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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2248/2008

ATA/82/2009 du 17.02.2009 ( DCTI ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.04.2009, rendu le 24.06.2009, REJETE, 1C_141/1009
Descripteurs : ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; DIMENSIONS DE LA CONSTRUCTION ; SURFACE ; PETITE CONSTRUCTION ; VOISIN ; PERMIS DE CONSTRUIRE ; VILLA ; 5E ZONE ; ORDRE CONTIGU ; DROIT CIVIL
Normes : LCI.58 ; LCI.59
Parties : ANCHISI René / WOLF Philippe et Sonia, WOLF Sonia, COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, TOMMASI Edouard
Résumé : Voisins recourant contre une autorisation de construire une villa contigüe à celle d'un tiers. En 5ème zone, les constructions en ordre contigu ne doivent pas nécessairement être alignées ou semblables sur le plan architectural. Le DCTI peut autoriser une surface de plancher de 25 % si les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2248/2008-DCTI ATA/82/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 17 février 2009

1ère section

dans la cause

 

Monsieur René ANCHISI
représenté par Me Julien Blanc, avocat

contre

 

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE

 

et

 

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

 

et

 

Monsieur Edouard TOMMASI
représenté par Me Dominique Levy, avocat

 

et

 

Madame Sonia et Monsieur Philippe WOLF

 


EN FAIT

1. Monsieur Edouard Tommasi (ci-après : le propriétaire) est copropriétaire pour un quart de la parcelle n° 6120 et propriétaire de la parcelle n° 6141, aux surfaces respectives de 140 m2 et 524 m2, feuille 25 de la commune d'Anières, à l'adresse 47C route de Chevrens.

2. Par acte instrumenté devant notaire du 27 juillet 2006, M. Tommasi a vendu la parcelle n° 6140, d'une surface totale de 780 m2, feuille 25 de la commune d'Anières, à l'adresse route de Chevrens 49, à Madame Sonia et Monsieur Philippe Wolf (ci-après : les époux Wolf). Sur ce terrain est érigée une villa habitée par ces derniers.

Il ressort de l'acte de vente que :

- De la parcelle n° 6140 dépend la copropriété pour un quart de la parcelle voisine n° 6120 ;

- De la parcelle n° 6141, détenue par M. Tommasi, dépend la copropriété pour un autre quart de la parcelle n° 6120 ;

- Les époux Wolf acceptaient que les droits à bâtir de la parcelle n° 6140 non utilisés soient transférés au profit de la parcelle n° 6141 et ils faisaient leur affaire personnelle de la construction sur la parcelle n° 6140 de l'élément permettant au futur immeuble à construire sur la parcelle n° 6141 de se jumeler à leur villa.

3. Les parcelles nos 6120, 6140 et 6141 sont situées en zone agricole, développement 5, et jouxtent le terrain de Monsieur René Anchisi, à l'adresse 47, route de Chevrens.

4. Souhaitant construire sur sa parcelle n° 6141 une villa contigüe à celle existante des époux Wolf, située sur la parcelle n° 6140, M. Tommasi a sollicité le 12 janvier 2007 du département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : le DCTI), la délivrance d'une autorisation de construire une villa jumelle avec couvert et parkings, parcelles nos 6141 et 6120 (DD 101'129), d'une densité de 23,6% calculée comme suit :

- Surface totale des parcelles

no 6141 : 524 m2, n° 6140 : 780 m2,

n° 6120 (50% x 140 m2) : 70 m2 : 1'374,00 m2

- Surface habitable autorisée, avec densité de 25% : 343,50 m2

- A déduire les droits à bâtir réservés pour la parcelle n° 6140 :

surface brute déjà utilisée : 164,20 m2

+ droits conservés + 15,00 m2 -179,20 m2

- Droits à bâtir autorisés pour le nouveau projet (343,50 - 179,20) : 164,30 m2

- Surface brute totale du nouveau projet (parcelle n° 6141) : 159,60 m2

- Droits à bâtir (incluant le bâtiment existant et celui à construire, 

et correspondant à 23,6% de la surface totale de 1'374 m2) : = 323,80 m2

5. Dans le cadre de l’instruction de la demande, le DCTI a recueilli les préavis des services concernés qui tous ont été soit favorables, soit sans observations. En particulier ceux de la direction de l'aménagement du territoire, de la commune d'Anières, de la commission d’architecture, favorable à une dérogation pour un rapport des surfaces de 25%, dès lors que le projet était compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, et celui de l'inspection de la construction, le taux d'utilisation du sol étant de 23,6%.

6. Par arrêté du 19 septembre 2007, le Conseil d'Etat a autorisé l'application des normes de la 5ème zone au bâtiment à construire selon le dossier DD 101'129.

7. Le domaine nature et paysage a octroyé, le 28 septembre 2007, une autorisation d'élaguer un cèdre.

8. Le 28 septembre 2007, le DCTI a délivré l'autorisation sollicitée, laquelle a été publiée dans la Feuille d'Avis officielle (ci-après : FAO) du 3 octobre 2007.

9. Par courrier daté du 30 octobre 2007, M. Anchisi a recouru contre cette autorisation auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions, remplacée depuis le 1er janvier 2009 par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission).

La construction projetée priverait du jour naturel la cuisine des époux Wolf. D'un style différent des villas déjà existantes et n'étant pas reliée à la construction en place par un mur de peu d'importance, tel un garage, elle ne pouvait être qualifiée de « villa jumelle ». Cette absence de « gémellité » ne lui permettait pas d'obtenir 5% de surface de construction supplémentaire, de sorte que les droits à bâtir devaient être ramenés aux 20% légaux par rapport à la surface de la parcelle. Par ailleurs, il ressortait d'un acte notarié en sa possession, mais non joint au recours, que les superficies à considérer étaient différentes de celles mentionnées dans le projet litigieux. Un métré contradictoire devait dès lors être effectué. Enfin, la conservation du cèdre à protéger n'était pas garantie par le projet.

10. Le 6 novembre 2007, M. Tommasi a conclu au rejet du recours.

Les époux Wolf acceptaient la suppression d'une fenêtre de leur cuisine. Celle-ci disposant d'autres ouvertures, ainsi que d'une porte-fenêtre, leur surface vitrée totale était largement supérieure à ce qui était requis par la loi.

La notion de similitude entre plusieurs maisons n'avait rien à voir avec la notion de gémellité ou contigüité, laquelle pouvait être réalisée par une construction dite de peu d'importance, ce qui était le cas du couvert figurant dans le projet corrigé du 19 février 2007 et qui avait été autorisé. Cette construction ne devait pas être nécessairement un garage. La contiguïté des bâtiments permettait l'application d'un indice d'utilisation du sol de 25%. Les chiffres fournis au DCTI avaient été vérifiés et admis par ce dernier, de sorte que ceux en possession de M. Anchisi étaient faux.

Enfin, les précautions nécessaires concernant la préservation du cèdre avaient été prises lors de l'instruction de l'autorisation de construire et d'élagage.

11. Le 13 novembre 2007, M. Anchisi a encore adressé un courrier à la commission, reprenant ses précédentes conclusions.

La construction d'un couvert, condamnant la principale fenêtre de la cuisine des époux Wolf, était contraire à l'article 74 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) relatif aux constructions sur cour. Les autres ouvertures de cette cuisine se trouveraient toujours à l'ombre à cause des hautes parois de la nouvelle construction. Le couvert projeté n'était pas un couvert à voitures. Les époux Wolf ignoraient les conséquences du projet de construction lorsqu'ils avaient acquis leur villa. Une autorisation d'abattre un seul arbre avait été délivrée, alors que selon les plans quatre arbres devaient l'être.

12. En date du 19 novembre 2007, la commission a publié dans la FAO le recours dont elle avait été saisie contre l'autorisation de construire précitée. L'avis mentionnait que les tiers disposaient d'un délai de 30 jours pour intervenir dans la procédure, conformément à l'article 147 LCI.

13. Le 19 décembre 2007, par acte intitulé « recours », les époux Wolf ont demandé à intervenir dans la procédure en concluant à l'annulation de l'autorisation de construire.

Le projet impliquait la construction d'un couvert en béton au-dessus du mur de leur cuisine, ce qui les priverait d'une source importante de lumière, en violation des dispositions sur les vues droites (art. 72ss LCI). Leur consentement pour accéder à leur terrain était nécessaire car aucun droit de passage n'existait. Le projet ne respectait pas l'esthétique des constructions. Ils adhéraient pour le surplus aux arguments de M. Anchisi.

14. Entendues par la commission en audience de comparution personnelle le 10 janvier 2008, les parties ont campé sur leurs positions.

Le DCTI a précisé que la qualification de villa contigüe était acquise, le rapport de surface contrôlé était de 23,6%. Il avait vérifié la question des jours et vues droites et a rappelé que la commission d'architecture avait donné son préavis favorable sur la base notamment des plans de la villa existante.

Les époux Wolf ont indiqué que les observations du DCTI ne ressortaient pas du dossier et ont persisté dans leur intervention.

M. Tommasi a maintenu ses observations. Il ressortait de l'acte de vente passé avec les époux Wolf que la réalisation d'un ouvrage de peu d'importance, permettant d'obtenir la contigüité entre les deux bâtiments, leur incombait.

M. Anchisi a déclaré persister dans son recours.

15. Le 16 janvier 2008, M. Anchisi a écrit à la commission afin de lui signaler plusieurs « anomalies », en particulier :

- Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 10 janvier 2008, il n'avait pas été répondu à sa question adressée au DCTI, portant sur le fait de savoir si la commission d'architecture avait remarqué sur les plans l'existence d'une fenêtre sur la paroi sud de la villa des époux Wolf ;

- Son courrier du 13 novembre 2007 adressé à la commission ne figurait pas au dossier qu'il avait consulté auprès du DCTI, raison pour laquelle plusieurs chapitres très importants qu'il contenait avaient été éludés lors de l'audience de la comparution personnelle précitée.

16. Le 1er avril 2008, la commission a reçu le complément d'information demandé au DCTI le 14 février 2008.

La construction projetée imposait l'obturation d'une fenêtre de la cuisine des époux Wolf orientée au sud de la villa existante. Toutefois, cette pièce disposait de deux autres ouvertures sur la façade est, de 0,53 m2 chacune, ainsi que d'une porte fenêtre sur la façade ouest, de 1,9 m2. La surface totale des jours maintenus était de 3 m2, pour une surface de cuisine de 13,4 m2, excédant ainsi largement le 10% de la surface de la cuisine, ce qui était conforme aux dispositions de l'article 125 du règlement d’application de la loi sur les constructions et installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01).

17. Les 8 et 11 avril 2008, M. Anchisi et les époux Wolf se sont prononcés sur ce complément d'information, considérant pour l'essentiel que la surface des jours était insuffisante.

18. Par décision du 9 mai 2008, expédiée aux parties le 20 mai 2008, la commission a rejeté le recours de M. Anchisi et l'intervention des époux Wolf.

Le projet, en tant qu'il prévoyait une construction en ordre contigu, était conforme à l'article 58 alinéa 2 LCI. La dérogation pour une surface de construction de 25% prévue par l’article 59 alinéa 4 lettre a LCI avait été approuvée aussi bien par la commune que par la commission d’architecture. Le taux d'utilisation du sol relevé par la police des constructions (23,6%) était inférieur aux 25% pouvant être admis dans ces cas. Le grief de la violation des règles sur les rapports des surfaces était ainsi infondé.

La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier était avérée, le DCTI s'étant basé sur la quasi-totalité des préavis favorables, notamment ceux de la commission d'architecture et de la commune.

Les dispositions relatives aux vues droites (art. 72 et ss LCI) étaient inapplicables aux constructions en ordre contigu (art. 67 al. 2 let. b LCI), et il n'appartenait pas à l'administration de s'immiscer dans les conflits de droits réels, comme les servitudes par exemple, ni dans les rapports de droit privé.

L'obturation d'une ouverture sur la façade sud de la villa des époux Wolf respectait les dispositions relatives à l'éclairage des pièces d'habitation (art. 125 RCI).

Enfin, s'agissant de la protection du cèdre, le DCTI avait suivi le préavis positif du service "domaine nature et paysage" du département du territoire, après l'apport des informations complémentaires souhaitées, de sorte qu'aucun excès ou abus de pouvoir d'appréciation n'avait été commis. N'ayant pas la compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, elle ne saurait se substituer à l'administration.

19. Par courrier posté le 20 juin 2008, M. Anchisi a recouru auprès du Tribunal administratif à l'encontre de la décision précitée, reçue le 21 mai 2008, en concluant à son annulation, avec suite de frais et dépens.

a. A titre préalable, une nouvelle mesure des rapports des surfaces devait être effectuée et un transport sur place devait être ordonné, de manière à constater le caractère inesthétique du projet ;

b. Le calcul du taux d'utilisation du sol de 23,6% était erroné. Seules les surfaces des parcelles nos 6140 et 6141 devaient être considérées. La parcelle no 6120, d'une surface totale de 140 m2, ne devait pas être intégrée dans le calcul, ou tout au plus à concurrence des droits à bâtir, soit 9 m2 ;

c. La contigüité de la construction nouvelle ne pouvait être retenue, car le couvert reliant les deux villas était une construction de « très peu » d'importance, et non pas de peu d’importance, ainsi que le requérait l'article 58 LCI ;

d. Le projet, en tant qu'il prévoyait d'obstruer le jour principal des époux Wolf, n'était pas conforme au droit, et ces derniers refuseraient l'accès à leur propriété pour la construction du couvert ;

e. Enfin, il contrevenait à l'esthétique du quartier et c'était à tort que la commission n'était pas entrée en matière sur ce sujet.

20. Les époux Wolf n'ont pas recouru contre la décision de la commission.

21. Dans ses observations du 11 juillet 2008, M. Tommasi conclut au rejet du recours, en adhérant pour l'essentiel aux arguments précédemment évoqués par le DCTI. Le recours de M. Anchisi n'avait d'autre but que de faire traîner la procédure et de retarder la construction de la villa.

22. Le DCTI a transmis ses observations le 1er septembre 2008. Il conclut au rejet du recours.

a. Le projet répondait à la définition de l'ordre contigu de l'article 58 alinéa 2 LCI car le couvert projeté, reliant les deux maisons, était une construction de peu d'importance.

b. Le calcul du taux d'utilisation du sol de 23,6% était correct. Il tenait compte d'une surface de 70 m2, correspondant à la moitié des droits à bâtir de M. Tommasi sur la parcelle n° 6120.

c. Concernant l'esthétique du projet, tous les préavis étaient favorables, notamment celui de la commission d'architecture.

23. Le 17 novembre 2008, le juge délégué a procédé à un transport sur place en présence des parties.

a. M. Anchisi a indiqué qu'un premier projet de M. Tommasi avait été refusé car la contigüité avec la villa existante n'était assurée que par une pergola, et le remplacement de celle-ci par un couvert dans le nouveau projet ne changeait rien. Par ailleurs, la hauteur du mur à édifier au milieu du couvert mesurait 2,90 mètres, et il était supérieur aux 2,50 mètres autorisés.

b. M. Tommasi a expliqué que la contigüité avec la villa existante serait assurée par un couvert, dont la hauteur du mur en limite de propriété serait inférieure au maximum de 2,50 mètres, compte tenu du fait que le terrain naturel remontait (coupe AA du plan). L'esthétique et la continuité entre la maison existante et le projet seraient assurées par deux faîtes prévus à la même altitude. La fenêtre de la cuisine des époux Wolf ne serait pas concrètement obstruée, mais du fait de la construction d'un couvert, cette ouverture ne verrait plus le ciel et serait considérée comme obstruée à cause de cela. Néanmoins, cette pièce ayant suffisamment de jours, cela ne poserait pas de problème.

c. Le DCTI, a confirmé les explications de M. Tommasi, relatives aux jours de la cuisine, et a persisté dans sa détermination pour le surplus.

d. Les époux Wolf ont indiqué qu'ils n'avaient plus d'objections au projet.

A l'issue du transport sur place, les parties ont été informées qu'un délai au 8 décembre 2008 leur était imparti pour faire valoir leurs éventuelles modifications relatives au procès-verbal. D'entente avec elles, le dossier serait gardé à juger à cette date.

24. Le 8 décembre 2008, le recourant s'est déterminé à la suite du transport sur place précité.

Le procès-verbal ne faisait pas mention de sa demande d'effectuer un nouveau métrage. Par ailleurs, c'était le DCTI, et non M. Tommasi, qui avait évoqué la question des jours suffisants de la cuisine des époux Wolf.

Il reprenait ou précisait pour le surplus de nombreux éléments déjà évoqués lors du transport sur place et sollicitait une nouvelle comparution personnelle des parties.

25. Le 18 décembre 2008, M. Tommasi s'est adressé au Tribunal administratif au motif que, par ses observations, le recourant avait en réalité procédé à un nouvel échange d'écritures, de sorte que ces observations devaient être écartées. M. Anchisi ne pouvait se plaindre, au nom des époux Wolf, de griefs que ces derniers n'avaient pas soulevés.

26. Les parties ont été entendues en comparution personnelle le 5 janvier 2009.

a. Le recourant a indiqué être persuadé que le couvert ne serait pas construit, et que s'il l'était, il devait être destiné à abriter des voitures, ainsi que l'avait demandé le DCTI dans sa décision de refus du 13 février 2006 (recte : 2007) ;

b. M. Tommasi s'est prononcé au sujet du courrier du 8 décembre 2008 du recourant et a confirmé que c'était bien lui qui avait donné les explications mises dans sa bouche. Le couvert serait bien construit ;

c. Le DCTI a confirmé l'exactitude des explications fournies par M. Tommasi lors du transport sur place. Se référant à la lettre du recourant du 8 décembre 2008, il a indiqué qu'un couvert avait un toit couvrant intégralement l'édifice, ce qui n'était pas le cas d'une pergola. La LCI n'exigeait pas que les couverts soient destinés à protéger des voitures.

Le juge délégué a confirmé que lors du transport sur place, le conseil du recourant avait bien demandé à ce qu'un nouveau métrage soit effectué, le juge lui avait alors indiqué qu'au vu des plans figurant au dossier, une règle d'architecte permettait de vérifier les chiffres retenus.

à l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. La qualité de partie des époux Wolf en première instance est donnée par l'article 147 LCI, qui stipule que la commission publie dans la FAO tous les recours dont elle est saisie contre les autorisations délivrées par le département ou les refus (al. 1), l'avis mentionnant que les tiers disposent d'un délai de 30 jours pour intervenir dans la procédure (al. 2).

3. Le litige porte sur l'autorisation de construire une villa jumelle avec couvert et parkings.

4. Le recourant demande à ce qu'une nouvelle mesure des rapports des surfaces soit effectuée.

Il ressort des plans figurant au dossier, visés ne varietur par le DCTI, qu'une règle d'architecte permet de vérifier les chiffres retenus, qui sont exacts, de sorte qu'un nouveau métrage n'est pas nécessaire.

5. Le recourant allègue que le calcul du taux d'utilisation du sol de 23,6% est erroné. Seules les surfaces des parcelles nos 6140 et 6141 auraient dû être considérées. La parcelle no 6120, d'une surface totale de 140 m2, ne devait pas être intégrée au calcul, ou tout au plus à concurrence des droits à bâtir, soit 9 m2.

a. Selon l’article 59 alinéa 1 LCI, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 20% de la surface de la parcelle. Par surface de plancher prise en considération dans le calcul du rapport des surfaces, il faut entendre la surface brute de plancher de la totalité de la construction hors sol (al. 2).

b. Toutefois, après consultation de la commune et de la commission d’architecture, le DCTI peut autoriser, pour un projet de construction en ordre contigu, une surface de plancher de 25%, si les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier (art. 59 al. 4 let. a LCI). 

En l’espèce, l’autorité inférieure a retenu pour le projet litigieux une surface de plancher, incluant le bâtiment existant et celui à construire, de 323,80 m2, correspondant à un taux d’utilisation du sol de 23,6%.

Il ressort de l'acte de vente du 27 juillet 2006 qu'il dépend de la parcelle n° 6140 appartenant aux époux Wolf la copropriété pour un quart de la parcelle n° 6120, et qu'un autre quart de la copropriété de la parcelle n° 6120 dépend de la parcelle n° 6141, détenue par M. Tommasi. Les époux Wolf ayant accepté dans l'acte de vente que les droits à bâtir non utilisés de leur parcelle n° 6140 soient transférés au profit de la parcelle n° 6141, il en résulte que M. Tommasi dispose ainsi de la moitié des droits à bâtir de la parcelle n° 6120.

Pour arriver à un taux d'utilisation du sol de 23,6%, le DCTI a tenu compte dans le calcul, outre la surface des parcelles nos 6140 et 6141, d'une surface de 70 m2 correspondant à la moitié des droits à bâtir de M. Tommasi sur la parcelle n° 6120, ce qui est correct.

Ce taux d'utilisation est certes supérieur à celui pouvant être admis dans ce cas. Néanmoins, la dérogation prévue par l’article 59 alinéa 4 lettre a LCI d'autoriser, pour un projet de construction en ordre contigu, une surface de plancher de 25%, a été approuvée aussi bien par la commune que par la commission d’architecture, lesquels ont jugé que cette mesure était compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier.

Par conséquent, le grief de la violation des règles sur les rapports des surfaces doit être rejeté.

6. Le recourant considère que la contigüité de la construction nouvelle ne saurait être retenue, car un couvert, qui n'est pas différent d'une pergola, est une construction de « très peu » d'importance, et non de peu d’importance. De plus, la hauteur du couvert est de 2,90 mètres, soit supérieure aux 2,50 mètres autorisés, et celui-ci doit être destiné à protéger des véhicules.

a. Selon l'article 58 alinéa 1er LCI, les constructions sises en cinquième zone sont édifiées en ordre contigu ou non contigu. Est réputée en ordre contigu, l'édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une construction de peu d'importance et disposant chacune de son propre accès de plain-pied (art. 58 al. 2 LCI).

b. L’article 3 alinéa 3 RCI précise que sont réputées constructions de peu d'importance, à la condition qu'elles ne servent ni à l'habitation, ni à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n'excède pas 50 m2 et qui s'inscrivent dans un gabarit limité par :

a) une ligne verticale dont la hauteur n'excède par 2,50 mètres ;

b) une ligne oblique faisant avec l'horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30° ;

c) une ligne horizontale de faîtage située à 4,50 mètres du sol au maximum.

c. Selon le dictionnaire « Petit Robert », une pergola est une petite construction de jardin faite de poutres horizontales en forme de toiture, soutenues par des colonnes, qui sert de support à des plantes grimpantes (« Petit Robert », 1990, p. 1402).

En l’espèce, le couvert projeté consiste en un toit couvrant intégralement l'édifice, condition qui ne serait pas remplie s'il s'était agi d'une pergola. De plus, il ressort des plans visés ne varietur que le couvert a une hauteur en limite de propriété inférieure au maximum des 2,50 mètres autorisés, compte tenu du fait que le terrain naturel remonte (coupe AA du plan). Partant, de par sa destination et compte tenu de sa surface et de sa hauteur, le couvert litigieux doit être considéré comme une construction de peu d'importance au sens de l’article 3 alinéa 3 RCI, la loi n'exigeant pas qu'un couvert soit nécessairement destiné à abriter des voitures. En tant qu’il reliera la construction déjà existante à la villa projetée, ce couvert respecte l’exigence de contiguïté de l’article 58 alinéa 2 LCI.

En conséquence, la villa projetée est bien une construction en ordre contigu au sens des dispositions précitées.

7. Le recourant soutient que M. Tommasi ne construira pas un couvert et qu'il ne s'agirait-là que d'un artifice afin d'obtenir l'autorisation de construire.

Une autorisation de construire porte sur un objet précis, tel qu'il ressort des plans visés ne varietur par le DCTI. Les craintes du recourant relèvent du procès d'intention, seule la construction d'un couvert au gabarit mentionné sur les plans a été autorisée par le biais de la décision attaquée.

8. Le recourant invoque le fait que le couvert projeté obstruera, de manière contraire au droit, le jour principal de la cuisine des époux Wolf.

A teneur de l'article 125 RCI, toute pièce pouvant servir à l'habitation doit être pourvue de jours ouvrant directement sur l'extérieur. La surface déterminée sur le plan de la façade par la projection de ces jours ne peut être inférieure au dixième de la surface de la pièce ni à 1 m2 au minimum.

Ainsi qu'il ressort du complément d'information fourni par le DCTI à la commission en date du 1er avril 2008, la cuisine touchée par cette obturation dispose de deux autres fenêtres sur la façade est, de sorte que la surface totale des jours maintenus dans ladite pièce excède largement le 10% de la surface de la pièce.

Aucune violation de l'article 125 RCI ne peut dès lors être retenue.

9. Le recourant allègue que les époux Wolf refuseront l'accès à leur propriété pour pouvoir effectuer la construction du couvert.

S'agissant des inconvénients découlant de l'absence de servitude, cette question relève du droit civil et le tribunal de céans ne peut pas en connaître.

En outre, lors du transport sur place du 17 novembre 2008, les époux Wolf ont indiqué au tribunal de céans que, satisfaits des explications fournies par M. Tommasi, ils n'avaient plus d'objections au projet, dont ils avaient eu par ailleurs connaissance à l'achat de la parcelle, raison pour laquelle ils n'avaient pas recouru contre la décision de la commission. L’éventualité de la construction d’un couvert a d'ailleurs été réservée dans la promesse de vente et d’achat du 27 juillet 2006, sous la forme d’une condition n° 5 en page 7 de l’acte, où l'on peut lire que « les acquéreurs feront leur affaire personnelle de la construction sur la parcelle n° 6140 de l'élément permettant au futur immeuble à construire sur la parcelle n° 6141 de se jumeler à leur villa ».

10. Le recourant allègue que le couvert se trouverait dans une trop petite unité architecturale avec la villa projetée et que le projet contrevient à l'esthétique du quartier, de sorte que la commission aurait dû entrer en matière sur ce sujet.

a. La notion d'édification en ordre contigu figurant à l'article 58 alinéa 2 LCI n'implique pas que les deux maisons soient alignées ou semblables sur le plan architectural (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.757/2005 du 3 avril 2006 ; ATA/314/2006 du 13 juin 2006  ; ATA/670/2005 du 11 octobre 2005).

b. Aux termes de l'article 15 LCI, le DCTI peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification, toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur, nuirait au caractère ou à l'intérêt du quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du DCTI se fonde notamment sur le préavis de la commission d'architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la commission des monuments de la nature et des sites. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du DCTI (al. 2).

c. Cette disposition légale renferme une clause d’esthétique, qui constitue une notion juridique indéterminée, laissant un certain pouvoir d’appréciation à l’administration, celle-ci n’étant limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (ATA/59/2004 du 20 janvier 2004 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel, 1984, p. 332-333 ; B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1991, p. 34-36, n° 160-169). Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/51/2006 du 31 janvier 2006 ; ATA/253/1997 du 22 avril 1997).

d. Chaque fois que l’autorité administrative suit les préavis des commissions consultatives, l’autorité de recours doit s’imposer une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/129/2003 du 11 mars 2003 ; T. TANQUEREL, La pesée des intérêts vue par le juge administratif in C.A. MORAND, La pesée globale des intérêts, Droit de l’environnement et aménagement du territoire, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1996, p. 201). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas, sans motif prépondérant et dûment établi, du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/646/1997du 23 octobre 1997).

En l’espèce, l’ensemble des préavis recueillis est favorable au projet. Dès lors, le Tribunal administratif, s’imposant la réserve qui lui incombe en matière d’esthétique des constructions, constatera qu’en accordant l’autorisation de construire, le DCTI n’a ni abusé de son pouvoir d’appréciation, ni excédé celui-ci.

11. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Un émolument de CHF 2'000.-, comprenant les frais de procédure, sera mis à la charge du recourant, qui succombe, et une indemnité de procédure de CHF 2'000.- sera allouée à M. Tommasi, à la charge du recourant (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 juin 2008 par Monsieur René Anchisi contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 9 mai 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument, comprenant les frais de procédure, de CHF 2'000.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à Monsieur Tommasi, à la charge du recourant ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Julien Blanc, avocat du recourant, à Me Dominique Levy, avocat de Monsieur Edouard Tommasi, à Madame Sonia et Monsieur Philippe Wolf, à la commission cantonale de recours en matière administrative, ainsi qu'au département des constructions et des technologies de l'information.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Hurni, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :