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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/200/2011

ATAS/914/2012 du 19.07.2012 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/200/2011 ATAS/914/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 juillet 2012

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur K__________, domicilié à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître TERRIER-HAGMANN Isabelle

 

recourant

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, Genève

intimé


EN FAIT

Monsieur K__________ (ci-après: le recourant), né en 1949, perçoit une rente d'invalidité complète et a été mis au bénéfice de prestations complémentaires avec effet au 1er décembre 1992.

Le formulaire de demande de prestations, signé par ses soins, comporte l'indication qu'il s'engage à annoncer immédiatement au Service des prestations complémentaires (SPC) tout changement intervenant dans sa situation économique ou personnelle. Cette obligation a été rappelée à l'occasion d'autres courriers ou décisions de prestations par la suite.

En date du 28 janvier 2001, le frère du recourant, K__________, et l'épouse de celui-ci sont décédés. Le recourant est seul héritier de feu K__________.

A la date du décès, l'actif successoral du précité s'élevait, selon l'administration fiscale, à 12'693'666 fr. L'impôt sur la succession a été arrêté à 1'817'739 fr. 10, l'avoir imposable étant de 6'273'013 fr.

Le recourant n'a, à aucun moment, annoncé cette succession au SPC.

Selon M. L__________ de la fiduciaire en charge de la liquidation de la succession, celle-ci présentait une perte de 3'213'294 fr. 57 au 11 février 2003, en raison de la perte des titres dans lesquels était placée la fortune du défunt. Le recourant a expliqué avoir actionné M. L__________ pour le manque de diligence dans le traitement du dossier successoral et avoir trouvé un accord avec celui-ci au terme duquel il lui a versé 150'000 fr.

Le recourant ayant épousé Mme N__________, née en 1979, à fin 2009, le SPC a recalculé son droit aux prestations, en imputant un revenu hypothétique à la jeune épouse dans sa décision du 29 juin 2010.

Le 22 juillet 2010, l'assistante sociale d'AVIVO a adressé un courrier du SPC, intitulé "Urgent", indiquant que le recourant et son épouse vivaient en-dessous du minimum vital et invitant ce service à recalculer ses prestations. Ce n'est qu'à cette occasion que le SPC, qui a demandé copie du bordereau de taxation à l'administration fiscale cantonale, a été informé de la succession dont avait hérité le recourant.

Par décisions du 29 juillet 2010, le SPC a ainsi réclamé au recourant le remboursement des prestations versées du 1er janvier 2001 à juillet 2010, soit un total de 211'554 fr. 85, correspondant à 157'449 fr. de prestations complémentaires AVS/AI, 7'004 fr. 05 de frais médicaux couverts par l'Etat et 47'101 fr. 80 de subsides à l'assurance maladie.

Dans son opposition, le recourant a fait valoir que la fiduciaire qui s'était occupée de la succession n'avait pas agi avec la diligence requise, de sorte que celle-ci avait été taxée d'office. Il avait vendu une partie des biens immobiliers pour s'acquitter de la dette fiscale. Il était encore propriétaire de deux immeubles, à savoir un appartement à Versoix et une villa à Chêne-Bourg, qui étaient loués. Les locations lui rapportaient 126'425 fr. par année, dont à déduire 47'000 fr. d'intérêts hypothécaires. Sa dette fiscale s'élevait en août 2010 à 459'295 fr.; il versait des acomptes de 4'150 fr. par mois. Compte tenu de sa charge fiscale courante de 28'000 fr. par an, due à sa fortune, il n'avait pas toujours pu s'acquitter des acomptes convenus. Il demandait donc que la décision du 29 juillet 2010 soit reconsidérée.

Le 28 septembre 2010, le Conseiller d'Etat en charge du département de la solidarité et de l'emploi a déposé plainte pénale à l'encontre du recourant pour obtention frauduleuse de prestations sociales (art. 31 LPC), "liée à une violation qualifiée d'injonction de renseigner au sens de l'art. 31 LPGA et d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP)".

Le SPC a alors suspendu le traitement de l'opposition, dans l'attente du jugement pénal. Le Ministère public ayant, à son tour, suspendu la procédure pénale, dans l'attente de l'issue de la procédure administrative, le SPC a ainsi rendu sa décision sur opposition le 7 décembre 2010, confirmant sa précédente décision. Il a relevé que l'obligation de restituer n'était pas subordonnée à la violation de l'obligation de renseigner; il s'agissait uniquement de rétablir l'ordre légal. Le calcul des prestations s'effectuait selon les revenus du bénéficiaire. L'héritage que celui-ci avait fait devait être pris en compte à la date du décès de son frère.

Par acte déposé le 24 janvier 2011, K__________ a recouru contre cette décision, dont il a demandé l'annulation.

Lors de l'audience de comparution personnelle qui s'est tenue le 2 mai 2011 devant la Cour de justice, le recourant a expliqué que l'ensemble des titres figurant à l'actif successoral avait été vendu et le produit remis à l'Etat de Genève. Il s'agissait de titres nantis dans le cadre d'un crédit lombard. Il ne souhaitait pas vendre ses deux biens immobiliers sis dans le canton de Genève car il n'était pas sûr que le produit lui permette de rembourser l'intégralité de ses dettes, d'une part. D'autre part, il souhaitait conserver le patrimoine familial. Il bénéficiait de prestations de l'assurance-invalidité en raison de troubles psychiques (dépression). Il ne contestait pas l'exactitude des montants qui lui étaient réclamés par le SPC. Il a encore indiqué que lorsqu'il avait vu qu'il avait hérité de 12 millions de francs suisses, il avait commencé à rêver. Ce n'était que par la suite qu'il s'était rendu compte que ce montant ne tenait pas compte des dettes de la succession. Son recours ne constituait pas seulement une demande de remise. Il mettait également en cause la décision de restitution.

Par arrêt du 27 juin 2011, la Cour a déclaré le recours recevable et l'a admis partiellement, le montant réclamé au recourant étant limité aux prestations perçues les cinq dernières années, à savoir entre juillet 2005 et juillet 2010. La Cour a considéré que le recourant n'avait pas commis d'escroquerie, dans la mesure où l'intimé avait fait preuve de négligence en ne sollicitant aucun document financier de la part du recourant depuis 2001.

Par arrêt du 3 février 2012, le Tribunal fédéral a annulé l'arrêt cantonal. Il a retenu que le SPC avait été l'objet d'une tromperie astucieuse au sens de l'art. 146 CP. Celui-ci n'avait pas fait preuve de négligence en ne sollicitant aucune information sur la situation financière du recourant depuis 2001; le SPC n'avait, en effet, pas eu de raisons de douter que la situation financière du recourant s'était considérablement modifiée depuis l'octroi initial de prestations. Le Tribunal fédéral a ainsi renvoyé le dossier à l'autorité cantonale afin qu'elle examine si les autres conditions de l'art. 146 CP, voire de l'art. 31 LPC ou 16 aLPC étaient remplies, en vue d'établir l'étendue du délai de péremption du droit à la restitution.

Dans leurs déterminations des 26 et 27 mars 2012, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

La cause a ensuite été gardée à juger.

EN DROIT

La Cour a déjà statué sur la recevabilité du recours. Elle renvoie sur ce point à son précédent arrêt.

En cas de renvoi de la cause par le Tribunal fédéral conformément à l'art. 107 al. 2 LTF, l'autorité inférieure doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants en droit de l'arrêt de renvoi. Le juge auquel la cause est renvoyée voit ainsi sa cognition limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'il est lié par ce qui a été tranché définitivement par le Tribunal fédéral (ATF 133 III 201 consid. 4.2; 131 III 91 consid. 5.2). Cela signifie que l'autorité cantonale doit limiter son examen aux points sur lesquels sa première décision a été annulée et que, pour autant que cela implique qu'elle revienne sur d'autres points, elle doit se conformer au raisonnement juridique de l'arrêt de renvoi. En revanche, les points qui n'ont pas ou pas valablement été remis en cause, qui ont été écartés ou dont il avait été fait abstraction lors de la procédure fédérale de recours ne peuvent plus être réexaminés par l'autorité cantonale, même si, sur le plan formel, la décision attaquée a été annulée dans son intégralité (arrêt du Tribunal fédéral 5P.425/2002 consid. 2.1; ATF 111 II 94 consid. 2; DONZALLAZ, Loi sur le Tribunal fédéral, Commentaire, 2008, n. 1695 et 1697).

3.a) À teneur de l’art. 25 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées, la restitution ne pouvant toutefois être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1er). Le droit de demander la restitution s’éteint un an après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant (al. 2).

Avant l'entrée en vigueur de la LPGA (le 1er janvier 2003), l'art. 27 al. 1 OPC-AVS/AI (teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002) prévoyait déjà que les prestations complémentaires indûment touchées devaient être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers. Les prescriptions de la LAVS étaient applicables par analogie à la restitution de telles prestations et à la libération de l'obligation de les restituer (cf. art. 47 al. 1 LAVS, abrogé avec l'entrée en vigueur de la LPGA). Une disposition identique figurait à l'art. 24 LPCC.

Lorsque le versement indu résulte d'une violation de l'obligation de renseigner au sens des art. 31 LPGA, art. 31 LPC et 11 LPCC et que cette violation est en relation de causalité avec la perception indue de prestations d'assurance, la modification de la prestation a un effet rétroactif (ex tunc), qui entraîne une obligation de restituer (ATF 119 V 431 consid. 2, SVR 1995 IV n° 58 p. 165).

Lorsqu'il statue sur la créance de l'intimée en restitution de prestations indûment versées, le juge peut examiner, à titre préjudiciel, si les circonstances correspondant à une infraction pénale sont réunies et, partant, si un délai de prescription plus long que les délais relatifs et absolus prévus par l'art. 25 al. 2 LPGA sont applicables.

b) L'art. 31 LPC prévoit qu'est puni d'une peine pécuniaire n'excédant pas 180 jours-amendes celui qui manque à son obligation de communiquer au sens de l'art. 31 LPGA.

L'art. 146 al. 1 CP (escroquerie) prévoit une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou une peine pécuniaire. Selon l'art. 97 al. 1 CP, l'action pénale se prescrit par 30 ans si l'infraction est passible d'une peine privative de liberté à vie, par 15 ans si elle est passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans, et de sept ans si elle est passible d'une autre peine. L'actuel art. 97 al. 1 CP est entré en vigueur le 1er novembre 2002. Avant cette date, la prescription de l'action pénale était régie par l'art. 70 aCP (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 1er octobre 2002; aRS p. 214; RO 1994 p. 2290, 2002 p. 2993 et 2996). Cette disposition prévoyait un délai de prescription de 20 ans si l'infraction était passible de la réclusion à vie, de dix ans si elle était passible de l'emprisonnement pour plus de trois ans ou de la réclusion, et de cinq ans si elle était passible d'une autre peine.

En cas de modification des délais de prescription de l'action pénale et des peines, le code pénal prévoit l'application de la lex mitior: les nouveaux délais de prescription ne sont applicables aux infractions commises avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle que s'ils sont plus favorables à l'auteur de l'infraction. A défaut, les anciens délais sont applicables (cf. art. 389 al. 1 CP; ATF 134 IV 82 consid. 6.2.1; 129 IV 49 consid. 5.1). En vertu du principe de la lex mitior, le délai de prescription de l'action pénale pour une infraction telle que décrite à l'art. 31 LPC est, en l'espèce, de cinq ans. Il est de 10 ans pour une infraction à l'art. 146 al. 1 CP.

L'infraction est consommée lors de la première perception indue de prestation (ATF 131 IV 83 consid. 2.1.3).

Afin de déterminer si l'intimé peut demander, comme il le soutient, la restitution des prestations pour la période de dix ans, il convient donc d'examiner si le recourant s'est rendu coupable d'une escroquerie au sens de l'art. 146 CP.

c) Aux termes de l'art. 146 CP, se rend coupable d'escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, a astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l'a astucieusement confortée dans son erreur et a de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. L'escroquerie consiste à tromper la dupe. Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit cependant pas; il faut qu'elle soit astucieuse.

Il y a tromperie astucieuse, au sens de l'art. 146 CP, lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 133 IV 256 consid. 4.4.3; 128 IV 18 consid. 3a). L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle (ATF 135 IV 76 consid. 5.2).

En matière d'aide sociale, l'autorité agit de manière légère lorsqu'elle n'examine pas les pièces produites ou néglige de demander à celui qui requiert des prestations les documents nécessaires afin d'établir ses revenus et sa fortune, comme par exemple sa déclaration fiscale, une décision de taxation ou des extraits de ses comptes bancaires. En revanche, compte tenu du nombre de demandes d'aide sociale, une négligence ne peut être reprochée à l'autorité lorsque les pièces ne contiennent pas d'indice quant à des revenus ou à des éléments de fortune non déclarés ou qu'il est prévisible qu'elles n'en contiennent pas (ATF np 6B_22/2011 du 23 mai 2011; 6B_576/2010 du 25 janvier 2011 consid. 4.1.2).

On admet qu'une infraction de résultat peut également être réalisée lorsque l'auteur omet par sa faute l'accomplissement d'un acte qu'il était juridiquement tenu d'accomplir et qui, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, aurait évité la survenance du dommage (délit d'omission improprement dit; LOGOZ, Commentaire du CPS, Partie générale, p. 62 et les références citées). Un délit d'omission improprement dit est réalisé lorsque la survenance du résultat par une action est expressément menacée d'une sanction pénale, que l'accusé par son action aurait effectivement pu éviter le résultat et qu'en raison de sa situation juridique particulière il y était à ce point obligé que son omission apparaît comparable au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (ATF 121 IV 353 consid. 2b; 120 IV 98 consid. 2c; 117 IV 130 consid. 2a; 113 IV 72 consid. 5a et les arrêts cités).

L'existence d'une escroquerie a ainsi été admise dans le cas d’un bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait gagné à la loterie et seulement transmis l’extrait de son livret d’épargne à l'autorité compétente, comme celle-ci le lui avait demandé, sans révéler spontanément sa fortune placée sur un autre compte. La condition de l’astuce était remplie, dès lors que l’autorité ne pouvait que très difficilement déceler la fortune de l’intéressé (ATF 127 IV 163).

4. La Cour a retenu dans son précédent arrêt qu'il était manifeste que le recourant, qui avait omis d'annoncer l'héritage qu'il avait fait, avait ainsi perçu depuis janvier 2001 des prestations auxquelles il ne pouvait prétendre. En effet, que l'actif successoral s'élève à 12'693'666 fr., comme l'a d'abord retenu à tort l'administration fiscale, ou à 6'273'013 fr., après rectification à la suite de la procédure administrative, celui-ci était considérable et excluait à l'évidence toute aide de la part de l'intimé. Même s'il est possible que la valeur des titres nantis dans le cadre de crédits lombards a chuté, comme l'a soutenu le recourant, il ne paraît pas crédible que l'entier des titres de la succession (7'729'124 fr.) ait été investi dans ce type de titres, d'une part, puis, d'autre part, intégralement perdu. De toute manière, la succession comportait également des immeubles, à l'étranger et en Suisse (d'une valeur totale fiscale de plus de 5 millions fr.) ainsi qu'une assurance-vie. Il n'apparaît pas ni n'est allégué que ces biens, notamment immobiliers, étaient grevés de charges hypothécaires approchant ou couvrant leur valeur. A aucun moment, la succession n'a présenté un solde négatif.

Le recourant en a, au demeurant, profité, puisqu'il ressort des taxations 2004 à 2009 figurant au dossier qu'il a perçu des revenus locatifs, voire a habité un des immeubles acquis par voie successorale. Le recourant est d'ailleurs toujours propriétaire de deux biens immobiliers à Genève dont il a hérité, dont la valeur fiscale nette a été estimée en 2008 à 1'633'919 fr. (2'881'919 fr. - moins les dettes hypothécaires), de sorte que sa fortune imposable s'élevait à plus de 1,5 mio fr. Selon les estimations de courtiers engagés par le recourant, l'appartement sis à Versoix a une valeur de vénale de 1'310'000 fr., respectivement de 1'415'000 fr., et la villa à Chêne-Bourg une valeur estimée à 750'000 fr. Les dettes hypothécaires de 700'000 fr. et de 542'000 fr. (selon la taxation pour l'année 2008) laissent un solde positif de 818'000 fr. environ. Même en imputant de cette somme l'arriéré fiscal de 459'295 fr. dû au 1er septembre 2010 ainsi que la charge fiscale courante de
28'000 fr., la fortune nette du recourant présente toujours un actif de 330'700 fr.

La Cour a également retenu que l'omission du recourant d'annoncer à l'intimé qu'il avait fait un héritage ne procédait pas de sa bonne foi. Au vu de l'importance de l'actif successoral, dont il a immédiatement profité (revenus tirés des locations d'immeuble, habitation à disposition, notamment), il ne pouvait sérieusement faire valoir ne pas avoir tiré de bénéfice de la succession. La Cour a ainsi retenu la mauvaise foi crasse du recourant.

Ces constatations n'ont pas été remises en cause par le recourant, qui n'a pas saisi le Tribunal fédéral d'un recours. Par ailleurs, les éléments apportés par les parties après le renvoi de la cause à l'autorité de céans ne modifient nullement l'appréciation exposée ci-dessus, qui est donc reprise.

La Cour avait toutefois nié l'existence d'une tromperie astucieuse, au motif que l'intimé avait fait preuve de négligence en ne procédant pas aux vérifications minimales qui lui aurait permis de se rendre compte de la modification essentielle de la situation économique du bénéficiaire. Cet avis n'a pas été partagé par le Tribunal fédéral, qui a retenu que l'intimé avait été astucieusement trompée, au sens de l'art. 146 CP, dès lors qu'il n'avait pas pu envisager la modification considérable survenue dans la situation économique du recourant.

Par ailleurs, étant lié par l'engagement écrit de signaler toute modification dans sa situation économique, le recourant avait une obligation qualifiée de renseigner à laquelle il a failli.

Les conditions objectives de l'infraction étant ainsi réalisées, il convient d'examiner les conditions subjectives de celle-ci.

5. Le recourant conteste que l'élément subjectif de l'infraction d'escroquerie soit réalisé, protestant de sa bonne foi.

a) Savoir ce que l'auteur voulait, savait ou ce dont il s'accommodait relève du contenu de la pensée (ATF 125 IV 242 consid. 3c; 119 IV 1 consid. 5a).

En l'occurrence, les éléments au dossier ne permettent pas de retenir l'intention « Vorsatz » du recourant de commettre une escroquerie. Seule entre ainsi en ligne de compte la question de savoir s'il s'est rendu coupable d'une escroquerie par dol éventuel.

Il y a dol éventuel lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable mais agit néanmoins, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il s'en accommode pour le cas où il se produirait (ATF 131 IV 1 consid. 2.2; 131 IV 58 consid. 8.2).

Parmi les éléments extérieurs permettant de conclure que l'auteur s'est accommodé du résultat dommageable pour le cas où il se produirait figurent notamment la probabilité (connue par l'auteur) de la réalisation du risque et l'importance de la violation du devoir de prudence. Plus celles-ci sont grandes, plus sera fondée la conclusion que l'auteur, malgré d'éventuelles dénégations, avait accepté l'éventualité de la réalisation du résultat dommageable (ATF 135 IV 12 consid. 2.3.3; 125 IV 242 consid. 3c; 121 IV 249 consid. 3a/aa; 119 IV 1 consid. 5a).

b) En l'espèce, la fortune héritée est considérable. Le recourant en avait pleinement conscience. Il a d'ailleurs indiqué en audience que lorsqu'il avait appris avoir hérité de 12 millions de francs, il avait commencé à rêver. Contrairement à ce qu'il soutient, il a directement bénéficié de cette fortune, puisqu'il a perçu des revenus locatifs, voire a habité un des immeubles acquis par voie successorale. Il est manifeste que le recourant ne pouvait ignorer qu'une telle fortune ne lui permettait plus de bénéficier des prestations complémentaires. En effet, le formulaire de demande de prestations est largement consacré aux éléments patrimoniaux dont dispose le demandeur de prestations. Par ailleurs, à intervalles réguliers, l'intimé a rappelé l'obligation du recourant de signaler toute modification de sa situation financière. Ce dernier ne pouvait donc ignorer l'importance que revêtait, pour l'intimé, la communication de toute information d'ordre économique le concernant. En s'abstenant néanmoins d'informer l'intimé du changement notable de sa situation financière, le recourant a ainsi pris le risque que l'intimé - qui n'avait aucune raison de se douter du changement notable de sa situation financière - lui verse des prestations auxquelles il ne pouvait prétendre, au vu dudit changement. Il convient ainsi de retenir qu'il s'est accommodé du résultat possible. Le dol éventuel est donc réalisé.

6. Les conditions tant subjectives qu'objectives de l'escroquerie étant réalisées, la prescription plus longue de dix ans s'applique à la demande de restitution de l'intimé. Celle-ci était donc fondée à réclamer la restitution des prestations versées du 1er janvier 2001 au 30 juillet 2010.

Le recourant a indiqué en audience ne pas contester l'exactitude des montants réclamés par l'intimé. Dûment documentés, ceux-ci paraissent au demeurant conformes aux pièces produites.

Enfin, la présente procédure n'a pas porté sur une éventuelle demande de remise, de sorte que la Cour ne peut pas se prononcer à ce sujet, contrairement à ce qu'a laissé entendre le recourant en audience (cf. ATF 132 V 42 consid. 1.2; ATF n.p. 8C_602/2007 du 13 décembre 2007; 264/05 du 25 janvier 2006, consid. 2.1).

En définitive, le recours est mal fondé et doit être rejeté.

* * *


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF; RS 173.110) aux conditions de l’art. 95 LTF pour ce qui a trait aux prestations complémentaires fédérales, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire (articles 113 ss LTF) aux conditions de l’art. 116 LTF pour ce qui a trait aux prestations complémentaires cantonales. Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

Brigitte BABEL

 

La présidente

 

Florence KRAUSKOPF

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le