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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3300/2012

ATA/799/2012 du 23.11.2012 sur JTAPI/1328/2012 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3300/2012-MC ATA/799/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 novembre 2012

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Yann Arnold, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 novembre 2012 (JTAPI/1328/2012)


EN FAIT

1. Le 19 août 2011, l'office fédéral des migrations (ci-après : ODM) a refusé d'entrer en matière sur la demande d'asile présentée le 21 avril 2011 par Monsieur  A______, né le ______ 1990, ressortissant algérien, et il a prononcé son renvoi de Suisse. L'intéressé devait avoir quitté la Suisse au plus tard le jour suivant l'échéance du délai de recours. Cette décision est devenue définitive.

2. Le 19 septembre 2011, M. A______ a déclaré à l'office cantonal de la population (ci-après : OCP) qu'il avait bien reçu la décision susmentionnée mais qu'il voulait rester en Suisse pour y chercher du travail. Il ne possédait pas de documents d'identité et n'effectuerait pas de démarches pour en obtenir.

3. Par ordonnance pénale du 16 juillet 2012, le Ministère public a condamné M. A______ à quarante jours-amende, avec sursis pendant trois ans, pour dommages à la propriété (art. 144 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0) et infraction à l'art. 115 al. 1 let b de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr ; RS 142.20).

4. Le 22 août 2012, l'ODM a informé l'OCP que M. A______ avait été reconnu comme citoyen algérien par l'ambassade d'Algérie à Berne et que cette dernière était disposée à lui délivrer un laissez-passer. L'OCP devait réserver un vol de retour d'ici au 22 novembre 2012.

5. Réentendu à l'OCP les 11 et 17 septembre 2012, M. A______ a confirmé vouloir demeurer en Suisse et n'avoir entrepris aucune démarche en vue de faciliter l'exécution de son renvoi.

6. Par ordonnance pénale du 8 octobre 2012 le Ministère public a condamné M. A______ à cent jours-amende, avec sursis pendant trois ans, pour menaces (art. 180 al. 1 CP) et violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 al. 1 CP).

7. Relaxé le même jour par le Ministère public, l'intéressé a été remis aux services de police en vue de l'exécution de son renvoi.

8. Le 8 octobre 2012, l'officier de police a ordonné la mise en détention administrative de M. A______ pour une durée d'un mois. Lors de son audition, ce dernier a refusé de retourner en Algérie, disant préférer se rendre en France ou en Allemagne.

9. Par jugement du 11 octobre 2012, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), a confirmé l'ordre de mise en détention administrative jusqu'au 7 novembre 2012. Lors de son audition, M. A______ a réitéré son opposition à son renvoi en Algérie. Il était d'accord de se rendre en Italie.

10. Le 22 octobre 2012, M. A______ a refusé de monter à bord de l'avion à destination de l'Algérie et dans lequel une place lui avait été réservée.

11. Le 29 octobre 2012, les autorités genevoises ont demandé à ce qu'une nouvelle place soit réservée sur un vol à destination de l'Algérie, avec escorte policière cette fois, pour la période du 13 au 15 novembre 2012.

12. Le 2 novembre 2012, l'OCP a sollicité, auprès du TAPI, la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois.

13. Entendu par le TAPI le 5 novembre 2012, M. A______ était toujours opposé à un retour en Algérie. Il ne monterait pas dans l'avion supposé l'y ramener.

14. Par jugement du 5 novembre 2012, remis en mains propres aux parties, le TAPI a prolongé la détention administrative de l'intéressé pour une durée d'un mois, jusqu'au 7 décembre 2012. La mesure était justifiée dans son principe. Les démarches en vue de l'exécution du renvoi étaient en cours. Il ne se justifiait pas de prolonger la détention pour plus d'un mois car, en cas d'échec de la tentative de renvoi, il ne serait pas possible de procéder par vol spécial, l'Algérie n'admettant pas ce mode de rapatriement. L'autorité pourrait alors examiner l'opportunité d'une mise en détention pour insoumission.

15. Le 15 novembre 2012, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant à son annulation et au prononcé de sa mise en liberté immédiate.

Les autorités cantonales avaient manqué de diligence et de célérité en ne sollicitant pas les documents nécessaires, soit un laissez-passer, pour permettre à brève échéance l'organisation d'un vol à destination de l'Algérie. Vu son opposition ferme et constante à son retour en Algérie, la question se posait de savoir si les conditions de détention en vue de renvoi étaient encore réalisées.

16. Le 16 novembre 2012, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d'observations.

17. Le 20 novembre 2012, l'OCP a conclu au rejet du recours. Les autorités chargées de l'exécution du renvoi avaient agi avec diligence et célérité. La nécessité d'obtenir un nouveau laissez-passer n'avait pas permis d'organiser un vol entre le 13 et le 15 novembre 2012, mais un nouveau document de voyage avait été demandé par l'ODM à l'ambassade d'Algérie pour le 7 décembre 2012. La détention était justifiée en raison de l'attitude du recourant, qui s'était opposé à une première tentative de renvoi et n'avait entrepris aucune démarche pour faciliter celui-ci. La durée de la mesure respectait le principe de la proportionnalité.

18. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté le 15 novembre 2012 contre le jugement du TAPI prononcé et communiqué à l’intéressé le 5 novembre 2012, le recours l’a été en temps utile auprès de la juridiction compétente (art. 132 al. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10 ; art. 17 et 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Le recours ayant été réceptionné le 16 novembre 2012, le délai de dix jours vient à échéance au plus tôt le 26 novembre 2012. En statuant ce jour, la chambre de céans respecte ce délai.

3. L'étranger qui a fait l’objet d’une décision de renvoi peut être mis en détention administrative si des éléments concrets font craindre qu’il entend se soustraire à son expulsion, en particulier parce qu’il ne se soumet pas à son obligation de collaborer au sens de l’art. 90 LEtr ou de l’art. 8 al. 1 let. a ou al. 4 LAsi (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEtr). Il en va de même si son comportement permet de conclure qu’il se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEtr).

L’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr décrit des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition. Ces deux éléments doivent donc être envisagés ensemble (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009, consid. 3.1). Lorsqu'il examine le risque de fuite, le juge de la détention doit établir un pronostic, en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du renvoi le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions en seront réunies. Il dispose pour ce faire d'une certaine marge d'appréciation, ce d'autant qu'il doit en principe entendre l'intéressé (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011, consid. 3.3).

4. En l’espèce, tant les déclarations du recourant - qui dit ne pas vouloir repartir en Algérie et a encore confirmé ce point lors de son audition par le TAPI les 11 octobre et 5 novembre 2012 - que son comportement - il a refusé de monter à bord du vol de retour prévu le 22 octobre 2012 -, suffisent à démontrer le risque de fuite et le refus d'obtempérer aux injonctions des autorités.

C'est ainsi à juste titre que le TAPI a admis que les conditions de la mise en détention administrative étaient réalisées, au sens des dispositions rappelées ci-dessus.

5. L’autorité administrative doit entreprendre rapidement les démarches permettant l’exécution de la décision de renvoi (art. 76 al. 4 LEtr). La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

Le recourant est placé en détention administrative depuis le 8 octobre 2012. Les autorités chargées d'exécuter le renvoi avaient, à cette date, entrepris les démarches nécessaires pour qu'il puisse disposer d'un document de voyage lui permettant de prendre le vol du 22 octobre 2012 à destination de l'Algérie sur lequel une place lui avait été réservée. Le refus de l'intéressé de monter à bord de l'avion a empêché ce renvoi. Depuis lors, tant l'OCP que l'ODM ont fait le nécessaire pour qu'un nouveau laissez-passer soit délivré rapidement et pour organiser un nouveau vol avec escorte policière. Les allégations de manque de diligence et de célérité formulées par le recourant sont téméraires au vu des éléments du dossier et relèvent de la mauvaise foi en regard de son absence totale de collaboration et de son comportement d'obstruction active, seuls à l'origine de la mesure de contrainte ordonnée.

La durée de la détention, qui est en l'état bien inférieure à la durée légale maximale, respecte également la garantie constitutionnelle précitée.

6. Selon l’art. 80 al. 4 LEtr, l’autorité judiciaire qui examine la décision tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d’exécution de la détention. Celle-ci doit en particulier être levée lorsque son motif n’existe plus ou si, selon l’art. 80 al. 6 let. a LEtr, l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu’il ne peut être raisonnablement exigé, cette dernière disposition légale renvoyant à l’art. 83 al. 1 à 4 LEtr.

Conformément à la jurisprudence, ces raisons doivent être importantes. Il ne suffit pas que l’exécution du renvoi soit momentanément impossible, tout en restant envisageable dans un délai prévisible. L’exécution du renvoi doit être qualifiée d’impossible lorsque le rapatriement est pratiquement exclu, même si l’identité de l’étranger est connue et que les papiers d’identité nécessaires peuvent être obtenus (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_625/2011 du 5 septembre 2011).

En l'espèce, il n'y aucune impossibilité juridique ou matérielle à l'exécution du renvoi par un vol avec escorte policière (ATA/296/2012 du 11 mai 2012). Le fait que l'intéressé persiste à déclarer ne pas vouloir se rendre en Algérie ne saurait constituer une telle impossibilité.

7. En conséquence, le recours sera rejeté.

Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue de celui-là, il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 novembre 2012 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 novembre 2012 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yann Arnold, avocat du recourant, au Tribunal administratif de première instance, à l'office cantonal de la population, à l'office fédéral des migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier juriste. :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

P. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :