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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/446/2021

ATAS/279/2022 du 25.03.2022 ( LAA )

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/446/2021 ATAS/279/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 25 mars 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Genève, représenté par ASSUAS Association suisse des assurés

 

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1976, a été employé de l’Aéroport international de Genève (ci-après : l’employeur) depuis le 1er janvier 2018.

b. Le 17 juin 2019, l’employeur a déclaré à la SUVA caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la SUVA ou l’intimée) que l’assuré avait eu un accident le 12 juin 2019. Il avait chuté à vélo, avec perte de connaissance et comme conséquences des contusions sur le côté (dos, main, visage) et une interruption du travail dès le lendemain.

c. La doctoresse B______, du service des urgences des Hôpitaux universitaires de Genève a indiqué, le 13 juin 2019, que l’assuré avait des douleurs à l’épaule droite et à la main gauche, sans limitation fonctionnelle, ni fracture. En cas de persistance des douleurs, il devait consulter un médecin. Un arrêt de travail à 100% lui était remis, à réévaluer par son médecin traitant.

d. Le 27 juin 2019, le docteur C______, médecine générale FMH, a prescrit des séances de physiothérapie à l’assuré (analgésie/anti-inflammatoire et amélioration des fonctions articulaire et musculaire).

e. Le 4 juillet 2019, la SUVA a alloué à l’assuré des prestations d’assurance pour les suites de son accident non professionnel du 12 juin 2019 en lui versant l’indemnité journalière dès le début de l’incapacité de travail, mais au plus tôt le 15 juin 2019.

f. Selon une IRM de l’épaule droite de l’assuré du 16 septembre 2019, il n’y avait pas de rupture de la coiffe des rotateurs, mais une tendinopathie insertionnelle du tendon du muscle supra-épineux, une contusion du muscle deltoïde et un kyste para-labral antéro-inférieur.

g. Le 23 septembre 2019, l’assuré a annoncé à la SUVA une rechute le 21 septembre 2019.

h. Dans un rapport du 17 octobre 2019, le docteur D______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur, a indiqué avoir vu en consultation l’assuré le 14 octobre 2019. Celui-ci avait présenté, environ un mois après son accident de vélo du 12 juin, une douleur au niveau de l’épaule droite dans la région de l’omoplate. Il avait subi une nouvelle chute, le 3 août, nécessitant la mise d’un plâtre au niveau du poignet avec une écharpe et ses douleurs de l’épaule s’étaient empirées. Cliniquement, le médecin avait constaté, le jour même, l’élévation antérieure active à 130 degrés, 150 degrés en passif, la rotation externe était à 60 degrés et la rotation interne main-dos à T12. Les tests de la coiffe étaient tous négatifs. Il notait un ressaut de l’omoplate avec des craquements dans la région du tubercule de Luschka. L’assuré présentait donc un snapping scapula post-traumatique. Le traitement était principalement conservateur. Si toutefois les craquements devenaient trop gênants et douloureux, une intervention de résection pourrait être effectuée. Le Dr D______ avait débuté par un traitement non chirurgical et proposait à l’assuré une infiltration écho-guidée de la bourse scapulo-thoracique avec possible ponction d’hématome.

i. Dans un rapport du 8 novembre 2019 relatif à une IRM de l’omoplate droite de l’assuré du 6 novembre 2019, il était conclu que celle-ci était dans les limites de la norme.

j. Selon un rapport médical établi le 4 décembre 2019, le Dr D______ avait revu l’assuré en consultation le 2 décembre. L’infiltration n’avait pas eu l’effet escompté, mais l’assuré avait pu retrouver une activité professionnelle 15 jours auparavant. L’assuré ne souhaitait pas poursuivre ce traitement conservateur au vu de la symptomatologie ressentie. Il était vrai que cliniquement cette dernière était tapageuse. Avec l’accord de l’assurance-accidents, le médecin planifierait l’endoscopie scapulo-thoracique avec résection du tubercule de Luschka.

k. Selon une notice téléphonique du 9 décembre 2019, une opération de l’épaule de l’assuré était prévue le 8 janvier 2020 par le Dr D______. L’assuré souhaitait toutefois encore obtenir un second avis.

l. Selon un rapport établi le 10 décembre 2019 par le docteur E______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, l’IRM n’avait pas montré de bursite thoraco-scapulaire, ni d’anomalie significative à son sens et notamment pas de problème avec la coiffe des rotateurs. L’examen auquel il avait procédé le même jour montrait des amplitudes articulaires complètes sans amyotrophie. Il avait l’impression d’une asymétrie de la mobilité des omoplates évoquant une dyskinésie scapulo-thoracique. Les craquements scapulo-thoraciques étaient bien perceptibles. Il n’avait pas constaté de déficit neurologique particulier, ni d’instabilité gléno-humérale ou acromio-claviculaire, ni lésion de la coiffe. Il n’avait pas l’habitude de la chirurgie endoscopique de ce type de conflit. Il était cependant frappé par l’absence de lésion réellement identifiable sur l’IRM et se demandait si un examen ENMG à la recherche d’une dysfonction, notamment du grand dentelé, ne pourrait pas éclairer la situation avant l’intervention chirurgicale.

m. Le 7 janvier 2020, le docteur F______, médecin des assurances, a estimé qu’il s’agissait d’un trouble fonctionnel scapulo-thoracique sans lésion organique objectivable et que la causalité naturelle entre l’intervention proposée et l’événement déclaré était tout au plus possible, sur la base du dossier médical à disposition.

n. Le 8 janvier 2020, la SUVA a informé l’assuré qu’il ressortait des pièces de son dossier médical qu’aucun lien de causalité certain, ou du moins probable, ne pouvait être établi entre l’événement dommageable du 12 juin 2019 et les troubles de son épaule droite qui nécessitaient un nouvel arrêt de travail. En conséquence, la SUVA ne pouvait plus lui allouer de prestations d’assurance dès le 21 septembre 2019.

o. Selon une notice téléphonique du 31 janvier 2020, la doctoresse G______, médecin praticien FMH, avait informé la SUVA que l’opération avait été annulée, car l’assuré refusait que les frais de l’opération soient pris en charge par l’assurance-maladie.

p. Le 10 février 2020, le Dr D______ a indiqué à la SUVA que le diagnostic était un snapping scapula post traumatique. Le traitement conservateur n’avait pas eu l’effet attendu et la symptomatologie de l’assuré s’était empirée. Au vu de l’absence d’effet du traitement conservateur, un traitement chirurgical devenait indiqué, à savoir une endoscopie scapulo-thoracique et une résection du tubercule de Luschka.

q. Le 10 février 2020, le docteur H______ a procédé à une échographie de l’épaule droite de l’assuré et conclu à une tendinopathie fissuraire non transfixiante du tiers moyen du supra-épineux et à une discrète bursite sous-acromio-deltoïdienne droite.

r. Le 20 février 2020, le docteur I______, spécialiste en chirurgie orthopédique FMH, médecin des assurances, a adressé un courrier au Dr D______ en lui transmettant un rapport de la Clinique romande de réadaptation qui concluait que l’indication opératoire n’était pas adaptée. Il s’agissait d’une pathologie non traumatique, qui n’était donc pas à la charge de la SUVA. L’assuré présentait une tendinopathie insertionnelle du tendon du muscle supra-épineux et l’IRM réalisée au mois de novembre 2019 ne permettait pas d’adhérer à sa proposition thérapeutique.

Le Dr I______ joignait en annexe un article rédigé en anglais sur le snapping scapula intitulé « association between snapping scapula, congenital hyperlaxity and folder hyperlaxity : a case study ».

B. a. Par décision du 26 février 2020, la SUVA a refusé de prendre en charge l’incapacité de travail de l’assuré dès le 21 septembre 2019 et l’intervention chirurgicale préconisée, faute de lien de causalité certain ou probable entre l’événement du 12 juin 2019 et les troubles déclarés dès le 21 septembre 2019.

b. Le 13 mars 2020, l’assuré, assisté d’ASSUAS, a formé opposition à la décision de la SUVA. Le 1er juin 2020, il a fait valoir que ses médecins traitants et physiothérapeutes mettaient unanimement en relation les diagnostics posés avec l’accident du 12 juin 2019, contrairement au Dr I______. Le rapport établi par ce dernier le 20 février 2020 reposait sur des renseignements anamnestiques sommaires, sans examen de l’assuré et sur un dossier médical incomplet, car celui-ci ne contenait pas les résultats de l’échographie du 10 février 2020. Or cette échographie démontrait plusieurs zones hypo-échogènes principalement à la face articulaire du tiers moyen du tendon suspect pour des fissurations non transfixiantes. Partant, il fallait constater que l’assuré présentait une lésion corporelle figurant dans la liste de l’art. 6 al. 2 LAA et qui devait être prise en charge par l’assureur-accidents. L’assuré s’était toujours plaint de douleurs à l’épaule droite dès son accident. Il avait fait preuve de compliance en suivant régulièrement des séances de physiothérapie afin d’éliminer les douleurs, mais cela avait été insuffisant, comme l’avait constaté le Dr D______. En conséquence, il fallait constater qu’il existait une causalité naturelle et adéquate entre l’accident du 12 juin 2019 et son affection, pour laquelle une endoscopie scapulo-thoracique avec résection du tubercule de Luschka était préconisée. L’assuré concluait à l’annulation de la décision du 26 février 2020 relative à la fin de la prise en charge des soins médicaux et de l’indemnité journalière du sinistre du 12 juin 2020 et, subsidiairement, à ce qu’il soit dit qu’il avait droit aux prestations de la SUVA en raison de son accident du 12 juin 2020 et de la rechute qui avait suivi.

c. Dans un rapport du 15 septembre 2020, le docteur J______, spécialiste en chirurgie orthopédique et médecin d’arrondissement de la SUVA, a indiqué que le ressaut de l’omoplate de l’assuré était attribué, selon le Dr D______, au tubercule de Luschka. Ce tubercule n’était toutefois pas objectivé sur l’IRM de l’omoplate et il n’y avait pas de bursite. L’IRM de l’omoplate du 6 novembre 2019 ne se retrouvait malheureusement pas dans le « pacs ». Il conseillait de compléter ce dernier par cette IRM et de demander une analyse scannographique de l’épaule droite de l’assuré, en particulier de sa surface thoracique, afin d’objectiver une protubérance osseuse caractéristique du tubercule de Luschka. Il reverrait la question de la causalité à la lumière de ces examens.

d. Le 18 septembre 2020, la SUVA a fait procéder à un scanner de l’omoplate droite de la paroi thoracique de l’assuré en vue d’objectiver une protubérance osseuse caractéristique du tubercule de Luschka.

e. Le 23 septembre 2020, le docteur K______, du Centre imagerie Servette de Genève, a procédé au scanner de l’épaule et de la paroi thoracique de l’assuré et conclu que le « CT » de l’omoplate droite était sans signe de complication post-opératoire, ni anomalie morphologique.

f. Le 22 décembre 2020, le Dr J______ a procédé à une appréciation orthopédique. Il a résumé les antécédents sur la base des pièces communiquées ainsi que la documentation radiologique. Sous appréciation, il a notamment mentionné qu’en ce qui concernait le scanner de l’épaule et de la paroi thoracique du 23 septembre 2020, celui-ci montrait un angle supérieur de l’omoplate droite ne portant pas de protubérance particulière et qui reflétait, selon l’appréciation du Dr K______, un état après résection de l’angle supéro-médial de l’omoplate droite. S’il y avait bien un élément qui ressortait de la littérature sur le ressaut scapulaire (snapping scapula), c’était que la source précise de ce problème restait très difficile à cerner, étant donné la multitude de facteurs généralement impliqués dans l’origine de cette symptomatologie. Dans ce contexte, on pouvait évoquer une hypermobilité articulaire généralisée. Il s’agissait aussi de tenir compte des particularités anatomiques au niveau du versant thoracique et de l’omoplate, considérant son angulation, la structure de sa surface, des incongruités et protubérances osseuses ainsi que des tumeurs bégnines.

Un autre facteur à considérer dans le contexte d’un snapping scapula était tous les troubles de la mobilité, donc les dyskinésies, dont l’origine pouvait être idiopathique, neurologique ou post-traumatique, en raison d’affections des structures musculaires ou nerveuses ou de formation de tissus cicatriciels et adhérentiels.

Il s’agissait également de tenir compte des bursites susceptibles de se développer, surtout au niveau des angles scapulaires internes où les excursions, lors de la mobilisation de l’omoplate, étaient les plus grandes.

Enfin, ces phénomènes de sursaut pouvaient être entretenus et favorisés ou même résulter d’autres pathologies de l’épaule, telles que l’atteinte de la coiffe ou du bourrelet, des problèmes au niveau de l’acromio-claviculaire ou de la sterno-claviculaire, des séquelles fracturaires au niveau de l’épaule ou de la clavicule etc. Certaines activités telles qu’on les retrouvait chez les athlètes pratiquant des sports de lancer ou la natation étaient également réputées favoriser les problèmes de sursaut scapulaire.

De nombreux travaux avaient essayé de trouver un point commun entre certaines structures ou particularité anatomiques et l’existence d’un sursaut de l’omoplate. Dr J______ citait à ce sujet le travail auquel avait participé le professeur L______, de l’Hôpital universitaire de Balgrist à Zurich, lors duquel il avait pu démontrer que la saillie osseuse au niveau du rebord supéro-interne de l’omoplate, dénommée tubercule de Luschka, ne pouvait pas être corrélée avec le phénomène de sursaut. À l’opposé, l’étude de SPIEGEL et coll. apparaissait démontrer qu’une forme plutôt concave de l’omoplate se retrouvait fréquemment en association avec une snapping scapula.

En ce qui concernait l’imagerie diagnostique, la préférence était donnée à l’IRM, qui permettait de mettre en évidence un état inflammatoire au niveau des différentes bourses et des lésions séquellaires au niveau de la musculature voire au niveau des structures nerveuses.

Par rapport aux mesures thérapeutiques, l’attitude recommandée était essentiellement un traitement conservateur. Le traitement chirurgical, que ce soit à ciel ouvert ou arthroscopique, était à considérer avec circonspection et ceci en particulier lors d’un traitement-test infiltratif préalable infructueux.

En ce qui concernait le cas de l’assuré, les examens complémentaires réalisés, à savoir l’IRM de l’épaule droite du 16 septembre 2019, l’IRM de l’omoplate droite du 6 novembre 2019, l’ultrasonographie du 10 février 2020 et le CT-scan de l’épaule et de la paroi thoracique du 23 septembre 2020, ne permettaient pas d’identifier de lésion traumatique ni d’autres facteurs susceptibles d’être responsables du sursaut de l’omoplate.

Dans son courrier du 4 décembre 2019, le Dr D______ proposait de réaliser une endoscopie scapulo-thoracique avec résection du tubercule de Luschka. Le tubercule de Luschka s’avérait être une saillie osseuse située au niveau de l’angle supéro-interne de l’omoplate. Cette saillie osseuse n’était de toute évidence pas traumatique, mais l’expression de la variabilité anatomique individuelle. Son implication dans le contexte du phénomène de la snapping scapula méritait d’être sérieusement mise en question, comme le démontrait par exemple la publication de DIETRICH & al., laquelle n’avait pas pu démontrer la présence accrue de cette variante anatomique dans le contexte de la snapping scapula comparé au groupe de contrôle. Par ailleurs, il apparaissait fort réducteur d’attribuer le phénomène de sursaut à la présence de cette simple particularité anatomique. Il convenait de préciser encore une fois qu’aucune lésion structurelle à caractère post-traumatique n’avait été mise en évidence au niveau de l’épaule droite de l’assuré. En ce qui concernait une possible dyskinésie de l’épaule droite, telle que mentionnée par le Dr E______ le 10 décembre 2019, cette hypothèse n’avait pas été confirmée et ne pouvait donc être considérée comme étant à l’origine du sursaut de l’omoplate. Quand bien même une telle dyskinésie serait confirmée, il resterait encore à en établir son origine.

La seule corrélation entre le sursaut scapulaire de l’omoplate droite de l’assuré et l’événement du 12 juin 2019 se limitait à des considérations temporelles étant donné que ce phénomène était décrit pour la première fois dans le rapport du Dr D______ du 17 octobre 2019, donc quatre mois après l’événement. Aucune lésion structurelle d’origine traumatique attribuable à l’événement du 12 juin 2019 pouvant expliquer le phénomène de sursaut scapulaire n’avait pu être identifiée et confirmée.

Considérant qu’en l’état du dossier, l’origine du sursaut de l’omoplate droite de l’assuré n’avait pas pu être identifiée en l’absence de lésion structurelle post-traumatique avérée, le Dr J______ estimait que le lien de causalité entre l’événement du 12 juin 2019 et le problème de snapping scapula à droit était possible sans plus.

g. Par décision sur opposition du 6 janvier 2021, la SUVA a estimé qu’elle ne voyait pas d’éléments pour douter du bien-fondé de l’analyse effectuée le 22 décembre 2020 par le Dr J______. Les considérations temporelles ne suffisaient pas pour engager la responsabilité de la SUVA. Aucun des critères développés par la jurisprudence n’était rempli pour retenir un lien de causalité adéquate entre l’accident et les troubles d’ordre psychique de l’assuré. En conséquence, l’opposition devait être rejetée.

C. a. L’assuré a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le 10 février 2021, concluant à son annulation et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit aux prestations de l’assurance-accidents en raison de son accident du 12 juin 2020, au-delà du 23 septembre 2019, subsidiairement, à l’instruction d’une expertise orthopédique.

Il faisait valoir qu’il ressortait des examens cliniques qu’il souffrait d’un ressaut au niveau de l’omoplate avec des craquements scapulo-thoraciques. L’IRM du 16 septembre 2019 confirmait une tendinopathie insertionnelle du tendon du muscle supra-épineux, une contusion du muscle deltoïde et un hypersignal de la portion moyenne du deltoïde juste en regard de l’acromion évoquant une lésion post-traumatique sans hématome organisé. Par conséquent, il fallait admettre des lésions physiques objectivées par examens IRM et examens cliniques, lesquelles induisaient chez lui de fortes douleurs qui n’étaient pas atténuées par un traitement conservateur. Le recourant s’était toujours plaint de douleurs à l’épaule droite dès son accident. Il avait fait preuve de compliance en suivant régulièrement des séances de physiothérapie pour éliminer ses douleurs, mais cela n’avait pas été suffisant, comme l’avait constaté le Dr D______ qui proposait un traitement chirurgical. L’avis des médecins-conseils de la SUVA et le rapport du Dr I______ de décembre 2019 reposaient sur des renseignements anamnestiques sommaires et pas sur des examens cliniques. Les examens réalisés en octobre 2020 par le Dr J______ démontraient un status post-résection de l’angle supéro-médial de l’omoplate droite, pas de signe de complication sur le site opératoire, pas d’anomalie visible de l’omoplate gauche, en particulier pas de variante de la norme de type tubercule de Luschka. En conclusion, la « CT » de l’omoplate droite était sans signe de complication postopératoire ni d’anomalie morphologique par ailleurs. Or, il fallait préciser que l’omoplate douloureuse était celle de droite et que l’assuré n’avait pas subi, faute de prise en charge par la SUVA, l’opération préconisée par le Dr D______. On comprenait donc mal pour quels motifs l’examen réalisé en octobre 2020 indiquait ou recherchait des complications postopératoires. De plus, il fallait relever que le Dr J______, bien qu’il semblait affirmer qu’aucune pièce au dossier ne permettait d’identifier des lésions traumatiques ni d’autres facteurs susceptibles d’être responsables du sursaut de l’omoplate, laissait ouverte la question du lien de causalité entre l’événement du 12 juin 2019 et le problème de snapping scapula.

S’agissant du lien de causalité, le recourant présentait des atteintes physiques, comme le décrivaient les Drs D______ et E______. La question litigieuse portait sur le diagnostic et le traitement préconisé, à savoir un traitement conservateur ou chirurgical. Le recourant ne souffrait pas d’une atteinte non organique. Une expertise devait être diligentée par un médecin indépendant.

b. Par réponse du 5 mars 2021, l’intimé a conclu au rejet du recours. L’opinion médicale du Dr J______ devait se voir reconnaître une pleine valeur probante et ne pouvait pas être mise en question par l’expression de « post-traumatique » utilisée par le Dr D______.

c. Dans sa réplique du 26 avril 2021, le recourant s’est référé à un arrêt ATAS/387/2020 du 14 mai 2020 de la chambre des assurances sociales, dont il ressortait, selon l’expert mandaté, que la littérature médicale décrivait de nombreux cas de snapping scapula apparaissant après un intervalle suite à un événement traumatique.

Dans cet arrêt, la chambre des assurances sociales indiquait également que c’était à tort que l’intimée s’était référée aux différentes catégories d’accidents, dans la mesure où la jurisprudence relative aux affections psychiques n’était pas applicable au cas d’espèce (ATF 115 V 139 consid. 6). Il en était de même dans le cas d’espèce, le recourant ne souffrant d’aucune atteinte psychique. La symptomatologie douloureuse qui l’affectait ne relevait en effet que d’une atteinte somatique. Le recourant persistait en conséquence dans ses conclusions, notamment dans la mise en œuvre d’une expertise médicale.

D. a. Le 16 février 2022, la chambre de céans a informé les parties de son intention de confier une expertise au docteur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, en leur transmettant son projet de mission d'expertise et en leur impartissant un délai pour se prononcer sur une éventuelle récusation de l’expert et sur la mission d’expertise.

b. Le 10 mars 2022, le recourant a indiqué à la chambre de céans n’avoir pas de motifs de récusation à faire valoir et être d’accord avec les points soumis pour expertise.

c. Le 18 mars 2022, l’intimée a demandé la récusation du Dr M______.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.        Le litige porte sur le droit du recourant aux prestations de l’intimée au-delà du 21 septembre 2019.

4.        4.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé: il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1, ATF 119 V 335 consid. 1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement «post hoc, ergo propter hoc»; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

4.2 Une fois que le lien de causalité naturelle a été établi au degré de la vraisemblance prépondérante, l’obligation de prester de l’assureur cesse lorsque l'accident ne constitue pas (plus) la cause naturelle et adéquate du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui serait survenu tôt ou tard même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (RAMA 1994 n° U 206 p. 328 consid. 3b; RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b). En principe, on examinera si l’atteinte à la santé est encore imputable à l’accident ou ne l’est plus (statu quo ante ou statu quo sine) selon le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 126 V 360 consid. 5b; ATF 125 V 195 consid. 2; RAMA 2000 n° U 363 p. 46).

En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident. Si un accident n'a fait que déclencher un processus qui serait de toute façon survenu sans cet événement, le lien de causalité naturelle entre les symptômes présentés par l'assuré et l'accident doit être nié lorsque l'état maladif antérieur est revenu au stade où il se trouvait avant l'accident (statu quo ante) ou s'il est parvenu au stade d'évolution qu'il aurait atteint sans l'accident (statu quo sine) (RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.2). A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il a été causé ou aggravé par l'accident (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1003/2010 du 22 novembre 2011 consid. 1.2 et 8C_552/2007 du 19 février 2008 consid. 2).

Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et ATF 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

4.3 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes suffisants quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

4.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

5.        La procédure dans le domaine des assurances sociales est régie par le principe inquisitoire d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'assureur (art. 43 al. 1 LPGA) ou, éventuellement, par le juge (art. 61 let. c LPGA). Ce principe n'est cependant pas absolu. Sa portée peut être restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations, la règle selon laquelle le fardeau de la preuve appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (RAMA 2000 n° U 363 p. 46), entre seulement en considération s'il n'est pas possible, dans le cadre du principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves un état de fait qui au degré de vraisemblance prépondérante corresponde à la réalité (ATF 117 V 261 consid. 3b et les références). La preuve de la disparition du lien de causalité naturelle ne doit pas être apportée par la preuve de facteurs étrangers à l'accident. Il est encore moins question d'exiger de l'assureur-accidents la preuve négative, qu'aucune atteinte à la santé ne subsiste plus ou que la personne assurée est dorénavant en parfaite santé. Est seul décisif le point de savoir si les causes accidentelles d'une atteinte à la santé ne jouent plus de rôle et doivent ainsi être considérées comme ayant disparu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.3).

Il incombe à l’assuré d’établir, au degré de vraisemblance prépondérante, l’existence d'un rapport de causalité naturelle entre l’état pathologique qui se manifeste à nouveau et l’accident (REAS 2002 p. 307). En l’absence de preuve, la décision sera défavorable à l’assuré (ATF 117 V 261 consid. 3b et les références; RAMA 1994 n° U 206 p. 327 consid. 1 et les références). Plus le temps écoulé entre l’accident et la manifestation de l'affection est long, plus les exigences quant à la preuve, au degré de la vraisemblance prépondérante du rapport de causalité naturelle doivent être sévères (SVR 2016 n° UV p. 55 consid. 2.2.2; cf. également arrêt du Tribunal fédéral 17 du 3 mai 2018 consid. 4.2).

6.        Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, les autorités administratives et les juges des assurances sociales doivent procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raison pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Ils ne peuvent ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, ils doivent mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 283 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3).

7.        Le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

L’assureur-accidents a la possibilité de mettre fin avec effet ex nunc et pro futuro à son obligation d'allouer des prestations, qu'il avait initialement reconnue en versant des indemnités journalières et en prenant en charge les frais de traitement, sans devoir se fonder sur un motif de révocation (reconsidération ou révision procédurale), sauf s’il réclame les prestations allouées (cf. ATF 133 V 57 consid. 6.8; arrêt du Tribunal fédéral 8C_3/2010 du 4 août 2010 consid. 4.1). Ainsi, il peut liquider le cas en invoquant le fait que selon une appréciation correcte de l'état de fait, un événement assuré n'est jamais survenu (ATF 130 V 380 consid. 2.3.1). Le Tribunal fédéral des assurances a précisé en outre que les frais de traitement et l'indemnité journalière ne constituent pas des prestations durables au sens de l'art. 17 al. 2 LPGA, de sorte que les règles présidant à la révision des prestations visées par cette disposition légale (cf. ATF 137 V 424 consid. 3.1 et la référence) ne sont pas applicables (ATF 133 V 57 consid. 6.7). En revanche, l’arrêt des rentes d’invalidité ou d’autres prestations versées pour une longue période est soumis aux conditions d’adaptation, reconsidération et révision procédurale (ATF 130 V 380 consid. 2.3.1). La jurisprudence réserve les cas dans lesquels le droit à la protection de la bonne foi s'oppose à une suppression immédiate des prestations par l'assureur-accidents (ATF 130 V 380 consid. 2.3.1).

8.        En l’espèce, l’intimée a fondé sa décision sur l’appréciation de son médecin d’arrondissement, le Dr J______, qui concluait que l’atteinte à la santé du recourant les troubles déclarés dès le 21 septembre 2019 n’étaient pas en lien de causalité avec l’accident du 12 juin 2019. Plus particulièrement ce médecin considérait qu’en l’état du dossier, l’origine du sursaut de l’omoplate droite de l’assuré n’avait pas pu être identifiée en l’absence de lésion structurelle post-traumatique avérée et que le lien de causalité entre l’événement du 12 juin 2019 et le problème de snapping scapula à droite était possible sans plus.

Dans ses rapports des 17 octobre 2019 et 10 février 2020, le Dr D______ ne se prononce pas de manière approfondie sur la question du lien de causalité, mais le fait qu’il qualifie l’atteinte du recourant de snapping scapula post-traumatique suffit à remettre suffisamment en doute les conclusions du Dr J______ du 22 décembre 2020, dès lors que ce médecin travaille pour l’intimée, pour qu’il se justifie de procéder à une instruction complémentaire du cas.

La chambre de céans ordonnera en conséquence une expertise orthopédique du recourant. L’expert devra déterminer les effets respectifs et conjoints des deux accidents subis par le recourant les 12 juin et 3 août 2019, en faisant procéder si nécessaire aux éventuels examens nécessaires (ENMG ?).

9.         

9.1 L’intimée a requis la récusation du Dr M______. Elle a indiqué que son service médical était d’avis que le Dr M______ (spécialiste en chirurgie arthroscopique de toutes les articulations) ne serait pas le professionnel le plus adapté à mettre en place l’expertise envisagée car il s’agissait d’une problématique de l’épaule complexe et difficile à cerner. Elle proposait de la confier au docteur N______ ou au professeur O______. Elle ajoutait que le Dr M______ avait travaillé et opéré avec le Dr D______, médecin traitant du recourant, ce qui pourrait mettre en doute la neutralité.

9.2 Selon l’art. 38 al. 1 LPA, lorsqu’une expertise est ordonnée, l’autorité nomme un ou des experts. Un délai est imparti aux parties pour proposer, s’il y a lieu, la récusation des experts (art. 39 al. 1 LPA).

Les personnes appelées à rendre ou à préparer des décisions sur des droits ou des obligations doivent se récuser si elles ont un intérêt personnel dans l’affaire, si elles représentent une partie ou ont agi dans la même affaire pour une partie, ou encore si, pour d’autres raisons, elles semblent prévenues (cf. art. 36 al. 1 LPGA, art. 10 al. 1 let. a, c et d PA).

La récusation d'un expert judiciaire - qui ne fait pas partie du tribunal - s'examine au regard de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101) garantissant l'équité du procès (ATF 125 II 541 consid. 4a p. 544). Cette disposition assure au justiciable une protection équivalente à celle de l'art. 30 al. 1 Cst. s'agissant des exigences d'impartialité et d'indépendance requises d'un expert (ATF 127 I 196 consid. 2b p. 198).

En matière de récusation, il convient de distinguer entre les motifs formels et les motifs matériels. Les motifs de récusation qui sont énoncés dans la loi (cf. art. 10 al. 1 PA et 36 al. 1 LPGA) sont de nature formelle parce qu'ils sont propres à éveiller la méfiance à l'égard de l'impartialité de l'expert. Les motifs de nature matérielle, qui peuvent également être dirigés contre la personne de l'expert (par exemple ses compétences professionnelles), ne mettent en revanche pas en cause son impartialité. De tels motifs doivent en principe être examinés avec la décision sur le fond dans le cadre de l'appréciation des preuves (ATF 132 V 93 consid. 6.5 p. 108 ; voir aussi ATF 139 V 349 ; AT 138 V 271).

Selon la jurisprudence relative aux art. 29 al. 1 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), les parties à une procédure ont le droit d'exiger la récusation d'un expert dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur son impartialité. Cette garantie tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de l'expert ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (cf. ATF 134 I 20 consid. 4.2 p. 21 et les arrêts cités).

Un expert passe pour prévenu lorsqu’il existe des circonstances propres à faire naître un doute sur son impartialité. Dans ce domaine, il s’agit toutefois d’un état intérieur dont la preuve est difficile à rapporter. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire de prouver que la prévention est effective pour récuser un expert. Il suffit que les circonstances donnent l’apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale de l’expert. L’appréciation des circonstances ne peut pas reposer sur les seules impressions de l’expertisé, la méfiance à l’égard de l’expert devant au contraire apparaître comme fondée sur des éléments objectifs. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération (ATF 127 I 198 consid. 2b, ATF 125 V 351 consid. 3b/ee, 123 V 175 consid. 3d ; RAMA 1999 n° U 332 p. 193, U 212/97, consid. 2a/bb et les références). Dans ce domaine, la jurisprudence exige des faits qui justifient objectivement la méfiance. Celle-ci ne saurait reposer sur le seul sentiment subjectif d'une partie; un tel sentiment ne peut être pris en considération que s'il est fondé sur des faits concrets et si ces derniers sont, en eux-mêmes, propres à justifier objectivement et raisonnablement un tel sentiment chez une personne réagissant normalement (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 127/06 du 6 février 2007).

Un expert donne l'apparence de prévention, et peut donc être récusé, s'il a déjà été impliqué, à quelque titre que ce soit (conseiller ou expert privé, témoin, membre d'une autorité), dans la procédure, pour autant qu'il ait pris position au sujet de certaines questions de manière telle qu'il ne semble plus exempt de préjugés (ATF 126 I 68 consid. 3c p. 73, ATF 125 II 541 consid. 4 p. 544). Le fait que l'expert a déjà eu à se prononcer au cours d'une procédure dans laquelle une des parties était impliquée n'exclut pas sa nomination en qualité d'expert (ATF 132 V 93 consid. 7.2.2 p. 110). La jurisprudence exige cependant que l'issue de la cause ne soit pas prédéterminée, mais qu'elle demeure au contraire indécise quant à la constatation des faits et à la résolution des questions juridiques (ATF 116 Ia 135 consid. 3b p. 139, 126 I 168 consid. 2a p. 169; Jacques Olivier PIGUET, Le choix de l'expert et sa récusation, HAVE/REAS 2/2011 p. 133). Des sentiments d'inimitié marquée (ou d'amitié étroite) à l'égard d'une partie ou de son avocat, peuvent, en principe, justifier une demande de récusation pour apparence de prévention (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_366/2013 du 2 décembre 2013 et 5A_756/2008 du 9 septembre 2009 consid. 2.1).

En matière d'expertise médicale, le fait qu’une expertise a été réalisée par un ancien médecin traitant de l’assuré soumis à cette mesure d’instruction ne justifie pas d’exclure d’emblée une telle expertise, en l’absence d’autre circonstance objective jetant le doute sur l’impartialité de l’expert, par exemple parce qu’il n’a pas rédigé son rapport de manière neutre et factuelle (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 832/04 du 3 février 2006 consid. 2.3.1 et I 29/04 du 17 août 2004 consid. 2.2 et les références). Le simple fait que le médecin consulté est lié à l’assureur par un rapport de travail ne permet pas de douter a priori de l’objectivité de son appréciation, ni de soupçonner une prévention (cf. ATF 125 V 353). De même, le fait qu’un médecin se soit déjà prononcé sur le cas de l’assuré ne constitue pas une circonstance de nature à susciter une apparence de prévention au sens de la jurisprudence précitée (cf. arrêt U 291/99du Tribunal fédéral des assurances du 8 septembre 2000).

Enfin, il convient de rappeler qu’il existe une présomption d’impartialité de l’expert, de sorte que la partie qui demande sa récusation doit apporter la preuve permettant de renverser cette présomption (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 752/03 du 27 août 2004 cause et doctrine citée).

Sont de nature formelle les motifs de récusation qui sont énoncés dans la loi (cf. art. 10 al. 1 PA [RS 172.021] et 36 al. 1 LPGA [RS 830. 1]) parce qu'ils sont propres à éveiller la méfiance à l'égard de l'impartialité de l'expert. En revanche, les motifs de nature matérielle, dirigés contre l'expertise elle-même ou contre la personne de l'expert, ne mettent pas en cause son impartialité (arrêt du tribunal fédéral 8C_510/2013 du 10 février 2014 consid. 2.1 et les références citées). De tels motifs doivent en principe être examinés avec la décision sur le fond dans le cadre de l'appréciation des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 8C 541/2014 du 17 février 2015).

Le fait qu’un expert choisi a longtemps travaillé pour le compte de l’assureur et que ses avis aient été contestés relève d’un motif de récusation d’ordre matériel et non pas formel (arrêt du Tribunal fédéral 9C 505/2012 du 15 janvier 2013). De même, le fait qu’un expert aurait suivi les instructions du SMR, en démontrant ainsi sa totale dépendance par rapport à celui-ci, relève d’un motif de récusation matériel (arrêt du Tribunal fédéral 9C 293/2008 du 28 janvier 2009).

g. En l’occurrence, le Dr E______ est domicilié professionnellement à Carouge et le Dr D______ à l’Hôpital de la Tour. Ils sont fondateurs, avec le docteur P______, du Centre de l'épaule, à la Clinique de la Tour, qui assure aux patients une prise en charge multidisciplinaire et personnalisée, de la première consultation jusqu'au suivi de rééducation post-opératoire. À teneur de la jurisprudence précitée,

En l'espèce, la demande de récusation a été déposée dans le délai imparti, de sorte qu’elle est recevable. L'intimée remet en cause la compétence du docteur M______ pour procéder à l'expertise, sans produire de pièces qui pourraient faire douter de ses compétences pour l'effectuer. Or, ce médecin a déjà été mandaté à plusieurs reprises pour des expertises relatives à l'épaule par la chambre de céans (voir notamment ATAS/734/2019 du 19 août 2019 et ATAS/61/2018 du 24 janvier 2018). Les motifs invoqués par l'intimée ne suffisent pas à justifier un changement d'expert, étant relevé que le Dr M______ a déjà donné son accord de principe pour procéder à l'expertise. Par ailleurs, le fait que le Dr M______ aurait travaillé avec le Dr D______, médecin traitant du recourant, n’est pas de nature à fonder un motif de récusation tant formel que matériel, étant rappelé qu’il existe une présomption d’impartialité de l’expert et que l’intimée n’a produit aucune pièce à l’appui de ses allégations démontrant un rapport particulièrement étroit entre les deux médecins. En l’occurrence, l’expert désigné ne donne aucune apparence de prévention et les craintes de l’intimée ne reposent sur aucun élément objectif. La demande de récusation formée par l’intimée sera en conséquence rejetée.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Préparatoirement :

I. Ordonne une expertise médicale de Monsieur A______.

La confie au docteur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, 1227 Les Acacias.

Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A. Prendre connaissance du dossier de la cause.

B. Si nécessaire prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée.

C. Examiner la personne expertisée et, si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D. Etablir un rapport comprenant les éléments et les réponses aux questions suivants :

1. Anamnèse détaillée

2. Plaintes de la personne expertisée

3. Status et constatations objectives

4. Diagnostics

4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1 Dates d'apparition

4.2 Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.2 Dates d'apparition

4.3 L’état de santé de la personne expertisée est-il stabilisé ?

4.3.1 Si oui, depuis quelle date ?

4.4. Les atteintes et les plaintes de la personne expertisée correspondent-elles à un substrat organique objectivable ?

5. Causalité

5.1 Les atteintes constatées sont-elles dans un rapport de causalité avec les accidents des 12 juin et 3 août 2019 ? Plus précisément ce lien de causalité est-il seulement possible (probabilité de moins de 50 %), probable (probabilité de plus de 50 %) ou certain (probabilité de 100 %) ?

Analyser les effets de chaque accident pris séparément, puis conjointement

5.1.1 Veuillez motiver votre réponse pour chaque diagnostic posé.

5.1.2 À partir de quel moment le statu quo ante a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui existait immédiatement avant l’accident) pour les deux accidents ?

5.1.3 Veuillez indiquer la date du statu quo ante pour chaque diagnostic posé et pour les deux accidents.

5.2 Les accidents ont-ils décompensé un état maladif préexistant ? préciser cas échéant la situation pour chaque accident.

5.2.1 Si oui, à partir de quel moment le statu quo sine a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui serait survenu tôt ou tard, même sans les accidents par suite d’un développement ordinaire) ?

6. Limitations fonctionnelles

6.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic.

6.1.1 Dates d'apparition

7. Capacité de travail

7.1 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans son activité habituelle, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50 %) avec l’accident et comment cette capacité de travail a-t-elle évolué depuis l’accident ?

7.1.1 Si la capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

7.2 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans une activité adaptée, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50 %) avec l’accident ?

7.2.1 Si cette capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

8. Traitement

8.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation

8.2 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée

8.3 Peut-on attendre de la poursuite du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée ?

8.4 Si non, à partir de quel moment ne peut-on plus attendre de la continuation du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée (état final atteint) ?

10. Appréciation d'avis médicaux du dossier

10.1 Êtes-vous d'accord avec l'avis du Dr J______ du 22 décembre 2020 ?

10.2 Êtes-vous d'accord avec la qualification de snapping scapula utilisée par le Dr D______ et la teneur de ses rapports des 10 février et 17 octobre 2020 ?

10.3 Êtes-vous d'accord avec le rapport établi le 10 décembre 2019 par le Dr E______ ? Prière de prendre position sur sa suggestion de faire un examen ENMG à la recherche d’une dysfonction, notamment du grand dentelé, qui pourrait éventuellement éclairer la situation avant l’intervention chirurgicale.

11. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles

E. Invite l’expert à déposer son rapport en trois exemplaires dans les meilleurs délais auprès de la chambre de céans.

F. Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme de la présente ordonnance est notifiée aux parties par le greffe le