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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3491/2014

ATA/726/2015 du 14.07.2015 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : ASSISTANCE PUBLIQUE ; BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS D'ASSISTANCE ; ÉTUDES POSTGRADUÉES ; OBLIGATION DE RENSEIGNER ; DEVOIR DE COLLABORER ; RESTITUTION(EN GÉNÉRAL) ; REMISE DE LA PRESTATION ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : Cst.29.al2 ; LIASI.11 ; LIASI.36 ; LIASI.42 ; LIASI.51 ; RIASI.13
Résumé : Rejet du recours d'un bénéficiaire de prestations d'aide sociale qui a caché à l'Hospice général avoir repris des études en vue d'obtenir un doctorat. L'intéressé, qui n'a pas formé opposition contre la décision de demande de restitution des prestations indûment perçues durant la période où il était à nouveau étudiant, ne peut remettre en cause cette décision, ni le montant réclamé, dans le cadre de la demande de remise de la dette. Les conditions de la remise ne sont pas réalisées, le recourant ne pouvant pas se prévaloir de sa bonne foi, vu les circonstances.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3491/2014-AIDSO ATA/726/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 juillet 2015

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

HOSPICE GÉNÉRAL



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ et originaire de République démocratique du Congo, est domicilié à Genève.

Son épouse, Madame B______, née le ______ et également originaire de République démocratique du Congo, et lui-même sont parents de trois enfants, soit C______, né le ______, D______, né le ______ et E______, née le______.

2) Il a suivi, dès la rentrée académique 2010-2011, un programme de maîtrise d'études avancées (MAS) en droit international humanitaire et des droits humains à Genève. Il était alors immatriculé comme étudiant à plein temps auprès de l'Université de Genève (ci-après : l'université).

3) M. A______ a bénéficié, du 1er juillet au 30 septembre 2011, d'une aide financière du service d'aide aux requérants d'asile (ci-après : ARA) de l'Hospice général (ci-après : l'hospice), devenu depuis lors le service d'aide aux migrants (ci-après : AMIG).

L'ARA avait alors accepté de lui allouer une aide financière ordinaire, afin qu'il puisse poursuivre son master à l'université.

4) Après avoir obtenu le statut de réfugié par décision de l'office fédéral des migrations (devenu depuis lors le secrétariat d’État aux migrations) du 12 août 2011, M. A______ a été mis au bénéfice, dès le 1er octobre 2011, de prestations d'aide financière ordinaire distribuées par l'unité des réfugiés statutaires de l'hospice.

Compte tenu de l'engagement de l'ARA en ce sens, l'unité des réfugiés statutaires a maintenu l'aide financière jusqu'à l'obtention du master.

5) Dès le mois d'octobre 2011, son épouse et leur fils aîné sont arrivés à Genève et ont été inclus dans le dossier d'aide financière.

6) Le 22 octobre 2011, M. A______ et Mme B______ ont signé conjointement le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général », s'engageant notamment à :

- donner immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l'établissement de leur situation personnelle, familiale et économique tant en Suisse qu'à l'étranger, en particulier toute information sur toute forme de revenu ou de fortune ;

- informer immédiatement et spontanément l'hospice de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière, notamment de toute modification de leur situation personnelle, familiale et économique, tant en Suisse qu'à l'étranger ;

- rembourser à l'hospice toute prestation exigible au sens de la législation applicable.

7) M. A______ a terminé le programme de MAS le 6 janvier 2012, étant toujours immatriculé comme étudiant à plein temps à l'université.

8) Le 1er mars 2012, il a été reçu par la responsable de l'unité des réfugiés statutaires et par l'assistante sociale en charge de son dossier. Alors qu'il avait manifesté son intention d'entreprendre un doctorat en droit, ses interlocutrices lui avaient indiqué qu'il n'aurait dans ce cas plus droit à une aide financière pour sa famille et lui-même. En effet, à teneur de la législation applicable, les étudiants étaient exclus de l'aide financière ordinaire et seule une aide financière exceptionnelle d'une durée maximale de six mois pouvait être accordée, à certaines conditions.

M. A______ avait ainsi pris l'engagement de renoncer à ses études et d'effectuer des recherches d'emploi actives.

9) Le 9 mars 2012, le diplôme de Master of Advanced Studies (LL.m.M.) in International Humanitarian Law lui a été décerné par l'université.

10) Le 19 mars 2012, M. A______ s'est exmatriculé de l'université.

11) En novembre 2012, l'assistante sociale lui a proposé de suivre une mesure d'insertion professionnelle par le biais de l'œuvre suisse d'entraide ouvrière (ci-après : OSEO). Son inscription à la prestation individualisée « BIE-HG », comprenant des cours et des stages, du 10 décembre 2012 au 10 mai 2013, a été confirmée.

12) Au début de l'année 2013, l’OSEO a informé l'assistante sociale de M. A______ que ce dernier ne pouvait pas effectuer de stages dans le cadre de la prestation, en raison du fait qu'il avait entrepris un doctorat en droit.

13) Le 25 février 2013, l'université a confirmé à l'assistante sociale que l'intéressé s'était réimmatriculé au semestre d'automne 2012, visant l'obtention d'un doctorat en droit. Les taxes pour le semestre de printemps n'ayant pas encore été acquittées, son inscription pour ce deuxième semestre n'était toutefois pas encore confirmée.

14) Le 5 mars 2013, M. A______ a été reçu en entretien par son assistante sociale et la responsable de celle-ci.

15) Le même jour, les époux ont à nouveau signé le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général ».

16) Par décision du 7 mars 2013, fondée sur le contenu de l'entretien du 5 mars 2013, l'unité des réfugiés statutaires a mis un terme dès le 1er avril 2013 à l'aide financière accordée, au motif que les conditions d'octroi des prestations de l'hospice n'étaient plus réalisées.

M. A______ avait clairement manifesté son intention de ne pas s'exmatriculer de l'université et de poursuivre son doctorat, malgré les explications fournies par son assistante sociale. Or, à teneur des dispositions légales et réglementaires applicables, les étudiants et personnes en formation n'avaient pas droit à l'aide financière ordinaire, et une aide financière exceptionnelle ne pouvait être accordée que pour une durée limitée pour permettre de surmonter des difficultés passagères et d'achever la formation en cours. S'il appartenait à la collectivité d'apporter une aide aux personnes ayant des difficultés sociales pour leur permettre de satisfaire leurs besoins vitaux et personnels indispensable, ainsi que d'acquérir une formation de base, il ne lui appartenait en revanche pas de financer des études supérieures.

Il avait volontairement omis d'informer l'hospice s'être réimmatriculé à l'université dès le semestre d'automne 2012 pour un doctorat en droit, en dépit de son engagement à y renoncer et à chercher du travail pris lors de l'entretien du 1er mars 2012 à ce sujet, lors duquel il lui avait été clairement indiqué que s'il persistait dans cette voie il ne pourrait plus bénéficier d'une assistance financière et qu'il devrait alors trouver une activité rémunérée lui permettant de subvenir aux besoins de sa famille tout en poursuivant ses études. Ce comportement était contraire à son obligation d'informer immédiatement et spontanément l'hospice de toute modification de sa situation personnelle, ce à quoi il s'était engagé en signant le document idoine.

Lors de l'entretien du 5 mars 2013, il avait annoncé à son assistante sociale interrompre du jour au lendemain la mesure OSEO, sans en avoir informé cette dernière au préalable, au motif qu'il débutait le 6 mars 2013 un stage non rémunéré de plus de trois mois dans le cadre d'une organisation non gouvernementale (ci-après : ONG). Or, il s'était déclaré d'accord de suivre cette mesure pour laquelle tant l'investissement financier que l'implication des collaborateurs l'ayant suivi étaient conséquents. Il ne respectait pas son devoir de collaborer en l'interrompant subitement.

S'il venait à s'exmatriculer de l'université, l'aide financière pouvait continuer à lui être versée, pour autant que les conditions d'octroi soient remplies.

17) En mars 2013, M. A______ a renoncé à poursuivre ses études et a, dès lors, pu percevoir à nouveau une aide financière pour l'ensemble de sa famille.

18) Par décision du 14 février 2014, l'unité des réfugiés statutaires a réclamé à M. A______ la restitution des prestations financières indûment perçues pour la période du 1er octobre 2012 au 28 février 2013, correspondant à celle durant laquelle il avait caché avoir repris ses études, pour un montant total de CHF 18'224.05.

19) Le 10 mars 2014, M. A______ a pris acte de cette décision et a sollicité la remise de la somme de CH 18'224.05 qui lui était réclamée. Le remboursement de ce montant, y compris s'il était partiel et/ou échelonné, allait les mettre lui et sa famille dans une situation financière difficile et risquait d'avoir des incidences majeures sur la vie du groupe familial. Les prestations de l'hospice étaient pour l'heure sa seule source de revenu.

Il n’a pas formé opposition contre dite décision.

20) Par décision du 13 octobre 2014, la direction de l'hospice a rejeté la demande de remise et a confirmé la décision du 14 février 2014.

Sans en avoir informé son assistante sociale et sachant que c'était un motif d'exclusion de l'aide sociale, M. A______ avait repris ses études. Lors de l'entretien du 5 mars 2013, ce n'était que lorsque l'assistante sociale lui avait indiqué être au courant qu'il s'était réimmatriculé à l'université qu'il l'avait admis.

Au surplus, l'intéressé était X_____ et Y______ de l'ONG « Appui aux femmes démunies et enfants marginalisés en République démocratique du Congo », dont Mme B______ était conseillère.

Vu les faits ressortant du dossier, il avait gravement violé son obligation de renseigner, ce qui ne lui permettait pas de se prévaloir de sa bonne foi, première des deux conditions légales cumulatives de la remise. Le montant de CHF 18'224.05 n'étant pas contesté, il n'y avait pas lieu d'y revenir.

En réponse à sa préoccupation de ne pas être en mesure de rembourser la somme réclamée, il était précisé que la restitution allait s'effectuer par prélèvement sur ses prestations, à hauteur d'une mensualité fixée compte tenu de son minimum vital. Dans l'hypothèse où il venait à ne plus avoir droit à des prestations financières avant le remboursement complet de sa dette, il pourrait contacter le service du recouvrement pour négocier la mise en place d'un plan de remboursement prenant en considération une éventuelle situation économique difficile, établie par pièces.

21) Le 14 novembre 2014, M. A______ a recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). À titre principal, il a conclu à ce qu'il soit :

-                 « [établi] qu'il y a eu arbitraire et que la demande de restitution intégrale de la somme réclamée ainsi que la décision de rejet violent le principe de dignité humaine dont le recourant ainsi que son groupe familial bénéficient ;

-                 [déclaré] que le recourant et son groupe familial avaient droit à une aide financière, dont la nature et le montant, pendant toute la durée de cinq mois (1er octobre 2012 au 28 février 2013) [devait être déterminés] ;

-                 [ordonné], de manière alternative, qu'un réexamen soit fait pour déterminer le montant exact à payer, étant entendu que le montant réclamé n'est pas correct au regard du droit actuel en vigueur tel que [démontré], dans l'hypothèse qu'une restitution devrait être établie ;

-                 [demandé] à l'intimé ou [déterminé] le minimum vital tout en indiquant le montant à prélever le cas échéant ;

-                 [dit], si par hypothèse il [devait] y avoir un montant à prélever, quelle rubrique (frais d'entretien, loyer, frais médicaux ou supplément d'intégration) [devait] être affectée et dans quelle proportion. »

À titre subsidiaire, il a conclu à ce qu'il soit exigé « qu'une rectification des faits pertinents soit opérée notamment en ce qui concerne la collaboration du recourant et sa détermination depuis le début dans la recherche active d'un emploi et de son entière coopération avec l'OSEO à l'époque des faits. »

Les indications fournies par l'hospice dans la décision attaquée quant aux modalités du remboursement ne donnaient pas de précisions sur ce que constituait le minimum vital d'après le barème actuel à l'aide sociale dans sa situation, ni sur la quotité du montant qui allait être prélevé. De même, aucune référence n'était faite quant aux rubriques des prestations que ce prélèvement allait affecter. Il craignait que son groupe familial, composé de cinq personnes avec des enfants en bas âge, se trouve privé de ressources ou empêché de satisfaire à ses besoins fondamentaux. Une réduction des prestations risquait ainsi de porter atteinte au principe de la dignité humaine.

Se fondant notamment sur les pièces produites à l'appui de son recours, il détaillait les divers revenus et charges de son ménage, afin de démontrer qu'aucune des rubriques ne pouvait être ponctionnée pour le remboursement. Il devait à tout le moins être précisé quelles rubriques seraient concernées et dans quelles proportions l'intimé allait procéder au prélèvement.

Il invoquait par ailleurs le droit de percevoir une aide financière, qu'elle soit de nature ordinaire ou exceptionnelle, durant la période du 1er octobre 2012 au 28 février 2013, correspondant à celle de son immatriculation à l'université. L'absence d'octroi de prestations à son groupe familial durant cinq mois et la demande de restitution intégrale de la somme de CHF 18'224.05 portaient également atteinte à la dignité humaine. Ce principe primait l'obligation d'informer. Or, l'intimé avait fait preuve d'arbitraire, tant dans la motivation que dans le résultat de ses décisions, en réclamant l'intégralité du montant précité et en refusant de lui accorder la remise totale, dès lors que l'application des bases légales pertinentes violait le principe juridique incontesté de la dignité humaine. Il estimait en outre que la réglementation en matière de prestations d'aide sociale aux personnes en formation, en particulier l'art. 13 al. 5 du règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01), lui donnait explicitement le droit à une aide ordinaire quand bien même il était immatriculé à l'université, dès lors qu'il avait des enfants mineurs à sa charge. Ainsi, il convenait d'écarter sa supposée non-contestation du montant réclamé et d'en retenir l'inexactitude, procédant au calcul de la somme juste ; il estimait pour sa part qu'une somme de CHF 9'500.- devait être déduite du montant réclamé.

Malgré ses demandes en ce sens à l'unité des réfugiés statutaires, il n'avait pas pu consulter son dossier dans le délai de recours, ses courriers étant restés sans réponse.

Enfin, il n'avait jamais refusé un stage proposé par l'OSEO, cette opportunité ne s'étant jamais présentée. Il avait en revanche, grâce à son statut de doctorant et aux instructions et orientations données par les mesures OSEO, obtenu un stage dans une agence de l'Organisation des Nations Unies (ci-après : ONU), non dans une ONG. Cette distinction était importante dans la mesure où il était plus probable dans la première configuration de décrocher un emploi rémunéré à l'issue des trois mois de stage. Il était par conséquent malsain de tirer de son prétendu refus à l'OSEO un indice ou une source de sa mauvaise foi ou de son défaut de collaboration. Les faits devaient être rectifiés, dès lors l'hospice, se fondant sur cet inexact faisceau d'indices, avait mis fin aux prestations accordées, au lieu de réduire ou suspendre l'aide financière, alors que le recourant collaborait et recherchait activement un emploi depuis septembre 2011.

22) Le 19 décembre 2014, la direction de l'hospice a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée.

Le recourant avait pu consulter son dossier à l'unité des réfugiés statutaires en date du 27 novembre 2014.

La décision litigieuse étant une décision de refus de remise d'un montant réclamé à titre de prestations perçues indûment, il convenait de s'en tenir à la seule question devant être tranchée dans le cadre de la présente procédure, soit celle de savoir si les conditions de la remise avaient été correctement appréciées. Or, au stade du recours devant la chambre de céans, M. A______ contestait non seulement la demande de restitution, la qualifiant d'arbitraire, mais également les modalités du remboursement de la dette qui n'avaient pas encore été fixées, faute d'une décision définitive et exécutoire sur la remise. Par ailleurs, une demande de remboursement pouvant être contestée par la voie de l'opposition dans un délai de trente jours dès notification, le recours devait être déclaré irrecevable en tant qu'il contestait cette demande de remboursement.

Au surplus, le recourant était parfaitement informé de son devoir de renseigner, comme en attestait notamment la signature du document « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général ». Or, en cachant à l'intimé le fait qu'il avait repris ses études, il avait volontairement et gravement violé son obligation de renseigner. Il ne pouvait ainsi pas se prévaloir de sa bonne foi pour solliciter la remise.

Si la décision attaquée venait à être confirmée, l'hospice compenserait la dette avec les prestations courantes du recourant et de sa famille en respectant leur minimum vital calculé selon les normes d'insaisissabilité applicables le moment venu. Dès lors que l'intimé versait un montant unique couvrant les besoins de base, les diverses prestations circonstancielles et les suppléments d'intégration, la compensation allait être effectuée avec la globalité de la prestation et non au détriment d'une prestation plutôt que d'une autre. Dans le cas où les bénéficiaires venaient à ne plus percevoir de prestations d'aide financière, le remboursement s'effectuerait compte tenu de leur situation sociale et familiale.

23) Le 22 décembre 2015, un délai a été imparti au recourant pour formuler toute requête complémentaire et/ou exercer son droit à la réplique, dont il n'a pas fait usage.

24) Le 5 juin 2015, le juge délégué a invité l'intimé à se déterminer au sujet de la situation du recourant et de sa famille, eu égard à l'art. 13 al. 5 RIASI et aux éléments invoqués à l'appui de la demande de remise, en particulier la bonne foi.

25) Le 15 juin 2015, la direction de l'hospice a indiqué que l'art. 13 al. 5 RIASI ne s'appliquait qu'aux étudiants et personnes en formation réunissant les conditions des art. 11 al. 4 let. a de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) et 13 al. 1 et 2 RIASI. Ainsi, les personnes susvisées ayant droit à une aide financière exceptionnelle pouvaient prétendre à ce que cette aide prenne la forme d'une aide financière ordinaire si elles entraient dans l'une des catégories visées à l'art. 13 al. 5 RIASI. Cette disposition avait été introduite postérieurement à l'entrée en vigueur du règlement, non pas pour ouvrir le droit à une aide financière à de nouvelles catégories de personnes, mais pour adapter le montant de l'aide aux besoins particuliers de certains étudiants et personnes en formation. Cela découlait d'une interprétation historique et systématique, la jurisprudence ayant rappelé que la volonté du législateur n'était pas de transformer l'aide sociale en aide à la formation, et que l'aide aux étudiants devait conserver un caractère exceptionnel. Dès lors que le recourant avait repris ses études en vue de l'obtention d'un doctorat, il ne remplissait pas les conditions de l'art. 13 al. 1 et 2 RIASI et ne pouvait par conséquent pas se prévaloir de l'art. 13 al. 5 RIASI. Au surplus, la condition de la bonne foi n'était pas réalisée, puisque le recourant savait parfaitement qu'en reprenant ses études il n'avait plus droit à l'aide et s'était malgré tout réimmatriculé à l'université en le cachant délibérément à l'hospice et en mettant tout en œuvre pour laisser croire qu'il n'était plus étudiant.

26) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 52 LIASI ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Dans un premier grief d'ordre formel recourant se plaint de manière implicite d'une violation de son droit d'être entendu par l'intimé, alléguant n'avoir reçu aucune suite à ses demandes de consultation de son dossier auprès de l'unité des réfugiés statutaires dans le délai de recours.

b. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 consid. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.3 et les références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3).

c. En l'espèce, bien qu'il l'ait requis auprès de l'intimé avant l'échéance du délai de recours par-devant la chambre de céans, le recourant n'a pu consulter son dossier que le 27 novembre 2014, soit après le délai de recours. Toutefois, dans la mesure où l'absence de consultation de son dossier au moment du dépôt de son recours ne l'a empêché ni de connaître les motifs de la décision attaquée, ni de se déterminer et de faire valoir largement son point de vue et ses arguments dans son écriture de recours, ni de produire un certain nombre de pièces qu'il avait en sa possession, son droit d'être entendu n'a pas été violé. Ce constat est renforcé par le fait que le recourant n'a pas complété son argumentation après avoir consulté son dossier, ce qu'il avait l'occasion de faire en utilisant par exemple son droit à la réplique.

En tout état, même à considérer que l'intimé n'aurait pas respecté le droit d'être entendu du recourant en ne lui accordant l'accès à son dossier qu'après l'échéance du délai de recours, le vice se trouverait réparé dans le cadre de la procédure par-devant la chambre de céans, dès lors que cette dernière dispose du même pouvoir d'examen que l'intimé et que le recourant a pu faire valoir efficacement devant elle son argumentation, conformément à la jurisprudence constante (ATA/597/2015 du 9 juin 2015 et les références citées).

3) a. Le recourant prend des conclusions et développe une argumentation relatives au principe même de la restitution du montant de CHF 18'224.05, à la quotité de ce montant et à son droit aux prestations d'aide financière au cours de la période de cinq mois durant laquelle il était immatriculé à l'université en vue d'obtenir un doctorat, soit du 1er octobre 2012 au 28 février 2013.

b. Selon l'art. 51 al. 1 LIASI, les décisions peuvent faire l'objet d'une opposition écrite, adressée à la direction de l'intimé dans un délai de trente jours à partir de leur notification.

c. En l'espèce, dans la mesure où le recourant n'a formé opposition dans les délais prescrits ni contre la décision de fin de prestation d'aide financière dès le 1er avril 2013, du 7 mars 2013, ni contre celle de demande de restitution de CHF 18'224.05 pour la période du 1er octobre 2012 au 28 février 2013, du 14 février 2014, ces deux décisions sont entrées en force. Il ressort d'ailleurs du courrier du recourant du 10 mars 2014, aux termes duquel il « [prend] acte de cette [dernière] décision », que sa demande portait exclusivement sur la remise du montant précité, au motif que le remboursement risquait de les mettre lui et sa famille dans une situation difficile.

Partant, le montant de CHF 18'224.05 sera considéré comme dû et non contesté, l'argumentation du recourant qui ne porte pas sur la question de la remise sera écartée et ses conclusions relatives à son droit aux prestations, ainsi qu'au principe et à la quotité de la restitution de cette somme seront déclarées irrecevables.

4) Le cadre du présent litige se limitera par conséquent à l'examen de la réalisation des conditions de la remise du montant dû à l'intimé au titre de prestations perçues indûment, soit CHF 18'224.05.

5) a. À teneur de l'art. 11 al. 4 let. a LIASI, le conseil d’État fixe par règlement les conditions d’une aide financière exceptionnelle, qui peut être inférieure à l'aide financière ordinaire et/ou limitée dans le temps, en faveur des catégories de personnes qui n'ont pas droit aux prestations ordinaires prévues par l'art. 2 let. b, de la loi, notamment les étudiants et les personnes en formation.

b. Selon l'art. 13 al. 1 RIASI, peut être mis au bénéfice d'une aide financière exceptionnelle l'étudiant ou la personne en formation, qui remplit les conditions cumulatives d'être au bénéfice d'allocations ou prêts d'études (let. a) et ne pas faire ménage commun avec son père et/ou sa mère (let. b). L’aide financière doit permettre de surmonter des difficultés passagères et de terminer la formation en cours. Elle est limitée à six mois et peut être reconduite à titre exceptionnel (art. 13 al. 2 RIASI). L'art. 13 al. 5 RIASI précise que sont au bénéfice de l'aide ordinaire les personnes en formation dans une filière professionnelle postobligatoire, de niveau secondaire II (attestation fédérale ou certificat fédéral de capacité) ou tertiaire non universitaire (écoles professionnelles supérieures) (let. a) ou les étudiants ou personnes en formation dont le groupe familial compte un ou plusieurs enfants mineurs à charge (let. b).

6) a. Aux termes de l’art. 36 LIASI, est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1) ; par décision écrite, l'hospice réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de la négligence ou de la faute du bénéficiaire (al. 2) ; le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3).

b. À teneur de l’art. 42 LIASI, le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1) ; dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de trente jours dès la notification de la demande de remboursement ; cette demande de remise est adressée à l'hospice (al. 2).

c. De jurisprudence constante, les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/588/2014 du 29 juillet 2014 et les références citées).

d. Selon un arrêt récent de la chambre de céans, les rapports entre les art. 36 al. 2 et 3 et 42 al. 1 LIASI, qui font pourtant tous deux partie de la section 8 du deuxième titre de la loi, ne sont pas des plus clairs. En effet, s'il est évident que seules des personnes tenues de rembourser l'hospice au sens de l'art. 36 LIASI peuvent obtenir une remise au sens de l'art. 42 LIASI, il semble exclu qu'une personne de mauvaise foi au sens de l'art. 36 al. 3 LIASI puisse être de bonne foi au sens de l'art. 42 al. 1, et l'on peut se demander si l'administré qui commet une faute ou une négligence au sens de l'art. 36 al. 2 LIASI peut encore être de bonne foi. Une réponse totalement négative à cette question n'est toutefois logiquement pas envisageable, sans quoi plus aucune remise ne serait possible, rendant ainsi l'art. 42 LIASI lettre morte contrairement à l'intention du législateur (ATA/167/2014 du 18 mars 2014 consid. 8).

À ce dernier égard, l'exposé des motifs de la LIASI signale que les dispositions de la section 8 du titre II de la loi correspondent à celles résultant de la loi 8’867 entrée en vigueur le 1er juillet 2004 (MGC 2005-2006/I A 270). Pourtant, la disposition de la loi 8’867 concernant les prestations touchées indûment ne faisait pas référence à la notion de bonne foi (art. 23 al. 2 de la loi 8’867 : « est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit, indépendamment de la question d'une faute de la part du bénéficiaire », MGC 2002-2003/IV A 1’688), contrairement à la disposition concernant la remise (art. 24 al. 1 de la loi 8’867, semblable à celui de l'art. 42 LIASI actuel), laquelle était reprise de la législation cantonale sur les chômeurs en fin de droit (MGC 2002-2003/IV A 1’696).

Quoi qu’il en soit, il n'est pas douteux qu'en cas de violation volontaire, grave et manifeste du devoir d'information, l'administré ne saurait être de bonne foi (ATA/588/2014 du 29 juillet 2014 et les références citées).

7) En l'espèce, le recourant et sa famille ont pu bénéficier, à titre exceptionnel, de prestations d'aide financière ordinaire pendant qu'il étudiait à l'université en vue de l'obtention d'une maîtrise. Toutefois, lorsqu'il a manifesté son souhait, dès 2012 après avoir obtenu son diplôme, de poursuivre ses études pour obtenir un doctorat, il a été immédiatement informé par l'intimé de ce qu'il ne pourrait, dans ces conditions, plus percevoir d'aide financière, ni exceptionnelle, ni ordinaire. Le fait qu'il s'engage alors à chercher un emploi, notamment en participant à des mesures OSEO, et qu'il se soit exmatriculé quelques jours après avoir reçu cette information indique qu'il l'avait comprise. Il s'est néanmoins réimmatriculé, quelques mois plus tard, sans en informer l'intimé, alors qu'il s'y était engagé par sa signature du document « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général ». Par ailleurs, dans la mesure où il ne remplissait plus les conditions d'octroi, à titre exceptionnel, d'une aide financière lui permettant d'achever une nouvelle formation au sens de l’art. 13 al. 1 et 2 RIASI, l'art. 13 al. 5 RIASI ne lui était pas applicable. Ainsi, le recourant, qui a manifestement, volontairement et gravement violé son devoir d'information, ne peut pas se prévaloir de sa bonne foi pour solliciter la remise du montant perçu indûment durant les cinq mois au cours desquels il était inscrit à l'université, du 1er octobre 2012 au 28 février 2013.

Par conséquent, bien que la chambre de céans n'entende pas minimiser l'impact du remboursement de CHF 18'224.05 sur le groupe familial, force est d'admettre que, la première des deux conditions cumulatives de la remise n'étant pas réalisée, l'intimé n'a pas violé le droit ni excédé son pouvoir d'appréciation en rejetant la demande de remise, de sorte que la dette devra être intégralement remboursée.

8) Le recourant allègue encore que la décision attaquée ne contient aucune précision quant aux modalités de remboursement de la dette, en particulier s'agissant du calcul du montant du minimum vital dans sa situation, de la nature des prestations qui vont être ponctionnées et de la quotité du montant qui va être prélevé chaque mois sur ses prestations.

L'intimé a néanmoins indiqué, dans sa réponse au recours, que les modalités du remboursement de la dette n'avaient pas encore pu être fixées, faute d'une décision définitive et exécutoire sur la remise. Toutefois, dès lors que la décision attaquée sera confirmée, il ressort des explications de l'hospice que, conformément à sa pratique en la matière, la dette sera compensée avec les prestations courantes allouées au recourant et sa famille en respectant leur minimum vital, calculé selon les normes d'insaisissabilité applicables. Cette compensation sera effectuée avec la globalité des prestations et non au détriment d'une prestation plutôt que d'une autre. Si les bénéficiaires venaient, avant que le remboursement complet ne soit intervenu, à ne plus percevoir de prestations d'aide financière, le remboursement s'effectuerait alors compte tenu de leur situation sociale et familiale, le cas échéant d'une éventuelle situation économique difficile, avec la possibilité de négocier avec le service du recouvrement la mise en place d'un plan de remboursement.

Dans ces circonstances, ce grief sera également écarté.

9) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), ni alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 14 novembre 2014 par Monsieur A______ contre la décision de l'Hospice général du 13 octobre 2014 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

 

communique le présent arrêt à Monsieur A______, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeants : Mme Junod, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :