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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3665/2009

ATAS/1209/2010 du 25.11.2010 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3665/2009 ATAS/1209/2010

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 3

du 25 novembre 2010

 

En la cause

Madame G___________, domiciliée c/o Me Pietro RIGAMONTI, à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître RIGAMONTI Pietro

recourante

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, case postale 6375, 1211 Genève 6

intimé

 


EN FAIT

Le 27 mars 2009, le SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES (ci-après SPC) a rendu une décision réclamant à Madame G___________ le remboursement d'un montant total de 171'337 fr. 20 correspondant aux prestations qui lui avaient été versées à tort.

Le 27 avril 2009, Me Pietro RIGAMONTI, s'est opposé à cette décision au nom de sa pupille en contestant notamment les montants retenus dans les calculs du SPC à titre de fortune immobilière et de produits de la fortune. Il demandait au surplus une "mise à jour" du droit aux prestations de sa pupille au 1er janvier 2009.

Le 10 août 2009, le SPC a partiellement admis l'opposition. Il a ainsi décidé de reprendre ses calculs au 1er avril 2009 au lieu et place du 1er mars 2009 et a modifié la fortune immobilière prise en compte au 1er avril 2004, au 1er janvier 2006 et au 1er septembre 2007.

En revanche, il a refusé de prendre en compte les montants après abattement fiscal - comme demandé par le tuteur de sa bénéficiaire.

S'agissant du produit de la fortune immobilière, le SPC s'est partiellement rangé aux arguments du tuteur de sa bénéficiaire.

S'agissant en revanche de la fortune mobilière, le SPC a refusé d'en déduire le montant de la dette de sa bénéficiaire envers lui, expliquant qu'il est tenu compte chaque année de l'état de fortune au 31 décembre de l'année précédente et qu'il ne saurait dès lors être question de déduire de cette dernière, pour l'année en considération, les dettes non encore remboursées.

Par courrier adressé le 24 août 2009 au SPC et transmis par ce dernier au Tribunal de céans comme objet de sa compétence, le tuteur de la bénéficiaire s'est rangé aux principaux arguments du SPC et a reconnu que les décisions pour les années 2004 à 2008 n'étaient plus litigieuses.

En revanche, il a persisté à contester le fait que le SPC ne déduise pas de la fortune de sa pupille la dette de cette dernière à son encontre pour procéder aux calculs relatifs à la période postérieure au 1er janvier 2009.

Par courrier du 25 août 2009, le tuteur de la bénéficiaire a demandé au SPC de traiter son courrier de la veille comme une opposition à traiter avec célérité et non comme un recours - puisque les décisions rendues pour l'année 2009 constituaient de nouvelles décisions.

Invité à se déterminer, l'intimé, dans sa réponse du 9 novembre 2009, a conclu au rejet du recours.

En premier lieu, il a expliqué que la période 2009 avait fait l'objet non d'une nouvelle décision mais d'un plan de calcul, lequel faisait intégralement partie de sa décision sur opposition du 10 août 2009, raison pour laquelle il avait considéré que c'était la voie de recours qui était ouverte, d'autant que les décisions initiales contre lesquelles opposition avait été formée se prononçaient également sur la période valable à compter du 1er janvier 2009.

Quant au fond du litige, le SPC conteste avoir eu en mains tous les éléments nécessaires dès décembre 2007. A cet égard, il relève avoir rendu en date du 15 avril 2008 déjà une décision à la suite de laquelle le tuteur de sa bénéficiaire a admis que certains éléments faisaient encore défaut, qui ne lui ont finalement été communiqués qu'en janvier 2009. Le SPC en tire la conclusion que ses décisions des 27 et 30 mars 2009, notifiées le 1er avril 2009, ont été rendues dans un délai approprié.

Il conclut à ce que la fortune mobilière de l'intéressée ne soit diminuée du montant qui lui a été demandé en restitution qu'à partir du 1er janvier suivant la date à laquelle cette dette aura été payée.

Dans sa réplique du 3 décembre 2009, le tuteur de la bénéficiaire a persisté dans ses conclusions visant à ce que le montant des prestations complémentaires dues à sa pupille au 1er janvier 2009 soit calculé en soustrayant la dette de cette dernière envers le SPC (soit 71'503 fr.).

Le tuteur de la bénéficiaire allègue que le fait que cette dette n'ait pu être acquittée plus tôt est imputable à la lenteur du SPC, auquel il rappelle avoir demandé par courrier du 28 septembre 2007 déjà la suspension du versement des prestations complémentaires en faveur de sa pupille au motif de la vente immobilière et du partage successoral intervenus fin août 2007, dont il avait subodoré qu'ils étaient susceptibles de supprimer son droit aux prestations complémentaires.

Il ajoute qu'en date du 12 décembre 2007, il a communiqué au SPC tous les documents pertinents à l'exception du décompte final du notaire qui n'était pas encore en sa possession. Il reproche au SPC de n'avoir réagi que plusieurs mois plus tard, soit le 15 avril 2008, en rendant une décision qui ne prenait aucunement en compte la fortune immobilière de sa pupille. Il a alors à nouveau demandé - le 30 avril 2008 - la suspension du versement des prestations complémentaires.

Il reproche ainsi au SPC d'avoir mis près de 18 mois à se déterminer et allègue que, dans la mesure où il a expressément demandé la suspension du versement des prestations complémentaires dans le but d'éviter de devoir rembourser des prestations indues, sa pupille ne saurait pâtir du retard imputable à l'intimé, qu'il juge responsable du fait que la dette n'ait pas été remboursée au 31 décembre 2008.

Selon lui, si l'intimé avait agi de manière adéquate, sa pupille aurait pu honorer sa dette en décembre 2008 et ainsi toucher des prestations plus élevées en 2009 puisque sa fortune aurait été diminuée d'autant.

Le 22 décembre 2009, l'intimé a persisté dans ses conclusions.

Une audience s'est tenue en date du 8 juillet 2010. A cette occasion, le tuteur de la bénéficiaire a persisté dans son argumentation, en faisant remarquer que la loi en matière de prestations complémentaires renvoie aux lois fiscales et qu'en vertu de ces dernières, la fortune est déterminée en tenant compte des avoirs mais également des dettes.

L'intimé a quant à lui relevé qu'en 2008, la recourante ne s'était pas plainte de son manque de célérité. Il a ajouté que si la loi renvoie certes aux lois fiscales en ce qui concerne l'évaluation de la fortune, elle précise également que c'est au 1er janvier de l'année suivante qu'il convient de se référer.

A l'issue de l'audience, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

Le Tribunal cantonal des assurances sociales institué par la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ; E 2 05) statue, conformément à l'art. 56V al. 1 let. a ch. 3 LOJ, en instance unique sur les contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC; RS 831.30) et à l’art. 43 de la loi cantonale du 25 octobre 1968 sur les prestations cantonales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité (LPCC, J 7 15), conformément à l'art. 56V al. 2 let. a LOJ. Sa compétence pour juger du cas d’espèce est donc établie.

a) En matière de prestations complémentaires fédérales, les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de 30 jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1er LPGA; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPCF]) auprès du tribunal des assurances du canton de domicile de l’assuré (art. 58 al. 1 LPGA).

b) S’agissant des prestations complémentaires cantonales, l’art. 43 LPCC ouvre les mêmes voies de droit.

c) En l’espèce, le recours a été déposé dans les forme et délai prévus par la loi, de sorte qu’il est recevable. On relèvera à cet égard que puisque la "décision" litigieuse était annexée à celle rendue sur opposition et par économie de procédure, on considèrera que la voie du recours était ouverte.

Les dispositions de la LPGA, en vigueur depuis le 1er janvier 2003, s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPCC n'y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC).

Il en va de même en matière de prestations complémentaires cantonales (cf. art. 1A let. b LPCC).

Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s’applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 230 consid. 1.1, ATF 129 V 4 consid. 1.2, ATF 127 V 467 consid. 1, ATF 126 V 136 consid. 4b et les références citées).

Le litige porte sur la seule question de savoir si c'est à juste titre que le SPC, dans sa décision fixant le montant des prestations dues à la recourante à compter du 1er janvier 2009, s'est refusé à diminuer la fortune de la recourante du montant que cette dernière lui devait et qu'elle ne lui avait alors pas encore remboursé.

Aux termes de l’art. 2 LPC, la Confédération et les cantons accordent aux personnes qui remplissent les conditions fixées aux art. 4 à 6 des prestations complémentaires destinées à la couverture des besoins vitaux (al. 1er). Les cantons peuvent allouer des prestations allant au-delà de celles qui sont prévues par la loi et fixer les conditions d’octroi de ces prestations.

a) L’art. 9 al. 1er LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

b) Le montant des prestations complémentaires cantonales correspond quant à lui à la part des dépenses reconnues qui excède le revenu déterminant de l'intéressé (art. 15 LPCC). Pour les prestations complémentaires cantonales, le montant correspondant à la couverture des besoins vitaux est remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum vital cantonal d'aide sociale défini (art. 6 LPCC).

a) Conformément à l’art. 11 al. 1er LPC, les revenus déterminants comprennent notamment :

- le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b),

- un quinzième de la fortune nette - un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse - dans la mesure où elle dépasse 25'000 fr. pour les personnes seules, étant précisé que si le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul est propriétaire d’un immeuble servant d’habitation à l’une de ces personnes au moins, seule la valeur de l’immeuble supérieure à 112'500 fr. entre en considération au titre de la fortune (let. c).

b) Conformément à l'art. 17 al. 1 de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (OPC-AVS/AI ; RS 831.301), la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile.

L'art. 23 al. 1 de l'ordonnance précise que sont pris en compte en règle générale pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle, les revenus déterminants obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune le 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie.

c) Le revenu (hypothétique) de la fortune est déterminé sur la base des taux d'intérêt moyens de l'épargne de l'année précédant le droit à la prestation (VSI 1994 p. 161). Les taux d'intérêt moyens s'élevaient à 0.8 % pour 2006, 1.1 % pour 2007, 1.2 % pour 2008 et 0.6 % pour 2009 (Directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, n° 2091).

a) Sur le plan cantonal, l'art. 5 LPCC énonce que le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, moyennant certaines adaptation au nombre desquelles, notamment, le fait qu'en dérogation à l'art. 11 al. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de 1/8, respectivement de 1/5 pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse.

b) Quant à la fortune, elle comprend, selon l'art. 7 al. 1 LPCC, la fortune mobilière et immobilière définie par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, étant précisé que la fortune est évaluée selon les règles de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (à l'exception de celles concernant les diminutions de la valeur des immeubles et les déductions sociales sur la fortune) et que les règles d'évaluation prévues par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution sont réservées (art. 7 al. 2 LPCC).

Tout comme au niveau fédéral, l'art. 9 al. 1 let. b LPCC prévoit qu'est déterminante, pour la fixation des prestations, la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée.

En l'espèce, l'intimé a procédé au calcul des prestations dues à compter du 1er janvier 2009 en se basant sur la fortune de la bénéficiaire, telle qu'elle se présentait au 1er janvier 2009. Ce faisant, il a respecté les dispositions légales.

Reste à déterminer si, comme le soutient la recourante, il se justifie de déroger à cette règle au motif que sa dette envers le SPC n'a pu - par la faute de ce dernier - s'éteindre plus tôt.

Le Tribunal cantonal des assurances sociales, dans son arrêt A/138/2008 du 6 février 2008 auquel se réfèrent les parties, a déjà eu l'occasion de juger qu'on ne saurait s'écarter du montant effectif de la fortune telle que celle-ci se présentait au 1er janvier de l'année pour laquelle les prestations sont demandées (consid. 8). En d'autres termes, la fortune ne peut être diminuée du montant à restituer qu'à partir du 1er janvier suivant la date à laquelle le trop perçu a effectivement été remboursé. Le fait qu'en l'espèce, le délai écoulé entre le moment où l'intimé a été informé du changement de situation et celui où il a statué soit plus long ne saurait justifier que l'on s'écarte de ce principe. Ainsi que l'a relevé l'intimé, il appartenait à la recourante d'entreprendre tout ce qui était en son pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à accélérer la procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard injustifié (ATF 107 Ib 155 consid. 2b et c p. 158 s.).

L'argumentation développée par la recourante vise à faire constater a posteriori l'existence d'un déni de justice qu'elle n'a pas jugé bon de faire constater plus tôt et d'en tirer des conséquences sur les droits qui lui sont reconnus.

Or, la sanction du dépassement du délai raisonnable consiste d'abord dans la constatation de la violation du principe de célérité, la constatation d'un comportement en soi illicite étant en effet une forme de réparation (H 134/02 Arrêt du 30 janvier 2003 consid. 1.5; ATF 122 IV 111 consid. I/4). Il n'y a en revanche pas lieu d'envisager de déroger à une disposition légale claire sous prétexte de réparer un éventuel dommage matériel d'autant que, durant ce délai supplémentaire qui lui a été accordé, la recourante a bel et bien été en possession du montant dont il est question.

Eu égard aux considérations qui précèdent, le calcul de l'intimé apparait parfaitement conforme aux dispositions légales et doit être confirmé.

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le