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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1193/2022

ATAS/1025/2022 du 17.11.2022 ( LCA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1193/2022 ATAS/1025/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 novembre 2022

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié ______, Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Thierry STICHER

 

demandeur

contre

SWICA KRANKENVERSICHERUNG AG, sise Römerstrasse 38, Winterthur

 

défenderesse

 


EN FAIT

 

A. a. En mai 2002, Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né en ______ 1956, alors chef de service au Restaurant B______, à Châtelaine, a déposé une première demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI) en invoquant un psoriasis, une gastrite, une dépression et des rachialgies.

b. Par décision du 17 août 2004, confirmée sur opposition le 12 novembre 2004, l'OAI lui a nié le droit à toute prestation, le degré d’invalidité étant insuffisant.

c. Saisi d'un recours, le Tribunal cantonal des assurances sociales - alors compétent - l'a rejeté en date du 9 mars 2006 (ATAS/233/2006), tout comme le Tribunal fédéral par la suite, le 25 janvier 2007 (arrêt I 372/06).

B. a. A compter du 1er janvier 2014, l’assuré a travaillé comme gérant de la pizzeria « C______ », à Genève. A ce titre, il était assuré contre la perte de gain maladie auprès de SWICA KRANKENVERISCHERUNG AG (ci-après : SWICA).

b. L’assuré a été à nouveau dans l’incapacité totale d’exercer sa profession à partir du 9 novembre 2015.

c. SWICA a versé les prestations contractuellement convenues du 9 décembre 2015 au 30 juin 2016, date à laquelle elle y a mis fin en se référant notamment aux conclusions des médecins de la D______.

C. a. Parallèlement, en avril 2016, l'assuré a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l'OAI.

b. Par décision du 16 août 2016, l’OAI précité a refusé d'entrer en matière sur cette nouvelle demande, au motif que son service médical régional (SMR) avait estimé, après lecture des éléments médicaux recueillis, qu’aucune modification de son état de santé depuis la décision initiale rendue en 2004 n’avait été rendue plausible. Non contestée, cette décision est entrée en force.

D. a. Par arrêté du 25 juin 2015, le Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé du canton de Genève (ci-après : DEAS) a retiré à la D______ l’autorisation d’exploiter une institution de santé pour une durée de trois mois.

b. Saisie d’un recours de la clinique, la Chambre administrative de la Cour de justice l’a rejeté et a confirmé le retrait d’autorisation (cf. arrêt du 15 novembre 2016 ATA/967/2016).

c. Le 22 décembre 2017 (arrêt 2C_32/2017), le Tribunal fédéral a confirmé le bien-fondé du retrait pour trois mois de l’autorisation d’exploiter une institution de santé, mais uniquement en tant qu’il visait les départements « psychiatrie » et « expertise » de la D______.

d. Par arrêté du 21 février 2018, publié le jour même dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève, le DEAS a retiré l’autorisation d’exploiter une institution de santé à la D______ pour les départements « psychiatrie » et « expertise » du 1er mars au 1er juin 2018, ce qui a conduit la Cour de céans à publier un communiqué de presse en date du 19 mars 2018, avisant les assurés, dont le droit à des prestations avait été nié sur la base d’une expertise effectuée dans ladite clinique, de la possibilité de demander la révision de la décision les concernant.

E. a. Faisant suite à l’arrêt du Tribunal fédéral et au communiqué de la Cour de céans susmentionnés, ainsi qu’à des articles de presse sur le sujet, l’assuré a saisi l’OAI d’une demande de révision en date du 18 avril 2018, sollicitant la mise sur pied d’une nouvelle expertise.

b. Par décision du 2 octobre 2018, l’OAI l’a rejetée et a maintenu son refus d’entrer en matière sur la nouvelle demande du 16 août 2016.

c. Sur recours, la Cour de céans a considéré, dans un arrêt du 24 juin 2020 (ATAS/526/2020), que la demande de révision était intervenue à temps, que, dans la mesure où l’expertise de la D______ avait été versée au dossier, le SMR avait dû la prendre en considération lors de son appréciation de la capacité de travail de l’assuré, et que, dès lors, c’était à tort que l’OAI avait rejeté la demande de révision. Pour le surplus, l’assuré ayant rendu plausible une aggravation de son état de santé, la cause était renvoyée à l’OAI pour instruction complémentaire.

d. Suite au renvoi de la cause, l’OAI a notamment mandaté pour expertise le docteur E______, spécialiste FMH en rhumatologie et médecine interne, lequel a considéré, dans un rapport du 8 décembre 2021, que l’état de santé de l’assuré s’était aggravé sur le plan somatique et que sa capacité de travail était nulle, à tout le moins progressivement depuis 2015-2016.

e. Le 21 décembre 2021, le SMR a relevé que, selon le psychiatre traitant, l’assuré était en revanche pleinement capable de travailler du point de vue psychique et ce, depuis fin septembre 2016. En revanche, différentes atteintes somatiques entraînaient des limitations fonctionnelles, une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et une capacité réduite à 30% dans une activité adaptée.

f. Au vu des conclusions de l’expertise et du SMR, l’OAI a procédé à une comparaison des revenus et informé l’assuré, par projet de décision du 2 mars 2022, qu’il entendait le mettre au bénéfice d’une rente entière limitée dans le temps, du 1er novembre 2016 au 30 novembre 2021.

F. a. Parallèlement à la procédure devant l’OAI, l’assuré a également requis de SWICA, par courrier du 29 août 2018, la reprise du versement des prestations d’assurance, avec effet au 1er juillet 2016, vu les conclusions du Tribunal fédéral concernant la D______.

b. Se référant aux décisions de l’OAI des 16 août 2016 et 2 octobre 2018, SWICA a refusé de reprendre le versement des prestations (cf. courrier du 7 décembre 2018).

c. Le 12 décembre 2018, l’assuré a informé son assurance perte de gain qu’il avait interjeté recours contre la décision de l’OAI du 2 octobre 2018 et a une nouvelle fois demandé le versement des prestations convenues, dans un délai de 10 jours.

d. Par courrier du 20 décembre 2018, SWICA a rappelé à l’assuré que lorsqu’il appartenait à l’assurance-invalidité d’intervenir, elle ne faisait que compléter ses prestations jusqu’à concurrence de l’indemnité journalière assurée. Or, l’OAI avait refusé d’accorder une rente à l’assuré, par décisions de 2016 et 2018 ; il n’était pas établi que la procédure de recours conduirait à une modification desdites décisions.

e. Le 9 mars 2022, l’assuré a transmis à SWICA le projet de décision de l’OAI du 2 mars 2022 et l’a invitée à lui verser les prestations dues, assorties des intérêts moratoires.

G. a. Par courriers des 20 juin 2018, 26 octobre 2018, 23 mai 2019 et 8 mai 2020 SWICA a renoncé à invoquer l’exception de prescription jusqu’au 31 mai 2021.

b. Le 16 avril 2021, SWICA a prolongé sa renonciation à invoquer la prescription jusqu’au 30 avril 2022, uniquement s’agissant des indemnités journalières. Il était précisé que cette renonciation n’était pas valable pour toute demande d’intérêts moratoires sur le droit litigieux aux indemnités journalières.

c. Par courrier du 23 avril 2021, l’assurance a confirmé que ses déclarations de renonciation à la prescription ne seraient désormais plus valables pour la demande d’intérêts moratoires sur le droit litigieux aux indemnités journalières.

d. Le 3 mai 2021, l’assuré a déposé une réquisition de poursuite contre SWICA pour un montant de CHF 67'726.-, plus intérêts à 5% dès le 1er juillet 2016, montant correspondant aux indemnités journalières pour cause de maladie dues dès cette date.

e. Un commandement de payer (poursuite n°417 288) a été notifié à SWICA le 26 mai 2021, pour le montant précité, frais de commandement de payer de CHF 103,30 en sus.

f. SWICA y a fait opposition le même jour.

g. Le 25 mars 2022, SWICA a informé l’assuré qu’elle refusait de payer le moindre intérêt moratoire, dès lors qu’il appartenait à l’intéressé de prouver son incapacité de travail. Par ailleurs, elle acceptait de renoncer à invoquer la prescription jusqu’au 31 mars 2023, en ce qui concernait les indemnités journalières uniquement.

H. a. Le 12 avril 2022, l’assuré a saisi la Cour de céans d’une demande en paiement d’un montant total de CHF 67'726.-, plus intérêts à 5% depuis le 1er juillet 2016, ce qui correspondait à 515 jours (du 1er juillet 2016 au 28 novembre 2017) à CHF 131,50 par jour.

b. Les 22 avril et 12 mai 2022, SWICA lui a versé CHF 16'174.50, respectivement CHF 25'267,60, soit le solde d’indemnités journalières du 1er juillet au 31 octobre 2016, respectivement du 1er novembre 2016 au 8 octobre 2017.

c. Par courrier du 12 mai 2022, SWICA a récapitulé les faits depuis qu’elle avait pu consulter le dossier de l’OAI. Dans la mesure où elle avait versé les indemnités journalières encore dues, la défenderesse était d’avis que la cause pouvait être rayée du rôle.

En annexe figurait tout de même la réponse de SWICA datée du même jour, dans laquelle la défenderesse concluait au rejet de la demande, expliquant que l’épuisement des indemnités journalières remontait au 28 octobre 2017 et non au 28 novembre 2017, de sorte que seuls 485 jours étaient encore dus. Elle s’était acquittée de 123 jours, pour un montant total de CH 16'174,50 pour la période du 1er juillet au 31 octobre 2016, et avait complété la rente d’invalidité du 1er novembre 2016 jusqu’à épuisement des prestations, le 28 octobre 2017, à hauteur de CHF 25'267,60, ce qui correspondait à 362 jours. Partant, elle avait entièrement rempli ses obligations. Elle contestait pour le surplus devoir verser des intérêts moratoires, les indemnités journalières ayant été versées suite à de nouveaux éléments.

d. Par courrier du 18 mai 2022, le demandeur a refusé de retirer sa demande et a modifié ses conclusions, concluant désormais uniquement au versement des intérêts moratoires, soit CHF 10'924.-, sur les indemnités journalières versées pour la période du 1er juillet 2016 au 28 octobre 2017, et à la mainlevée définitive de l’opposition au commandement de payer à due concurrence.

e. Dans sa duplique du 2 juin 2022, la défenderesse a persisté dans ses précédentes conclusions en rejet de la demande.

f. Par courrier du 3 novembre 2022, le demandeur a renoncé à une audience de débats, tout en persistant dans ses différentes conclusions et écritures.

 

EN DROIT

1.              

1.1. Conformément à l'art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la LAMal, relevant de la loi fédérale sur le contrat d'assurance, du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1).

Selon la police d’assurance, le contrat est régi par la LCA.

La compétence de la Chambre de céans à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2. L'art. 46a LCA prescrit que le for se définit selon la loi du 24 mars 2000 sur les fors (LFors) qui a été abrogée au 1er janvier 2011 par l’entrée en vigueur du CPC, auquel il convient désormais de se référer. Sauf disposition contraire de la loi, pour les actions dirigées contre les personnes morales, le for est celui de leur siège (art. 10 al. 1 let. b CPC), étant précisé que l’art. 17 al. 1 CPC consacre la possibilité d’une élection de for écrite.

En l’occurrence, l’art. 36 des condition générales d’assurance (CGA) régissant l’assurance collective indemnité journalière selon la LCA, édition 2015 (ci-après : les CGA) prévoit que le preneur d’assurance et la personne assurée peuvent saisir à leur choix le for ordinaire ou celui de leur domicile en Suisse ou dans la Principauté du Liechtenstein.

Le demandeur ayant son domicile à Genève, la Cour de céans est compétente à raison du lieu pour connaître de la demande.

1.3. Selon l'art. 59 CPC, le tribunal n'entre en matière que sur les demandes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action. Ces conditions sont examinées d'office (art. 60 CPC). La liste des conditions de recevabilité prévue à l'art. 59 al. 2 CPC n'est pas exhaustive (François BOHNET, Code de procédure civile commenté, 2011, n. 9 ad art. 59 CPC).

En l'espèce, la demande a été déposée en la forme prévue à l'art. 244 CPC. Elle est donc recevable.

2.             Les litiges relatifs aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l'art. 197 CPC lorsque les cantons ont prévu une instance cantonale unique selon l'art. 7 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6; ATAS/577/2011 du 31 mai 2011), étant précisé que le législateur genevois a fait usage de cette possibilité (art. 134 al. 1 let. c LOJ).

3.              

3.1. La procédure simplifiée s'applique aux litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale au sens de la LAMal (art. 243 al. 2 let. f CPC) et la Cour de céans établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC).

La jurisprudence applicable avant l'introduction du CPC, prévoyant l'application de la maxime inquisitoire sociale aux litiges relevant de l'assurance-maladie complémentaire, reste pleinement valable (ATF 127 III 421 consid. 2). Selon cette maxime, le juge doit établir d'office les faits, mais les parties sont tenues de lui présenter toutes les pièces nécessaires à l'appréciation du litige. Ce principe n'est pas une maxime officielle absolue, mais une maxime inquisitoire sociale. Le juge ne doit pas instruire d'office le litige lorsqu'une partie renonce à expliquer sa position. En revanche, il doit interroger les parties et les informer de leur devoir de collaboration et de production des pièces; il est tenu de s'assurer que les allégations et offres de preuves sont complètes uniquement lorsqu'il a des motifs objectifs d'éprouver des doutes sur ce point. L'initiative du juge ne va pas au-delà de l'invitation faite aux parties de mentionner leurs moyens de preuve et de les présenter. La maxime inquisitoire sociale ne permet pas d'étendre à bien plaire l'administration des preuves et de recueillir toutes les preuves possibles (ATF 125 III 231 consid. 4a).

La maxime inquisitoire sociale ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4C.185/2003 du 14 octobre 2003 consid. 2.1). Pour toutes les prétentions fondées sur le droit civil fédéral, l'art. 8 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 (CC; RS 210), en l'absence de règles contraires, répartit le fardeau de la preuve et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 133 III 323 consid. 4.1 non publié; ATF 130 III 321 consid. 3.1; ATF 129 III 18 consid. 2.6; ATF 127 III 519 consid. 2a). Cette disposition ne prescrit cependant pas quelles sont les mesures probatoires qui doivent être ordonnées (cf. ATF 122 III 219 consid. 3c; ATF 119 III 60 consid. 2c). Elle n'empêche pas le juge de refuser une mesure probatoire par une appréciation anticipée des preuves (ATF 121 V 150 consid. 5a). L'art. 8 CC ne dicte pas comment le juge peut forger sa conviction (ATF 122 III 219 consid. 3c; ATF 119 III 60 consid. 2c; ATF 118 II 142 consid. 3a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, il ne s'applique que si le juge, à l'issue de l'appréciation des preuves, ne parvient pas à se forger une conviction dans un sens positif ou négatif (ATF 132 III 626 consid. 3.4 et ATF 128 III 271 consid. 2b/aa). Ainsi, lorsque l'appréciation des preuves le convainc de la réalité ou de l'inexistence d'un fait, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus (ATF 128 III 271 consid. 2b/aa).

3.2.

3.2.1. En vertu de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. En conséquence, la partie qui fait valoir un droit doit prouver les faits fondant ce dernier, tandis que le fardeau de la preuve relatif aux faits supprimant le droit, respectivement l’empêchant, incombe à la partie, qui affirme la perte du droit ou qui conteste son existence ou son étendue. Cette règle de base peut être remplacée par des dispositions légales de fardeau de la preuve divergentes et doit être concrétisée dans des cas particuliers (ATF 128 III 271 consid. 2a/aa avec références). Ces principes sont également applicables dans le domaine du contrat d'assurance (ATF 130 III 321 consid. 3.1).

En principe, un fait est tenu pour établi lorsque le juge a pu se convaincre de la vérité d'une allégation. La loi, la doctrine et la jurisprudence ont apporté des exceptions à cette règle d'appréciation des preuves. L'allégement de la preuve est alors justifié par un « état de nécessité en matière de preuve » (Beweisnot), qui se rencontre lorsque, par la nature même de l'affaire, une preuve stricte n'est pas possible ou ne peut être raisonnablement exigée, en particulier si les faits allégués par la partie qui supporte le fardeau de la preuve ne peuvent être établis qu'indirectement et par des indices (ATF 132 III 715 consid. 3.1; ATF 130 III 321 consid. 3.2). Tel peut être le cas de la survenance d'un sinistre en matière d'assurance-vol (ATF 130 III 321 consid. 3.2) ou de l'existence d'un lien de causalité naturelle, respectivement hypothétique (ATF 132 III 715 consid. 3.2). Le degré de preuve requis se limite alors à la vraisemblance prépondérante (die überwiegende Wahrscheinlichkeit), qui est soumise à des exigences plus élevées que la simple vraisemblance (die Glaubhaftmachung). La vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ou hypothèses envisageables ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2; ATF 132 III 715 consid. 3.1; ATF 130 III 321 consid. 3.3).

3.2.2. Selon l'art. 8 CC, la partie qui n'a pas la charge de la preuve a le droit d'apporter une contre-preuve. Elle cherchera ainsi à démontrer des circonstances propres à faire naître chez le juge des doutes sérieux sur l'exactitude des allégations formant l'objet de la preuve principale. Pour que la contre-preuve aboutisse, il suffit que la preuve principale soit ébranlée, de sorte que les allégations principales n'apparaissent plus comme les plus vraisemblables (ATF 130 III 321 consid. 3.4). Le juge doit procéder à une appréciation d'ensemble des éléments qui lui sont apportés et dire s'il retient qu'une vraisemblance prépondérante a été établie (ATF 130 III 321 consid. 3.4; arrêt du Tribunal fédéral 4A_61/2011 du 26 avril 2011 consid. 2.1.1).

3.2.3. Conformément au principe général de l'art. 8 CC, l'ayant droit est tenu de prouver les faits relatifs à la « justification de ses prétentions » (selon la note marginale de l'art. 39 LCA), à savoir l'existence d'un contrat d'assurance, la survenance du cas d'assurance et l'étendue de ses prétentions. Il incombe à l'assureur de prouver les faits qui l'autorisent à réduire ou à refuser la prestation contractuelle convenue ou qui rendent le contrat d'assurance non contraignant à l'égard de l'ayant droit. Le degré de preuve ordinaire s'applique à l'incapacité de travail alléguée en lien avec la survenance du cas d'assurance. Par conséquent, la preuve est apportée lorsque le tribunal, en se fondant sur des éléments objectifs, est convaincu de l'exactitude d'une allégation de fait. Il suffit qu'il n'y ait plus de doutes sérieux quant à l'existence du fait allégué ou que les doutes qui subsistent éventuellement paraissent légers (ATF 148 II 105 consid. 3.3.1).

4.             Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s’applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 229 consid. 1.1 et les références).

En l’espèce, le litige porte uniquement sur la question des intérêts moratoires sur les indemnités journalières dues pour la période du 1er juillet 2016 au 28 octobre 2017. Ainsi, les modifications de la LCA du 19 juin 2020, entrées en vigueur le 1er janvier 2022 (RO 2020 4969 ; FF 2017 4767), ne sont pas applicables au présent litige.

5.              

5.1. En matière d'assurances complémentaires, les parties sont liées par l'accord qu'elles ont conclu dans les limites de la loi, les caisses-maladies pouvant en principe édicter librement les dispositions statutaires ou réglementaires dans les branches d'assurances complémentaires qui relèvent de la liberté contractuelle des parties hormis quelques dispositions impératives en matière d'indemnités journalières (ATF 124 V 201 consid. 3d).

Le droit aux prestations d'assurances se détermine sur la base des dispositions contractuelles liant l'assuré et l'assureur, en particulier des conditions générales ou spéciales d'assurance (arrêt du Tribunal fédéral 5C.253/2000 du 6 mars 2001 consid. 4a).

5.2. En l'occurrence, l'art. 7 ch. 1 CGA définit la maladie comme toute atteinte à la santé physique, mentale ou psychique non imputable à un accident et qui exige un examen ou un traitement médical et provoque une incapacité de travailler (art. 3 LPGA). Est réputée incapacité de travail toute perte, totale ou partielle, de l’aptitude de la personne assurée à accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé d’elle, si cette perte résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique (art. 6 LPGA). Après trois mois d’incapacité, l’activité susceptible d’être exigée de la personne assurée peut aussi relever d’une autre profession ou d’un autre domaine d’activité (ch. 2).

Si la personne assurée se trouve dans l’incapacité de travailler et que celle-ci est attestée médicalement, SWICA verse, dans la mesure où ladite incapacité est totale, l’indemnité journalière convenue dans le contrat, toutefois au maximum jusqu’à concurrence de la perte de gain établie (art. 13 ch. 1). En cas d’incapacité de travail perdurant au-delà de l’échéance du délai d’attente convenu, SWICA verse à la personne assurée, à compter de ladite échéance, l’indemnité journalière fixée jusqu’à concurrence de la perte de gain établie (art. 14 ch. 1). L’indemnité journalière est allouée au maximum pendant la durée fixée dans le contrat collectif. Le délai d’attente convenu est déduit de la durée des prestations (art. 16 ch. 1).

Si, du fait de sa maladie, la personne assurée reçoit des prestations de la part d’assurances étatiques ou professionnelles, ou encore d’un tiers responsable, SWICA complète lesdites prestations dès l’échéance du délai d’attente jusqu’à concurrence de l’indemnité journalière assurée. ( ) (art. 17 ch. 1). Aussi longtemps que le droit de la personne assurée à toucher une indemnité journalière ou une rente de la part d’une assurance étatique ou professionnelle n’est pas encore établi, SWICA peut verser à bien plaire l’indemnité journalière assurée à titre d’avance (art. 17 ch. 4).

Qui souhaite percevoir des indemnités journalières est tenu de s’annoncer au plus tard dans les cinq jours après l’écoulement du délai d’attente. Toutefois, si ce dernier excède 30 jours, l’annonce doit avoir lieu au plus tard au bout de 30 jours d’incapacité de travail (art. 20 ch. 1). Si la maladie dure plus d’un mois, un certificat établissant le taux et la durée de l’incapacité de travail doit être remis mensuellement à SWICA, laquelle, en pareil cas, acquitte l’indemnité journalière sous la forme de mensualités (art. 20 ch. 3).

Dans le cas du demandeur, le contrat d'assurance collective maladie perte de salaire prévoit le versement d'une indemnité journalière, en cas de maladie, correspondant à 80% du salaire maximal assuré de CHF 60'000.-, payable dès le 31e jour d’incapacité de travail et ce, durant 720 jours.

6.              

6.1. Les CGA ne stipulent pas de terme de paiement pour les indemnités journalières. On doit dès lors admettre que, conformément à l'art. 41 al. 1 LCA, la créance qui résulte du contrat d'assurance est échue quatre semaines après le moment où l'assureur a reçu les renseignements de nature à lui permettre de se convaincre du bien-fondé de la prétention. Les « renseignements » au sens de l'art. 41 LCA visent des questions de fait (cf. l'intitulé de l'art. 39 LCA). Ils correspondent aux devoirs de déclaration et de renseignement institués par les art. 38 et 39 LCA (cf. ATF 129 III 510 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_489/2017 du 26 mars 2018 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_122/2014 du 16 décembre 2014 consid. 3.5; BREHM, Le contrat d'assurance RC, 1997, nos 512 et 515 s.). Le délai de délibération de quatre semaines laissé à l'assureur ne court pas tant que l'ayant droit n'a pas suffisamment fondé sa prétention; tel est par exemple le cas lorsque, dans l'assurance contre les accidents, l'état de santé véritable de l'ayant droit n'est pas éclairci parce que ce dernier empêche le travail des médecins (arrêt du Tribunal fédéral 4A_307/2008 du 27 novembre 2008 consid. 6.3.1 ; NEF, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, 2001, n° 15 ad art. 41 LCA).

Si ce n’est qu’en cours de procédure, par exemple lors de l’audition d’un médecin, que l’assureur a reçu les renseignements lui permettant de se convaincre du bien-fondé d’une prétention, celle-ci devient exigible quatre semaines après l’audience et les intérêts moratoires courent dès le jour suivant (ATAS/795/2018 du 12 septembre 2018 consid. 16c). La prise en compte d’un délai de délibération n’est toutefois justifiée que dans les cas où l’assureur n’a pas déjà clairement exprimé son refus de prester avant l’ouverture de l’action (Commentaire romand de la LCA, 2022, n° 40 ad Art. 41).

En revanche, si une expertise judiciaire ne fait que corroborer les atteintes à la santé alléguées par le lésé, ce n’est pas le jour de la notification de l’expertise qui fait courir les intérêts moratoires, mais la première interpellation de l’assureur pour les prestations liées auxdites atteintes (arrêts du Tribunal fédéral 4A_58/2019 du 13 janvier 2020 consid. 4.3 et 4A_307/2008 du 27 novembre 2008 consid. 6.3.2).

6.2. Les conséquences de l'exigibilité des prestations se déterminent d'après le droit des obligations, par renvoi de l'art. 100 LCA (CARRÉ, Loi fédérale sur le contrat d'assurance, Lausanne 2000, p. 301). Selon l'art. 102 du code des obligations (CO ; RS 220), le débiteur d'une obligation exigible est mis en demeure par l'interpellation du créancier (al. 1). L'intérêt moratoire de 5% l'an (art. 104 al. 1 CO) est dû à partir du jour suivant celui où le débiteur a reçu l'interpellation, ou, en cas d'ouverture d'une action en justice, dès le lendemain du jour où la demande en justice a été notifiée au débiteur (arrêt du Tribunal fédéral 5C.177/2005 du 25 février 2006 consid. 6.1).

Une interpellation est une déclaration, expresse ou par acte concluant, adressée par le créancier au débiteur par laquelle le premier fait comprendre au second qu'il réclame l'exécution de la prestation due (THÉVENOZ, Commentaire romand, Code des obligations I, 2ème éd. 2021, n° 17 ad art. 102).

Toutefois, lorsque l'assureur refuse définitivement, à tort, d'allouer des prestations, on admet, par analogie avec l'art. 108 ch. 1 CO, qu'une interpellation n'est pas nécessaire; l'exigibilité et la demeure sont alors immédiatement réalisées (arrêts du Tribunal fédéral 4A_16/2017 du 8 mai 2017 consid. 3.1, 4A_122/2014 consid. 3.5, 4A_206/2007 du 29 octobre 2007 consid. 6.3, 5C.18/2006 du 18 octobre 2006 consid. 6.1 in fine; cf. NEF, op. cit., n° 20 in fine ad art. 41 LCA, et GROLIMUND/VILLARD, in Basler Kommentar, Nachführungsband 2012, n° 20 ad art. 41 LCA).

7.              

7.1. En l’espèce, le litige ne porte plus que sur la question des intérêts moratoires, dès lors que la défenderesse a versé les indemnités journalières dues en date des 22 avril et 13 mai 2022.

Le demandeur est d’avis que l’intérêt moratoire est dû depuis le 1er juillet 2016, date du premier refus qui lui a été opposé, qu’il qualifie de définitif et infondé, d’allouer des prestations (cf. demande du 12 avril 2022 p. 9). Dans sa réplique du 18 mai 2022, le demandeur a modifié les dates de la manière suivante : du 1er septembre 2016 au 22 avril 2022 sur le montant de CHF 16'174,50 et du 1er mai 2017 au 13 mai 2022 sur le montant de CHF 25'267.60.

De son côté, la défenderesse considère qu’aucun intérêt moratoire n’est dû, dès lors que les indemnités journalières ont été versées suite à de nouveaux éléments. Elle fait valoir que lorsqu’elle a suspendu ses prestations, elle pouvait s’appuyer sur une expertise externe, celle de la D______ et que son refus était par conséquent correct à ce moment-là (réponse du 12 mai 2022, p. 6). Lorsque, le 9 mars 2022, elle a été interpellée suite au nouveau projet de décision de l’OAI, la défenderesse a immédiatement demandé la copie du dossier de l’office précité et, après en avoir pris connaissance, a procédé au versement des indemnités journalières avec effet rétroactif (duplique du 2 juin 2022 p. 2).

La question qui se pose est dès lors celle de savoir s’il peut être considéré, comme le prétend le demandeur, que la défenderesse a refusé, de manière définitive et à tort, ses prestations le 30 juin 2016 déjà, lorsqu’elle y a mis un terme. Dans l’affirmative, l’intérêt moratoire courrait à partir du 1er juillet 2016.

7.2. A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que les prestations d’assurance deviennent exigibles quatre semaines après que l’assureur a reçu tous les renseignements de nature à lui permettre de se convaincre du bien-fondé de la prétention. Un assureur qui n’a pas payé à l’expiration du délai de délibération précité ne se trouve toutefois pas automatiquement en demeure. Son interpellation est en principe nécessaire. Aucun intérêt moratoire n’est en effet dû par l’assureur qui n’a pas encore été mis en demeure. Une interpellation est cependant superflue lorsque l’assureur nie définitivement et à tort son devoir de prester. Dans ce cas, l’exigibilité et la demeure sont immédiatement réalisées.

7.3. Il ressort des écritures et des pièces produites que la défenderesse a versé au demandeur des indemnités journalières entre le 9 décembre 2015 et le 30 juin 2016, sur la base de la déclaration de maladie du 12 novembre 2015, n’indiquant aucun motif. Selon le rapport de la D______ du 29 février 2016, celle-ci a été mandatée pour expertise par la défenderesse, vu l’absence d’un diagnostic précis et d’un suivi spécialisé, aucun rapport médical ne figurant au dossier (cf. pièce 102 déf., p. 6). C’est sur la base de cette expertise, dont il ressort que le demandeur n’était plus en incapacité de travail sur le plan psychique, que la défenderesse a mis un terme à ses prestations à compter du 1er juillet 2016, (cf. ad 5 et 6, réponse du 12 mai 2022 et pièce 102 déf.). Selon l’arrêt de la Chambre de céans du 24 juin 2020, à laquelle les deux parties se réfèrent, une expertise somatique a également été réalisée le 3 juin 2016. Elle ne figure toutefois pas au dossier et n’est pas non plus mentionnée dans l’expertise du Dr E______ du 8 décembre 2021.

A ce stade, il est établi qu’en 2016, SWICA a fait réaliser une expertise psychiatrique (cf. pièce 102 déf.) et vraisemblablement également somatique (cf. ATAS/526/2020 du 24 juin 2020, ch. 2 EN FAIT, produit sous pièce 9, déf.). Sur cette base, elle a mis un terme à ses prestations et, parallèlement, l’OAI a refusé d’entrer en matière sur la nouvelle demande par décision du 16 août 2016 (cf. ATAS/526/2020 du 24 juin 2020, ch. 2 EN FAIT, pièce 9, déf.).

Rien, dans le dossier, ne permet de considérer que le demandeur aurait contesté, en 2016 déjà, le terme qui a été mis au versement des indemnités journalières le 30 juin 2016, ni qu’il aurait fourni à la défenderesse des pièces médicales attestant toujours de son incapacité. Il ne l’allègue d’ailleurs nullement. Il est en revanche établi qu’il n’a pas recouru contre la décision de l’OAI de ne pas entrer en matière sur sa nouvelle demande (cf. ATAS/526/2020 du 24 juin 2020, ch. 2 EN FAIT, pièce 9 déf.).

Dans ces circonstances, il doit être considéré, vu les pièces au dossier, que la défenderesse n’avait effectivement pas de raison de continuer de prester. D’ailleurs, l’inactivité du demandeur jusqu’en 2018 plaide en ce sens.

Ce n’est en réalité que suite à l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2017 du 22 décembre 2017, confirmant le retrait de l’autorisation de pratiquer de la D______, que le demandeur a demandé à l’OAI de réviser sa décision de non-entrée en matière (cf. ATAS/526/2020 du 24 juin 2020, ch. 2 EN FAIT, pièce 9 déf.) et qu’il a requis de la défenderesse la reprise du versement des indemnités journalières avec effet rétroactif au 1er juillet 2016 (cf. courrier du 29 août 2018, pièce 6a dem.). L’OAI a, dans un premier temps, refusé de réviser sa décision (cf. ATAS/526/2020 du 24 juin 2020, ch. 4 et 7 EN FAIT, pièce 9, déf.). Compte tenu du refus de l’OAI d’entrer en matière (décision du 15 août 2016) et de réviser cette décision (décision du 2 octobre 2018), SWICA a également refusé de revoir sa position par courrier du 7 décembre 2018 (cf. pièce 6 dem.).

A nouveau, rien dans le dossier, ne permet de considérer que le demandeur aurait transmis à la défenderesse des pièces médicales permettant d’appuyer sa demande de reprise du versement des prestations dès le 1er juillet 2016. Il ne l’allègue d’ailleurs pas. Par conséquent, à cette époque, aucun reproche ne peut être formulé à SWICA en présence d’un dossier a priori vide de toute pièce médicale concernant la période postérieure au 1er juillet 2016.

En réalité, ce n’est qu’après avoir reçu le projet de décision de l’OAI du 2 mars 2022, dont il ressortait que l’office entendait mettre le demandeur au bénéfice d’une rente entière d’invalidité à compter du 1er novembre 2016, et, surtout, après avoir reçu le dossier de l’OAI début avril 2022, que la défenderesse a pu disposer de toutes les pièces lui permettant de se prononcer sur le droit du demandeur à des indemnités journalières du 1er juillet 2016 au 28 octobre 2017.

En d’autres termes, dans cette constellation particulière, en l’absence d’autres pièces médicales, il doit être considéré que, jusqu’à réception du dossier de l’OAI, des doutes subsistaient quant à l’obligation de la défenderesse de poursuivre le versement des indemnités journalières.

7.4. C’est encore le lieu de relever que la présente cause diffère de celles ayant conduit à l’ATAS/1216/2018 - notamment annulé sur la question des intérêts moratoires par le Tribunal fédéral dans son arrêt 4A_58/2019 du 13 janvier 2020 - ou encore à l’arrêt du Tribunal fédéral 4A_307/2008 et 4A_311//2008 du 27 novembre 2008, par exemple.

En effet, dans ces deux causes, les assurés avaient immédiatement contesté, pièces à l’appui, les rapports médicaux sur lesquels les assurances s’étaient fondées pour mettre un terme au versement des prestations. En raison du refus de prester malgré les rapports médicaux au dossier, les assurés avaient finalement saisi les juridictions civiles compétentes d’une demande en paiement.

Dans le cas d’espèce, en revanche, le dossier soumis à la Cour de céans ne permet pas de considérer que le demandeur a, en son temps, contesté les conclusions de la D______, encore moins pièces médicales à l’appui. Il n’a pas non plus recouru contre la décision de l’OAI de ne pas entrer en matière sur la nouvelle demande, acceptant ainsi implicitement les conclusions de cet office lui reconnaissant une capacité de travail entière.

Au surplus, dans les deux causes mentionnées supra, des expertises judiciaires ont été réalisées, qui sont venues confirmer les rapports des médecins traitants. Le Tribunal fédéral a considéré que, dans la mesure où les expertises judiciaires n’avaient fait que corroborer des atteintes à la santé alléguées précédemment et prouvées par le lésé, au vu des pièces médicales produites, ce n’était pas au jour de la notification de l’expertise que commençaient à courir les intérêts moratoires, mais à la première interpellation de l’assureur pour les prestations liées auxdites atteintes, l’assurance disposant de toutes les informations nécessaires pour trancher la question avant même de mettre un terme à ses prestations. Dans la cause 4A_307/2008 te 4A_311/2008 du 27 novembre 2008, le Tribunal fédéral a encore considéré que la situation différait de celle examiné dans l’arrêt reproduit in RBA XIV n° 67, dans lequel la Cour de justice du canton de Genève avait jugé que les intérêts moratoires n’auraient pas dû être comptés du jour du sinistre, mais plutôt dès la date de l’introduction de la demande, voire de l’entrée en force de son arrêt, pour le motif que la demanderesse n’avait rien fait pour permettre à l’assureur de se convaincre du bien-fondé de sa prétention.

Dans le cas présent, comme cela a été relevé ci-dessus, le dossier soumis à la Cour de céans ne comporte aucun élément médical permettant de considérer que la défenderesse avait en mains tous les éléments nécessaires pour constater que c’était à tort qu’elle avait mis un terme à ses prestations le 30 juin 2016 et qu’il lui appartenait de continuer à les verser au-delà de cette date : l’annonce de maladie ne comporte aucun motif ; le médecin psychiatre de la D______ explique qu’aucun rapport médical ne lui a été transmis ; aucun rapport d’un quelconque médecin traitant ne figure au dossier ; le demandeur n’allègue pas avoir contesté la suppression du versement des indemnités journalières, pièces médicales à l’appui, avant août 2018 ; le demandeur n’a pas recouru contre la décision de l’OAI de ne pas entrer en matière. Ce n’est que suite à la confirmation du retrait de l’autorisation de pratiquer que la décision de non-entrée en matière a été révisée et que l’instruction de la demande de prestations d’avril 2016 a repris.

7.5. Dans ces circonstances, on ne saurait faire remonter le cours de l’intérêt moratoire au 1er juillet 2016, ni aux dates moyennes retenues par le demandeur, mais quatre semaines après que la défenderesse a reçu le dossier de l’OAI.

La réception de ce dossier est intervenue début avril, à une date qui n’a pas été précisée par la défenderesse. Le dossier a une nouvelle fois été demandé le mercredi 31 mars 2022 et on peut considérer qu’il a été reçu au plus tard le lundi 4 avril 2022. La défenderesse bénéficiait donc de quatre semaines pour se prononcer sur le droit aux prestations du demandeur.

Compte tenu du premier versement de CHF 16'174.50 le 22 avril 2022, il doit être considéré que la défenderesse a admis son obligation de prester. Vu son interpellation par commandement de payer et par demande en paiement, elle était immédiatement en demeure pour le deuxième versement également, même si elle ne disposait pas encore des chiffres.

Partant, les intérêts moratoires courent du 22 avril au 11 mai 2022, soit pendant 20 jours, sur le montant de CHF 25'267.60, ce qui représente un montant de CHF 69,20 ([CHF 25'267,60 x 5%] / 365 jours x 20 jours).

8.             Il convient encore de se prononcer sur la demande de mainlevée définitive.

8.1. En vertu de l'art. 80 de la loi sur la fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1), le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition (al. 1). Les transactions ou reconnaissances passées en justice sont assimilées à des jugements (al. 2 ch. 1). L'art. 81 al. 1 LP prévoit que lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription.

La décision de mainlevée n'a d'effet que sur la poursuite en cours (SCHMIDT, Commentaire romand de la Poursuite et faillite, Bâle 2005, ad art. 80, no 17, p. 331).

La Chambre des assurances sociales de la Cour de justice statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public peut, selon ce qui précède, prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer puisque, statuant au fond, la condamnation au paiement est assimilée à un jugement exécutoire (ATF 109 V 46 consid. 4).

8.2. Partant, il y a lieu de prononcer la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, poursuite n°417288, à due concurrence des intérêts moratoires dus au demandeur, soit CHF 69,20, avec frais de poursuite.

9.              

9.1. A teneur de l’art. 106 CPC, les frais sont mis à la charge de la partie succombante. La partie succombante est le demandeur lorsque le tribunal n’entre pas en matière et en cas de désistement d’action; elle est le défendeur en cas d’acquiescement (al. 1). Lorsqu’aucune des parties n’obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (al. 2).

Les cantons sont compétents pour fixer le tarif des frais comprenant les dépens (art. 96 CPC en relation avec l’art. 95 al. 3 let. b). Le législateur genevois a notamment prévu que dans les contestations portant sur des affaires pécuniaires, le défraiement d'un représentant professionnel est, en règle générale, proportionnel à la valeur litigieuse. Il est fixé, dans les limites figurant dans un règlement du Conseil d'Etat, d'après l'importance de la cause, ses difficultés, l'ampleur du travail et le temps employé (art. 20 al. 1 de la loi d'application du code civil suisse et d’autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 [LaCC - E 1 05]).

Le règlement cité à l’art. 20 précité est le règlement fixant le tarif des frais en matière civile du 22 décembre 2010 (RTFMC - E 1 05.10), lequel détermine notamment le tarif des dépens, applicable aux affaires civiles contentieuses (art. 1 RTFMC). Celui-ci rappelle, à l’art. 84, le principe de l’art. 20 al. 1 LaCC, à savoir que le défraiement d'un représentant professionnel est, en règle générale, proportionnel à la valeur litigieuse. Sans effet sur les rapports contractuels entre l'avocat et son client, il est fixé d'après l'importance de la cause, ses difficultés, l'ampleur du travail et le temps employé. L’art. 85 al. 1 RTFMC prévoit que pour les affaires pécuniaires, le défraiement prend pour base le tarif ci-dessous. Sans préjudice de l'article 23 LaCC, il peut s'en écarter de plus ou moins 10% pour tenir compte des éléments rappelés à l'article 84. Lorsque la valeur litigieuse est au-delà de CHF 40'000.- jusqu’à CHF 80'000.-, le défraiement est de CHF 6'100.-, plus 9% de la valeur litigieuse dépassant CHF 40'000.-.

9.2. En l’espèce, la défenderesse a versé, le 22 avril 2022, soit postérieurement à la demande en paiement, les indemnités journalières qu’elle reconnaissait finalement devoir. Ce faisant, elle a implicitement acquiescé à la demande, à concurrence de CHF 41'442.10.

En réduisant ses conclusions aux seuls intérêts moratoires, le demandeur a renoncé aux CHF 26'283.90 restants. Il s’agit-là d’un retrait de la demande ou, en d’autres termes, d’un désistement.

Conformément à l’art. 85 RTFMC, le défraiement, dans le cas d’une partie qui obtient totalement gain de cause, pour une valeur litigieuse de CHF 67'726.-, s’élève à CHF 8'595.- (soit CHF 6'100.- + CHF 2'495.-, ce dernier montant correspondant à 9% de la valeur litigieuse dépassant CHF 40'000.-, soit 9% de CHF 26'284.-). Conformément à l’art. 106 al. 2 CPC, ce montant doit être réparti selon le sort de la cause. En d’autres termes, le demandeur obtient environ deux tiers de ses conclusions et succombe pour un tiers de ses prétentions du fait du retrait de son recours sur ce montant. Partant, les CHF 8'595.- doivent être répartis comme suit : CHF 5'730.- à la charge de la défenderesse et CHF 2'865.- à la charge du demandeur, ce qui revient, après compensation, à CHF 2'865.- à la charge de la défenderesse.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 114 let. e CPC).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement, en ce sens que la défenderesse est condamnée à verser au demandeur un montant de CHF 69,20 correspondant aux intérêts moratoires de 5% dus sur la somme de CHF 25'267.60 entre le 22 avril et le 11 mai 2022 inclus.

3.        Prononce la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer poursuite n°417288 à due concurrence du montant dont il a été reconnu qu’il était dû par SWICA KRANKENVERSICHERUNG AG.

4.        Condamne la défenderesse à verser à la demanderesse une indemnité de CHF 2’865.-, à titre de dépens, TVA et débours inclus.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La présidente

 

 

Karine STECK

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le