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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3876/2014

ATAS/254/2015 (2) du 07.04.2015 ( CHOMAG ) , ADMIS

Descripteurs : AC ; CHÔMAGE ; DROIT CANTONAL ; CONTRAT DE TRAVAIL ; RÉSILIATION ; MOTIF; RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL) ; DÉCISION(ART. 5 PA) ; RESTITUTION(EN GÉNÉRAL) ; PRESCRIPTION ; DÉLAI RELATIF
Normes : LMC.30; LMC.32.1; LMC.48B; LPGA.25.2
Résumé : Le délai d'un an prévu à l'art. 48B al. 3 LMC pour demander à l'employeur la restitution de l'allocation pour retour à l'emploi (ARE) court à compter du moment où l'OCE, respectivement le service de l'ARE a eu connaissance du versement indu de l'allocation. En effet, la teneur de l'art. 48B al. 3 LMC est en tous points identique à celle de l'art. 25 al. 2 LPGA, de sorte que la jurisprudence relative à cette disposition légale est applicable par analogie. Etant donné que l'employeur a résilié le contrat de travail de l'assuré par un courrier du 29 novembre 2012, courrier dont il a transmis la copie au service de l'ARE, ce dernier a su à réception de ce document que le contrat de travail était résilié, soit avant le terme de la période ARE prévue le 2 juillet 2014. Il ne pouvait par ailleurs que conclure à l'absence de justes motifs au vu de la teneur de la lettre de licenciement. Dès lors, en notifiant à l'employeur le 25 juillet 2014, sa décision de restitution des ARE versées à tort, l'OCE a agi tardivement, de sorte que son droit à réclamer la restitution des ARE est prescrit.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3876/2014 ATAS/254/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 7 avril 2015

1ère Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à VEYRIER, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître JUNOD Pascal

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Le 22 juin 2012, Monsieur A______ (ci-après l’employeur), gérant libre de la boulangerie B______, propriété de la Sàrl B______, a déposé une demande auprès de l’Office cantonal de l’emploi (ci-après OCE), visant à l’octroi d’une allocation de retour en emploi (ARE) en faveur de M. C______ (ci-après l’assuré), qu’il souhaitait engager en qualité de directeur d’établissement pour une durée de 24 mois, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 6'391.60.

2.        Par décision du 9 juillet 2012, l’OCE a accepté la demande, sur la base du préavis de la commission tripartite du marché de l’emploi du 3 juillet 2012, pour la période du 3 juillet 2012 au 2 juillet 2014.

L’OCE a ainsi versé à la société, pour les mois de juillet à octobre 2012, une somme totale de CHF 20'124.50.

Par courrier du 29 novembre 2012, l’employeur a informé l’assuré qu’il mettait un terme au contrat de travail, avec effet au 31 décembre 2012, précisant que « j’ai toujours été très satisfait de votre collaboration, ainsi que de votre gentillesse et sympathie envers les clients, et je suis au regret de prendre une telle décision ». Copie de ce courrier a été transmise au service de l’ARE.

3.        Le 24 janvier 2012 (recte 2013), l’assuré a expliqué à l’OCE qu’il avait été licencié parce qu’il avait refusé de continuer à signer les fiches de salaire de novembre 2012, le salaire ne lui étant pas versé. Il déclare qu’il a investi dans ce fonds de commerce une somme de CHF 27'650.- dans le but de fonder une collaboration, somme remise en trois fois sans quittance à l’employeur. Il précise également avoir été en arrêt accident du 5 août au 10 septembre 2012, et avoir fait une rechute le 1er novembre 2012, de sorte qu’il est toujours en incapacité de travail. Il allègue à cet égard que, selon les informations à sa disposition, l’assureur perte de gain accident aurait versé des indemnités jusqu’au 31 octobre 2012 à l’employeur, sans qu’elles lui aient été reversées, et qu’il en aurait été de même pour les ARE de juillet à octobre 2012.

4.        Le 20 mai 2014, l’assuré, représenté par Me Cyril AELLEN, a requis de l’OCE une attestation - dont il avait besoin dans le cadre d’un litige prud’homal - visant à démontrer que l’office avait bien versé le salaire pendant la durée de sa relation contractuelle directement à l’employeur.

5.        L’OCE a ainsi confirmé le 16 juin 2014 qu’il avait directement versé à l’employeur les ARE suivantes :

- CHF 4'783.70 le 4 septembre 2012 pour juillet 2012

- CHF 5'113.60 le 4 septembre 2012 pour août 2012

- CHF 5'113.60 le 9 octobre 2012 pour septembre 2012

- CHF 5'113.60 le 23 novembre 2012 pour octobre 2012

pour un total de CHF 20'124.50.

6.        Par courrier du même jour, l’OCE a réclamé à l’employeur tout document attestant du paiement de la rémunération due à l’assuré pour les mois de juillet à décembre 2012, ainsi que la preuve du versement des charges sociales y relatives.

7.        Par courrier du 2 juillet 2014, l’employeur a indiqué qu’il avait repris en gérance libre la pâtisserie le 1er juillet 2012 ; que l’assuré, qu’il connaissait depuis plus de vingt ans, s’était déclaré intéressé à devenir collaborateur associé ; que toutefois, au moment où il avait fallu payer la caution et le premier loyer de la gérance, celui-ci ne lui avait pas versé sa part, n’ayant pu obtenir l’aide de l’une de ses connaissances comme il l’avait prévu ; que « suite à ça, j’ai engagé l’assuré en devenant employé, il m’a dit que je pouvais obtenir l’ARE » ; que tout s’était bien passé, de sorte qu’il avait même engagé le beau-frère de l’assuré, M. D______ ; que le 5 août 2012, l’assuré avait été victime d’un accident, que le service de l’ARE avait payé le salaire des mois de juillet et août dans le courant du mois de septembre ; que l’assureur lui avait certes versé des indemnités, qu’il devait toutefois les lui rembourser, l’assuré n’ayant pas fourni les certificats d’arrêt.

L’employeur affirme avoir versé les salaires de l’assuré et produit pour preuve les fiches de paie signées par ce dernier. Il précise qu’une procédure devant le Tribunal des Prud’hommes est en cours. Il verse par ailleurs au dossier copie d’une ordonnance du 14 novembre 2013 par le Ministère public - suite à la plainte que l’assuré avait déposée contre lui pour escroquerie - et aux termes de laquelle

« le Ministère public constate que les déclarations des parties sont contradictoires et qu’aucun élément objectif ne permet d’établir que l’employeur se serait effectivement rendu coupable d’escroquerie ou d’une autre infraction à l’encontre de l’assuré ou de la société.

L’éventuelle culpabilité du mis en cause ne peut en tous les cas pas être établie à ce stade.

En outre, le litige relève manifestement du droit civil, l’aspect pénal étant nul en l’état, étant rappelé que l’employeur est en litige, d’une part, avec l’assuré devant la juridiction des Prud’hommes et, d’autre part, avec la Sàrl devant le Tribunal des baux et loyers.

En définitive et au vu de ce qui précède, les conditions à l’ouverture de l’action pénale n’étant manifestement pas réunis, vu l’absence de charges suffisantes, il sera décidé de ne pas entrer en matière sur les faits visés par la présente procédure pénale (art. 310 al. 1 let. a CPP) ».

L’employeur précise que s’il a licencié l’assuré et son beau-frère, c’est parce qu’il leur reprochait d’avoir commis un vol. Il n’avait toutefois rien mentionné sur la lettre de licenciement, « ceci afin de ne pas leur nuire, car ils sortaient tous deux de l’hospice ».

L’employeur a également produit copie d’un courrier qu’il avait adressé le 22 juillet 2013 à l’OAI, aux termes duquel,

« Au mois de novembre 2012, j’ai licencié l’assuré pour des motifs personnels. Il est vrai qu’il avait eu un accident le 8 août 2012 qui lui avait provoqué selon ses dires, une déchirure musculaire de la cuisse. La compagnie d’assurances GENERALI versait d’ailleurs les prestations LAA. Or, l’assuré n’ayant pas envoyé les certificats de septembre et octobre, la compagnie m’a fait parvenir un courrier afin que je leur rembourse le trop perçu. Après avoir licencié l’assuré, j’ai demandé à la compagnie de verser directement à ce dernier les prestations, car à ce moment-là, il leur avait fourni les certificats pour la continuité de son accident. Depuis, je suis confronté à la malhonnêteté de cette personne qui après m’avoir dénoncé pour des soi-disant voies de fait, m’assigne devant le tribunal des Prudhommes pour des heures supplémentaires que je n’aurais pas payées. Difficile de faire des heures supplémentaires lorsque l’on est en arrêt de travail pour accident !

Vous comprendrez qu’au vu de ce qui précède, je ne puis vous aider pour compléter votre questionnaire ».

8.        Par décision du 25 juillet 2014, le service juridique de l’OCE a révoqué la décision d’octroi d’ARE, et réclamé à l’employeur le remboursement de la somme de CHF 20'214.50, au motif que le contrat de travail de l’assuré avait été résilié avant la fin prévue de l’ARE, et qu’aucun juste motif n’avait été invoqué au sens de l’art. 337 CO.

9.        Le 5 septembre 2014, l’employeur, représenté par Me Pascal JUNOD, a formé opposition. Il a complété son opposition le 30 septembre 2014. Il reproche à l’OCE d’avoir notifié la décision litigieuse à la boulangerie, alors que celle-ci n’a pas la personnalité juridique. Il rappelle que l’exploitante inscrite au Registre du commerce est Mme A______ depuis le 13 août 2014. Il considère dès lors que la décision est nulle.

Au fond, il confirme que l’ARE a été versée de juillet à octobre 2012 pour un montant total de CHF 20'124.50, et affirme que le salaire a été versé à l’assuré. Il rappelle que celui-ci a été licencié parce qu’il avait prélevé indûment une somme de CHF 18'000.-.

Il allègue enfin qu’il lui est impossible de rembourser la somme de CHF 20'124.50, au vu de sa situation financière.

10.    Par décision du 11 novembre 2014, l’OCE a rejeté l’opposition.

Il relève, préalablement, que M. A______ était bien l’employeur de l’assuré, en ce sens que c’est en cette qualité qu’il avait déposé une demande d’ARE. Aussi la décision d’octroi d’ARE du 9 juillet 2012 avait-elle été notifiée à l’assuré et à l’employeur, « entreprise boulangerie B______ », de même que la décision de révocation et de remboursement du 25 juillet 2014.

Au fond, l’OCE relève que l’employeur ne conteste pas avoir mis un terme au contrat de travail de l’assuré le 29 novembre 2012 pour le 31 décembre 2012, soit pour une date antérieure à la fin de l’ARE prévue le 2 juillet 2014. D’autre part, le licenciement ne tombe pas sous le coup des justes motifs de l’art. 337 CO, puisque l’employeur a choisi la voie du licenciement ordinaire, en respectant le délai de congé.

11.    L’employeur, représenté par son mandataire, a interjeté recours le 15 décembre 2014 contre ladite décision sur opposition. Il fait valoir que l’OCE a agi en dehors du délai légal d’un an, en violation de l’art. 48B al. 3 LMC.

Il considère quoi qu’il en soit, qu’il existait de justes motifs de résiliation immédiate du contrat de travail, l’assuré ayant commis un vol, ce que celui-ci a expressément admis dans son courrier du 24 janvier 2012. Il reconnaît qu’il n’aurait pas dû omettre le réel motif de licenciement dans son courrier du 29 novembre 2012, mais souligne qu’il était de bonne foi.

Il se réfère enfin à l’art. 48B al. 2 LMC, selon lequel l’autorité compétente peut renoncer à exiger la restitution sur demande de l’intéressé, lorsque celui-ci est de bonne foi et que la restitution le mettrait dans une situation financière difficile, considérant que ces deux conditions sont dans son cas réalisées.

Il conclut ainsi à ce qu’il soit dit et constaté, principalement, que l’action en révocation et remboursement de l’allocation de retour en emploi est prescrite, subsidiairement, qu’il y a juste motif de résiliation du contrat de travail, conformément à l’art. 337 CO, plus subsidiairement, qu’il soit renoncé à la restitution des prestations touchées indûment en vertu de l’art. 48B al. 2 LMC, et encore plus subsidiairement, que la cause soit renvoyée à l’OCE pour nouvelle décision dans le sens des considérants de l’arrêt que rendre la Cour.

12.    Dans sa réponse du 27 janvier 2015, l’OCE s’en rapporte à justice quant au grief de la prescription, et conclut au rejet du recours pour le surplus.

13.    Ce courrier a été transmis au recourant. Invité à faire part de ses éventuelles observations, il ne s’est pas manifesté.

14.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 49 al. 3 de la loi en matière de chômage du 11 novembre 1983 (LMC - J 2 20)).

3.        La décision querellée a trait aux prestations cantonales prévues par la LMC. Cette dernière ne contenant aucune norme de renvoi, la LPGA n’est par conséquent pas applicable (cf. art. 2 LPGA).

4.        Le litige porte sur le droit de l'OCE de révoquer les ARE accordées à la société et de réclamer à celle-ci le remboursement de la totalité des prestations versées.

5.        La loi genevoise en matière de chômage vise à favoriser le placement rapide et durable des chômeurs dans le marché de l'emploi, et à renforcer leurs compétences par l'octroi de mesures d'emploi, de formation et de soutien à la réinsertion. Elle institue pour les chômeurs des prestations cantonales complémentaires à celles prévues par l'assurance-chômage fédérale.

Les chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités fédérales peuvent ainsi bénéficier d'une allocation de retour en emploi (ARE), s'ils retrouvent un travail salarié auprès d'une entreprise active en Suisse (art. 30 de la loi en matière de chômage du 11 novembre 1983 (LMC ; RS J 2 20)). La mesure se déroule en priorité au sein d'une entreprise privée, laquelle doit offrir des conditions d'engagement conformes aux usages professionnels de la branche, subsidiairement, au sein de l'Etat et autre collectivité et entité publique (art. 34 LMC).

Aux termes de l’art. 32 al. 1 LMC,

« 1 L’octroi de la mesure est subordonné à la production, avant la prise d'emploi, d’un contrat de travail à durée indéterminée.

2 Si l'employeur met un terme au contrat de travail avant la fin de la durée totale de la mesure au sens de l'article 35, il est tenu de restituer à l'Etat la participation au salaire reçue. Sont réservés les cas de résiliation immédiate du contrat de travail pour justes motifs au sens de l'article 337 du code des obligations.

3 Le chômeur doit en outre :

a) avoir épuisé son droit aux indemnités fédérales;

b) …

c) être apte au placement;

d) ne pas avoir subi, pendant le délai-cadre d'indemnisation fédérale, de suspension du droit à l'indemnité de 31 jours et plus pour les motifs énumérés à l'article 30, alinéa 1, lettres c, d, e, f et g, de la loi fédérale;

e) ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation pénale ou administrative en raison d'une infraction réprimée aux articles 105, 106, 107 de la loi fédérale et 47 et 48 de la présente loi ».

L'allocation de retour en emploi est versée pendant une durée de douze mois consécutifs au maximum pour les chômeurs de moins de 50 ans au moment du dépôt de la demande, et de vingt-quatre mois consécutifs au maximum pour les chômeurs de 50 ans et plus au moment du dépôt de la demande (art. 35 LMC).

Selon l'art. 36 LMC,

"1 L’autorité compétente verse l’allocation de retour en emploi sous forme d’une participation au salaire.

2 Le salaire déterminant pour le versement de l’allocation est plafonné au montant maximum du gain mensuel assuré dans l’assurance-accidents obligatoire.

3 L’allocation est versée par l’intermédiaire de l’employeur, lequel doit payer les cotisations usuelles aux assurances sociales sur l’intégralité du salaire et prélever la part du travailleur.

4 Le Conseil d’Etat détermine le montant de la participation au salaire. Celle-ci correspond en moyenne à 50% du salaire brut et est versée de manière dégressive pendant 12 mois maximum, respectivement 24 mois maximum."

L'allocation de retour en emploi est versée de manière dégressive. Elle correspond à 80% du salaire mensuel brut pendant le premier quart de la mesure, puis est réduite de 20% par quart suivant (art. 27 du règlement d'exécution de la loi en matière de chômage du 23 janvier 2008 (RMC ; RS J 2 20.01).

Le salaire contractuel n'est déterminant que si les parties respectent sur ce point les clauses contractuelles. Il s'agit en effet d'éviter des accords abusifs selon lesquels les parties conviendraient d'un salaire fictif qui, en réalité, ne serait pas perçu par le travailleur : un salaire contractuellement prévu ne sera dès lors pris en considération que s'il a réellement été perçu par le travailleur durant une période prolongée et que s'il n'a jamais fait l'objet d'une contestation (ATF 128 V 190 consid. 3a/aa; DTA 2001 n° 27 p. 228 consid. 4c, DTA 1999 n° 7 p. 27, DTA 1995 n° 15 p. 79).

Selon la circulaire relative à l'indemnité de chômage (IC) publiée par le SECO, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (ci-après : IC 2007), pour les personnes qui, avant leur chômage, n'avaient pas une position comparable à celle d'un employeur, l'attestation de l'employeur ainsi que les décomptes de salaire suffisent en règle générale à prouver la perception effective du salaire et, par conséquent, l'existence d'une activité soumise à cotisation. Si la caisse a toutefois des doutes quant à l’exactitude de l'attestation établie par l’employeur ou quant à l’existence même d’un rapport de travail, elle doit alors exiger des éléments de preuve complémentaires. Il peut y avoir notamment doutes en présence de rapports de travail entre proches parents (B145). Pour les assurés occupant une position assimilable à celle d’un employeur et pour leur conjoint, la caisse doit dans tous les cas s'assurer du versement effectif des salaires (B146).

Aux termes de l'art. 48B LMC,

« 1 En cas de violation de la présente loi, de son règlement d’exécution ou des obligations contractuelles mises à charge du bénéficiaire de la mesure, de l’entité utilisatrice ou de l'employeur, l’autorité compétente peut révoquer sa décision d’octroi et exiger la restitution des prestations touchées indûment.
2 L’autorité compétente peut renoncer à exiger la restitution sur demande de l’intéressé, lorsque celui-ci est de bonne foi et que la restitution le mettrait dans une situation financière difficile.

3 Le droit de demander la restitution s'éteint 1 an après le moment ou l'autorité compétente a eu connaissance du fait, mais au plus tard 5 ans après le versement de la prestation ».

6.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

7.        En l’espèce, l’employeur s’est vu reconnaître le droit à une ARE en faveur de l’assuré engagé en qualité de directeur d’établissement, pour une période allant du 3 juillet 2012 au 2 juillet 2014.

8.        L’OCE reproche à l’employeur d’avoir mis un terme au contrat de travail de l’assuré avant la fin de la période ARE, et considère, au vu de la lettre de licenciement du 29 novembre 2012, qu’il n’y a pas justes motifs au sens de l’art. 337 CO.

Il n’est pas contesté que le contrat de travail a été résilié le 29 novembre 2012 avec effet au 31 décembre 2012, soit prématurément. L’existence de justes motifs l’est en revanche, l’employeur alléguant qu’il avait en réalité licencié l’assuré parce que celui-ci l’avait volé, alors que l’OCE s’est fondé sur les termes de la lettre du 29 novembre 2012. La question peut rester ouverte quoi qu’il en soit, ce pour le motif développé ci-après.

9.        L’employeur allègue que le droit de l’OCE de lui réclamer le remboursement des prestations ARE versées pour les mois de juillet à octobre 2012 est prescrit.

Il se réfère à l’art. 48B al. 3 LMC, selon lequel « le droit de demander la restitution s’éteint un an après le moment où l'autorité compétente a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation ».

10.    Il y a lieu de relever que la teneur de l’art. 48B al. 3 LMC est en tous points identique à celle de l’art. 25 al. 2 LPGA, de sorte que la jurisprudence relative à cette disposition légale est applicable par analogie. Selon cette jurisprudence, le délai de péremption relatif d'une année commence à courir dès le moment où la caisse de chômage aurait dû connaître les faits fondant l'obligation de restituer, en faisant preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle (ATF 122 V 270 consid. 5a p. 274). La caisse doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde - quant à son principe et à son étendue - la créance en restitution à l'encontre d'une personne déterminée, tenue à restitution (ATF 111 V 14 consid. 3 p. 17). Lorsque la restitution est imputable à une faute de l’administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai le moment où la faute a été commise, mais bien celui auquel l’administration aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l’occasion d’un contrôle comptable), se rendre compte de son erreur en faisant preuve de l’attention requise (ATF 124 V 380 consid. 1 ; ATFA non publié du 3 février 2006, C 80/05). Si l'administration dispose d'indices laissant supposer l'existence d'une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires. À défaut, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où elle aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle. Le délai de péremption d'une année commence à courir dans tous les cas aussitôt qu'il s'avère que les prestations en question étaient indues (arrêt K 70/06 du 30 juillet 2007 consid. 5.1). Cette jurisprudence vise un double but, à savoir obliger l'administration à faire preuve de diligence, d'une part, et protéger l'assuré au cas où celle-ci manquerait à ce devoir de diligence, d'autre part.

11.    En l’espèce, le délai d’un an prévu à l’art. 48B al. 3 LMC court à compter du moment où l’OCE ou service de l’ARE a eu connaissance de ce que l’allocation avait été versée à tort. Il y a à cet égard lieu de constater que l’employeur a résilié le contrat de travail de l’assuré par un courrier du 29 novembre 2012, courrier dont il a transmis la copie au service de l’ARE. C’est ainsi à réception de ce document que ce service a su que le contrat de travail était résilié avant la fin de la période ARE. Il ne pouvait par ailleurs que conclure à l’absence de justes motifs au vu de la teneur de la lettre de licenciement. Dès lors, en notifiant à l’employeur le 25 juillet 2014, sa décision de restitution des ARE versées à tort, l’OCE a agi tardivement, de sorte que son droit à réclamer la restitution des ARE est prescrit.

12.    Aussi le recours est-il admis et la décision sur opposition du 11 novembre 2014 annulée.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet et annule la décision sur opposition du 11 novembre 2014.

3.        Condamne l'intimé à payer au recourant une indemnité de CHF 1'200.- au titre de dépens.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Doris GALEAZZI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'Etat à l'économie par le greffe le