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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/286/2013

ATA/955/2014 du 02.12.2014 sur JTAPI/229/2014 ( ICCIFD ) , ADMIS

Descripteurs : IMPÔT ; CALCUL DE L'IMPÔT ; BÉNÉFICE NET ; AMENDE ; SOUSTRACTION D'IMPÔT ; INTENTION
Normes : LIFD.175.al1 ; LIFD.2 ; LIFD.181 ; LHID.56.al1 ; LHID.56.al2 ; LPFisc.69.al1 ; LPFisc.69.al2
Résumé : Il est vrai que la société intimée a reconnu spontanément que sa comptabilité 2007 était inexacte et dès la découverte des comptes et des placements non déclarés, a sollicité spontanément leur réintégration dans son assiette fiscale. Cependant, il y a lieu de retenir que les différences de montants entre les bordereaux initiaux et ceux de rappel d'impôts sont relativement importantes, l'organe de la société n'était pas dépourvu d'expérience et de connaissance en la matière, de plus assisté d'une fiduciaire, elle ne pouvait pas ignorer l'obligation de déclarer les bénéfices réalisés dans le cadre de la promotion immobilière. Partant, l'appréciation initiale de l'AFC-GE fixant le montant de l'amande à une fois celui de l'impôt éludé, n'apparaît pas critiquable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/286/2013-ICCIFD ATA/955/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 décembre 2014

2ème section

 

dans la cause

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

contre

A______ SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE
représentée par Berney & Associés S.A., société fiduciaire, mandataire

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 mars 2014 (JTAPI/229/2014)


EN FAIT

1) A______ société coopérative (ci-après : la coopérative) est une société coopérative d'habitation inscrite au registre du commerce (ci-après : RC) du canton de Genève depuis le 14 mars 1995 et ayant son siège à B______. Elle a pour but de « mettre à disposition de ses membres, en propriété par étages, des habitations aux conditions les plus favorables ; faire construire un immeuble sur un droit de superficie concédé par la commune B______ sur des parcelles qui proviendront d'un remaniement parcellaire dans le quartier du "A______" et mise en propriété par étages de l'immeuble construit par ses soins ».

2) Monsieur C______ était son administrateur-président avec signature individuelle, fonction qu'il a occupée jusqu'au 6 août 2014.

3) M. C______ était également administrateur unique avec signature individuelle de D______ SA (ci-après : D______), aujourd'hui radiée, inscrite à l'époque au RC du canton de Genève et ayant son siège à Carouge, dont le but était « l'exécution d'opérations afférentes à la construction d'immeubles, surveillance en matière de bâtiments et réalisation de mandats dans ces domaines ». Ladite société était détenue à 100 % par M. C______.

4) En date du 29 septembre 2005, la coopérative a conclu un contrat de droit de superficie distinct et permanent avec la commune B______ (ci-après : la commune) grevant la parcelle n° 1______ appartenant à cette dernière.

La coopérative s'engageait à construire un immeuble d'habitation de douze appartements destinés à l'habitation devant être vendus en propriété par étages (ci-après : PPE). Dès la fin des travaux, le superficiaire devait verser une rente du droit de superficie au superficiant de CHF 48'031.- pendant les cinq premières années, indexée tous les cinq ans sur la base de l'indice genevois des prix à la consommation.

Ce droit a été inscrit au registre foncier (ci-après : RF) le 12 octobre 2005 et expirera le 29 septembre 2095.

5) Au cours de l'année 2005, M. C______ a acquis la parcelle n° 2______ jouxtant la parcelle n° 1______.

6) Un projet commun entre M. C______ et la commune a vu le jour, qui visait à construire deux bâtiments côte à côte sur les deux parcelles, à savoir quatre appartements sur la parcelle de M. C______ et douze appartements sur celle de la commune.

Par contrat du 2 novembre 2005, il a été convenu que la promotion sur les parcelles serait réalisée par trois intervenants, à savoir la coopérative, M. C______ – en raison individuelle, pour le pilotage et la mise en valeur du projet de construction et la commercialisation – et D______ pour la construction.

Le coût des travaux pour les deux immeubles « clefs en mains » (construction, pilotage, mise en valeur et commercialisation) s'élevait à CHF 8'673'000.-.

Les risques, marges et bénéfices de la promotion des seize appartements étaient attribués à raison de 100 % à M. C______.

7) Une fois la promotion terminée, les appartements soumis au régime de la PPE ont été vendus à des membres de la coopérative. La commune, propriétaire de la parcelle n° 1______, a imposé aux nouveaux propriétaires de reprendre le droit de superficie, de devenir membre de la coopérative et d'accepter un droit de préemption légal de la commune en cas de revente.

À l'issue de la promotion, les appartements situés sur la parcelle de la commune sont devenus propriété de la coopérative, à charge pour elle de s'acquitter de sa part du prix de construction y relatif. En août 2007, la commune a revendu les douze appartements aux coopérateurs en contrepartie du prix de vente correspondant à la quote-part du prix de construction total. Les inscriptions de changement de propriétaires au RF ont eu lieu le 16 août 2007.

8) Le 11 juillet 2008, la coopérative, assistée par une société fiduciaire, a transmis sa déclaration fiscale 2007 à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE), sans mentionner la promotion immobilière précitée, ni la comptabilité y relative.

9) Le 12 août 2008, l'AFC-GE lui a notifié ses bordereaux de taxation pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2007, fixant l'impôt dû à CHF 0.- et retenant une perte reportée de CHF 22'644.-. Ces bordereaux sont entrés en force.

10) Le 26 novembre 2009, la coopérative a contacté l'AFC-GE pour examiner les conséquences fiscales de sa liquidation, étant donné qu'elle avait atteint son but.

11) Par courrier du 30 mars 2010, la coopérative a exposé à l'AFC-GE qu'elle n'avait pas comptabilisé les transactions et opérations enregistrées au RF, notamment les opérations relatives à la quote-part du prix d'achat de la construction et au prix de vente des douze appartements. Il s'agissait d'une erreur de M. C______ en tant que président de la coopérative, qui avait comptabilisé l'opération immobilière selon la « réalité économique » plutôt que selon la « réalité juridique », soit dans la comptabilité de son activité indépendante et non pas dans celle de la coopérative. Ceci était dû au fait que E______ (ci-après : E______), qui avait financé le projet immobilier, ne l'avait accepté qu'à la condition que le crédit soit accordé à M. C______, la coopérative ayant pour tout capital dix parts de CHF 250.- et n'ayant pas été considérée comme un « partenaire crédible ». Un contrat avait été conclu entre la coopérative détenant le droit de superficie et M. C______, débiteur de la banque, accordant à ce dernier l'intégralité des profits et des risques de l'opération. Ainsi, M. C______ avait déclaré l'intégralité du bénéfice de la promotion dans le cadre de son activité indépendante.

12) Le 21 juin 2010, l'AFC-GE a informé la coopérative qu'elle ne partageait pas ses conclusions, privilégiant une approche économique à une approche juridique. Elle transmettait l'ensemble du dossier à la direction du contrôle fiscal de l'AFC-GE.

13) Par lettres des 10 et 18 août 2010, l'AFC-GE a informé la coopérative de l'ouverture d'une procédure en rappel d'impôt et d'une procédure pénale pour soustraction d'impôt pour l'IFD et l'ICC 2007, en lien avec l'absence de déclaration de la promotion immobilière suite à la vente des douze appartements.

14) Le 4 novembre 2010, la coopérative a remis à l'AFC-GE la comptabilité de l'entreprise individuelle de M. C______ concernant la promotion précitée. La coopérative a expliqué que celle-ci avait été réalisée uniquement par M. C______ du fait qu'aucun établissement bancaire ne voulait accorder de prêt à la coopérative. Le bénéfice total de cette promotion, soit un montant de CHF 586'838.-, avait été intégralement déclaré dans la déclaration fiscale personnelle de M. C______ en 2007.

15) Par courrier du 1er décembre 2010, la coopérative a fourni des explications supplémentaires relatives à la comptabilité précitée. Les factures de D______ n'avaient pas pu être séparées, la construction ayant été faite en un seul bloc. Les charges, dès lors, avaient été mentionnées en fonction du nombre d'appartements, soit douze sur la parcelle de la commune (75 %) et quatre sur la parcelle de M. C______ (25 %).

16) Par décision du 23 décembre 2010, l’AFC-GE, arrêtant le bénéfice de l'opération immobilière à CHF 200'578.-, a notifié à la coopérative un bordereau de supplément d'ICC 2007 de CHF 43'318.65, assorti d'intérêts de retard de CHF 2'673.10, et un bordereau de supplément d'IFD 2007 de CHF 15'699.50 avec des intérêts de CHF 1'794.75, ainsi qu'une amende, correspondant au montant des impôts soustraits, à savoir CHF 43'318.65 en ICC et CHF 15'699.50 en IFD. Compte tenu du fait que M. C______ était son principal animateur et organe, la coopérative n'avait pas été imposée sur sa réelle capacité contributive lorsqu'elle avait omis de déclarer le résultat de la promotion immobilière suite à la vente des douze appartements. Il en résultait une soustraction d'impôt qui était due à une négligence.

17) Le 24 janvier 2011, la coopérative a élevé réclamation contre les bordereaux de supplément d’impôt et d'amende, concluant à leur annulation.

Du point de vue économique, il apparaissait erroné de comptabiliser un bénéfice dans une société qui ne comptait pas d'employé, qui n'avait déployé aucune activité et qui n'avait investi aucun montant dans la promotion immobilière. La coopérative s'était contentée de mettre à disposition le terrain qui aurait été récupéré dans tous les cas. En contrepartie, M. C______ avait pris tous les risques liés à cette promotion. Dès lors, il se justifiait que le bénéfice dégagé par la promotion fût déclaré par M. C______ et non par la coopérative. Aucune soustraction d'impôt n'avait été commise, dans la mesure où l'AFC-GE avait récupéré l'impôt dû dans le cadre de la taxation personnelle de M. C______.

Par ailleurs, l'AFC avait arrêté le bénéfice imposable à CHF 200'578.-, sans justification quant au montant repris et à la nature de la reprise.

18) Le 23 novembre 2011, lors d'un entretien ayant eu lieu dans les locaux de l'AFC-GE, la coopérative a présenté le relevé de compte bancaire E______ 3______ indiquant tous les mouvements pour l'année 2007 ainsi que la comptabilisation en produits de CHF 6'980'000.- dans la société D______, la charge du même montant ayant été comptabilisée dans les comptes de la raison individuelle de M. C______. La coopérative a également précisé que ce compte n'avait été déclaré à l'AFC-GE ni par M. C______, ni dans les décomptes qu’elle avait fournis, de même que les intérêts créditeurs reçus suite aux placements fiduciaires effectués sur ce compte.

19) Par courrier du 5 janvier 2012, la coopérative a sollicité la réintégration dans son assiette fiscale des comptes et des placements non déclarés, tout en priant l'AFC-GE de considérer cet acte comme une déclaration spontanée.

20) Par décisions du 21 décembre 2012, l’AFC-GE a rejeté la réclamation et a maintenu ses bordereaux de rappel d’impôt et d’amende du 23 décembre 2010.

Par le contrat de réalisation de la promotion immobilière du 2 novembre 2005, M. C______ et la coopérative avaient constitué une société simple de fait. Le résultat d'une promotion initiée entre deux entités sous la forme d'une telle société devait, dès lors, être partagé entre les co-promoteurs. Pour cette raison, l'AFC-GE avait notifié la reprise en bénéfice revenant à la coopérative de CHF 200'578.- selon le calcul suivant :

 

 

Produits de la promotion (douze appartements)

CHF 6'069'000.-

Cédules

CHF 33'525.-

Total des produits

CHF 6'102'525.-

Charges de l'entreprise générale (CHF 6'980'000.- x 75%)

CHF 5'235'000.-

Intérêts intercalaires (CHF 87'873.- x 75%)

CHF 65'905.-

Charges de commercialisation (CHF 263'376.- x 75%)

CHF 197'532.-

Charges de mise en valeur (CHF 288'014.- x 75%)

CHF 216'010.-

Charges de pilotage (CHF 250'000.- x 75%)

CHF 187'500.-

Total des charges

CHF 5'901'947.-

 

 

Bénéfice de la promotion imposable à ajouter au résultat

 

CHF 200'578.-

Le pourcentage de 75% appliqué avait servi à répartir les charges de D______ pour les seize appartements, dont seuls douze appartenaient à la coopérative.

S'agissant des amendes, la taxation 2007 de la coopérative entrée en force était inexacte. Dès lors, l'application d'une pénalité s'imposait. Toutefois, pour fixer la quotité de l'amende, l'AFC-GE n'avait retenu ni circonstance aggravante ni circonstance atténuante, de sorte que la pénalité avait été fixée au montant de l'impôt soustrait.

21) Par acte du 18 janvier 2013, la coopérative a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation ainsi qu'à celle des bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2007 et le bordereau d'amende du 23 décembre 2010.

Le bénéfice résultant de l'opération immobilière ne devait pas être imposable dans la coopérative, mais dans la déclaration fiscale personnelle de M. C______, dans la mesure où il était le seul à être impliqué dans le projet par son engagement personnel auprès de l’E______ et par l'achat de la parcelle n° 2______.

S'agissant de la soustraction d'impôt, l'entier de la promotion immobilière avait été déclaré et taxé pour l'année fiscale 2007 chez M. C______, avec la progressivité des taux d'imposition des personnes physiques, si bien qu'il n'y avait pas eu de soustraction. À cet effet, la coopérative avait fait état de simulation d'impôt afin de comparer les situations fiscales avant et après la procédure de rappel d'impôt, afin de démontrer que l'AFC-GE n'avait pas été lésée. Au contraire, il apparaissait une différence totale d'impôt de CHF 15.- qui était même en faveur de celle-ci. En outre, si le TAPI devait estimer qu'il y avait une soustraction, celle-ci devrait être calculée sur le différentiel net d'impôt et non sur l'impôt de la coopérative.

22) Le 3 juin 2014, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

La coopérative avait omis de comptabiliser la promotion immobilière dans ses comptes pour l'année fiscale 2007. Or, elle était devenue propriétaire du droit de superficie de la parcelle n° 1______, sur laquelle elle avait fait construire douze appartements soumis au régime de la PPE. Le contrat de réalisation de ses immeubles et de ceux de M. C______ du 2 novembre 2005 réglait le mandat de réalisation. Les deux entités avaient ainsi constitué de fait une société simple dont le résultat devait être partagé entre elles, ce qui n'avait pas été le cas. Dès lors, la coopérative avait bénéficié d’une taxation plus favorable.

Par ailleurs, lors de l'entretien s'étant déroulé le 23 novembre 2011 dans les locaux de l'AFC-GE, la coopérative avait bien précisé que le compte bancaire E______ 3______ d'un montant de CHF 6'980'000.-, n'avait été déclaré ni par elle-même, ni par M. C______, montant dont elle avait sollicité la réintégration dans son assiette fiscale par courrier du 5 janvier 2012. Aussi, la coopérative avait elle-même admis dans son courrier du 30 mars 2010 que sa comptabilité 2007 était inexacte, en ce sens qu'elle n'avait pas enregistré les différents actes et opérations au RF et qu'il s'agissait d'une erreur commise par son organe, M. C______.

Concernant les amendes, la coopérative avait présenté une déclaration incomplète, bénéficiant ainsi d'une taxation insuffisante. Dès lors, l'application d'une pénalité s'imposait. Par l'intermédiaire de ses organes, notamment par M. C______, administrateur président avec signature individuelle, elle avait signé les états financiers et les déclarations d'impôt et avait ainsi agi par négligence. Dès lors, l'infraction en soustraction était ainsi réalisée.

S'agissant de la quotité des amendes, il n'y avait ni circonstance aggravante ni circonstance atténuante à prendre en compte, de sorte que le coefficient pondéré appliqué avant la réclamation, d'une fois le montant des droits soustraits, correspondait à une faute de gravité moyenne.

23) Par jugement du 3 mars 2014, notifié aux parties le 6 mars 2014, le TAPI a partiellement admis le recours de la coopérative. Il a confirmé la reprise sur le bénéfice de CHF 200'578.- et les rappels de l'ICC et de l'IFD 2007 y relatifs, réduisant cependant à 3/4 du montant d'impôt éludé les amendes infligées.

L'engagement de la coopérative, en vertu duquel elle avait attribué à M. C______ tous les risques, marges et bénéfice, à raison de 100 % liés à l'opération immobilière, ne pouvait pas justifier la comptabilisation de son activité commerciale dans le cadre de l'activité indépendante de son administrateur, ni la distribution à celui-ci de la totalité du bénéfice, avant sa taxation. Il était clairement reconnaissable, même à des particuliers peu au courant des affaires, qu'une personne morale poursuivant, ne serait-ce que de manière accessoire, une activité commerciale et en retirant des bénéfices était tenue d'en rendre compte à l'AFC-GE, et, à plus forte raison, que l'ampleur de l'opération immobilière en cause supposait l'enregistrement des recettes y relatives. Dès lors, la coopérative s'était rendue coupable de soustraction fiscale, à tous le moins par dol éventuel, et non pas par négligence, comme l'avait retenu l'AFC-GE. Ce constat n'avait toutefois pas de conséquence sur la quotité des amendes en cause. En revanche, la relative bonne coopération avec l'AFC-GE de la coopérative pendant les procédures de rappel et de soustraction, qui incluait la mise en place de mesures visant à prévenir les lacunes rencontrées auparavant, était une circonstance de nature à diminuer la sanction, si bien qu'elle était réduite à 3/4 du montant d'impôt éludé.

24) Par acte du 7 avril 2014, l’AFC-GE a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, en concluant, avec « suite de dépens », à son annulation, dans la mesure où il avait réduit la quotité de l'amende à 3/4 des droits et à la confirmation de ses décisions du 21 décembre 2012.

En retenant une circonstance atténuante due à une « relativement bonne coopération » de la coopérative diminuant ainsi l'amende d'un quart, le TAPI s'était substitué de façon indue à son pouvoir d'appréciation, alors même qu'il avait lui-même considéré qu'il y avait lieu de retenir le dol éventuel et n'avait pas analysé les circonstances aggravantes. Le TAPI avait fait abstraction, dans son appréciation, des importants montants d'impôts soustraits par la coopérative, soit CHF 43'318.65 pour l'ICC et CHF 15'699.50 pour l'IFD, des connaissances techniques de ses organes et de l'assistance de mandataires professionnellement qualifiés dont elle avait bénéficié.

25) Le 15 avril 2014, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

26) Invitée à répondre au recours, la coopérative ne s’est pas déterminée dans le délai imparti.

27) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 2 de la loi cantonale de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le présent litige a trait à l’ICC et l’IFD de l’année 2007, plus particulièrement à la diminution de la quotité des amendes d'une fois à 3/4 des droits du montant des impôts éludés dans le cadre de la procédure en rappel d’impôt et soustraction ouverte à l'encontre de la coopérative.

3) La chambre administrative peut rendre un seul arrêt valant pour les deux amendes prononcées, l'une en matière d’ICC, l'autre concernant l’IFD, ce qui est admissible, dès lors que l'amende pour soustraction fiscale est réglée de la même façon en droit fédéral et dans le droit cantonal harmonisé (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_907/2012 du 22 mai 2013 consid. 1 et 2C_918/2012 du 11 février 2013 consid. 1).

4) a. Le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (art. 175 al. 1 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11 ; art. 56 al. 1 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14 ; art. 69 al. 1 LPFisc). En règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 2 LHID et art. 69 al. 2 LPFisc).

b. Il en découle qu’en présence d’une infraction intentionnelle sans circonstances particulières, l’amende équivaut en principe au montant de l’impôt soustrait. Ce dernier constitue donc le premier critère de fixation de l’amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d’augmentation de sa quotité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 6.2). Il convient notamment de réduire le montant de l’amende lorsque le contribuable a agi par négligence, celle-ci devant être considérée comme un cas de faute légère au sens de l’art. 175 LIFD (Diane MONTI, Les contraventions fiscales en droit fiscal harmonisé, 2001, p. 70). Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales disposent d’un large pouvoir d’appréciation lors de la fixation de l’amende (ATF 114 Ib 27 consid. 4a p. 31 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1007/2012 du 15 mars 2013 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 précité consid. 6.2) et l'autorité de recours ne censure que l'abus du pouvoir d'appréciation (ATA/42/2011 du 25 janvier 2011 consid. 6 ; ATA/693/2009 du 22 décembre 2009 consid. 10a ; ATA/410/2007 du 28 août 2007 consid. 20). Ces autorités doivent, dans le respect du principe de la proportionnalité, faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (ATA/18/2013 du 8 janvier 2013).

c. La faute au sens des art. 175 et 181 LIFD ne peut être qu'un attribut de la personne physique. En d’autres termes, il ne peut s’agir que de la faute d'un organe de la personne morale, dont le comportement doit être imputé à celle-ci (ATF 135 II 86 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_724/2010 du 27 juillet 2011 consid. 9.1).

d. Le contribuable qui mandate une fiduciaire pour remplir sa déclaration d’impôt n’est pas pour autant libéré de ses obligations fiscales. Il doit, le cas échéant, supporter les inconvénients d’une telle intervention et répond de l’erreur de l’auxiliaire qu’il n’instruit pas correctement ou dont il ne contrôle pas l’activité (RDAF 2003 II 632, 637 ; RDAF 1999 II 535 ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 588).

Toutefois, lorsque le contribuable qui ne dispose pas de connaissances fiscales particulières choisit un mandataire compétent et lui communique tous les documents et renseignements nécessaires à l’établissement d’une déclaration conforme à la vérité, on ne peut raisonnablement pas lui reprocher de signer sa déclaration sans la contrôler dans les moindres détails. Il y aurait plutôt lieu de déterminer si le contribuable a transmis des documents incomplets à son mandataire, s’il l’a correctement instruit ou s’il s’est entendu avec lui pour commettre l’infraction fiscale (Pietro SANSONETTI, Commentaire romand de la loi sur l’impôt fédéral direct, 2008, p. 1500).

5) En l'espèce, l'appréciation du TAPI selon laquelle la coopérative s'est rendue coupable de soustraction fiscale, à tous le moins par dol éventuel, n'est pas remise en cause par les parties et sera ainsi confirmée.

Toutefois, le TAPI a estimé, malgré le caractère intentionnel de l'infraction, que la quotité des amendes devait être réduite à 3/4 du montant de l’impôt éludé, pour tenir compte d'une circonstance atténuante, soit la « relativement bonne coopération » de l'intimée.

Cette argumentation ne saurait être suivie.

Il est vrai que la coopérative a reconnu spontanément que sa comptabilité 2007 était inexacte, en ce sens qu'elle n'avait pas enregistré les différents actes et opérations au RF et qu'il s'agissait d'une erreur commise par son organe. Aussi, la coopérative a-t-elle sollicité, dès la découverte des comptes et des placements non déclarés, leur réintégration dans son assiette fiscale, tout en priant l’AFC-GE de considérer cet acte comme une déclaration spontanée.

Néanmoins, le TAPI a omis d'analyser les circonstances aggravantes.

Les bordereaux initiaux que la coopérative a laissé entrer en force retenaient un bénéfice net de CHF 0.-. En revanche, les bordereaux de rappel d'impôts ICC et IFD 2007 faisaient état d'un bénéfice net total de CHF 154'718.-. Les impôts passaient quant à eux pour l'ICC 2007 de CHF 0.- à CHF 43'318.65 et pour l'IFD 2007 de CHF 0.- à CHF 15'699.50. Dès lors, il y a lieu de retenir que les différences de montants sont déjà relativement importantes.

M. C______, responsable, en raison individuelle, du pilotage et de la mise en valeur du projet de construction et de la commercialisation de la promotion immobilière était également l'administrateur président à signature individuelle de la coopérative, tout comme l'administrateur à signature individuelle de D______, responsable de l'exécution des opérations afférentes à ladite promotion. Partant, l'organe de la coopérative n'était pas dépourvu d'expérience et de connaissances en la matière. De plus, assistée d'une fiduciaire, à savoir d'un mandataire professionnellement qualifié, la coopérative ne pouvait pas ignorer l'obligation de déclarer les bénéfices réalisés dans le cadre de la promotion immobilière.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’appréciation initiale de l’AFC-GE, fixant le montant de l’amende à une fois celui de l’impôt éludé, n’apparaît pas critiquable. L’administration a respecté le principe de la proportionnalité et fait preuve de sévérité tout en restant dans le cadre de son pouvoir d’appréciation.

6) Au vu de ce qui précède, le recours sera admis. Les amendes pour l'ICC et pour l'IFD de 2007 pour soustraction d’impôts seront fixées à une fois le montant de l'impôt éludé, soit à CHF 43'318.65 pour la soustraction de l'ICC 2007 et à CHF 15'699.50 pour la soustraction de l'IFD 2007. Pour le surplus, le jugement du TAPI sera confirmé.

7) Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la coopérative, qui succombe, et, vu cette issue, il ne lui sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 avril 2014 par l'administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 mars 2014 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 mars 2013 en ce qu'il ordonne la diminution de la quotité des amendes fixées par bordereaux de l'administration fiscale cantonale du 23 décembre 2010 à 3/4 du montant d'impôt soustrait ;

le confirme pour le surplus ;

rétablit les bordereaux d'amende de l'administration fiscale cantonale du 23 décembre 2010 ;

met à la charge de A______ société coopérative un émolument de CHF 500.- ;

dit qu’il n'est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à l’administration fiscale cantonale, à A______ société coopérative, représentée par Berney & Associés S.A., société fiduciaire, mandataire, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :