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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/310/2018

ATAS/183/2019 du 06.03.2019 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/310/2018 ATAS/183/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 mars 2019

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié c/o B______, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Yves MABILLARD

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après l'assuré), né en 1960, travaille en tant qu'indépendant dans un chantier naval et à l'entretien de bâtiments depuis 1992.

2.        Dès le 15 octobre 2012, l'assuré a été en incapacité de travail.

3.        Le 13 mars 2013, l'assuré a subi une oesophagectomie en raison d'un cancer.

4.        Par demande du 24 août 2014, l'assuré a sollicité des prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité (ci-après OAI).

5.        Le 16 septembre 2014, l'OAI a réceptionné un rapport de la doctoresse C______, spécialiste FMH en oncologie médicale, indiquant que l'assuré avait présenté en octobre 2012 un adénocarcinome de l'œsophage. Il souffrait d'un status après traitement de l’adénocarcinome, avec dumping syndrome (malaises succédant à chaque repas avec lente récupération), d'une asthénie de grade II et d'un inconfort digestif chronique. Selon le médecin, la persistance des symptômes était probable et le pronostic global était réservé.

Dans son activité habituelle, l'incapacité de travail avait été de 80% du 15 octobre 2012 au 18 février 2013, totale du 19 février au 31 mars 2013, 90% du 1er avril au 31 août 2013, 85% du 1er septembre au 10 novembre 2013, 80% du 1er décembre 2013 au 31 mai 2014, et à 70% dès le 1er juin 2014.

L'activité habituelle était encore exigible à 30%, avec une baisse de rendement en raison de l'activité physiquement lourde, la nécessité de récupérer des malaises post-prandiaux et une tolérance à l'effort diminuée.

Dans une activité adaptée, une occupation partielle était possible pour autant que l'assuré ait un temps de récupération nécessaire et un outillage adapté pour les efforts contraignants. L'assuré avait déjà commencé à acquérir un nouvel outillage permettant de le décharger de certaines tâches physiquement lourdes, à ses frais. Une amélioration de la capacité de travail était encore indéterminée.

L'assuré était en train de développer une activité professionnelle physiquement moins lourde (bâteau-école). Il était très motivé à poursuivre son activité le plus possible (ce qui n'était possible qu'à temps partiel).

6.        La Bâloise Vie SA, assureur perte de gain (ci-après l'APG), a estimé que l’assuré présentait une incapacité de gain de 38% dès le 15 octobre 2014 et lui a versé une rente.

7.        Par rapport du 13 avril 2015, la Dresse C______ a indiqué que l'état de santé de l'assuré était stationnaire et qu'en raison du status post traitement d'un adénocarcinome de l'œsophage, sa capacité de travail dans son activité habituelle était de 30% depuis juin 2014.

8.        Dès le 14 avril 2015, l'assuré a été en incapacité de travail à 90% en raison d'une occlusion veineuse proximale du membre supérieur droit.

9.        Par avis du 27 avril 2015, le Service médical régional AI (ci-après SMR) a indiqué que l'assuré était en incapacité de travail depuis le 15 octobre 2012 en raison d'un adénocarcinome de l'œsophage opéré en février 2013. Sa capacité de travail était de 30% depuis juin 2014. Les limitations fonctionnelles étaient liées à l'asthénie et aux malaises post-prandiaux dans un contexte de dumping syndrome. Il convenait de déterminer la capacité de travail dans une activité adaptée légère et les limitations fonctionnelles à respecter.

10.    Le 27 avril 2015, l'APG a transmis à l'OAI les taux d'incapacité de gain reconnus : 80% dès le 15 octobre 2012, 90% dès le 1er avril 2013, 85% dès le 1er septembre 2013, 80% dès le 1er décembre 2013, 70% dès le 1er juin 2014 et 38% dès le 15 octobre 2014.

11.    Le 4 juin 2015, l'assuré a informé l'OAI que son état de santé s'était aggravé et qu'en 2010, il avait déjà subi une opération aux deux mains.

12.    Le 9 juin 2015, la Dresse C______ a indiqué qu'une augmentation de la capacité de travail de 20% était envisageable à moyen terme. Dans une activité adaptée légère, la capacité était limitée par les multiples épisodes quotidiens de type dumping syndrome/malaises et une asthénie secondaire à l'effort. Chaque effort avait pour conséquence une période de récupération prolongée. La limitation fonctionnelle à respecter était le besoin de périodes de repos plusieurs fois par jour.

13.    Le 10 juin 2015, l'OAI a réceptionné des rapports transmis par l'APG, dont notamment une expertise établie le 29 juin 2011 par le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, diagnostiquant, avec répercussion sur la capacité de travail de l’assuré, une rhizarthrose trapézométacarpienne bilatérale de stade II opérée des deux côtés et une arthrose débutante bilatérale des doigts longs. Lors d'une 1ère consultation médicale en 2009, le diagnostic de rhizarthrose bilatérale avait été posé. En 2010, un syndrome du tunnel carpien bilatéral s'y était ajouté. Entre juin 2010 et avril 2011, l'assuré avait subi successivement une décompression nerveuse au poignet et une arthroplastie du 1er rayon de chaque main.

Depuis le 8 juin 2011, l'assuré avait repris son activité à 80%, à l'exclusion des travaux lourds qui ne pouvaient plus être réalisés en raison de l'arthrose douloureuse des doigts et de la présence d'implants prothétiques des pouces. L'assuré déléguait à des professionnels indépendants les travaux lourds. Habituellement, le travail administratif du chantier représentait 20% et les travaux lourds 80%. Actuellement, la gestion de l'entreprise représentait 50% et les travaux lourds 50%. Ainsi, depuis le 8 juin 2011, l'incapacité médico-théorique était de 50%.

14.    Le 15 juin 2015, le docteur E______, spécialiste FMH en maladies vasculaires, a diagnostiqué, avec effet sur la capacité de travail de l’assuré, un syndrome post-thrombotique du membre supérieur droit consécutif à une thrombose veineuse profonde du membre supérieur droit dans un contexte de pose de port à cath. L'assuré avait présenté une occlusion veineuse proximale du membre supérieur droit en avril 2015. Les limitations fonctionnelles étaient une douleur, une tuméfaction et une diminution de la force du membre supérieur droit. L'incapacité de travail était de 70% en tant que constructeur naval.

15.    Par avis du 24 août 2015, le SMR a noté que selon les médecins, l'incapacité de travail se maintenait à 70% depuis juin 2014. Selon le SMR, l'incapacité de travail totale dans la part « chantier » et tâches lourdes était plausible du fait des séquelles de l'atteinte oncologique, de l'arthrose des mains et du syndrome post-thrombotique du membre supérieur droit. Il s'agissait encore de préciser la capacité de travail dans une activité légère, de type administratif.

Selon le résumé transmis en avril 2015 par l'APG, l'incapacité de travail de l'assuré était de 38% depuis le 15 octobre 2014. Il existait donc des divergences avec l'appréciation des médecins.

16.    Le 3 septembre 2015, l'APG, à la demande de l'OAI, a transmis à nouveau les taux d'incapacité de gain de l'assuré dès le 15 octobre 2012. Il en résultait qu'à compter du 15 octobre 2014, celle-ci était de 38%.

L'APG a également transmis la copie du rapport du docteur F______, spécialiste FMH en gastroentérologie, daté du 16 juin 2015. L'expert, mandaté par l'APG, avait diagnostiqué un carcinome oesophagien, un status après oesophagectomie et un dumping syndrome précoce après oesophagectomie. L'assuré se plaignait essentiellement de douleurs abdominales apparaissant dès la fin du repas sous forme de coup de poing, quotidiennement, pouvant durer de quelques minutes à quelques heures. Il signalait des sueurs, une hypersialorrhée et des vertiges. L'assuré se plaignait également de crampes touchant les membres supérieurs et inférieurs. Il signalait également un manque d'énergie et un manque d'allant, sans symptôme dépressif mais réalisant la diminution de ses capacités physiques, rendant son activité professionnelle pénible et l'obligeant à beaucoup s'organiser pour éviter les travaux de force et planifier des travaux qui allaient durer beaucoup plus que d'habitude. Il avait également une sensation de doigts engourdis de la main droite.

Sur le plan professionnel, il travaillait à la gestion, l'entretien, les déplacements, les transports, la manutention, les réparations, le stockage, les modifications de bateaux, et l'entretien de bâtiments. Il n'avait pas d'employés réguliers et engageait des tâcherons. Il avait plusieurs projets pour adapter son activité à son handicap dans le sens de sa fatigue, dont la construction d'un bateau-école et l'organisation de stages professionnels bénévoles dans son entreprise. L'assuré estimait sa capacité professionnelle à 20% depuis deux ans.

L'expert a constaté que l'intervention chirurgicale était responsable d'un dumping syndrome précoce ayant pour conséquence une fatigabilité pathologique, des limitations des capacités professionnelles pour la réalisation des travaux sur le chantier naval et des délais augmentés pour l'achèvement des mandats confiés. L'expert a indiqué qu'il lui était difficile de juger du degré de l'incapacité de travail médico-théorique. Cependant, après description de son activité et constatation objective, l'évaluation de 20% semblait légitime. L'assuré ne tirait aucun bénéfice, ni profit secondaire de sa maladie. Il n'y avait aucune exagération, ni absence d'effort, ni simulation quant à une reprise de l'activité professionnelle.

La mise en place de mesures nutritionnelles et diététiques pouvaient amener une amélioration du dumping syndrome et une éventuelle augmentation significative des aptitudes professionnelles. La situation devait être réévaluée après une année, suite à une prise en charge nutritionnelle et diététique adéquate.

Enfin, l’expert recommandait de mettre en œuvre un consilium neurologique, à la recherche d’une neuropathie ou d’une myopathie post-chimiothérapeutique, et une évaluation psychologique.

17.    Par rapport du 15 décembre 2015, la Dresse C______ a indiqué que l'état de santé de l'assuré s'était amélioré progressivement. Les limitations constatées étaient une asthénie de grade II, des troubles de la concentration et un dumping syndrome après chaque repas. La capacité de travail était de 40% en tant qu'entrepreneur naval dès le 1er janvier 2016.

18.    Selon une note téléphonique versée au dossier en date du 29 février 2016, la Dresse C______ a expliqué au SMR qu'une consultation neurologique n’était pas nécessaire et que l'assuré avait déjà eu un bilan nutritionnel en mai 2014. S'agissant de sa capacité de travail résiduelle, il était présent dans son entreprise une grande partie de la journée, mais son rendement était diminué. Il était obligé de prendre des repas fractionnés réguliers, lesquels étaient à chaque fois suivis par un malaise lié au dumping syndrome, qui obligeait l'assuré à s'arrêter et à se reposer. En outre, il était plus rapidement fatigable. Dans ce contexte, il n'effectuait plus de travaux lourds et déléguait toutes les tâches de chantier naval et de mise à l'eau des bateaux. Son activité se concentrait sur les tâches administratives, la supervision et l'enseignement. En outre, il effectuait des convoyages de bateaux en mer. Cette activité semblait compatible avec les limitations fonctionnelles car l'assuré pouvait se reposer après les repas. Selon la Dresse C______, l'assuré était prêt à aménager son activité autant que possible pour travailler au maximum de ses possibilités. Elle estimait difficile de chiffrer la capacité de travail résiduelle, mais elle allait tenter de le faire lors de la prochaine consultation.

19.    Par avis du 29 février 2016, le SMR a relevé qu'outre le dumping syndrome précoce après oesophagectomie dans le cadre d'un carcinome oesophagien, le Dr F______ avait relevé plusieurs problématiques concomitantes qu'il recommandait d'investiguer: des crampes des membres inférieurs et supérieurs, un manque d'énergie et une diminution des capacités physiques, des engourdissements des doigts de la main droite et un status après thrombose du membre supérieur droit sur un port à cath qui avait été retiré depuis. En outre, l'assuré ne bénéficiait pas d'un suivi nutritionnel. L'expert estimait « légitime » l'évaluation de la capacité de travail résiduelle de 20% faite par l'assuré lui-même. L'expert ne se prononçait toutefois pas sur la capacité de travail dans une activité strictement adaptée, légère. Il avait émis plusieurs recommandations susceptibles d'améliorer la capacité de travail, soit une prise en charge nutritionnelle, une consultation neurologique et une évaluation psychologique.

Le SMR a relevé qu'il apparaissait que la compagne de l'assuré, médecin, avait assisté à l'évaluation effectuée par le Dr F______, ce qui n'était pas conforme aux recommandations en matière de qualité des expertises. En outre, selon la Dresse C______, l'assuré présentait une capacité de travail de 40% depuis le 1er janvier 2016 (rapport du 15 décembre 2015).

Par conséquent, l'expertise ne permettait pas de préciser la capacité de travail résiduelle dans une activité adaptée légère. En outre, l'état de santé de l’assuré n'était pas stabilisé à ce moment-là.

Selon le SMR, le taux de 40% restait une appréciation peu précise de sa capacité de travail résiduelle.

20.    Selon une note d'entretien téléphonique du 3 mai 2016, la Dresse C______ a expliqué que malgré tous ses efforts, l'assuré n'arrivait pas à travailler à plus de 40%. Il restait très fatigué, fatigable, et avait besoin de se reposer régulièrement. L'assuré était très volontaire et avait tenté de mettre en place des mesures afin de maintenir à flot son entreprise. Il avait engagé des employés et aménagé son poste. Toutefois, sa présence était nécessaire. Il n'arrivait pas à faire face aux commandes et n'arrivait pas à faire plus. La situation était financièrement difficile et l'assuré craignait de ne pas parvenir à continuer son activité. Très motivé, il était demandeur d'aide avec un spécialiste en réadaptation. Selon le médecin, la situation était stabilisée et il y avait peu d'espoir que la fatigue s'améliore. Elle n'était pas en position pour déterminer si une activité mieux adaptée pourrait permettre d'envisager une capacité de travail supérieure au 40%. Selon elle, il fallait observer l'assuré en situation.

21.    Par rapport du 3 mai 2016, la Dresse C______ a indiqué que les limitations fonctionnelles étaient identiques à celles notées dans son rapport du 15 décembre 2016.

Elle a joint un rapport du 2 mai 2016 adressé au docteur G______, spécialiste FMH en chirurgie, expliquant que l'activité professionnelle de l'assuré était limitée à 40% principalement en raison du dumping syndrome ainsi que d'une fatigabilité accrue. L'assuré n'arrivait plus que difficilement à mener à bien son entreprise: les délais de réparation des bateaux étaient difficiles à respecter. Son état général, conservé pour les activités de la vie quotidienne, limitait toutefois son travail de chef d'entreprise, malgré ses essais pour diversifier son travail afin de le rendre moins « physique » (tentative de monter une petite « bateau-école » et de faire des rapatriements de bateaux).

22.    Par avis du 30 mai 2016, le SMR a signalé qu'il était difficile de statuer sur la capacité de travail effective au sein de l'entreprise compte tenu du fait que l'assuré effectuait vraisemblablement encore des tâches lourdes. Sur la base des informations transmises par la Dresse C______, la capacité de travail effective ne semblait pas dépasser un 40%. S'agissant de l'appréciation de la capacité de travail effective dans une activité qui serait complètement adaptée, légère de type administrative, tenant compte de la fatigabilité, permettant un fractionnement des repas et des périodes de repos après les repas, le SMR proposait de la déterminer par une observation en situation. Il pouvait être utile d'avoir un descriptif des activités actuelles de l'assuré, des activités qu'il considérait encore pouvoir faire et de celles qu'il ne pouvait plus faire et de préciser son taux de présence effectif dans son entreprise.

23.    Par courriel du 3 juillet 2016, l'assuré a expliqué à l'OAI qu'il s'occupait de la restauration, de l'entreposage, de l'entretien de bateaux ainsi que de l'entretien et de la restauration de bâtiments. Il n'avait pas d'employés, mais avait à son service un réseau de professionnels et de « tâcherons » qu'il payait pour accomplir certaines activités dans lesquelles il ne pouvait pas être seul, par sécurité, ou par lourdeur du mandat octroyé.

Il pouvait encore effectuer tous les travaux qui ne demandaient pas d'efforts démesurés et de délais trop précis.

Les travaux qu'il ne pouvait plus effectuer étaient la prise en charge de gros travaux, les gros bateaux qui demandaient trop de concentration ou trop d'efforts physiques; les travaux dans des conditions météorologiques autres que normales, les travaux demandant une attention et un stress trop constant, les travaux non accompagnés (risques d'inattention et de surcharge), les activités demandant des horaires et des remises de mandats trop précis ainsi que des travaux demandant un outillage ou un environnement non adapté à sa condition physique actuelle.

Son taux de présence effectif dans l'entreprise était de 30%.

L'assuré a ajouté notamment qu'il ne désirait pas du tout arrêter son activité, ne sachant faire que cela et étant passionné par son travail. Toutefois, il se rendait compte que même s'il faisait l'effort de répondre à 100% à son entreprise, le résultat n'était que de 30% vu sa condition physiologique. Le dumping syndrome engendrait de grosses fatigues quotidiennes et l'obligeait à arrêter toutes les activités temporairement.

24.    L'assuré a remis à l’OAI les bilans de son entreprise pour les années 2009 à 2016.

25.    L'extrait de compte individuel de l'assuré fait état des revenus suivants :

-          CHF 14'600.- (en 1995 et 1996),

-          CHF 15'100.- (de 1997 à 1999),

-          CHF 28'500.- (en 2000),

-          CHF 24'400.- (en 2001),

-          CHF 20'900.- (en 2002),

-          CHF 8'307.- (de 2003 à 2005),

-          CHF 15'900.- (en 2006),

-          CHF 11'500.- (en 2007),

-          CHF 18'600.- (en 2008),

-          CHF 24'800.- (en 2009),

-          CHF 21'300.- (en 2010),

-          CHF 9'094.- (en 2011),

-          CHF 14'300.- (en 2012),

-          CHF 9'333.- (en 2013),

-          CHF 14'100.- (en 2014).

26.    Le 14 juillet 2017, l'OAI a établi un rapport d'enquête pour indépendant. Il en résulte notamment que l’assuré avait opéré une restructuration de son entreprise en l’orientant vers la location de bateaux et en faisant appel à des sous-traitants pour les travaux de construction et d’entretien. Depuis 2017, il donnait des cours de bateau. La partie administrative avait augmenté de 20% à 50% car il formait et encadrait des personnes. Les convoyages demandaient de la préparation, de la planification. Il gérait les imprévus et les cours de navigation nécessitaient une gestion administrative. Il effectuait encore certaines tâches physiques, à son rythme.

L’assuré faisait appel à de la sous-traitance et n’avait pas d’autre charges salariales que les siennes. Il ne payait pas les bénévoles et les stagiaires.

L’année 2009 avait été la meilleure des années entre 2008 et 2011, soit avant sa maladie.

En 2013, il y avait eu un fléchissement du chiffre d’affaires.

En 2014, pour réaliser les contrats, l’assuré avait fait appel à de la sous-traitance et avait investi dans du matériel et effectué des frais d’achats deux fois supérieurs à ce qui était habituel. Grâce à une baisse de certains frais généraux tels que le loyer, les frais de véhicules et le maintien de certains frais fixes, la société avait pu dégager un bénéfice et le chiffre d’affaires réalisé était proche de celui de 2009.

En 2015, le chiffre d’affaires était largement supérieur ; l’assuré avait obtenu un contrat de rénovation d’une villa et il avait fait appel à des sous-traitants pour effectuer le travail. Il semblait que la réorganisation du travail de l’assuré au sein de sa propre société avait permis à l’entreprise de prendre de l’essor. Le bénéfice moyen des années 2008-2009 était de CHF 22'056.- et le taux de diminution du revenu de l’année 2016 en rapport avec cette moyenne était de 45%.

Selon l'OAI, il était clair qu’au vu d’un chiffre d’affaire bas, toute variation, même faible, au niveau des charges pouvait avoir une importance sur le résultat de l’entreprise. Les taux de diminution du revenu variaient entre 38% et 45% depuis l’atteinte à la santé. Sur un revenu moyen entre 2014 et 2016, l’assuré ne rencontrerait pas de préjudice économique.

Au vu des éléments autres que l’atteinte à la santé (éléments économiques et organisationnels, en raison de facteurs étrangers à l’invalidité), il semblait difficile de se fier à la comptabilité.

En l’état, l’OAI estimait difficile de se prononcer sur la perte de gain de l’assuré. Il était préférable que le SMR se détermine sur la capacité de travail résiduelle dans l'activité habituelle et adaptée en précisant les limitations fonctionnelles de l'assuré.

27.    Par avis du 31 août 2017, le docteur H______ du SMR a indiqué que l'enquête d'indépendant démontrait que l'assuré avait aménagé son travail et qu'il avait augmenté la partie administrative. Compte tenu des limitations fonctionnelles, de la fatigabilité, de l'impossibilité d'effectuer des efforts physiques et des résultats de l'enquête, le SMR était en mesure de dire que la capacité de travail dans l'ancienne activité était de 40% et dans une activité adaptée de 60%.

28.    Par rapport d'enquête économique du 21 septembre 2017, l'OAI a évalué l'invalidité de l'assuré en utilisant la méthode ordinaire.

Le revenu sans invalidité (CHF 25'190.-) correspondait à la meilleure année en fonction des résultats des comptes pertes et profits 2009. Les gains soumis à cotisation AVS confirmaient ce revenu.

Le revenu d'invalide (CHF 22'086.-) avait été fixé selon les résultats d'exploitations des années 2014-2016. Depuis 2014, l'état de santé de l'assuré était stationnaire, cependant, les revenus de l'assuré étaient en dents de scie, de sorte qu'il convenait de faire une moyenne 2014-2016.

En comparant les revenus avec et sans invalidité, il en résultait un degré d'invalidité de 12%.

Ainsi, dans son activité habituelle, en s'attribuant les activités possibles à son état de santé, l'assuré présentait un préjudice économique de l'ordre de 12%. Cela étant, même si dans son activité habituelle le préjudice économique était supérieur à 40%, l’assuré n'aurait pas de préjudice financier dans une activité adaptée, au vu de l'exigibilité retenue par le SMR le 31 août 2017. L'assuré s'était en effet contenté d'un faible revenu avant son atteinte à la santé. De ce fait, même dans une activité salariée effectuée à temps partiel, la perte économique n’était pas supérieure à 40%.

29.    Par projet de décision du 25 octobre 2017 et décision du 7 décembre 2017, l'OAI a nié le droit de l'assuré à une rente d'invalidité. Selon le SMR, l'assuré avait une capacité de travail de 40% dans son activité habituelle dès le 15 octobre 2012, et de 60% dans une activité adaptée dès cette date. Selon les résultats de l'enquête économique du 12 juillet 2017, l'assuré avait aménagé son travail et augmenté la partie administrative. Partant, le préjudice économique était de 12%, ce qui n'ouvrait le droit ni à une rente d'invalidité, ni à une mesure de reclassement.

30.    Par acte du 26 janvier 2018, l'assuré, par l'intermédiaire de son conseil, a interjeté recours contre cette décision, concluant, sous suite de frais et dépens, préalablement, à son audition et à celle de la Dresse C______, principalement, à l'annulation de la décision et à l'octroi d'une rente entière dès le 27 août 2014, et subsidiairement, à la mise en œuvre d'une enquête économique indépendante et au renvoi de la cause pour instruction complémentaire et/ou nouvelle décision.

Le recourant a contesté l’estimation du SMR du 31 août 2017 selon laquelle il présentait une capacité de travail dans l'ancienne activité de 40% et dans une activité adaptée de 60%. Selon le recourant, cette estimation était arbitraire et aucun médecin n'avait retenu de tels pourcentages.

Par ailleurs, le recourant a contesté l’enquête économique de l’intimé, laquelle contenait plusieurs erreurs, ainsi que les salaires avec et sans invalidité retenus par l’intimé.

Il a expliqué notamment qu'il s'était lancé dans une activité indépendante en 1994 en tant que patron d'une entreprise de chantier naval mais qu'il n'avait jamais pu pleinement développer son activité indépendante en raison de son état de santé. En 2001, la croissance de son entreprise avait pâti en raison de ses problèmes de dépendance à l’alcool, dont il avait réussi à se sevrer en 2009. Cette année-là, il avait dû réduire son activité en raison des douleurs et de la perte de force aux deux mains. En 2010 et en 2011, il avait subi des opérations aux mains et en 2012, un cancer de l’œsophage avait été diagnostiqué.

L'intimé avait, à tort, retenu qu'il s'était contenté de faibles revenus avant son atteinte à la santé en 2012. L'intimé avait interprété arbitrairement les bilans et avait omis de prendre en compte notamment le fait qu'en 2003, les revenus avaient chuté drastiquement, non pas par convenance, mais parce qu'il était malade. Depuis 2002, sa capacité de travail avait diminué pour des raisons de santé. Partant, le revenu sans invalidité ne pouvait être repris des revenus de ses bilans.

En outre, selon l'intimé, le recourant était en mesure d'aménager indéfiniment son travail pour adapter son activité habituelle à ses limitations fonctionnelles, notamment en augmentant la partie administrative de son activité. D'un partage 20%-80% entre activités administratives et travaux lourds, le recourant était passé à un 50%-50% en 2010 suite aux problèmes rencontrés avec ses pouces. Mais on ne pouvait exiger qu'il adapte encore son temps de travail en augmentant le temps consacré à l'administration de son entreprise, alors que c'était l'exécution des travaux lourds qui lui rapportait des revenus. Le travail administratif ne rapportait aucun revenu et ne se développait pas. Enfin, il était le seul employé de son entreprise.

La méthode ordinaire de comparaison des revenus appliquée par l’intimé était arbitraire: il avait retenu un revenu hypothétique sans invalidité de CHF 25'190.- en se fondant sur les revenus de 2009, alors qu’il souffrait déjà des pouces et avait présenté une incapacité de travail de 50%. Il convenait donc de se référer aux statistiques, dont il résultait un revenu annuel de CHF 40'000.- par an, au moins. Pour le revenu avec invalidité, il convenait de tenir compte de l'année 2012 déjà et d'exclure l’année 2015, qui était exceptionnelle, de sorte que le revenu avec invalidité était de CHF 12'440.-. La comparaison des revenus aboutissait à une invalidité de 69%, ouvrant droit à une rente d'invalidité.

31.    Par réponse du 13 février 2018, l'intimé a conclu au rejet du recours. Les arguments du recourant n'étaient pas susceptibles de modifier l'appréciation de l'enquêtrice concernant le revenu de valide retenu et celui d'invalide. Le rapport d'enquête du 14 juillet 2017 et son complément du 21 septembre 2017 étaient probants.

32.    Par réplique du 22 mars 2018, le recourant a fait valoir notamment que, concernant le revenu sans invalidité en 2009, l'intimé avait omis de tenir compte de ses aptitudes personnelles, de son état de santé et de sa situation économique. Or, le recourant n'était déjà pas en bonne santé en 2009 puisqu'il souffrait des mains. Par conséquent, son entreprise n'avait pas pu se développer comme il aurait pu l'escompter. Ce trouble avait eu un impact significatif sur le chiffre d'affaires de l'entreprise, ce d'autant plus qu'elle dépendait uniquement de lui. Le développement économique de l'entreprise avait été, par trois fois, pour des raisons médicales, entravé par des périodes d'invalidité (alcoolisme, arthrose des pouces et cancer). Ces troubles avaient mis un terme à la progression de l'entreprise et contraint le recourant à repartir de plus bas. On ne pouvait ainsi considérer que le recourant s’était satisfait de petits revenus. Il avait tout fait pour développer son entreprise malgré les difficultés éprouvées en raison de son état de santé.

S'agissant du revenu avec invalidité, le SMR avait retenu une capacité de travail de 60% dans une activité adaptée. Or, le recourant souffrait du dumping syndrome et selon les médecins, sa capacité de travail résiduelle était de 20 à 30% seulement. En 2015, il avait eu l'opportunité de diriger un chantier de rénovation d'une maison et il n’avait effectué personnellement aucun travail manuel. Ce mandat exceptionnel ne reflétait pas sa situation professionnelle concrète, de sorte qu'il ne fallait pas en tenir compte. En raison de sa capacité de travail réduite existant depuis 2012, ses revenus en lien avec son activité principale (le chantier naval et la construction) avaient fortement diminué, hormis pour l'année 2015.

En outre, il avait déjà tout mis en œuvre de son propre chef pour éviter de devoir recourir aux prestations des assurances sociales. Il était erroné de soutenir les conclusions du SMR selon lequel il pouvait travailler à 40% dans son entreprise et à 60% dans une activité adaptée. Il avait déjà réorganisé son temps de travail en 2010. Par conséquent, il avait déjà tout tenté pour diminuer son dommage et on ne pouvait lui reprocher de ne pas pouvoir exercer davantage d'activité de gestion.

33.    Par duplique du 17 avril 2018, l'intimé a indiqué que les éléments soulevés par le recourant n'étaient pas susceptibles de modifier son appréciation du cas.

34.    Le 27 août 2018, le recourant a indiqué que des faits nouveaux concernant son état de santé s'étaient produits. Il avait présenté un état dépressif et une asthénie avec des douleurs diffuses depuis décembre 2017, voire septembre 2017, mais ce trouble n’avait été diagnostiqué qu’en février 2018. Par ailleurs, une polyneuropathie sensitivo-motrice des quatre membres avait été confirmée en juin 2018. Elle était présente depuis la chimiothérapie du recourant, soit depuis 2013. Elle affectait son travail vu qu'elle provoquait des troubles sensitifs au bout des doigts, un manque de dextérité, des douleurs et un manque de force.

Par économie de procédure, il apparaissait opportun au recourant d'adresser ces faits nouveaux. Les rapports confirmaient que le recourant n'était absolument pas en mesure d'exercer une activité à 60% au vu du dumping syndrome, mais également de son état dépressif sévère et de sa polyneuropathie. Les médecins avaient encore abaissé sa capacité de travail résiduelle de 20 % à 10% depuis le 19 mars 2018, suite aux nouveaux syndromes. En outre, il avait été en arrêt de travail total du 1er février au 18 mars 2018. Sa perte de gain allait être encore plus importante en 2018 que les années précédentes.

Le recourant a produit notamment:

-          un rapport du 30 avril 2018 du docteur I______, spécialiste FMH en médecine interne générale, diagnostiquant un état dépressif et une asthénie d’origine indéterminée avec des douleurs diffuses depuis décembre 2017. Le recourant avait été hospitalisé du 27 mars au 12 avril 2018 à la clinique genevoise de Montana. L’incapacité de travail était totale depuis le 1er février 2018 en raison de l’asthénie.

-          un rapport du 3 mai 2018 de la doctoresse J______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, diagnostiquant un trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère (F32.2). Le recourant avait présenté une péjoration marquée de son état psychique dès fin septembre 2017. Il avait de l’anergie, de la tristesse, une perte de motivation, des angoisses, des difficultés de sommeil et de concentration et des idéations passives suicidaires. Il n’y avait pas d’éléments psychotiques, ni d’abus de substance. Le recourant avait dû être hospitalisé en raison de la péjoration de son état dépressif. Son incapacité de travail était totale depuis le 1er février 2018. L’état dépressif restait sévère et empêchait toute activité structurée et maintenue dans la journée.

-          un rapport du 14 juin 2018 du docteur K______, spécialiste FMH en neurologie, diagnostiquant une polyneuropathie sensitivo-motrice à nette prédominance axonale, longueur-dépendante des quatre membres, d’origine toxique. Le recourant se plaignait de troubles sensitifs et de l’équilibre, modérés, évoluant de longue date, associés à des troubles sensitifs au bout des doigts, un manque de dextérité, des douleurs et un manque de force.

Le recourant présentait d’une part un équilibre moins bon qu’auparavant avec une tendance à s’encoubler, associé à une sensation de froid et de pieds cartonnés. Cette sensation était probablement présente de longue date depuis la chimiothérapie. Depuis quelques mois, en reprenant le travail, il avait remarqué un manque de dextérité et un trouble de la sensibilité au bout des doigts avec lâchage d’objets. Il décrivait une asthénie importante ainsi qu’une perte de poids de 6 kg.

35.    Par écriture du 18 septembre 2018, l'intimé a rappelé que la décision litigieuse datait du 7 décembre 2017, de sorte que seuls pouvaient être retenus, dans le cadre de la présente procédure, les faits antérieurs à cette date. Par ailleurs, il produisait un avis du SMR du 18 septembre 2018, selon lequel le recourant présentait un épisode dépressif avec peu d'éléments de sévérité, dont même la psychiatre traitante préjugeait d'une évolution favorable qui n'avait pas nécessité l'introduction d'un traitement antidépresseur. Le trouble avait entraîné une incapacité attestée depuis février 2018, ce qui était postérieur à la décision de décembre 2017. Par ailleurs, la polyneuropathie était présente de longue date et n’avait pas empêché le recourant de reprendre son activité habituelle à 30% dès juin 2014 et à 40% dès janvier 2016. De plus, cette atteinte était compatible avec une activité administrative légère.

36.    Par pli du 12 novembre 2018, le recourant a expliqué avoir été hospitalisé en urgence le 20 septembre 2018 en raison d'un malaise cardiaque, comme l'attestait le rapport du 8 octobre 2018 de la doctoresse L______, médecin auprès de l’Hôpital Georges Pianta à Thônon-les-Bains, qu’il produisait. On ne pouvait plus exiger de lui qu'il continue de travailler au vu de son dossier médical.

Par ailleurs, il produisait le compte individuel actualisé pour l'année 2016, selon lequel ses revenus s'étaient élevés à CHF 9'333.- et non pas à CHF 12'028.- comme faussement indiqué dans son recours. Cela confirmait que son état de santé se péjorait au fil des années.

Il a produit un extrait du compte individuel établi le 18 octobre 2018, dont il résulte notamment que ses revenus avaient été de CHF 9'333.- (en 2016) et de CHF 41'300.- (en 2015).

37.    Après avoir adressé une copie de cette écriture à l'intimé, la chambre de céans a gardé la cause à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA).

3.        Est litigieuse, en l’occurrence, la question de savoir si le recourant peut prétendre à une rente d’invalidité.

4.        a. Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

b. En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

5.        Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

6.        a. Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

b. Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

b/aa. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

b/bb. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

7.        a. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

b. Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

8.        En l’occurrence, l’intimé a retenu que le recourant présentait, depuis le 15 octobre 2012, une capacité de travail de 40% dans son activité habituelle et de 60% dans une activité adaptée, ce que le recourant conteste.

À l'appui de sa position, l'intimé s'est fondé sur les conclusions du Dr H______ du SMR du 31 août 2017. Selon ce médecin, compte tenu des limitations fonctionnelles, de la fatigabilité, de l'impossibilité d'effectuer des efforts physiques et des résultats de l'enquête, il était en mesure de dire que la capacité de travail du recourant dans l'ancienne activité était de 40% et dans une activité adaptée de 60%.

À la lecture de l’ensemble des pièces versées au dossier, la chambre de céans est toutefois d’avis que l’on ne saurait confirmer les conclusions du SMR, et ce pour les motifs qui suivent.

On relèvera déjà que l'avis succinct du SMR du 31 août 2017 ne contient aucun diagnostic. Certes, le Dr H______ a-t-il renvoyé à l'avis du SMR du 30 mai 2016. Force est toutefois de constater que celui-ci portait uniquement sur les suites du cancer du recourant, soit une asthénie marquée et un dumping syndrome post-oesophagectomie, alors qu'il n'est pas contesté que le recourant présentait également de l'arthrose des mains et un syndrome post-thrombotique du membre supérieur droit (cf. avis du SMR du 24 août 2015). En outre, l'avis du Dr H______ n'indique pas à partir de quelle date les taux de capacités de travail retenus - 40% dans l’activité habituelle et 60% dans une activité adaptée - seraient valables.

Par ailleurs, s’agissant de la capacité de travail du recourant dans son activité habituelle, soit 40%, on relèvera que si la Dresse C______ a certes fait état d’une telle capacité à compter du 1er janvier 2016 (rapports des 15 décembre 2015 et 2 mai 2016), force est toutefois de relever que pour la période antérieure au 1er janvier 2016, aucun médecin ayant examiné le recourant n’a estimé que ce dernier présentait une telle capacité de travail. En outre, alors que le SMR avait considéré que l’appréciation de la capacité de travail résiduelle du recourant dans une activité complètement adaptée et légère devait se faire par une observation en situation (cf. avis du 30 mai 2016), on peine à comprendre comment le Dr H______ est parvenu à la conclusion que la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était de 60%, alors qu'aucune observation en situation n'a été effectuée au préalable. De surcroît, aucun médecin ayant examiné le recourant ne s’était prononcé sur le taux de sa capacité de travail résiduelle. En procédant de la sorte, le SMR a ainsi posé de nouvelles conclusions, alors qu’il doit se limiter à porter une appréciation sur celles déjà existantes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_518/2007 du 14 juillet 2008 consid. 3.2 et les références citées). Enfin, la teneur de l'avis du SMR du 24 août 2015, selon lequel l'APG avait retenu une « capacité de travail » de 62% dès le 15 octobre 2014 - alors qu'il s'agissait en réalité d'une « capacité de gain » de 62% - (cf. pièces 24 page 1 chargé intimé et 29 chargé recourant), laisse à penser que le Dr  H______ s’est fondé, à tort, sur l’information transmise par l’APG pour retenir également une capacité de travail de 60% dans une activité adaptée.

Pour l'ensemble de ces motifs, force est de constater que les rapports versés à la procédure ne permettent pas de confirmer l'appréciation de l'intimé, à savoir que le recourant présentait, dès le 15 octobre 2012, une capacité de travail de 40% dans son activité habituelle et de 60% dans une activité adaptée.

Par ailleurs, s’agissant des atteintes invoquées pour la première fois par le recourant dans son écriture du 27 août 2018, la chambre de céans rappellera que selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 321/04 du 18 juillet 2005 consid. 5).

En l'occurrence, si le trouble dépressif récurrent et la polyneuropathie sensitivo-motrice ont certes été diagnostiqués postérieurement à la décision litigieuse du 7 décembre 2017, les rapports versés à la procédure ne permettent toutefois pas d'exclure que ces atteintes n'avaient pas déjà une influence sur la capacité de travail du recourant avant le 7 décembre 2017 (date déterminante de la décision litigieuse), ce d'autant plus qu'en juin 2015, le Dr F______ avait déjà recommandé, au vu des plaintes du recourant, d'effectuer des investigations neurologiques et psychologiques (cf. rapport du 16 juin 2015, p. 3).

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la chambre de céans n'est pas en mesure de statuer en l'état actuel du dossier, dès lors qu'il ne contient pas les éléments suffisants et probants permettant une appréciation adéquate des atteintes à la santé dont souffrait le recourant, leurs éventuelles limitations fonctionnelles et répercussions sur sa capacité de travail dans son activité habituelle et dans une activité adaptée.

Il convient dès lors de renvoyer la cause à l'intimé afin qu'il ordonne un complément d'instruction sous la forme notamment d'une expertise médicale indépendante auprès de médecins spécialisés en gastroentérologie, médecine interne, neurologie, et psychiatrie. Les conditions jurisprudentielles d’un tel renvoi sont d’autant plus remplies que l'intimé n'a mis en oeuvre aucune expertise. En cas de nécessité, un stage d'observation professionnelle visant à clarifier le rendement exigible et les activités qui demeurent à la portée de l'intéressé sera également organisé.

9.        Il convient à présent d’examiner le calcul du degré d’invalidité effectué par l'intimé.

10.    a. Pour évaluer celui-ci, il existe principalement trois méthodes - la méthode générale de comparaison des revenus, la méthode spécifique et la méthode mixte - dont l'application dépend du statut du bénéficiaire potentiel de la rente : assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, assuré sans activité lucrative, assuré exerçant une activité lucrative à temps partiel (ATF 137 V 334 consid. 3.1). La détermination du taux d'invalidité ne saurait reposer sur la simple évaluation médico-théorique de la capacité de travail de l'assuré car cela revient à déduire de manière abstraite le degré d'invalidité de l'incapacité de travail, sans tenir compte de l'incidence économique de l'atteinte à la santé (ATF 114 V 281 consid. 1c et 310 consid. 3c ; RAMA 1996 n° U 237 p. 36 consid. 3b).

b. Chez les assurés qui exerçaient une activité lucrative à plein temps avant d'être atteints dans leur santé physique, mentale ou psychique, il y a lieu de déterminer l'ampleur de la diminution des possibilités de gain de l'assuré, en comparant le revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré ; c'est la méthode générale de comparaison des revenus (art. 28a al. 1 LAI en corrélation avec l'art. 16 LPGA) et ses sous-variantes, la méthode de comparaison en pour-cent et la méthode extraordinaire de comparaison des revenus (ATF 137 V 334 consid. 3.1.1 et les références).

b/aa. Dans le cas d’un indépendant, le degré d’invalidité ne saurait être déterminé en appliquant la méthode de la comparaison en pour-cent, cette méthode ne prenant pas en considération le fait que la gestion d'une structure commerciale engendre des charges fixes et incompressibles, telles que loyer, mobilier ou assurances, qui sont indépendantes de la variation du degré d'activité. Une diminution du chiffre d'affaires ne se traduit donc pas par une diminution proportionnelle du bénéfice. De telles circonstances nécessitent bien plutôt l'examen concret de la situation de la personne assuré (arrêt du Tribunal fédéral 9C_44/2011 du 1er septembre 2011 consid. 4.2 et 4.3).

b/bb. Chez une personne de condition indépendante, la comparaison des résultats d'exploitation réalisés dans son entreprise avant et après la survenance de l'invalidité ne permet de tirer des conclusions valables sur la diminution de la capacité de gain due à l'invalidité que dans le cas où l'on peut exclure au degré de vraisemblance prépondérante que les résultats de l'exploitation aient été influencés par des facteurs étrangers à l'invalidité. En effet, les résultats d'exploitation d'une entreprise dépendent souvent de nombreux paramètres difficiles à apprécier, tels que la situation conjoncturelle, la concurrence, l'aide ponctuelle des membres de la famille, des personnes intéressées dans l'entreprise ou des collaborateurs. Généralement, les documents comptables ne permettent pas, en pareils cas, de distinguer la part du revenu qu'il faut attribuer à ces facteurs - étrangers à l'invalidité - et celle qui revient à la propre prestation de travail de l'assuré (arrêts du Tribunal fédéral 9C_46/2016 du 10 août 2016 consid. 2.1 et 9C_44/2011 du 1er septembre 2011 consid. 3.3 et les références).

b/cc. Si l'on ne peut déterminer ou évaluer sûrement les deux revenus en cause, il faut, en s'inspirant de la méthode spécifique pour personnes sans activité lucrative (art. 28a al. 2 LAI en corrélation avec les art. 27 RAI et 8 al. 3 LPGA), procéder à une comparaison des activités et évaluer le degré d'invalidité d'après l'incidence de la capacité de rendement amoindrie sur la situation économique concrète (procédure extraordinaire d'évaluation de l'invalidité). La différence fondamentale entre la procédure extraordinaire d'évaluation et la méthode spécifique réside dans le fait que l'invalidité n'est pas évaluée directement sur la base d'une comparaison des activités; on commence par déterminer, au moyen de cette comparaison, quel est l'empêchement provoqué par la maladie ou l'infirmité, après quoi l'on apprécie séparément les effets de cet empêchement sur la capacité de gain. Une certaine diminution de la capacité de rendement fonctionnelle peut certes, dans le cas d'une personne active, entraîner une perte de gain de la même importance, mais n'a pas nécessairement cette conséquence. Si l'on voulait, dans le cas des personnes actives, se fonder exclusivement sur le résultat de la comparaison des activités, on violerait le principe légal selon lequel l'invalidité, pour cette catégorie d'assurés, doit être déterminée d'après l'incapacité de gain (ATF 128 V 29 consid. 1 p. 30 et les références).

11.    En l’espèce, l’intimé a évalué le degré d’invalidité du recourant en appliquant la méthode ordinaire de comparaison des revenus. Afin de déterminer le revenu sans invalidité, l’intimé s’est fondé sur les résultats du compte pertes et profits de l’année 2009 et s'agissant du revenu avec invalidité, l'intimé a effectué une moyenne des résultats d'exploitation des années 2014 à 2016 (cf. rapport d'enquête économique du 21 septembre 2017).

Compte tenu de l'ensemble des pièces versées au dossier, la chambre de céans est toutefois d'avis que le résultat de l’entreprise pour l'année 2009 ne saurait être retenu en tant que revenu sans invalidité étant donné qu’il est établi, et non contesté par l'intimé (cf. enquête économique du 14 juillet 2017) que le recourant souffrait déjà d'une rhizarthrose bilatérale cette année-là (cf. expertise du Dr  D______, p. 5 et avis du SMR du 24 août 2015) entraînant une incapacité de travail dès octobre 2009 (cf. pièce 28 p. 91 chargé intimé). Par ailleurs, les années antérieures à 2009 ne sauraient être prises en compte, en l’état, dès lors que le recourant allègue avoir souffert d’une dépendance à l’alcool dès 2001 avec des répercussions sur son travail. Si les pièces versées au dossier ne permettent pas d’établir si cette atteinte a eu effectivement des conséquences sur la capacité de travail du recourant, il n’en demeure pas moins qu’il est établi que le recourant a souffert de cette addiction et qu’il est sevré depuis 2009 (expertise du Dr D______ p.4 et expertise du Dr F______, p. 3). Quoi qu'il en soit, quand bien même le recourant disposait encore d’une capacité de travail dans son activité habituelle, on ne peut procéder, comme l’a fait l’intimé, en se fondant sur les résultats de l’entreprise avant et après invalidité. En effet, les données comptables de l'entreprise du recourant ne sauraient constituer une base valable pour évaluer son incapacité de gain, car elles ne permettent pas de distinguer la part du revenu qui résulte exclusivement de la prestation personnelle de travail du recourant de celle qu'il faut attribuer à des facteurs étrangers. Comme l'a relevé l'intimé lui-même, au vu d'un chiffre d'affaire bas, toute variation, même faible, au niveau des charges avait une importance sur le résultat de l'entreprise (enquête économique du 14 juillet 2017, p. 10). En outre, en raison de ses atteintes à la santé, le recourant a été contraint de sous-traiter une partie de ses activités, de sorte qu'il n’est pas possible de tirer de ces chiffres une appréciation pertinente des effets sur la capacité personnelle de gain du recourant de la diminution de sa capacité de rendement due à l'invalidité. L'incapacité de gain du recourant ne saurait se confondre avec la diminution du bénéfice d'exploitation de son entreprise, dans la mesure où ce raisonnement fait fi des circonstances - étrangères à l'invalidité - qui ont influencé la part du revenu qu'il faut attribuer à ces facteurs et celle qui revient à la propre prestation de travail de l’assuré. Au demeurant, la chambre de céans relèvera que dans le cadre de l'enquête économique du 14 juillet 2017, l'intimé était également parvenu à cette conclusion, considérant qu'au vu des éléments autres que l'atteinte à la santé (éléments économiques et organisationnels), il était difficile de se fier à la comptabilité de l'entreprise (p. 10 du rapport d'enquête économique du 14 juillet 2017). Or, de manière contradictoire, l'intimé s'est tout de même fondé sur les résultats de l'entreprise pour fixer les revenus sans et avec invalidité du recourant.

Partant, le calcul de l'invalidité, tel qu'effectué par l'intimé, n’est ainsi pas de nature à permettre une évaluation conforme au droit des effets des atteintes à la santé sur la capacité de gain du recourant.

12.    Compte tenu de ce qui précède, le recours sera admis partiellement. La décision litigieuse sera annulée et la cause sera renvoyée à l'intimé pour mise en œuvre d'une expertise pluridisciplinaire et, le cas échéant, d'un stage d'observation professionnelle. Cela fait, il appartiendra à l'intimé d'effectuer une nouvelle évaluation de l'invalidité et de rendre une nouvelle décision.

13.    Le recourant obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 3'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 89 H de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

14.    Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de l'intimé (art. 69 al. 1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision de l’intimé du 7 décembre 2017.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Condamne l’intimé à verser au recourant une indemnité de CHF 3'500.- à titre de dépens.

6.        Met un émolument de CHF 500.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le