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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/276/2022

ATA/657/2022 du 23.06.2022 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/276/2022-FORMA ATA/657/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 juin 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre


OFFICE POUR L'ORIENTATION, LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET CONTINUE



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______2000, a suivi auprès du collège et école de commerce (ci-après : CEC) B______ la formation initiale élargie, soit une école à plein temps, en vue de l'obtention du certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) d'employé de commerce, lors des sessions de formation de 2016 à 2019.

2) Il n'a, à la procédure de qualification de juin 2019, pas satisfait aux exigences de réussite, ayant obtenu les notes de 4.1 d'entreprise et de 3.3 d'école.

3) À la rentrée 2019, il a commencé à suivre les cours dans le même CEC. Il a demandé à les interrompre en novembre 2019 et à pouvoir se présenter en candidat libre aux procédures de qualification pour la session d'examens de 2020.

4) M. A______ ne s'étant pas présenté à cette session, il a obtenu la note de 1.00 pour la partie professionnelle, à l'écrit et à l'oral, ramenant sa note d'entreprise à 3.00. Pour la partie école, sa note a été ramenée à 2.9.

5) Il s'est présenté à la session d'examens de 2021, mais n'a pas satisfait aux exigences de réussite. Il a obtenu les notes de 4.5 pour la partie entreprise et de 3.4 pour la partie école, de sorte qu'il ne s'est pas vu délivrer son CFC.

6) Par courrier du 22 août 2021, adressé par pli recommandé le 28 septembre 2021, à l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue (ci-après : OFPC), M. A______ a demandé que son absence soit excusée.

Il était en situation d'échec pour la troisième fois. Il ne s'était pas présenté à la session d'examens de 2020 en raison de problèmes personnels. Dès le début de l'année scolaire 2019-2020, il ne se sentait déjà pas bien et ne voulait plus sortir de chez lui. C'était pour cette raison qu'il avait demandé en novembre 2019 à être candidat libre. Avec le temps, il était tombé en dépression. Il n'en avait parlé à personne et avait hésité à aller chez un médecin ou un psychologue. Toutefois, comme cela n'était pas facile d'en parler, il « avai[t] laissé tomber ».

7) L'OFPC a accusé réception dudit courrier le 20 octobre 2021 et l'a transmis à son unité législation et recours.

Il a été demandé à M. A______ le 18 novembre 2021 de fournir un certificat médical pour justifier son absence à la session d'examens 2020.

8) M. A______ a répondu le 21 novembre 2021 ne pas en avoir, dans la mesure où il n'avait pas consulté de professionnel de la santé, répétant qu'il avait hésité à aller chez un psychologue, « mais comme ça n'[était] pas facile d'en parler », il n'y était finalement pas allé.

9) Il a été invité par courriers des 18 octobre puis 29 novembre 2021 à s'inscrire auprès de CAP Formations afin d'élaborer un projet de formation professionnelle.

10) L'OFPC a, par décision du 13 décembre 2021, rejeté son opposition et dit que la session d'examens 2020 ne pouvait pas être annulée.

Ce n'était qu'après avoir échoué une troisième fois, alors qu'il était en situation d'échec définitif, qu'il avait demandé à être excusé à la session d'examens de 2020. Il n'avait pas pu fournir de certificat médical à l'appui des soucis de santé invoqués. Sa demande d'excuse était donc tardive et son absence ne pouvait pas être excusée. La session de 2020 ne pouvait donc pas être annulée.

11) Dans un courrier du 22 décembre 2021, le directeur général de l'OFPC, se référant à un entretien téléphonique de M. A______ avec l'unité législation et recours, a relevé que ce dernier avait à deux reprises indiqué n'avoir jamais consulté de médecin en 2019 et 2020 et ne pas avoir de certificat médical à présenter. Le fait qu'il indique avoir désormais un tel document ne remettait pas en cause la décision rendue, « principalement » car cette annonce était tardive, soit « un an » après la session d'examens en question. Il pouvait, s'il le souhaitait, former recours contre la décision du 13 décembre 2021 selon les modalités y mentionnées.

12) M. A______ a adressé un courrier à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 25 janvier 2022, dont les termes étaient « J'ai, en septembre 2021, fait une demande pour repasser mon examen de 3ème CFC commerce, j'ai expliqué pourquoi je ne m'[étais] pas présenté aux examens et tout cela avec un certificat médical mais on m'a rejeté cette demande. Je vous envoie tous les détails avec cette lettre ».

Il a joint à ce courrier un certificat médical établi le 10 décembre 2021 par la Docteure C______, spécialiste en médecine interne, selon lequel elle attestait le suivre depuis 2018. Dans le courant de l'année 2019, M. A______ avait présenté des troubles psychologiques de type dépressif, lesquels s'étaient accentués dans le courant de l'année 2020 et avaient eu des répercussions considérables sur ses capacités de travail et de motivation pour l'école. Ayant échoué à trois reprises aux examens de troisième année, il n'était « paraît-il » pas autorisé à les repasser. Au vu des ces circonstances et ayant observé une amélioration psychique de son patient, elle souhaitait que « vous reconsidériez » la possibilité qu'il se présente aux examens finaux lui permettant d'obtenir son CFC.

13) La chambre administrative a fixé à M. A______, le 26 janvier 2022, un délai au 4 février 2022 suivant pour déposer un acte de recours satisfaisant aux conditions de l'art. 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10), sous peine d'irrecevabilité.

14) M. A______ a, le 1er février 2022, expédié un courrier avec pour seul texte « La raison pour laquelle je fais un recours est que l'on m'a demandé d'envoyer un certificat médical, mais après avoir envoyé ce certificat on me refuse tout de même ma demande ».

15) Le 17 mars 2022, l'OFPC a demandé à la chambre administrative de suspendre la procédure afin de pouvoir clarifier certains points en lien avec le certificat médical nouvellement produit, a priori tardivement. Néanmoins, au vu des enjeux pour M. A______, il était d'accord de se pencher sur cette pièce nouvelle et d'investiguer sur les points qu'elle soulevait.

M. A______ a donné son accord pour une suspension de la procédure par un courriel du 22 mars 2022, reçu par la chambre administrative le 25 mars suivant.

L'OFPC a toutefois « après réflexion [ ] annul[é] » sa demande de suspension par lettre du 31 mars 2022.

16) L OFPC a conclu le 25 avril 2022 au maintien de sa décision.

S'il regrettait que M. A______ ait été confronté aux difficultés évoquées dans le certificat médical du 10 décembre 2021, il maintenait qu'il était raisonnable d'admettre que la production de ce document était tardive, puisque toute absence à un examen devait être justifiée dans les meilleurs délais. Il y avait par ailleurs une contradiction entre les dires de M. A______ et ce document, s'agissant d'avoir ou non consulté un médecin ou un psychologue.

Ses deux premiers échecs étaient entrés en force, faute d'avoir été contestés dans les délais.

17) M. A______ n'a pas fait usage de son droit à la réplique.

18) Les parties ont été informées le 3 juin 2022 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c LPA ; art. 31 al. 4 du règlement d'application de la loi sur la formation professionnelle du 17 mars 2008 - RFP - C 2 05.01).

2) a. Selon l'art. 65 al. 1 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions de la personne recourante.

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions de la personne recourante. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est pas en soi un motif d'irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins de la personne recourante. Une requête en annulation d'une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où la personne recourante a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu'elle ne développe pas d'effets juridiques (ATA/721/2020 du 4 août 2020 consid. 2b).

c. En l’espèce, on comprend des courriers du recourant des 21 janvier et 1er février 2022 qu'il demande l'annulation de la décision confirmant qu'il n'est pas autorisé à repasser une troisième fois ses examens en vue de l'obtention d'un CFC d'employé de commerce.

Le recours est donc recevable.

3) Le litige porte sur ce refus.

Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA).

4) La loi sur la formation professionnelle du 13 décembre 2002 (LFPr – RS 412.10) régit notamment, pour tous les secteurs professionnels autres que ceux des hautes écoles, les procédures de qualification, les certificats délivrés et les titres décernés (art. 2 al. 1 let. d LFPr).

La vérification d'une qualification en vue de l'octroi d'un certificat ou d'un titre se fait au moyen de procédures d'examen globales et finales ou de procédures équivalentes (art. 30 al. 2 de l’ordonnance sur la formation professionnelle du 19 novembre 2003 - OFPr - RS 412.101). Les qualifications professionnelles sont attestées par un examen global, par une combinaison d'examens partiels ou par d'autres procédures de qualification reconnues par le secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation (ci-après : SEFRI ; art. 33 OFPr). Le Conseil fédéral fixe les conditions relatives aux procédures de qualification. Il en assure la qualité et la comparabilité. Les critères d'appréciation utilisés doivent être objectifs et transparents, et assurer l'égalité des chances (art. 34 al. 1 LFPr). Le SEFRI règle les conditions d'admission aux procédures de qualification (al. 2 2ème phr.).

Les personnes peuvent répéter les procédures de qualification deux fois au maximum. Les parties réussies ne doivent pas être répétées. Les prescriptions sur la formation peuvent être plus sévères en ce qui concerne l’obligation de répéter un examen (art. 33 al. 1 OFPR).

Reçoit un CFC la personne qui a réussi l'examen de fin d'apprentissage ou qui a suivi avec succès une procédure de qualification équivalente (art. 38 al. 1 LFPr). Le CFC est délivré par les autorités cantonales (al. 2). Ceux-ci veillent à ce que les procédures de qualification aient lieu (art. 40 al. 1 LFPr).

Le Conseil fédéral arrête les dispositions d'exécution, à moins que la LFPr n'en dispose autrement (art. 65 al. 1 LFPr). Il peut déléguer au département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) ou au SEFRI la compétence d'édicter des prescriptions.

5) a. Dans la mesure où elle n'appartient pas à la Confédération, l'exécution de la LFPr incombe aux cantons (art. 66 LFPr).

À Genève, l'art. 39 de la loi sur la formation professionnelle du 15 juin 2007 (LFP - C 2 05) prévoit que les qualifications professionnelles sont attestées par un examen global final, par une combinaison d'examens partiels ou par des procédures équivalentes permettant de vérifier les qualifications acquises en dehors des filières de formation réglementées. Les procédures de qualification sont définies dans les ordonnances sur la formation (ORFO) correspondantes.

b. La personne en formation est tenue de se présenter à l'examen de fin de formation auquel elle est inscrite ainsi qu'aux autres examens obligatoires (art. 42 LFP). La personne candidate à un examen de fin de formation ou à une procédure de qualification équivalente se conforme aux instructions qu'elle reçoit de l'office. Elle a l'obligation de passer toutes les épreuves pour lesquelles elle est convoquée (art. 27 al. 1 RFP). En cas d'empêchement de se présenter pour cause de force majeure à un examen, à une session d'examens de fin de formation ou à une procédure de qualification équivalente, la personne candidate doit immédiatement en aviser l'office et les autorités préposées à l'organisation des examens. Si l'empêchement est dû à la maladie ou à l'accident, elle doit présenter un certificat médical (al. 2). Une absence injustifiée à une épreuve comptant pour les examens de fin de formation ou prévue dans le cadre d'une procédure de qualification équivalente est sanctionnée par l'attribution de la note 1.0 (al. 4).

6) En l'espèce, le recourant ne remet pas en cause le fait qu'il a échoué à trois reprises aux examens en vue de l'obtention d'un CFC, en 2019, 2020 et 2021. Il ne discute pas les résultats obtenus lors des sessions de 2019 et 2021, échecs qui sont entrés en force. Il cherche en revanche à remettre en cause sa situation d'échec aux examens de 2020, où il ne s'est pas présenté, prétendument en raison de problèmes de santé qu'il aurait rencontrés depuis 2019. Il a pour la première fois évoqué de tels problèmes dans son courrier du 22 août 2021 adressé à l'OFPC.

La maladie dont le recourant dit souffrir lui était donc connue avant la session d'examens en cause et force est de relever qu'il n'a à ce moment-là pas indiqué qu'il aurait été empêché de passer ses examens ni n'a présenté le certificat médical requis si l'empêchement était dû à la maladie, tel qu'exigé par l'art. 27 al. 2 RFP.

Il n'a non seulement pas présenté un tel document en cours de session d'examens, voire immédiatement après sa fin ou encore à la réception des notes afférentes à cette deuxième session de 2020, mais a de plus, le 21 novembre 2021, indiqué qu'il n'avait pas de certificat médical, puisqu'il n'avait consulté aucun professionnel de la santé.

Dans ces conditions, le certificat médical du 10 décembre 2021, attestant d'une prise en charge d'une médecin généraliste dans le courant de l'année 2019 pour des troubles psychologiques de type dépressif est produit tardivement. Si le recourant estimait ne pas être apte à se présenter à une session d’examens en 2020 pour des raisons médicales, il lui aurait appartenu, comme déjà dit, de s’en prévaloir avant ou pendant l’examen, voire immédiatement après, soit de formuler une demande d'excuse dûment accompagnée du certificat requis dans une telle situation. Le risque qu’il a pris en ne se présentant pas aux examens de la session 2020 et en attendant les résultats de la dernière tentative en 2021 pour se prévaloir d'un empêchement une année plus tôt lui est partant opposable.

Le recours, mal fondé, sera rejeté.

7) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 janvier 2022 par Monsieur A______ contre la décision de l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue du 13 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue ainsi qu'au secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l'innovation .

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Mc Gregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :