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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3256/2017

ATAS/306/2018 du 11.04.2018 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3256/2017 ATAS/306/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 11 avril 2018

4ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à Meyrin, représentée par B______ SA

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après l’assurée ou la recourante), née le ______ 1941, divorcée, a demandé des prestations complémentaires au service des prestations complémentaires (ci-après le SPC ou l’intimé) le 24 mai 2016. Elle annonçait détenir des avoirs à hauteur de CHF 43'680.-, lesquels étaient répartis sur deux comptes ouverts auprès de la BCGE.

2.        À l'appui de sa demande, elle a transmis au SPC ses avis de taxation dont il ressort que le montant de sa fortune s'élevait à :

-          CHF 341'926.- au 31 décembre 2007 ;

-          CHF 315'468.- au 31 décembre 2008 ;

-          CHF 265'230.- au 31 décembre 2009 ;

-          CHF 231'424.- au 31 décembre 2010 ;

-          CHF 187'710.- au 31 décembre 2011 ;

-          CHF 139'911.- au 31 décembre 2012 ;

-          CHF 96'127.- au 31 décembre 2013 ;

-          CHF 70'869.- au 31 décembre 2014.

Il en ressort également que l'assurée a eu des frais bancaires et médicaux s'élevant au total à CHF 458.- en 2008, CHF 3'211.- en 2009, CHF 2'521.- en 2010, CHF 884.- en 2011, CHF 526.- en 2012, CHF 618.- en 2013, CHF 4'556.- en 2014 et CHF 414.- en 2015.

3.        Le 1er juillet 2016, elle a indiqué au SPC que sa fortune avait passé de CHF 11'772.- à CHF 341'926.- au 31 décembre 2007 à la suite de la vente de son chalet. Depuis lors, elle avait prélevé de l'argent de son compte pour compléter son train de vie.

4.        Par décision du 4 octobre 2016, le SPC a informé l’assurée que le droit aux prestations complémentaires lui était refusé, car les dépenses reconnues étaient entièrement couvertes par le revenu déterminant. Il avait pris en compte, dans son calcul des prestations dès le 1er mai 2016, CHF 75'816.- de biens dessaisis (donation, diminution non justifiée ou sans contre-prestation équivalente).

Cette décision était fondée sur un tableau de diminution d’épargne établi par le SPC qui indique, notamment, les dépenses justifiées prises en compte (frais bancaires et frais médicaux selon avis de taxation du 31 décembre 2007 au 31 décembre 2013) et les montants dessaisis, soit CHF 59'556.- pour les années 2008 et 2009, CHF 51'636.- pour les années 2010 et 2011 et CHF 34'624.- pour les années 2012 et 2013.

5.        Le 15 novembre 2016, l’assurée a formé opposition à la décision précitée, faisant valoir que le plan de calcul des prestations complémentaires du SPC présentait des inexactitudes. Le SPC avait pris à tort en compte dans ses revenus une pension alimentaire de CHF 18'618.-, car elle n'en percevait pas. Il n'aurait pas dû non plus tenir compte de fonds dessaisis à hauteur de CHF 75'816.-, car elle n'avait pas procédé à des donations et il n'y avait pas de fonds dessaisis. La diminution de sa fortune mobilière résultait uniquement de ses dépenses privées. La somme de CHF 75'816.- devait donc être supprimée des calculs du SPC.

6.        Le 24 novembre 2016, le SPC a invité l’assurée à justifier les dépenses qu’elle mentionnait avoir eues à sa charge durant les années 2008 à 2013 en lui fournissant la copie des factures de ses dépenses. Il ressortait en effet de son épargne des baisses importantes durant ces années, au sujet desquelles elle n’avait pas fourni de justificatifs. C’était pour ce motif qu’un dessaisissement avait été pris en compte.

7.        Le 8 décembre 2016, l’assurée a remis au SPC un tableau récapitulatif de ses dépenses annuelles au cours des années 2007 à 2014, précisant que les chiffres mensuels portés dans cette récapitulation provenaient des livrets de récépissés postaux qui étaient à sa disposition. Il s'agissait, notamment, des loyers, de l’assurance-maladie, des frais de téléphone et des frais médicaux, soit ses paiements postaux. Elle avait en outre payé par virements bancaires des voyages au Canada, des habits et de la nourriture. Il ressortait de son tableau que ses dépenses courantes étaient plus élevées que ses revenus. En conséquence, elle avait prélevé sur son compte d’épargne le complément nécessaire. Il n’y avait donc eu aucun dessaisissement.

8.        Par décision sur opposition du 13 juillet 2017, le SPC a confirmé sa décision s’agissant de la prise en considération du bien dessaisi dans la fortune. Le tableau récapitulatif des dépenses produit par l’assurée concernait pour la plupart des éléments déjà pris en compte dans les besoins vitaux. Ces derniers étaient : alimentation, habillement et chaussures, logement et énergie, aménagement du logement et tenue courante du ménage, hygiène, transports et communication, loisirs et culture, autres biens et services, soins corporels, restauration, vacances, cotisations pour des associations. Partant, le SPC n’avait pas pris en compte l’ensemble des factures présentées pour les dépenses susmentionnées, considérant qu’elles entraient dans le barème des besoins vitaux.

S’agissant de la pension alimentaire, le SPC avait pris en compte les explications contenues dans l’opposition et établi de nouveaux plans de calcul, ne tenant pas compte du montant de la pension alimentaire depuis le début du droit aux prestations complémentaires. Il ressortait des nouveaux plans de calcul des arriérés de prestations en faveur de l’assurée à hauteur de CHF 3'903.-, lesquels lui seraient versés le mois suivant, et qu'elle avait droit à des prestations complémentaires à hauteur de CHF 305.- qui lui seraient versées dès le mois suivant.

9.        Le 3 août 2017, l’assurée a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Elle ne travaillait plus depuis l’année 2006 et percevait une rente AVS de CHF 1'700.- à CHF 1'800.- mensuellement, représentant ses seuls revenus. Elle avait prélevé sur son compte épargne les fonds nécessaires à son train de vie qui se situait en moyenne à CHF 4'500.- par mois. Le tableau remis récapitulait ses dépenses mensuelles au cours des années 2007 à 2014. Ses dépenses étaient, notamment, les loyers, l’assurance-maladie, le téléphone, les frais médicaux, l’électricité. À ces dépenses récurrentes s’ajoutait un voyage au Canada presque chaque année soit en moyenne CHF 2'400.- six ans sur huit. Elle avait également acheté un véhicule pour la somme de CHF 22'900.-.

Son épargne en 2007 était de  : CHF 342'000.-

et sa rente AVS (moyenne CHF 21'000.- x 8 ans)  : CHF 168'000.-

soit un disponible de  : CHF 510'000.- .

S’agissant de ses charges :

-          train de vie (CHF 4'500.- x 12 x 8) : CHF 432'000.-

-          voyages au Canada (CHF 2'400.- x 6) : CHF 14'400.-

-          achat d’une automobile : CHF 22'900.-

soit au total : CHF 469'300.-

Solde : CHF 40'700.- (CHF 510'000.- – CHF 469'300.-).

Son avoir en banque au 31 décembre 2016 était de CHF 43'680.-. La démonstration était ainsi faite qu’au cours des huit dernières années, de 2007 à 2014, le montant de son épargne avait été utilisé exclusivement pour couvrir ses dépenses de train de vie et ses dépenses diverses dépassant les revenus. Il n’y avait jamais eu de dessaisissement ni dans les faits ni juridiquement. En conséquence, elle concluait à l’annulation de la décision du 13 juillet 2017 et à ce qu’il soit demandé au SPC de déterminer à nouveau son droit aux prestations complémentaires en supprimant la notion de bien dessaisis, sous suite de dépens.

À l’appui de son recours, l’assurée a produit, notamment, des copies de billets d’avion du 5 octobre 2016 et du 4 novembre 2016 relatifs à un voyage au Canada.

10.    Par réponse du 1er septembre 2017, le SPC a conclu au rejet du recours, se référant à la motivation de sa décision du 13 juillet 2017. Il relevait avoir sollicité par deux fois la recourante pour qu’elle justifie la diminution de ses avoirs relatifs à la vente d’un bien immobilier entre le 31 décembre 2007 et le 31 décembre 2014. Il ne pouvait donc lui être reproché de ne pas avoir fait la demande des factures justifiant les dépenses de la recourante. Le tableau de diminution d’épargne établi par le SPC indiquait les dépenses justifiées prises en compte, soit les frais bancaires ainsi que les frais médicaux, sur la base des avis de taxation du 31 décembre 2007 au 31 décembre 2013. Il en ressortait que la décision sur opposition ainsi que la décision de prestations complémentaires du 4 octobre 2016 avaient été établies sur la base des justificatifs fournis. Aucun autre justificatif n’ayant été produit, la recourante devait supporter les conséquences de l’absence de preuves (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 4/05 du 29 août 2005 consid. 5.3.3). Si la recourante apportait de nouvelles factures justifiant de la diminution de ses avoirs, elles seraient prises en compte dans le plan de calcul dès la date de connaissance.

11.    Le 22 septembre 2017, la recourante a observé que le SPC prétendait qu’un ou des dessaisissements à hauteur de CHF 75'816.- avaient été pris en compte au cours des années 2007 à 2014. Le tableau récapitulatif remis le 8 décembre 2016 portait sur son train de vie et regroupait les dépenses mensuelles auxquelles elle avait dû faire face. À titre d’exemple, elle joignait à son courrier la copie des justificatifs de frais pour les dépenses encourues pour le mois de juin 2014. Ses frais récurrents se répétaient chaque mois de l’année. Ce tableau avait pour but de démontrer que les dépenses effectuées au cours des exercices 2007 à 2014, avec une moyenne annuelle de l’ordre de CHF 56'000.- avaient épuisé sa fortune et les revenus disponibles et qu’il n’y avait pas de liquidités susceptibles de réaliser ou de faire une donation ou un don sans contreprestation équivalente. Il n’y avait donc pas eu de dessaisissement. La totalité des fonds disponibles avait servi à couvrir les dépenses liées à son train de vie, compte tenu de ses dépenses de voyages et de l’acquisition d’une automobile. La détermination de la fortune retenue pour le calcul des prestations complémentaires ne devait pas englober un montant au titre de dessaisissement.

À l’appui de son courrier du 22 septembre 2017, la recourante a produit :

-          une liste établie le 30 juin 2014 intitulée « paiements ménage » :

o   Rosset & Cie juillet 2014 : CHF 1'189.-

o   Parking : CHF 50.-

o   Mutuelle assurance juillet 2014 : CHF 841.65

o   Garage Favrod facture 10 juin 2014 : CHF 131.45

o   Swisscom facture 10 juin 2014 : CHF 237.-

o   SI facture du 16 avril au 19 juin 2014 : CHF 28.75

o   Assurance locataire mai 2014 : CHF 20.-

o   Fondation Barry : CHF 25.- 

o   Total CHF 2'522.85

o   Billag : CHF 40.-

o   Allianz : CHF 100.- ;

-          une facture de primes établie par Groupe Mutuel assurance-maladie pour la LAMal et la LCA à hauteur de CHF 841.65 du 1er avril au 30 juin 2014 ;

-          une facture établie par Swisscom SA facture réseau fixe pour deux mois (du 1er  avril au 31 mai 2014) à hauteur de CHF 237.- ;

-          une facture établie par les Services Industriels de Genève estimée pour la période du 16 avril au 19 juin 2014 à CHF 35.40 ;

-          une facture pour association des locataires de Meyrin Sud-Ouest (mai 2014) à hauteur de CHF 20.- ;

-          une facture établie par le garage D. Favrod le 10 juin 2014 pour des travaux de réparation à hauteur de CHF 131.45 ;

-          une facture établie par Rosset Immobilier à hauteur de CHF 50.- pour un parking et CHF 1'189.- pour un appartement de cinq pièces pour juillet 2014 ;

-          une copie du carnet de paiements de La Poste de l’assurée pour l’année 2014 dont il ressort que les bénéficiaires des virements sont Mutuel assurance-maladie, Rosset & Cie, Swisscom, les Services Industriels, UBS AG (UBS card center), garage Favrod, service cantonal des véhicules, Zürich Allianz, le Touring Club Suisse.

12.    Le 17 octobre 2017, le SPC a relevé que les preuves apportées avec la dernière écriture de la recourante ne pouvaient être retenues au titre de dépenses justifiées car elles étaient déjà incluses dans les besoins vitaux comme expliqué dans le préavis du 1er septembre 2017. Il s’agissait des frais d’électricité et de communication, des impôts, du loyer, des assurances et des dons. La recourante n’avait pas produit de nouvelles factures à titre de dépenses justifiées.

13.    Lors d'une audience devant la chambre de céans du 14 mars 2018, la recourante a déclaré qu'elle voulait démontrer par les pièces produites qu'elle n'avait pas donné de sommes d’argent à qui que ce soit, mais qu’elle avait utilisé l’argent de son compte pour ses propres dépenses. Elle ne voyait pas ce qui, dans ses dépenses courantes, pouvait être considéré comme du dessaisissement. Elles correspondaient au minimum pour vivre correctement. Sa seule dépense plus importante avait été l’acquisition d’une voiture.

La représentante du SPC a indiqué que le SPC ne jugeait pas la qualité de vie de la recourante et que les dépenses qu’elle avait démontrées avaient été prises en considération, mais il se trouvait qu’en grande partie elles étaient comprises dans le forfait. Le SPC était prêt à examiner tout justificatif qui lui serait produit par la recourante.

14.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Les dispositions de la LPGA, en vigueur depuis le 1er janvier 2003, s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.        Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - RS/GE J 4 20] ; art. 43 LPCC).

4.        Le litige porte sur le bien-fondé de la prise en compte par le SPC de biens dessaisis dans le calcul des prestations complémentaires de la recourante.

5.        a. Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de vieillesse de l'assurance-vieillesse et survivants, conformément à l'art. 4 al. 1 let. a LPC.

Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1er LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. Les revenus déterminants comprennent notamment les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (art. 11 al. 1 let. g LPC).

L'art. 10 LPC énumère – de manière exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 9C_822/2009 du 7 mai 2010 consid. 3.3 et la référence, in SVR 2011 EL n° 2 p. 5) – les dépenses reconnues. Le montant destiné à la couverture des besoins vitaux, s'élève, par année, à CHF 19'290.- pour une personne seule (art. 10 al. 1 let. a ch. 1 LPC). Ce montant inclut notamment les frais de nourriture, d'habillement, de soins corporels, de consommation d'énergie (électricité, gaz, etc.), de communication, de transport ou de loisirs (CARIGIET/KOCH, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, 2ème éd. 2009, p. 134; JÖHL, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR] vol. XIV, Soziale Sicherheit, 2ème éd. 2007, p. 1694 n. 86). Selon la jurisprudence, les impôts – courants ou arriérés – ne font pas partie des dépenses reconnues énumérées à l'art. 10 LPC. Il convient néanmoins d'admettre qu'ils sont compris, indépendamment de leur importance, dans le montant forfaitaire destiné à la couverture des besoins vitaux (JÖHL, op. cit., p. 1724 n. 132).

Les dépenses reconnues comprennent notamment le loyer d’un appartement et les frais accessoires y relatifs, et ce, jusqu’à concurrence de CHF 13'200.- par an pour les personne seules (art. 10 al. 1 let. b LPC).

6.        En vertu de l’art. 7 LPCC, la fortune comprend la fortune mobilière et immobilière définie par la LPC et ses dispositions d'exécution (al. 1). La fortune est évaluée selon les règles de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), à l'exception notamment des règles concernant les déductions sociales sur la fortune, prévues aux art. 50 let. e, et 58 de ladite loi, qui ne sont pas applicables. Les règles d'évaluation prévues par la LPC et ses dispositions d'exécution sont réservées (al. 2).

Selon l’art 49 al. 1 LIPP, l'état de la fortune mobilière et immobilière est établi au 31 décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû.

Le chiffre 3444.01 des Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI [ci-après DPC], valables dès le 1er avril 2011, précise que l’estimation des parts de fortune à prendre en compte doit s’effectuer selon les principes prévus par la législation sur l’impôt cantonal direct du canton de domicile. Est déterminante la valeur de la fortune retenue par le fisc avant la déduction des montants exempts d’impôt.

7.        Par dessaisissement, il faut entendre, en particulier, la renonciation à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique ni contre-prestation équivalente (ATF 123 V 35 consid. 1; ATF 121 V 204 consid. 4a). Pour vérifier s'il y a contre-prestation équivalente et pour fixer la valeur d'un éventuel dessaisissement, il faut comparer la prestation et la contre-prestation à leurs valeurs respectives au moment de ce dessaisissement (ATF 120 V 182 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_67/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1). Il y a également dessaisissement lorsque le bénéficiaire a droit à certains éléments de revenu ou de fortune mais n'en fait pas usage ou s'abstient de faire valoir ses prétentions, ou encore lorsqu'il renonce à exercer une activité lucrative possible pour des raisons dont il est seul responsable (ATF 123 V 35 consid. 1).

Les conditions pour la prise en compte d'un dessaisissement de fortune sont alternatives. Pour qu'un dessaisissement de fortune puisse être pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires, la jurisprudence soumet cet acte à la condition qu'il ait été fait « sans obligation juridique », respectivement « sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente ». Les deux conditions précitées ne sont pas cumulatives, mais alternatives (ATF 131 V 329 consid. 4.3).

Une contre-prestation peut être considérée comme adéquate lorsqu’elle n’entame pas la fortune ou au contraire l’augmente, mais également lorsqu’elle consiste en des dépenses destinées à l’acquisition de biens de consommation (Ralph JÖHL, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, SBVR, 2ème éd. 2006, p. 1807 n° 234). Le Tribunal fédéral a considéré qu'il n'y avait pas dessaisissement dans le cas d'une assurée ayant épuisé sa fortune après avoir vécu dans un certain luxe
(ATF 115 V 352 consid. 5b). L'existence d'un dessaisissement de fortune ne peut être admise que si l'assuré renonce à des biens sans obligation légale ni contre-prestation adéquate. Lorsque cette condition n'est pas réalisée, la jurisprudence considère qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'une fortune (hypothétique) dans le calcul de la prestation complémentaire, même si l'assuré a pu vivre au-dessus de ses moyens avant de requérir une telle prestation. En effet, il n'appartient pas aux organes compétents en matière de prestations complémentaires de procéder à un contrôle du mode de vie des assurés ni d'examiner si l'intéressé s'est écarté d'une ligne que l'on pourrait qualifier de « normale » et qu'il faudrait au demeurant préciser. Il convient bien plutôt de se fonder sur les circonstances concrètes, à savoir le fait que l'assuré ne dispose pas des moyens nécessaires pour subvenir à ses besoins vitaux, et - sous réserve des restrictions découlant de l'art. 3c al. 1 let. g LPC - de ne pas se préoccuper des raisons de cette situation (VSI 1994 p. 225 s. consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 65/04 du 29 août 2005 consid. 5.3.1).

Il y a lieu de prendre en compte dans le revenu déterminant tout dessaisissement sans limite de temps (Pierre FERRARI, Dessaisissement volontaire et prestations complémentaires à l'AVS/AI, in RSAS 2002, p. 420).

À teneur de l'art. 17a de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI -RS 831.301), la part de fortune dessaisie à prendre en compte (art. 11 al. 1
let. g LPC) est réduite chaque année de CHF 10'000.- (al. 1). La valeur de la fortune au moment du dessaisissement doit être reportée telle quelle au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement, pour être ensuite réduite chaque année (al. 2). Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).

On présume ainsi que l'ayant droit, à supposer qu'il ne se soit pas dessaisi de sa fortune, en aurait mis une partie à contribution pour subvenir à ses besoins; l'amortissement prévu par cette disposition n'est cependant admis que sous la forme d'un forfait indépendant du montant exact de la fortune dessaisie ou de celle dont dispose encore l'ayant droit (cf. ATF 118 V 150 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 5.2.). Le Tribunal fédéral a admis la conformité de cette disposition à la loi et à la Constitution (ATF 118 V 150
consid. 3c/cc).

Conformément à cette disposition, il faut qu'une année civile entière au moins se soit écoulée entre le moment où l'assuré a renoncé à des parts de fortune et le premier amortissement de fortune (Ralph JÖHL, Die Ergänzungsleistung und ihre Berechnung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, p. 1816 n. 247).

La somme dessaisie est ensuite réduite chaque année de CHF 10'000.-. En cas de dessaisissements successifs, le solde du premier est additionné au second lorsque celui-ci intervient et le total est réduit de CHF 10'000.- par année (DPC n°3483.06 et 3483.07, p. 242).

En outre, conformément à l'art. 3c al. 1 let. b LPC, il convient de tenir compte, dans le calcul des revenus déterminants, du produit hypothétique de la part de fortune dont l'assuré s'est dessaisi.

8.        Les dispositions applicables en matière de prestations complémentaires cantonales instaurent un régime similaire. L’art. 4 LPCC prévoit qu’ont droit aux prestations les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable. Le revenu déterminant est calculé conformément aux dispositions fédérales, de sorte qu’il comprend également les ressources dont un ayant droit s’est dessaisi (art. 5 al. 1 LPCC). Les dépenses reconnues sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion du montant destiné à la couverture des droits vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 2 (art. 6 LPCC).

Le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti s'élève, dès le 1er janvier 2015, à CHF 25'661.-, s’il s’agit d’une personne célibataire, veuve, divorcée, dont le partenariat enregistré a été dissous, ou qui vit séparée de son conjoint ou de son partenaire enregistré (art. 3 al. 1 let. a règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03). En outre, la jurisprudence en matière de biens dessaisis s’applique mutatis mutandis en matière de prestations complémentaires cantonales (ATAS/1290/2010 du 14 décembre 2010).

9.        Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références).

Lorsque des éléments de fortune ou de revenus ne sont plus à disposition, il incombe à l’assuré d’apporter la preuve qu’ils ont été remis en vertu d’une obligation légale ou moyennant une contre-prestation adéquate. L’exigence de cette preuve n’est toutefois pas absolue. Il suffit que l’assuré puisse prouver au degré de la vraisemblance prépondérante qu’il n’y pas eu dessaisissement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_934/2009 du 28 avril 2010 consid. 2 et les références). Une preuve doit être considérée comme apportée lorsque, d’un point de vue objectif, les motifs plaidant en faveur de ce qui est allégué sont si importants que les autres possibilités envisageables ne sauraient raisonnablement entrer en considération (arrêt du Tribunal fédéral 9C_732/2014 du 12 décembre 2014 consid. 4.1.1). En revanche, en l’absence de preuve, l’assuré doit accepter que l’on s’enquière des motifs de la diminution de fortune et que l’on tienne compte, le cas échéant, d’un revenu ou d’une fortune hypothétique (arrêt du Tribunal fédéral 9C_124/2014 du 4 août 2014 consid. 5 et les références). Les diminutions de fortune demeurées inexpliquées peuvent en effet être considérées comme un dessaisissement (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 59/02 du 28 août 2003 consid. 3.3). Avant de statuer en l'état du dossier, l'administration devra avertir la partie défaillante des conséquences de son attitude et lui impartir un délai raisonnable pour la modifier; de même devra-t-elle compléter elle-même l'instruction de la cause s'il lui est possible d'élucider les faits sans complications spéciales, malgré l'absence de collaboration d'une partie (cf. ATF 117 V 261 consid. 3b; ATF 108 V 229 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 59/02 du 28 août 2003 consid. 3.3 et les références).

10.    En l’espèce, la recourante n’a pas été en mesure de produire des quittances et des factures justifiant la diminution de ses comptes bancaires pour la période courant du 31 décembre 2007 au 31 décembre 2012. Les quittances qu'elle a produites concernent en effet des charges comprises dans le forfait des besoins vitaux, déjà pris en compte par le SPC selon l'art. 10 LPC, lequel inclut, notamment, les frais de nourriture, d'habillement, de soins corporels, de consommation, de communication, de transport ou de loisirs. Contrairement à ce que semble penser la recourante, un dessaisissement n'est pas seulement réalisé en cas de dons à des tiers, mais également lorsque que les dépenses du bénéficiaire des prestations ne sont pas justifiées. La recourante ne pouvait se contenter d'alléguer, sans le démontrer, qu'elle avait utilisé son patrimoine pour des dépenses liées à son train de vie. Il en résulte que, conformément à la loi et à la jurisprudence, l’intimé devait tenir compte à titre de biens dessaisis des montants correspondant à la diminution du patrimoine de la recourante intervenue entre 2007 et 2012, dont il n’est pas établi qu’ils ont servi à acquérir des biens ou des services.

La décision querellée doit en conséquence être confirmée, étant relevé que le montant retenu à titre de dessaisissement a correctement été établi par le SPC en tenant compte d'une réduction annuelle de CHF 10'000.- des montants dessaisis, conformément à l'art. 17a OPC-AVS/AI.

11.    Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.

12.    La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA ; art. 89H al. 1 LPA).

 


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le