties que la cause était gardée à juger.

C.                Les faits suivants ressortent du dossier soumis à la Chambre des prud'hommes:

a. B.______ SA est une société sise à Genève, dont le but est notamment ______. D.______ en est l'administrateur avec signature individuelle.

b. Le 27 août 2013, A.______, domiciliée en France, et B.______ SA ont signé une "Convention pour la conclusion d'un contrat de portage salarial et d'encaissement de revenus par une société de droit suisse" (ci-après, la Convention).

Selon le préambule de la Convention, A.______ désirait développer une activité de services d'aide à domicile. Pour cela, B.______ SA lui offrait un support administratif et était disposée à conclure un contrat de travail de type "portage". Ainsi, A.______ devait financer son salaire en facturant, par le biais de B.______ SA, sa propre clientèle. En retour, B.______ SA lui garantissait que tous les revenus découlant de son activité seraient strictement consacrés à ses charges spécifiques, y compris son salaire.

B.______ SA devait établir un contrat de travail et engager A.______ officiellement comme employée (art. I de la Convention).

Sous les directives de A.______, B.______ SA émettrait des factures concernant les clients de A.______ et les encaisserait en son nom, mais aux seuls risques et profits de A.______ (art. II al. 2 de la Convention).

A teneur de l'art. III al. 1 de la Convention, A.______ déclarait et consentait que le contrat de travail était établi à titre fiduciaire dès l'encaissement des premiers revenus facturés. Ce contrat était établi ainsi à son entière charge et à ses seuls risques et profits. A.______ renonçait donc formellement à tous ses droits d'employée au sens du droit du travail et reprenait à son unique charge économique toutes les obligations contractuelles de B.______ SA en tant qu'employeur.

A.______ s'engageait à verser d'avance les liquidités nécessaires à B.______ SA pour l'accomplissement de ce contrat (art. V al. 1 de la Convention). Pour des raisons de droit fiscal suisse, outre l'avance ou le remboursement intégral de toutes les charges liées à l'accomplissement de ce contrat, notamment les charges salariales et les dépenses de l'employée facturées à la société, cette dernière percevrait une rémunération minimum supplémentaire de 5% sur toutes lesdites dépenses (salaires, charges, sociales, frais et débours d'employés et toutes dépenses liées à l'activité spécifique du mandant). Toutefois, la rémunération minimale annuelle serait de 500 fr. la première année et 1'000 fr. pour les années suivantes (art. V al. 2 de la Convention).

Selon l'art. VII al. 1 de la Convention, en conformité du droit impératif défini à l'art. 404 al. 1 CO, la Convention pouvait être résiliée en tout temps avec effet immédiat, dès que l'une des parties en ferait la demande par écrit en recommandé. Le contrat de travail serait également résilié dans les mêmes délais.

Enfin, la Convention était soumise au droit suisse, en particulier aux dispositions du contrat de mandat définies aux art. 394 et suivants CO (art. VIII al. 1 de la Convention). Exceptionnellement, quel que fût le lieu de domicile des parties, il était prévu que tout litige et toute action résultant de la Convention, par exemple sur sa validité, son exécution, son inexécution ou autre, seraient réglés par les tribunaux ordinaires à Genève (art. VIII al. 2 de la Convention).

b. Le même jour, A.______ et B.______ SA ont signé un document intitulé "Votre contrat de travail". Selon celui-ci, A.______ était engagée par B.______ SA, à compter du 1er octobre 2013, en qualité de "responsable département aide à domicile", moyennant un salaire annuel brut de 24'000 fr. payable en douze mensualités, pour dix-huit heures hebdomadaires de travail, plus une participation de 20% sur le chiffre d'affaires annuel dépassant 100'000 fr.

c. Toujours le 27 août 2013, E.______ SA, société sise à Genève - dont D.______ est l'administrateur-président -, d'une part, et A.______ et B.______ SA, d'autre part, ont conclu un "sous-bail à loyer" portant sur un bureau et des espaces communs, sis au ______ à Genève. La durée du bail était fixée du 1er septembre 2013 au 31 décembre 2018, pour un loyer annuel, charges comprises, de 11'040 fr. Dès le 30 juin 2014, les sous-locataires pouvaient résilier le bail moyennant un délai de trois mois.

d. Le 23 septembre 2013, A.______ et B.______ SA ont rempli et signé un formulaire individuel de demande pour frontalier, destiné à l'Office cantonal de la population, selon lequel A.______ est désignée comme la salariée de B.______ SA.

e. Le 18 novembre 2013, une déclaration AVS auprès de la Caisse interprofessionnelle AVS de la Fédération des entreprises romandes a été remplie par A.______ et B.______ SA, mentionnant l'engagement de la première par la seconde, dès le 1er octobre 2013.

f. Par courrier du 1er mai 2014 adressé à B.______ SA,
A.______ a renoncé à la location du bureau sis ______, en raison de difficultés financières.

g. Par courrier du 4 juin 2014, A.______ a rappelé à B.______ SA les obligations découlant du contrat de portage salarial du
22 [recte 27] août 2013. Elle s'est plainte de problèmes liés à la publicité et de montants facturés par B.______ SA qu'elle considérait indus.

h. Par courrier du 18 août 2014, A.______, sous la plume de son conseil, a indiqué que la convention de portage salarial avait été résiliée pour la fin du mois de mai 2014. Elle a réitéré ses griefs en rapport avec ce contrat, sans faire mention d'un quelconque rapport de travail.

i. Le 27 août 2014, B.______ SA a répondu sans faire mention de rapports de travail noués avec A.______.

j. Par attestation du 11 novembre 2015, l'Office cantonal des assurances sociales
a certifié verser des allocations familiales à A.______ pour ses deux enfants depuis le 1er septembre 2014. Selon cet office, elle n'avait perçu aucun salaire en Suisse pendant la période d'août 2013 à mai 2014. Par conséquent, un droit aux allocations familiales ne pouvait être ouvert pour ladite période.

D.                a. Par requête de conciliation datée du 11 février 2016 déposée devant la juridiction des prud'hommes, A.______ a assigné B.______ SA en délivrance de plusieurs documents, en se fondant sur le contrat de travail du 27 août 2013.

À l'issue de l'audience de conciliation du 7 avril 2016, une autorisation de procéder a été délivrée à A.______. Ce document mentionne des conclusions en paiement de 22'000 fr., correspondant au salaire brut pour la période du 27 août 2013 au 30 juin 2014, ainsi que la délivrance des fiches et attestations de salaire correspondantes.

b. Par demande simplifiée motivée du 11 avril 2016, A.______ a assigné B.______ SA en paiement de la somme totale de 20'000 fr., à titre de salaire pour une période de dix mois de travail.

Elle a exposé avoir été "déclarée "employée" auprès de B.______ SA", mais elle n'avait reçu aucun document correspondant d'une quelconque autorité. Elle se plaignait de n'avoir perçu aucun revenu, en raison d'une double facturation dans l'exécution du contrat de portage, qui n'avait pas été honoré.

c. Par réponse du 31 mai 2016, B.______ SA a conclu au déboutement de A.______.

La défenderesse a allégué que le contrat de travail avait été conclu dans le seul but de pouvoir obtenir un permis de travail. Ainsi, seul un contrat de mandat avait été conclu au sens de l'art. 394 CO. La compétence des autorités prud'homales n'était donc pas donnée.

d. Une audience de débats a été convoquée pour le 30 juin 2016, par citation du Tribunal notifiée le 17 juin 2016.

e. B.______ SA ne s'est pas présentée à cette audience, sans excuse.

A.______ a été auditionnée. Elle a déclaré qu'initialement, elle ne souhaitait pas obtenir une somme d'argent de la défenderesse, mais seulement certains documents. Elle avait travaillé dans les bureaux de la défenderesse pendant neuf mois. Cependant, le contrat de travail qui avait été conclu était un faux. Elle n'était pas l'employée de la défenderesse, mais voulait monter sa propre structure. Elle était désormais inscrite au Registre du commerce en qualité d'indépendante, ce qui correspondait à sa situation.

À l'issue de l'audience, la cause a été gardée à juger.

E. Dans son jugement, le Tribunal a constaté sa compétence à raison du lieu, mais nié être compétent à raison de la matière. En effet, les parties avaient simulé la conclusion d'un contrat de travail, la demanderesse n'ayant jamais travaillé pour la défenderesse. En raison du défaut de la défenderesse à l'audience de débats, le Tribunal avait statué sur la base du dossier et des actes accomplis.

 

 

EN DROIT

1. 1.1 Les jugements finaux de première instance sont susceptibles d'appel si l'affaire est non pécuniaire ou si, pécuniaire, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant le Tribunal atteint 10'000 fr. (art. 308 CPC).

En l'espèce, l'appelante a pris des conclusions de l'ordre de 20'000 fr. à l'encontre de l'intimée. Dès lors, la voie de l'appel est ouverte.

Interjeté contre une décision finale (308 al. 1 let. a CPC) auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ) dans le délai utile de 30 jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 311 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La Chambre de céans revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

1.3 S'agissant d'un litige dont la valeur litigieuse est inférieure à 30'000 fr., la procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 1 CPC). Les faits doivent être établis d'office (art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC).

2. 2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte qu'aux conditions suivantes: ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a), ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

2.2 Les pièces nouvelles produites par l'appelante sont antérieures à la clôture de la procédure de première instance. Il n'est pas allégué que la pièce non datée, qui se rapporte à des faits survenus en 2013 et 2014, n'aurait pas pu être établie antérieurement.

Par conséquent, les pièces nouvelles produites par l'appelante, ainsi que les faits qui s'y rapportent, sont irrecevables.

3. L'on comprend de l'écriture d'appel que l'appelante entend contester la décision de première instance, laquelle porte sur la compétence ratione materiae de la juridiction des prud'hommes. L'appelante remet aussi en cause divers points factuels.

3.1.1 Le Tribunal n'entre en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action (art. 59 al. 1 CPC, applicable par renvoi de l'art. 13 al. 1 LTPH). Ces conditions, dont la réalisation est examinée d'office (art. 60 CPC) sont notamment la compétence du Tribunal à raison de la matière et du lieu (art. 59 al. 2 lit. b CPC).

Le Tribunal des prud'hommes est compétent pour connaître des litiges découlant d'un contrat de travail, au sens du titre dixième du code des obligations (art. 1 al. 1 lit. a LTPH).

Lorsqu'il doit statuer d'entrée de cause sur sa compétence (art. 59 al. 2 let. b CPC), le tribunal doit tout d'abord examiner si le ou les faits pertinents de la disposition légale applicable, en l'occurrence l'article 34 al. 1 CPC, sont des faits simples ou des faits doublement pertinents, les exigences de preuve étant différentes pour les uns et pour les autres. Les principes jurisprudentiels développés en matière internationale sous le nom de "théorie de la double pertinence" sont applicables en matière de compétence interne (arrêt du Tribunal fédéral 4A_73/2015 du 26 juin 2015 consid. 4.1).

Les faits déterminants pour l'examen de la compétence sont soit des faits "simples", soit des faits "doublement pertinents" (arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2014 du 10 décembre 2014 consid. 4.2).

Les faits sont simples (einfachrelevante Tatsachen) lorsqu'ils ne sont déterminants que pour la compétence. Ils doivent être prouvés au stade de l'examen de la compétence, lorsque la partie défenderesse soulève l'exception de déclinatoire en contestant les allégués du demandeur (ATF 141 III 294 consid. 5.1).

Les faits sont doublement pertinents ou de double pertinence (doppelrelevante Tatsachen) lorsque les faits déterminants pour la compétence du tribunal sont également ceux qui sont déterminants pour le bien-fondé de l'action. C'est à ces faits que s'applique la théorie de la double pertinence (Ibidem).

Selon cette théorie, le juge saisi examine sa compétence sur la base des allégués, moyens et conclusions de la demande (der eingeklagte Anspruch und dessen Begründung), sans tenir compte des objections de la partie défenderesse (ATF 141 III 294 consid. 5.2).

L'administration des preuves sur les faits doublement pertinents est renvoyée à la phase du procès au cours de laquelle est examiné le bien-fondé de la prétention au fond. Tel est notamment le cas lorsque la compétence dépend de la nature de la prétention alléguée, par exemple lorsque le for a pour condition l'existence d'un acte illicite ou d'un contrat. Autrement dit, au stade de l'examen et de la décision sur la compétence, phase qui a lieu d'entrée de cause (cf. art. 60 CPC), les faits doublement pertinents n'ont pas à être prouvés; ils sont censés établis sur la base des allégués, moyens et conclusions du demandeur.

Ainsi, le tribunal doit décider, en fonction des écritures du demandeur, si, par exemple, un acte illicite a été commis.

- Si tel n'est pas le cas, les conditions permettant de fonder la compétence du tribunal saisi ne sont pas remplies et la demande doit être déclarée irrecevable.

- Si tel est le cas, le tribunal saisi admet sa compétence. L'administration des moyens de preuve sur les faits doublement pertinents, soit sur l'acte illicite, aura lieu ultérieurement dans la phase du procès au fond, soit au cours des débats principaux.

- S'il se révèle alors que le fait doublement pertinent n'est pas prouvé, par exemple qu'il n'y a pas eu d'acte illicite, le tribunal rejette la demande, par un jugement revêtu de l'autorité de la chose jugée.

- S'il se révèle que le fait doublement pertinent est prouvé, par exemple que l'acte illicite a eu lieu, le tribunal examine alors les autres conditions de la prétention au fond (ATF 141 III 294 consid. 5.2).

L'existence d'un contrat de travail est un fait doublement pertinent (ATF 137 III 32 consid. 2.3 et 2.4.1).

3.1.2 Le portage salarial est défini comme le fait, pour un indépendant (le porté), de déléguer à un tiers (le porteur), moyennant rémunération, l'encaissement de ses honoraires et l'acquittement de charges sociales sur ceux-ci. Le solde est ensuite versé en mains du porté (Fuld/Michel, Le portage salarial : analyse en droit du travail et des assurances sociales suisses, in : Jusletter 22 octobre 2012, n. 6; Portmann/Nedi, Neue Arbeitsformen - Crowdwork, Portage Salarial une Employee Sharing, in : Tatsachen - Verfahren - Vollstreckung Festschrift für Isaak Meier, Zurich 2015, p. 535). Selon les auteurs précités, une qualification de la relation de portage en contrat de travail au sens des art. 319 et suivants CO est envisageable, mais il faut alors qu'un lien de subordination existe, ce qui posera souvent problème. En particulier, un contrat de travail n'est pas conclu si le seul but des parties est de soumettre le porté au régime des assurances sociales réservé au salarié (Fuld/Michel, op. cit., n. 54 et 55; Portmann/Nedi, op. cit. p. 538 et 39).

3.1.3 On parle d'acte simulé au sens de l'art. 18 CO lorsque les deux parties sont d'accord que les effets juridiques correspondant au sens objectif de leur déclaration ne doivent pas se produire et qu'elles n'ont voulu créer que l'apparence d'un acte juridique à l'égard des tiers (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc; 112 II 337 consid. 4a; 97 II 201 consid. 5). Leur volonté véritable tendra soit à ne produire aucun effet juridique, soit à produire un autre effet que celui de l'acte apparent; dans ce dernier cas, les parties entendent en réalité conclure un second acte dissimulé (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc; 112 II 337 consid. 4a). Juridiquement inefficace d'après la volonté réelle et commune des parties, le contrat simulé est nul (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc; 97 II 201 consid. 5), tandis que le contrat dissimulé - que, le cas échéant, les parties ont réellement conclu - est valable si les dispositions légales auxquelles il est soumis quant à sa forme et à son contenu ont été observées (ATF 117 II 382 consid. 2a; 96 II 383 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_429/2012 du 2 novembre 2012 consid. 4.2, publié in SJ 2013 I p. 286). Savoir si les parties avaient la volonté (réelle) de feindre une convention revient à constater leur volonté interne au moment de la conclusion du contrat, ce qui constitue une question de fait (ATF 126 III 375 consid. 2e/aa; 97 II 201 consid. 5; arrêts du Tribunal fédéral 5A_434/2015 du
21 août 2015 consid. 6.1.3; 4A_429/2012 du 2 novembre 2012 consid. 4.2, publié in SJ 2013 I p. 286; 5C.127/2001 du 26 octobre 2001 consid. 2a; 4C.227/2003 du 9 décembre 2004 consid. 2.2.1).

3.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que les tribunaux genevois sont compétents ratione loci, compte tenu du siège genevois de l’intimée (art. 34 al. 1 et art. 60 CPC, applicables par renvoi de l'art. 13 al. 1 LTPH).

3.3 S'agissant de la compétence ratione materiae, le Tribunal l'a niée, excluant l'existence d'un contrat de travail. Il sied donc d'examiner si un contrat de travail a été conclu, puis les conséquences procédurales de la réponse à cette question.

3.3.1 En l'espèce, les parties ont unanimement affirmé que le contrat de travail qu'elles avaient signé était fictif. Il n'existait aucune intention de leur part d'entrer dans une relation de travail, dès lors qu'il n'avait jamais été envisagé qu'un salaire soit versé à l'appelante, ni qu'elle serait soumise à un rapport de subordination envers l'intimée.

Certes, l'appelante se demande comment un contrat peut être signé, mais être finalement dépourvu d'effets. Ce faisant, elle perd de vue que seule prime la réelle et commune intention des parties, établie sans équivoque en l'espèce. Le juge ne doit pas s'arrêter aux dénominations utilisées par les parties pour déguiser la nature véritable de la convention. Ici, les parties souhaitaient entrer dans une relation de mandat, mais n'ont jamais eu l'intention de la doubler d'un contrat de travail effectif. Certes, la constellation contractuelle porte le nom de portage salarial, mais l'on se trouve précisément dans le cas envisagé par la doctrine où les parties, alors qu'aucun rapport de subordination n'existe, paraphent un contrat de travail dans le seul but de bénéficier de certains régimes légaux propres aux relations de travail.

Par conséquent, le prétendu contrat de travail était simulé, donc nul.

L'appelante semble reprocher l'établissement de certains faits au Tribunal, notamment en lien avec la négociation, puis l'exécution du contrat de portage la liant à l'intimée. Au vu du raisonnement qui précède, ces faits sont dénués de pertinence puisqu'ils ne tendent pas à démontrer la conclusion d'un contrat de travail.

C'est donc à juste titre que le Tribunal a retenu qu'un contrat de travail n'existait pas.

3.3.2 Il découle cependant du texte de la demande et des pièces produites, ainsi que de la conduite de la procédure par le Tribunal, qu'il n'était pas d'entrée de cause évident, à la lecture des écritures de la demanderesse, qu'aucun contrat de travail n'avait été valablement conclu.

En effet, la contestation de la compétence est intervenue au stade de la réponse de la défenderesse, sous la forme de l'allégation du caractère fictif du contrat de travail. Puis, le Tribunal a jugé nécessaire de procéder à une audience, au cours de laquelle l'appelante a admis que le contrat de travail avait été simulé.

L'existence d'un contrat de travail - fait doublement pertinent - aurait ainsi pu être considérée comme suffisamment démontrée, au stade de l'examen de la compétence ratione materiae, par les allégations et les pièces de la demanderesse. Dans un tel cas de figure, le Tribunal aurait dû se déclarer compétent, puis, lorsque l'inexistence du contrat de travail est apparue avec évidence au cours de l'audience de débats, la demande aurait dû être rejetée.

Le Tribunal a toutefois rendu une décision d'irrecevabilité.

Bien que contraire à la jurisprudence du Tribunal fédéral, cette manière de procéder n'est expressément contestée par aucune des parties. Certes, l'intimée a pris des conclusions en déboutement, mais sans former d'appel joint, de sorte que la décision d'irrecevabilité du Tribunal sera confirmée.

4. L'appelante considère que le défaut de l'intimée à l'audience des débats ne saurait être laissé sans suite.

4.1 À teneur de l'art. 234 al. 1 CPC - applicable par analogie en procédure simplifiée (art. 219 CPC) -, en cas de défaut d'une partie, le tribunal statue sur la base des actes qui ont, le cas échéant, été accomplis conformément aux dispositions de la présente loi. Il se base au surplus, sous réserve de
l'art. 153 CPC, sur les actes de la partie comparante et sur le dossier.

4.2 En l'occurrence, le Tribunal, après avoir constaté le défaut de l'intimée, pourtant régulièrement citée, a agi conformément à l'art. 234 al. 1 CPC en rendant sa décision sur la base du dossier en sa possession. L'appelante ne prétend pas qu'elle aurait demandé des actes d'instruction supplémentaires, ce qui n'est pas le cas.

Ainsi, la décision du Tribunal sur ce point est conforme au droit.

5. Au vu de ce qui précède, le jugement entrepris doit être intégralement confirmé.

6. Il n'est pas perçu de frais judiciaires dans la procédure au fond pour les litiges devant la juridiction des prud'hommes, lorsque la valeur litigieuse n'excède pas 30'000 fr., comme en l'espèce (art. 114 let. c CPC).

Par ailleurs, s'agissant d'une cause soumise à la juridiction des prud'hommes, il ne sera pas alloué de dépens ni d'indemnité pour la représentation en justice (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 4 :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A.______ contre le jugement JTPH/405/2016 rendu le 3 novembre 2016 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/3738/2016-4.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Sur les frais :

Dit que la procédure est gratuite.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente; Madame Nadia FAVRE, juge employeur; Madame Christiane VERGARA-PIZZETTA, juge salariée; Madame Véronique BULUNDWE-LEVY, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à
15'000.- fr.