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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2038/2005

ATA/663/2005 du 11.10.2005 ( VG ) , REJETE

Parties : FRANCIS GOETSCHMANN ARCHITECTE SA ET AUTRES, ABB J. STRYJENSKI & H. MONTI SA, B & S INGENIEURS CONSEILS SA, TECNOSERVICE ENGINEERING SA / DEPARTEMENT MUNICIPAL DE L'AMENAGEMENT,DES CONSTRUCTIONS &VOIRIE
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2038/2005-VG ATA/663/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 11 octobre 2005

dans la cause

ABB-J. STRYJENSKI & H. MONTI S.A.

B. & S. INGÉNIEURS CONSEILS S.A.

FRANCIS GOETSCHMANN ARCHITECTE S.A.

TECHNOSERVICE ENGINEERINGT S.A.
représentés par Me Marc Lorenz, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE


 


1. La Ville de Genève a publié dans la Feuille d’Avis Officielle du lundi 12 décembre 2004 un appel d’offres pour un marché de services, selon la procédure sélective, soumis à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) et à l’accord GATT/OMC concernant un mandat d’architecture, de conseils et d’études techniques dans le cadre du projet de rénovation de la salle de l’Alhambra.

L’article 3.2 de cette publication indiquait qu’à l’issue du premier tour, les candidats sélectionnés devraient fournir toutes les attestations mentionnées à l’article 28 du règlement sur la passation des marchés publics en matière de constructions du 19 novembre 1997 (RPMMC – L 6 05.01).

2. Le consortium formé des sociétés Francis Goetschmann Architecte S.A. à Carouge, de B. & S. Ingénieurs Conseils S.A. à Genève, de Technoservice Engineering S.A. à Marin-Epargnier et de ABB-J. Stryjenski & H. Monti S.A. à Carouge (ci-après : le consortium) a déposé sa candidature. Celui-ci a été informé, le 10 février 2005, qu’il avait été sélectionné avec six autres candidats pour participer à la deuxième phase. Ce pli précisait notamment qu’outre le cahier des charges dûment rempli, le consortium devait fournir, pour chacun des membres de son groupe, les attestations obligatoires selon les articles 28 et 33 alinéa 2 RPMMC.

3. Les soumissions ont été ouvertes le 27 mai 2005 à 9h15. Celle du consortium a été écartée, au motif que les attestations AVS/AI et LPP dataient du 12 avril 2005, alors que l’attestation fiscale datait du 15 avril de la même année. Le dossier a été restitué au représentant du consortium.

Deux autres offres ont été refusées pour avoir présenté des attestations datant, dans un cas, du 29 avril 2005 et, dans l’autre, du 11 mai 2005.

4. Le même jour, à 11h55, le consortium a de nouveau déposé le dossier comprenant des attestations plus récentes.

5. Par courrier du 30 mai 2005, la Ville de Genève a confirmé son refus. Lors du dépôt du dossier, les attestations de Technoservice Engineering S.A.. avaient plus de quinze jours. L’égalité de traitement entre les candidats ne serait pas respectée s’il était possible de produire les attestations après l’ouverture de l’offre publique.

6. Le 9 juin 2005, le consortium a saisi le Tribunal administratif d’un recours. Il conclut préalablement à l’octroi de l’effet suspensif. La décision l’excluant de la procédure constituait un formalisme excessif et violait le principe de la proportionnalité. Au fond, le consortium conclut à ce que la décision litigieuse soit annulée et que son offre soit réintégrée dans la procédure d’adjudication.

7. Le 23 juin 2005, la Ville de Genève conclut au rejet du recours. Les candidats avaient été informés au moins à huit reprises du fait que, pour être valables, les attestations jointes à l’appel d’offres ne devaient pas être antérieures de plus de quinze jours au délai de rentrée des appels d’offres. Elle entendait appliquer strictement les dispositions réglementaires, seules à même de garantir la rigueur, l’égalité de traitement et la transparence entre les candidats.

8. Par décision du 6 juillet 2005, la vice-présidente du Tribunal administratif a refusé de restituer l’effet suspensif au recours. Elle a en outre imparti à la Ville de Genève un délai échéant le 7 août pour se déterminer sur le fond du recours.

9. Le 5 août 2005, la Ville de Genève a persisté dans ses conclusions.

1. a. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

b. En application de l'article 74 LPA, le Tribunal n'ordonnera pas de deuxième échange d'écritures, disposant déjà des éléments nécessaires pour juger la présente affaire.

2. Selon l’article 28 RPMMC, seules les offres accompagnées d’attestations justifiant notamment que la couverture du personnel en matière d’assurances sociales est assurée et que le prestataire s’est acquitté de ses obligations en matière d’impôts à la source, attestations ne devant pas être antérieures de plus de quinze jours de calendrier à la date fixée dans le dépôt de l’offre, sont prises en considération.

L’article 33 alinéa 2 RPMMC dispose que les offres doivent contenir les attestations mentionnées à l'article 28. Ces documents doivent être présentés sous plis séparés pour permettre la vérification des attestations avant l'ouverture des offres.

L’article 34 alinéa 2 du même règlement indique que les offres qui ne sont pas accompagnées des attestations visées à l'article 33, alinéa 2 seront écartées, sans mention de prix.

L’article 35 lettre c RPMMC précise que l’offre d’un soumissionnaire doit en principe être écartée lorsqu’il n'est pas à jour avec le paiement de ses impôts ou ses cotisations sociales, légales et conventionnelles.

3. a. La jurisprudence a tiré de l’article 29 alinéa 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et de l’obligation d’agir de bonne foi à l’égard des justiciables (art. 5 et 9 Cst), le principe de l’interdiction du déni de justice formel qui comprend la prohibition de tout formalisme excessif. Un tel formalisme existe lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique sans raison objective la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.507/2002 du 31 mars 2004, consid.5.2 et références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.109/2004 du 10 mars 2004, consid.2.1 et références citées). C’est en particulier le cas lorsque la violation d’une règle de forme de peu d’importance entraîne une sanction grave et disproportionnée, telle par exemple une décision d’irrecevabilité (ATA/473/2004 du 25 mai 2004 ; ATA/561/2003 du 23 juillet 2003 ; P. MOOR, Droit administratif, vol. II, Berne 2002 , p. 230 et ss n. 2.24.6 et références citées).

b. Le Tribunal administratif a déjà eu l’occasion de juger que les règles de procédure, en matière de marchés publics, permettent de garantir une certaine uniformité des candidatures. Cette procédure se doit d’être rigoureuse, afin d’assurer l’égalité de traitement et la transparence entre les candidats potentiels. Les soumissionnaires sont tenus de se conformer strictement à ces conditions. Ces exigences ne sont pas des règles formelles, exemptes de toute finalité, dont le respect serait une fin en soi (ATA/90/2000 du 8 février 2000).

c. Le fait d’admettre le recours créerait une inégalité de traitement inadmissible entre les recourants et les deux candidats écartés de la procédure pour des motifs strictement identiques.

4. a. Le consortium fonde sa position sur l’ATF 2P.93/2001 du 3 juillet 2001 confirmant l’ATA/260/2001 du 24 avril 2001, ainsi que sur un arrêt du Tribunal administratif de Neuchâtel du 4 septembre 2003, commenté par la doctrine (D. ESSEIVA, Droit de la construction 2002/77).

Toutefois, il résulte de la lecture de l’arrêt précité, rendu par le Tribunal administratif le 24 avril 2001, que le grief relatif au défaut de production en temps utile d’une attestation fiscale concernant le siège principal de la société en question avait été abandonné par le recourant. Le contrôle effectué par le Tribunal fédéral, s’agissant d’un recours de droit public, était limité à l’arbitraire. Quand à l’arrêt neuchâtelois – comme l’ATA/260/2001 – il vise des procédures où l’autorité adjudicatrice a elle-même fait abstraction d’informalités. Il s’agit dès lors de situations différentes du cas d’espèce, où l’autorité intimée a strictement appliqué les dispositions légales existantes.

b. C’est aussi en vain que le recourant invoque une jurisprudence rendue par le Tribunal administratif du canton du Jura. En effet, l’article 21 alinéa 1 de l’ordonnance jurassienne concernant l'adjudication des marchés publics du 19 janvier 1999 (RSJu 174.11 –OAMP/Ju) donne à l’autorité le pouvoir de se procurer et consulter les documents concernée, sans faire de l’absence des documents requis un motifs de refus de l’offre.

5. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de procédure, en CHF 1'500.-, sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 juin 2005 par B. & S. Ingénieurs Conseils S.A., Francis Goetschmann Architecte S.A., Technoservice Engineering S.A., ainsi qu’ABB-J. Stryjenski & H. Monti S.A. contre la décision de la direction de l’organisation urbaine et des constructions de la Ville de Genève du 30 mai 2005 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1'500.- ;

communique le présent arrêt à Me Marc Lorenz, avocat des recourants, ainsi qu'à la direction de l’organisation urbaine et des constructions de la Ville de Genève.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Paychère, Mme Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste  adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :