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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1226/2013

ATAS/848/2013 du 02.09.2013 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1226/2013 ATAS/848/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 2 septembre 2013

6ème Chambre

 

En la cause

Monsieur T__________, domicilié au GRAND-LANCY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître William RAPPARD

recourant

 

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Didier ELSIG

 

 

intimée


EN FAIT

1.        Monsieur T__________ (ci-après : l’assuré), né en 1981, était employé par Monsieur U_________, depuis le mois d’août 2007, en qualité de peintre en bâtiment. A ce titre, il était assuré contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de la SUVA, Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : la SUVA ou l’assureur).

2.        Le 1er septembre 2011, alors qu’il était occupé au masticage des murs dans le salon de l’appartement dans lequel il intervenait, l’assuré a tapé le genou gauche dans l’angle d’une fenêtre.

3.        Le lendemain, l’assuré a consulté le Dr A_________, spécialiste FMH en médecine interne, qui lui a délivré un arrêt de travail dès le 1er septembre 2011.

4.        Une imagerie par résonnance magnétique (IRM), effectuée le 20 septembre 2011, a mis en évidence une contusion des tissus mous à la face antéro-latérale du genou gauche ainsi qu’un petit élément contusionnel du condyle fémoral interne gauche. Aucun argument en faveur d’une déchirure méniscale n’était toutefois constaté.

5.        Dans un rapport du 4 novembre 2011, le Dr A_________ a indiqué suivre l’assuré depuis le 2 septembre 2011 et avoir constaté un petit épanchement du genou gauche, une limitation de la flexion dudit genou et une douleur sous-rotulienne. Les radiographies du genou gauche, de face et de profil, n’avaient démontré aucune lésion visible. Le diagnostic provisoire était celui de contusion du genou gauche.

6.        Le suivi a, par la suite, été assuré par le Dr B_________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, qui a fait état, dans un rapport du 4 novembre 2011, d’une limitation de la flexion, de la persistance d’un épanchement relativement important et de craquements rotuliens au retour de flexion. L’évolution était trainante et le diagnostic retenu était celui de traumatisme appuyé du genou gauche avec contusion osseuse et chondrale du condyle fémoral interne. L’assuré était toujours totalement incapable de travailler vu son activité professionnelle physique et l’évolution était peu favorable.

7.        Une nouvelle IRM du genou gauche a été effectuée le 14 novembre 2011. Selon le compte-rendu du 17 novembre 2011 y relatif, les atteintes suivantes ont été constatées : une chondropathie de grade III fissuraire rétropatellaire externe avec fissuration horizontale s’étendant dans plus de la moitié de l’épaisseur cartilagineuse, une chondropathie de grade II de la gorge trochléenne avec petite fissuration à ce niveau s’étendant dans moins de la moitié de l’épaisseur cartilagineuse ; une chondropathie de la zone portante condylienne fémorale interne avec aplatissement d’une pastille cartilagineuse quadrangulaire de 4mm de largeur, 5 mm de longueur et infra-illimétrique d’épaisseur, sans lésion de la plaque osseuse sous-chondrale en regard, une lésion de grade I du ligament collatéral interne ainsi qu’une lamelle liquidienne d’épanchement articulaire avec aspect cloisonné en rétro-condylien fémoral interne. Aucun argument en faveur d’une déchirure méniscale n’a toutefois été relevé.

8.        Au vu du diagnostic de fractures chondrales centro-rotuliennes et du condyle fémoral interne en zone de charge du genou gauche, une arthroscopie avec greffe de cartilage en mosaïque a été réalisée par le Dr B_________, le 16 décembre 2011, à la Clinique générale Beaulieu.

9.        Suite à cette intervention, l’assuré, qui se déplaçait uniquement à l’aide de cannes anglaises, a bénéficié d’une attelle complète de la jambe avec un régulateur d’angle et il lui a été interdit, par son chirurgien, de poser le pied à terre pendant une période de six à huit semaines.

10.    Dans un rapport du 27 février 2012, le Dr B_________ a rappelé le diagnostic de fracture ostéo-chondrale du condyle fémoral interne du genou gauche. Il a également fait état de suites difficiles de la greffe en mosaïque, avec la persistance d’une raideur à la flexion et à l’extension ainsi que d’épanchements à répétition. Une reprise progressive de l’appui était actuellement effectuée. Il fallait également s’attendre à une possible restriction de l’amplitude et à une souffrance articulaire chronique (sous forme d’épanchements et de douleurs météotropes). Pour l’instant, la reprise de l’activité de peintre en bâtiment était encore impossible pour plusieurs mois et il fallait éventuellement prévoir une restriction définitive.

11.    Le 13 mars 2012, l’assuré a fait une demande de prestations d’assurance-invalidité.

12.    Une nouvelle IRM a été effectuée le 14 mars 2012. Selon le compte rendu du 20 avril 2012 y relatif, une bonne intégrité de la greffe cartilagineuse du condyle fémoral interne était constatée. Le cartilage présentait encore un aspect irrégulier tant en intensité qu’en surface, cependant sans signe de fissure. Un œdème de l’os spongieux sous-jacent, s’étendant jusqu’à la métaphyse fémorale, était toutefois relevé. Les fissures de la rotule de la facette interne et externe étaient inchangées et compatibles avec un grade II. Les médecins avaient cependant constaté une augmentation de l’épanchement pleural et une diminution de l’œdème de l’espace cellulo-graisseux sous-cutané en avant du ligament collatéral externe. La lésion de grade II ou la dégénérescence mucoïde au niveau des cornes moyenne et postérieure du ménisque interne était retrouvée sur les clichés. Enfin, le reste de l’examen était superposable au précédent.

13.    Dans son rapport du 27 avril 2012, le Dr B_________ a indiqué avoir constaté une flexion-extension du genou gauche de 115/5/0, la persistance d’un épanchement, le fait qu’il était impossible pour l’assuré de monter et descendre les escaliers et l’existence de grincements en flexion-extension. La cicatrisation des greffes fémorales était bonne mais il y avait eu aggravation de l’atteinte ostéochondrale de la rotule. Le diagnostic retenu était celui de fracture ostéochondrale du fémur et de la rotule gauches. Pour le moment, l’assuré suivait un traitement de physiothérapie mais une nouvelle arthroscopie avec greffe mosaïque de la rotule était prévue pour le 8 mai 2012. L’assuré était toujours totalement incapable de travailler et ce pour une longue durée, de sorte qu’un changement de profession était probablement à envisager.

14.    Comme indiqué par le Dr B_________ dans le rapport précité, une arthroscopie, puis une arthrotomie et greffe rotulienne ostéochondrale en mosaïque ont été effectuées le 8 mai 2012 à la Clinique générale Beaulieu.

15.    Dans un rapport intermédiaire du 22 mai 2012, le Dr B_________ a diagnostiqué une chondropathie traumatique du fémur et de la rotule du genou gauche. L’épanchement était alors modéré et le pronostic était modérément favorable au vu des dégâts articulaires. Le traitement était le suivant : physiothérapie, ponctions, marche en appui déroulé. L’assuré était toujours totalement incapable de travailler et un reclassement allait très probablement être nécessaire.

16.    Dès juin 2012, l’assuré a présenté des épanchements à répétition et d’importantes douleurs au genou droit.

17.    Le 9 août 2012, une IRM du genou droit a été effectuée. Selon le rapport y relatif, daté du même jour, une petite zone de surcharge mécanique au niveau du condyle interne et du plateau tibial interne associée à une lésion de grade II de la corne postérieure du ménisque interne ainsi que la présence d’un kyste de Baker de 6,9 x 2 cm étaient constatés. Aucune déchirure n’a toutefois été relevée.

18.    Par rapport du 28 août 2012, le Dr B_________ a indiqué à l’assureur que l’évolution était relativement favorable s’agissant du genou gauche, avec une lente diminution de l’épanchement. Quelques petits ressauts étaient toutefois toujours présents lors des mouvements. Le médecin précité a encore précisé que même si la cicatrisation du cartilage était obtenue, il fallait prévoir un reclassement car de nombreuses activités de plâtrier risquaient de n’être définitivement plus possibles (accroupissement, échelles, etc.).

19.    Lors de l’échographie du genou droit, du 6 septembre 2012, un volumineux kyste épais et cloisonné poplité du genou droit a été constaté. Sous contrôle échographique, il a été ponctionné et évacué.

20.    Le 17 septembre 2012, la SUVA a communiqué le cas de l’assuré à l’OFFICE DE L’ASSURANCE-INVALIDITE de Genève (OAI).

21.    L’assuré a sollicité un second avis auprès du Dr C_________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, qui a indiqué, dans un rapport du 24 septembre 2012, que lors de l’examen clinique du 18 septembre 2012, son patient marchait avec une boiterie antalgique du membre inférieur gauche, à l’aide de deux cannes anglaises. Le genou droit présentait un petit épanchement et un gros kyste poplité. Au niveau du genou gauche, la mobilisation était limitée, avec des douleurs importantes essentiellement au niveau fémoro-tibial interne. La marche sans cannes était extrêmement difficile. En guise de conclusion, le Dr C_________ a expliqué que la situation était désastreuse, malgré les deux interventions chirurgicales. Il n’avait cependant pas d’explication claire, ni pour les douleurs initiales ayant nécessité lesdites interventions ni pour l’évolution défavorable. Il n’avait aucune indication chirurgicale raisonnable à proposer et avait dès lors conseillé à l’assuré de poursuivre la rééducation avec mobilisation en piscine et renforcement musculaire progressif.

22.    L’assuré a également consulté le Dr D_________, qui a fait mention, dans un rapport complémentaire du 16 octobre 2012, d’un probable Südeck. Il relevait en outre que l’assuré marchait avec ses deux cannes et qu’une limitation de la flexion/extension persistait. Enfin, le Dr D_________ proposait une arthroscopie.

23.    Par courriel du 11 novembre 2012, le Dr B_________ a fait état, s’agissant du genou gauche, d’un probable recul d’un greffon ostéochondral mosaïque de la rotule avec conflit fémoropatellaire en flexion. Il a également expliqué qu’une arthroscopie de régularisation allait probablement être nécessaire mais qu’il attendait l’avis du Dr D_________. S’agissant du genou droit, les symptômes (épanchements à répétition et importantes douleurs) étaient certainement liés à une surcharge après un an de cannes et d’appui mais il ne s’agissait pas, selon lui, d’une conséquence directe de l’accident compte tenu de l’intervalle libre de 10 mois. Les investigations et les traitements (IRM, échographies, ponctions, infiltrations) étaient mis à la charge de l’assurance-maladie.

24.    Le dossier a été soumis au Dr E_________, spécialiste FMH en orthopédie, qui a établi un avis en date du 20 novembre 2012. Après avoir résumé les pièces médicales, le médecin précité a relevé qu’un problème de maladie, sous la forme d’un kyste poplité, semblait accompagner la convalescence. S’agissant de ce kyste, on ne pouvait établir un lien de causalité pour le moins probable avec le traumatisme assuré, en raison de l’absence d’indication dans les certificats médicaux du dossier d’une contusion ou d’un autre événement au genou droit.

25.    Par décision du 22 novembre 2012, la SUVA a refusé la prise en charge des prestations liées aux troubles du genou droit, considérant que le lien de causalité entre l’événement du 1er septembre 2011 et les troubles de ladite articulation n’était pas certain ou du moins établi au degré de la vraisemblance prépondérante.

26.    Cette décision a notamment été envoyée à l’assurance-maladie de l’assuré, HELSANA ASSURANCES SA, qui y a fait opposition, provisoirement, par courrier du 29 novembre 2012.

27.    Quant à l’assuré, il a fait opposition à la décision du 22 novembre 2012 en date du 5 décembre 2012, relevant que le Dr E_________ ne l’avait pas examiné et constatant qu’avant l’accident assuré, il n’avait jamais souffert de ce genou. Il était donc sain et ne présentait aucune lésion.

28.    Par courrier du 20 décembre 2012, l’assuré a refusé, pour des motifs familiaux, le séjour à la CLINIQUE ROMANDE DE READAPTATION proposé par la SUVA.

29.    En raison d’une protrusion ostéo-cartilagineuse de la greffe en mosaïque de la rotule au genou gauche, une nouvelle arthroscopie, tendant à l’égalisation ostéo-cartilagineuse, a été effectuée le 10 décembre 2012.

30.    Le 16 janvier 2013, une IRM du genou droit a été effectuée. Selon le rapport y relatif, daté du même jour, les atteintes suivantes ont été constatées : une fissuration horizontale des cornes moyenne et postérieure du ménisque interne se prolongeant par une déchirure fragmentant focalement le bord libre, bordé d’une chondropathie fémoro-tibiale interne à focalisation condylienne au stade III, une discrète chondropathie fémoro-patellaire ainsi que de probables séquelles de déchirure proximale du ligament collatéral interne.

31.    Copie du rapport du 16 janvier 2013 a été adressée à la SUVA, par courrier du 20 janvier 2013, par l’assuré.

32.    Dans un rapport intermédiaire du 21 février 2013, le Dr B_________ a considéré que l’évolution, au niveau du genou gauche, était lentement favorable, avec une diminution des épisodes de gonflement, une récupération d’une mobilité, quelques grincements rotuliens en parties physiologiques. Des douleurs à la charge étaient toujours constatées. Le pronostic était favorable mais la reprise du travail n’était toujours pas prévue.

33.    Le dossier médical de l’assuré a été soumis au Dr E_________ pour un complément d’appréciation s’agissant du genou droit. Dans un avis du 11 mars 2013, le médecin précité a considéré que l’échographie et l’IRM démontraient assez clairement l’existence d’un état antérieur, avec la présence de lésions de type chondropathie fémoro-tibiale interne et chondropathie fémoro-patellaire, qui n’étaient pas d’origine traumatique mais dégénérative. Quant au kyste poplité, il ne pouvait pas non plus être considéré comme une pathologie traumatique. Après avoir relevé que dans la déclaration d’accident ainsi que sur les certificats établis dans les six mois suivant l’événement traumatique, le genou droit n’était pas mentionné, le Dr E_________ a considéré que la symptomatologie au niveau de cette articulation était de type maladif, sans qu’il n’existât une relation de causalité au degré de la probabilité entre l’accident assuré et les lésions constatées.

34.    Par décision sur opposition du 18 mars 2013, la SUVA a confirmé sa décision du 22 novembre 2012, considérant qu’il n’existait aucun élément permettant de douter du bien-fondé du rapport du Dr E_________. Par ailleurs, le fait que l’assuré ne souffrait pas de son genou avant l’accident n’était pas pertinent. Enfin, la SUVA relevait que l’assurance-maladie avait accepté d’engager sa responsabilité.

35.    Quant à HELSANA, elle a retiré son opposition du 29 novembre 2012, par courrier du 28 mars 2013, précisant toutefois que cela ne signifiait pas qu’elle était d’accord avec l’évaluation de la SUVA mais qu’elle n’entendait pas effectuer d’action juridique.

36.    Suspectant un dérangement interne du genou droit, avec des lésions méniscales internes et une chondropathie de stade III du condyle interne en zone de charge, le Dr B_________ a procédé, en date du 11 mars 2013, aux interventions suivantes : arthroscopie, ménisectomie partielle, shaving et micro-fractures.

37.    Par écriture du 17 avril 2013, l’assuré (ci-après : le recourant) interjette recours concluant, sous suite de frais et dépens, principalement à l’annulation de la décision sur opposition du 18 mars 2013 et à la prise en charge, par la SUVA, de l’intégralité des frais découlant des troubles du genou droit, subsidiairement à la réalisation d’une expertise médicale, à la constatation que les troubles subis sont en lien de causalité avec l’accident assuré, à l’annulation de la décision entreprise et au renvoi de la cause à la SUVA pour nouvelle décision au sens des considérants. A l’appui de son recours, il explique notamment que s’il n’avait pas dû reporter tout son poids sur son genou droit en raison de l’accident à son genou gauche, le genou litigieux n’aurait pas été atteint ou du moins pas de la même manière. Le lien de causalité tant naturelle qu’adéquate était dès lors établi au degré de la vraisemblance prépondérante. En effet, les Drs B_________, F_________ et G_________ avaient fait état de « fatigue », « zone de charge » et « zones de surcharge ».

38.    Le même jour, le Dr B_________ a adressé à la SUVA un rapport intermédiaire portant sur le genou gauche, répétant les diagnostics d’ores et déjà connus et qualifiant l’évolution de lentement favorable depuis l’arthroscopie, avec une décrue progressive de l’épanchement mais toutefois la persistance de craquements à la flexion complète. L’assuré supportait bien la charge complète et constante imposée par la décharge du genou droit récemment opéré. Le pronostic était plutôt favorable mais il était peu probable que l’assuré pût retrouver une capacité de travail dans tous les métiers de la construction. Une demande de reclassement auprès de l’assurance-invalidité était en cours.

39.    Le 17 juin 2013, sous la plume de son Conseil, la SUVA (ci-après : l’intimée) répond au recours, concluant à son rejet. A l’appui de sa position, elle rappelle qu’il n’a jamais été fait mention, dans les pièces médicales du dossier, au cours des mois qui ont suivi l’accident assuré, d’une lésion éventuelle du genou droit. Par ailleurs, la nature maladive des lésions de ce genou a été confirmée par le Dr E_________ dans une appréciation médicale contre laquelle le recourant lui-même n’apporte aucun argument concret susceptible de jeter un doute sur le bien-fondé des prises de position motivées. Il n’explique pas non plus les raisons pour lesquelles l’avis du Dr E_________ ne serait pas concluant, vierge de contradictions intrinsèques ou infondé. Pour la défenderesse, ladite appréciation dispose donc d’une entière valeur probante.

40.    Sur quoi, le cas a été gardé à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA; RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        A teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Toutefois, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA; il n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 345 consid. 3).

3.        Le délai de recours est de 30 jours (art. 60 al. 1 LPGA). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable, en vertu des art. 56ss LPGA.

4.        Le litige porte sur le refus, par la SUVA, de prendre en charge les suites de l’atteinte au genou droit et singulièrement sur l’existence d’un lien de causalité naturelle entre l’accident assuré et l’atteinte au genou droit.

5.        a) Aux termes de l'art. 6 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA). La notion d'accident se décompose ainsi en cinq éléments ou conditions, qui doivent être cumulativement réalisés: une atteinte dommageable; le caractère soudain de l'atteinte; le caractère involontaire de l'atteinte; le facteur extérieur de l'atteinte; enfin, le caractère extraordinaire du facteur extérieur. Il suffit que l'un d'entre eux fasse défaut pour que l'événement ne puisse pas être qualifié d'accident (ATF non publié 8C_520/2009 du 24 février 2010, consid. 2).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 461 consid. 5a et les références).

b/aa) Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit que l'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs, ait provoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré, c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci. Ainsi, l’assureur-accidents doit également prendre en charge les causes indirectes d’un accident (RAMA 2003 no. U 487 p. 337 consid. 5.2.2; ATF non publiés 8C_684/2008 du 5 janvier 2009 consid. 5.1 et 8C_444/2008 du 23 décembre 2008 consid. 5).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement «post hoc, ergo propter hoc»; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb p. 341; RAMA 1999 no U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

b/bb) Le Tribunal fédéral a notamment considéré qu’un mauvais appui en raison d’une blessure au pied ou à la jambe ou encore un raccourcissement de la jambe, etc. peuvent entraîner des douleurs au dos, pouvant être qualifiées de séquelles accidentelles indirectes (RAMA 2003 n°U 38/01 p. 337 consid. 5.5.2, ATF non publié U 522/06 du 12 octobre 2007, consid. 5.1). Cependant, une boiterie d’évitement n’est pas propre à causer une surcharge des vertèbres en l’absence d’une déformation grave supplémentaire (comme une différence de la longueur des jambes ou d’une arthrose de la hanche) (ATF non publié 8C_248/2008 du 4 juillet 2008, consid. 3.2). Dans ce contexte, notre Haute Cour a également considéré que les symptômes d’un mauvais appui en tant que séquelle indirecte d’un accident pouvaient apparaître tardivement (voir ATF non publié 8C_684/2008 du 5 janvier 2009 consid. 5.2 et ATFA non publié U 303/06 consid. 6.2.1).

c) Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 2.2 et ATF 125 V 460 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb; ATFA non publié U 351/04 du 14 février 2006, consid. 3.2). En d’autres termes, en présence d’une atteinte à la santé physique, les liens de causalité naturelle et adéquate se recouvrent en grande partie (ATF 134 V 109 consid. 2).

6.        a) En vertu de la maxime d'office, l'administration et le juge doivent veiller d'office à l'établissement exact et complet des faits pertinents. Sont pertinents tous les faits dont l'existence peut influencer d'une manière ou d'une autre le jugement relatif à la prétention. Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, les autorités administratives et les juges des assurances sociales doivent procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Ils ne peuvent ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994, 220 consid. 4a). Les parties sont donc en principe - sous réserve du devoir de collaborer à l'instruction de l'affaire - dispensées de l'obligation de prouver (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références). Pour autant, elles ne sont pas libérées du fardeau de la preuve, en ce sens qu'en cas d'absence de preuve, la décision sera défavorable à la partie qui voulait déduire un droit de l'état de fait non prouvé (ATF 117 V 264 consid. 3b et les références; RAMA 1999 n° U 349 p. 478 consid. 2b).

b) Selon le principe de la libre appréciation des preuves, qui s’applique aussi bien en procédure administrative qu’en procédure de recours de droit administratif (art. 40 PCF en corrélation avec l’art. 19 PA ; art. 95 al. 2 OJ en liaison avec les art. 113 et 132 OJ), l’administration ou le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Lorsque les rapports médicaux sont contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. A cet égard, l'élément déterminant n'est ni l'origine, ni la désignation du moyen de preuve comme rapport ou expertise, mais son contenu. Il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et, enfin, que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3a).

c) Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins de la SUVA aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions soient sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permette de mettre en cause leur bien-fondé.

c/aa) Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d).

c/bb) Par ailleurs, en ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb et cc).

d) Le juge cantonal qui estime que les faits ne sont pas suffisamment élucidés a en principe le choix entre deux solutions : soit renvoyer la cause à l'assureur pour complément d'instruction, soit procéder lui-même à une telle instruction complémentaire. Un renvoi à l'assureur, lorsqu'il a pour but d'établir l'état de fait, ne viole ni le principe de simplicité et de rapidité de la procédure, ni le principe inquisitoire. Il en va cependant autrement quand un renvoi constitue en soi un déni de justice (par exemple, lorsque, en raison des circonstances, seule une expertise judiciaire ou une autre mesure probatoire serait propre à établir l'état de fait), ou si un renvoi apparaît disproportionné dans le cas particulier (ATF non publié 9C_162/2007 du 3 avril 2008 consid. 2.3). A l'inverse, le renvoi à l'assureur apparaît en général justifié si celui-ci a constaté les faits de façon sommaire, dans l'idée que le tribunal les éclaircirait comme il convient en cas de recours (DTA 2001 n° 22 p. 170 consid. 2). Le Tribunal fédéral a récemment précisé cette jurisprudence, en indiquant qu'un renvoi à l'administration est en principe possible lorsqu'il s'agit de trancher une question qui n'a jusqu'alors fait l'objet d'aucun éclaircissement, ou lorsqu'il s'agit d'obtenir une clarification, une précision ou un complément quant à l'avis des experts interpellés par l'autorité administrative; a contrario, une expertise judiciaire s'impose lorsque les données recueillies par l'administration en cours d'instruction ne revêtent pas une valeur probante suffisante sur des points décisifs (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.4 et 4.4.1.5).

7.        En l’espèce, l’intimée se fonde sur deux appréciations du Dr E_________ pour refuser de prendre en charge les suites de l’atteinte au genou droit, considérant que lesdits troubles ne sont pas d’origine traumatique, mais maladive, de sorte qu’il y a lieu de nier le lien de causalité avec l’accident. Il convient donc d’examiner la valeur probante de ces deux rapports.

a) La Cour relève, en premier lieu, que les appréciations du Dr E_________ se fondent sur un dossier qui contient suffisamment d’appréciations de médecins ayant personnellement examiné le recourant, de sorte qu’une pleine valeur probante peut leur être reconnue pour autant que les autres conditions soient réalisées. S’agissant de ces dernières, la Cour de céans ne peut toutefois se prononcer pour les motifs suivants.

Dans ses deux appréciations, le Dr E_________ a examiné la question uniquement sous l’angle du lien de causalité directe. Or, dans un courriel du 11 novembre 2012, le Dr B_________ a indiqué que les symptômes (épanchements à répétition et importantes douleurs) étaient certainement liés à une surcharge après un an de cannes et d’appui, ce qui tendrait à retenir un lien de causalité naturelle indirecte (voir ATF U 210/04 consid. 4.2 et l’ATF non publié 8C_684/2008 du 5 janvier 2009, dans lesquels le Tribunal fédéral a renvoyé la cause pour instruction complémentaire sur l’existence d’un lien de causalité indirecte).

Ainsi, dans la mesure où le Dr E_________ ne se prononce pas sur la question du lien de causalité naturelle indirecte, son rapport est lacunaire et la Cour de céans ne peut s’y fier pour se prononcer sur la validité des décisions prises par la SUVA. On ne saurait toutefois nier toute valeur probante aux rapports du Dr E_________, ce dernier ne s’étant en réalité jamais prononcé sur la question du lien de causalité indirecte entre l’accident assuré et les troubles au genou droit.

Partant, dès lors qu'il s'agit en réalité de trancher une question qui n'a, jusqu'alors, fait l'objet d'aucun éclaircissement (causalité indirecte), il y a lieu de renvoyer la cause à l’intimée, pour qu’elle procède à une instruction médicale complémentaire sur la question de la causalité indirecte, en mandatant un spécialiste FMH en orthopédie pour expertise. Ce n’est que lorsque l’expert se sera prononcé sur cette question que l’instruction médicale sera complète et que le bien-fondé de la décision de la SUVA pourra être examiné.

8.        Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis. La décision sur opposition du 18 mars 2013 et la décision du 22 novembre 2012 qu’elle confirme seront annulées et la cause sera renvoyée à l’intimée pour instruction médicale complémentaire au sens des considérants.

Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de 1'500 fr. lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement et annule la décision sur opposition du 18 mars 2013 et la décision du 22 novembre 2012.

3.        Renvoie la cause à l’intimée pour instruction médicale complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

4.        Condamne la SUVA à payer au recourant la somme de 1'500 fr. à titre de participation à ses frais et dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nancy BISIN

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le