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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/509/2022

ATA/640/2022 du 17.06.2022 ( EXPLOI ) , REJETE

Descripteurs : ÉPIDÉMIE;VIRUS(MALADIE);LOI COVID-19;CATALOGUE DES ACTES LÉGISLATIFS(SUISSE);AIDE FINANCIÈRE;ANNEXE(COMPTE DE PROFITS ET PERTES);BILAN(EN GÉNÉRAL);RESTITUTION(EN GÉNÉRAL)
Normes : LOJ.132; LPA.4; LPA.1.al2; LPA.5; LPA.65; LPA.11.al3; LPA.60; COVID19.12; Ordonnance COVID-19.1.al1; Ordonnance COVID-19.2; Ordonnance COVID-19.3; Ordonnance COVID-19.5.al1; Ordonnance COVID-19.5.al1bis; Ordonnance COVID-19.5a; Ordonnance COVID-19.5b; aLAFE-2021.1; aLAFE-2021.2; aLAFE-2021.3; aLAFE-2021.5; aLAFE-2021.11.al2; aLAFE-2021.8; aRAFE-2021.3; aRAFE-2021.5.al1; aRAFE-2021.12; LAFE-2021.9; LAFE-2021.10.al1; RAFE-2021.3; RAFE-2021.11; RAFE-2021.12; aLAFE.16.al1; LAFE.17.al1
Résumé : Postérieurement à la décision sur réclamation prise par l'intimé, le recourant lui a écrit pour s'y opposer. Le département aurait dû transmettre cette écriture à la chambre administrative de la Cour de justice pour traitement. Sur le fond du litige, le recourant n'aurait pas dû bénéficier de l'aide financière extraordinaire destinée aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de Covid-19 dans la mesure où il ressort de ses comptes annuels audités que son chiffre d'affaires pour l'année en cause est supérieur à ses coûts totaux, hors impôts et taxes. L'intimé est donc en droit de lui demander la restitution de cette aide non nécessaire. Recours rejeté, en tant qu'il est recevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/509/2022-EXPLOI ATA/640/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 juin 2022

1ère section

 

dans la cause

 

A______ SA

contre


DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI



EN FAIT

1) A______ SA (ci-après : A______ ou la société) est une société anonyme inscrite depuis le 12 mars 1912 au registre du commerce de Genève (ci-après : RC), canton dans lequel elle a son siège.

Elle a pour but l'exploitation, la location, la possession d'hôtels, le commerce d'immeubles et toutes opérations se rattachant à l'industrie hôtelière.

2) Le 6 janvier 2021, l'A______ a complété le formulaire de demande « Entreprises cas de rigueur (complément) » relatif à l'aide financière extraordinaire destinée aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de Covid-19 (loi cantonale 12'863 du 29 janvier 2021 [ci-après : aLAFE-2021].

3) Le 18 mars 2021, le département du développement économique, devenu depuis lors le département de l’économie et de l’emploi (ci-après : DDE ou le département), a informé l'A______ que sa demande satisfaisait aux conditions requises pour bénéficier de la mesure d’aide financière extraordinaire, et lui a octroyé un montant de CHF 100'336.-, considérant un chiffre d'affaires de CHF 1'054'212.-, des coûts totaux de CHF 1'154'548.- et des coûts fixes de CHF 1'122'846.30 pour l'année 2020, tels qu'issus des documents transmis.

4) Le 31 mars 2021, l'A______ a demandé au département de « reconsidérer » sa demande dans la mesure où les coûts non couverts étaient en réalité de CHF 765'982.- et non de CHF 100'336.-.

Différents documents ont été transmis, dont un contrat de location conclu le 15 octobre 2015 avec B______ AG (ci-après : B______), ainsi que les comptes annuels 2020 de l'A______ datés du 22 avril 2021.

5) Le 9 juillet 2021, le département a alloué à l'A______, en application de la loi relative aux aides financières extraordinaires de l'État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l’épidémie de Covid-19 pour l'année 2021 (loi cantonale 12'938 du 30 avril 2021), une aide financière de CHF 50'168.-.

6) Par courriel du 16 juillet 2021, l'A______ a transmis au département ses états financiers audités 2020 avec le rapport de l'auditeur, datés du 11 juin 2021.

7) Par décision sur réclamation du 9 août 2021, le département a exigé de l'A______ la restitution des montants octroyés pour un total de CHF 150'504.- (CHF 100'336.- + CHF 50'168.-).

L'analyse des états financiers audités 2020 révélait l'existence d'un bénéfice sur l'exercice considéré, en lieu et place de la perte initialement annoncée. Seuls les états financiers audités – en l'occurrence soumis le 16 juillet 2021 – devaient être retenus au titre de justificatifs pertinents. Or, ceux-ci présentaient des modifications comptables notables, notamment au niveau des coûts totaux 2020.

L'aide financière attribuée par le canton était octroyée sur la base de documents comptables permettant de démontrer le résultat net et les coûts fixes effectifs liés à une activité entrepreneuriale. Elle n'avait, en aucun cas, vocation à combler un éventuel manque à gagner de l'entreprise du type de celui dont il était fait état et qui serait en l'occurrence causé par l'absence d'encaissement de loyers découlant du contrat du 15 octobre 2015 et signé entre l'A______ et B______. De fait, l'absence du revenu considéré devait être couverte par B______, au besoin par le biais des indemnités de cas de rigueur octroyées en sa faveur par le canton de Zoug.

En outre, tout en les considérant comme éminemment louable, les abandons de créances demeuraient attendus de la part d'actionnaires soucieux de garantir la pérennité de l'entreprise.

Sur la base des états financiers 2020 audités et considérant un chiffre d'affaires 2018 et 2019, respectivement de CHF 1'531'612.- et de CHF 2'013'033.- et, pour l'année 2020, un chiffre d'affaires de CHF 1'054'212.- et des coûts totaux de CHF 943'564.- (hors impôts et taxes), force était de constater qu'aucune aide financière ne pouvait au final être octroyée pour l'année 2020, la société étant bénéficiaire à hauteur de CHF 110'648.-.

D'autre part, à la suite de récentes modifications législatives liées à l'extension de la période d'indemnisation au 30 juin 2021, l'A______ avait été invitée à signer un avenant lui ayant permis de bénéficier d'un acompte, correspondant à une projection des données financières 2020 et appliquée au premier semestre 2021. C'était ainsi qu'un montant de CHF 50'168.- avait été versé en sa faveur.

Or, l'évaluation des comptes audités 2020 concluant à l'absence de droit à une aide financière pour l'exercice considéré, et l'acompte versé pour le 1er semestre 2021 ayant été fondé sur une projection de ces mêmes droits 2020, tels que connus avant réception des comptes audités de l'année considérée, le département n'était pas en mesure de confirmer un quelconque droit à l'aide financière octroyée de manière anticipée sur l'exercice 2021.

8) Le 16 août 2021, l'A______ a demandé au département « d'examiner avec bienveillance sa situation et de renoncer au remboursement de CHF 150'504.- ».

Il était correct que l'A______ aurait dû se retourner contre B______ mais, au vu de ses pertes, cette dernière aurait dû déposer le bilan.

Dans la mesure où, en 2020, l'A______ n'avait perçu que CHF 700'000.- au titre de loyer au lieu de CHF 2'100'000.- de la part de B______, l'A______ s'était retrouvé en difficulté, ce qui avait amené la présidente du conseil d'administration à renoncer à sa rémunération (CHF 80'000.-) et au bonus 2019 auquel elle aurait eu droit (CHF 81'500.-). La société de gestion du groupe hôtelier avait également renoncé à sa commission (CHF 300'000.-).

Avec l'aide des CHF 100'336.-, l'A______ avait rendu son bilan légèrement positif par souci des emprunts et des paiements à sa banque.

Si l'A______ avait procédé à des radiations appropriées et avait comptabilisé les ajustements publicitaires, par ailleurs nécessaires sur les prêts avec subordination, il en résulterait une perte massive, qui correspondait au bilan 2020 qui avait été soumis à l'origine.

Ces prêts à B______ étaient menacés depuis l'épidémie de Covid-19, le remboursement ne semblant plus possible. Afin d'améliorer la situation vis-à-vis des banques, ces dépréciations et corrections de valeur avaient été supprimées dans les comptes annuels révisés 2020.

Ces radiations et corrections de valeur étaient fondamentalement nécessaires et la correction de valeur des créances de B______ était également justifiée d'un point de vue commercial et n'avait pas été effectuée pour les raisons mentionnées. Compte tenu de ces corrections, le résultat net ajusté pour l'exercice 2020 était une perte de plus de CHF 3'500'000.- (comme indiqué dans la version des comptes du 22 avril 2021).

Au premier semestre 2021, l'A______ avait obtenu un prêt de CHF 500'000.- du groupe C______ Switzerland AG afin que les intérêts bancaires et l'amortissement actuel de CHF 240'000.- par an à sa banque puissent être payés.

B______ était toujours en grande difficulté financière et si l'A______ devait rembourser le montant de CHF 150'504.-, il s'y trouverait également.

9) Le 11 janvier 2022, le département, constatant que la demande de remboursement de l'aide financière d'un montant de CHF 150'504.- était restée impayée, a émis une facture à l'attention de l'A______, payable dans les trente jours.

10) Le 27 janvier 2022, l'A______ a écrit au département pour clarifier la situation et démontrer son droit aux prestations.

Sa « plainte » du 16 août 2021 n'ayant pas été traitée, il convenait de préciser que l'élément déclencheur de la demande de restitution était la divergence entre le projet de comptes annuels du 22 avril 2021 et ceux finalement révisés du 11 juin 2021.

Pour des raisons de financement bancaire, l'A______ avait été obligée d'utiliser la marge de manœuvre pour faire état d'un résultat positif et ainsi avoir une influence positive sur les négociations en cours avec la banque de financement. Dans cet objectif, l'A______ avait temporairement suspendu les provisions pourtant nécessaires et en accord avec l'organe de révision.

Selon les résultats du projet des comptes annuels 2020 du 22 avril 2021, la perte de l'exercice s'élevait à CHF 3'892'042.- alors que selon les résultats des comptes annuels audités, il existait un résultat positif de CHF 56'668.-.

Une correction de valeur du prêt à B______ de CHF 3'021'142.- avait été abandonnée car il existait des réserves latentes sur l'immeuble de l'A______. L'amortissement initialement nécessaire à l'exploitation, de CHF 675'805.-, avait été réduit de CHF 605'000.- et porté à CHF 70'805.-. Ce montant n'était pas suffisant, raison pour laquelle une reprise de réserves latentes de CHF 400'000.- avait été déclarée dans les notes aux comptes annuels. Les sociétés du groupe et les propriétaires avaient renoncé aux avantages auxquels ils auraient eu droit en vertu du contrat (CHF 328'068.-).

Ces mesures avaient permis d'éviter une perte. D'un point de vue économique, cependant, il y avait effectivement une perte pendant cette période. Il en résultait des frais fixes non couverts qui dépassaient de loin le montant de CHF 150'504.-.

11) Le 10 février 2022, l'A______ a écrit à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

En date du 9 août 2021, le département lui avait demandé de restituer les aides financières extraordinaires d'un montant total de CHF 150'504.- dans la mesure où les comptes annuels 2020 révisés ne faisaient plus apparaître de perte. Or, le 16 août 2021, l'A______ avait déposé « une plainte » dans laquelle il avait expliqué la différence entre le projet soumis et les comptes annuels révisés pour 2020.

Malgré son courrier du 16 août 2021, le département avait envoyé une facture pour la restitution du montant réclamé en date du 11 janvier 2022.

L'A______ n'était pas d'accord « avec la procédure et mainten[ait] [sa] plainte du 16 août 2022 (recte : 2021) ». Il avait en outre complété sa réclamation en date du 27 janvier 2022.

L'A______ avait été informé par courrier du 9 février 2022 que la chambre de céans était compétente pour traiter la problématique. Il remettait ainsi en annexe son courrier du 27 janvier 2022 adressé au département avec les annexes.

Le courrier du 9 février 2022 ne figure pas au dossier.

12) Le 17 février 2022, la juge déléguée a transmis au département, pour information en l'état, copie de l'écriture de l'A______ et lui a demandé de lui indiquer s’il avait réagi au courrier du 16 août 2021 de l'A______.

13) Le 24 février 2022, le département a confirmé à la chambre administrative qu'une réponse au courrier de l'A______ du 16 août 2021 avait été apportée, en date du 6 octobre 2021, courrier qui reprenait et confirmait la teneur de sa décision sur réclamation du 9 août 2021, laquelle comprenait l'indication de la voie de recours.

Le département a joint à son écriture son courrier du 6 octobre 2021.

Selon ce courrier, l'analyse des états financiers 2020 de l'A______ révélait l'existence d'un bénéfice sur l'exercice considéré, en lieu et place de la perte initialement annoncée dans les comptes annuels du 22 avril 2021. Or, seuls les états financiers audités, à savoir ceux datés du 11 juin 2021, devaient être retenus, lesquels présentaient des modifications comptables notables, notamment au niveau des coûts totaux 2020.

Comme expliqué dans la décision du 9 août 2021, l'évaluation des comptes audités 2020 concluant à l'absence de droit à une aide financière pour l'exercice considéré et l'acompte versé pour le premier semestre 2021 ayant été fondé sur une projection de ces mêmes droits 2020, tels que connus avant réception des comptes audités de l'année considérée, le montant de l'acompte de CHF 50'168.- devait être également restitué.

Le département ne pouvait ainsi entrer en matière sur le traitement de la demande d'indemnité « cas de rigueur » déposée le 6 août 2021 (sic).

En conséquence, la teneur de la décision en restitution du 9 août 2021 était réitérée et le montant total octroyé à l'A______, soit CHF 150'504.- (CHF 100'336.- + CHF 50'168.-), était à verser en faveur de la trésorerie générale de l'État de Genève.

14) Le 10 mars 2022, l'A______ a expliqué avoir écrit au département le 16 août 2021 l'informant ne pas être d'accord avec la décision du 9 août 2021 et demandant qu'il soit renoncé au remboursement du montant total de CHF 150'504.-.

En date du 6 octobre 2021, le département avait pris position sur sa demande. Toutefois ce courrier de réponse ne contenait pas d'indication selon laquelle l'A______ aurait dû adresser ses « réclamation » ou recours à la chambre administrative. En outre, son « recours » n'avait jamais été transmis à la chambre de céans, alors que le département aurait dû le faire.

Il était étrange que le département fasse, pour la première fois, référence à la possibilité d'interjeter recours dans son courrier du 9 août 2021. Une telle façon de procéder ne pouvait pas être admise, ce d'autant moins qu'il agissait en personne et qu'il n'avait pas conscience de l'erreur.

Il demandait ainsi à la chambre administrative d'examiner sa réclamation avec bienveillance et de renoncer à exiger le remboursement des sommes versées à hauteur de CHF 150'504.-.

15) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) La compétence des autorités est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). La chambre administrative examine d’office sa compétence (art. 1 al. 2, art. 6 al. 1 let. c et art. 11 al. 2 LPA ; ATA/252/2020 du 3 mars 2020 consid. 1).

2) a. La compétence de la chambre administrative est définie à l'art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05). Elle est, sous réserve des compétences de la chambre constitutionnelle et de la chambre des assurances sociales, l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 LOJ). Selon l'art. 132 al. 2 LOJ, le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e, et 57 LPA. Sont réservées les exceptions prévues par la loi.

b. En vertu de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 1 LPA, les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondés sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). Lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA).

c. Sont réputées autorités au sens de la LPA les autorités administratives ainsi que les juridictions administratives (art. 1 al. 2 LPA). L'art. 5 LPA énumère les autorités administratives dont les décisions sont susceptibles de recours. Parmi celles-ci figurent les départements (let. c).

d. Selon l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (al. 2).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/595/2020 du 16 juin 2020 consid. 2b). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/133/2022 du 8 février 2022 consid. 2b).

e. Selon l'art. 11 al. 3 LPA, si l'autorité décline sa compétence, elle transmet d'office l'affaire à l'autorité compétente et en avise les parties.

3) En l'espèce, la recourante a adressé un courrier le 16 août 2021 au département lui demandant « d'examiner avec bienveillance sa situation et de renoncer au remboursement de CHF 150'504.- ». Dans ce courrier, elle a fourni des explications contestant la position du département par rapport à sa décision sur réclamation du 9 août 2021.

La recourante, qui n'a jamais été assistée d'un avocat tout au long des échanges avec le département, n'a pas pris de conclusions formelles en annulation de la décision sur réclamation du 9 août 2021. On comprend toutefois de son écriture du 16 août 2021 qu'elle conteste la restitution de l'aide financière perçue dans le cadre des aides financières extraordinaires de l'État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l’épidémie de Covid-19. Son courrier contient également les motifs devant conduire, selon elle, à ce qu'il soit renoncé à la restitution du montant total de CHF 150'504.-.

Au vu des éléments contenus dans cette écriture et en application de l'art. 11 al. 3 LPA, il appartenait au département de transmettre ce courrier à la chambre de céans pour traitement, ce qu'il n'a pas fait.

Cette informalité commise par le département ne saurait porter préjudice à la recourante, de sorte qu'il convient de traiter son écriture du 16 août 2021 comme recours contre la décision sur réclamation du 9 août 2021 et d'entrer en matière, étant relevé que l'intéressé a agi dans le délai de trente jours (art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b LPA).

4) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision sur réclamation du département du 9 août 2021 ordonnant la restitution d'un montant total de CHF 150'504 (CHF 100'336.- + CHF 50'168.-) dévolu au titre d'aide financière extraordinaire dans le contexte de la crise du Covid-19.

5) Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l’espèce.

Il n’en résulte toutefois pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble (ATA/505/2022 du 16 mai 2022 consid. 5). Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 5.1).

6) a. Le 25 septembre 2020, l’Assemblée fédérale a adopté la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de Covid-19 (loi Covid-19 - RS 818.102) qui prévoit, à son art. 12, des mesures destinées aux entreprises.

Dans sa teneur en vigueur le 18 mars 2021, l'al. 1 de cet article prévoit qu'à la demande d’un ou de plusieurs cantons, la Confédération peut soutenir les mesures de ces cantons pour les cas de rigueur destinées aux entreprises particulièrement touchées par les conséquences de l’épidémie de Covid-19 en raison de la nature même de leur activité économique, en particulier les entreprises actives dans la chaîne de création de valeur du secteur événementiel, les forains, les prestataires du secteur des voyages, de la restauration et de l’hôtellerie ainsi que les entreprises touristiques pour autant que les cantons participent à leur financement à hauteur de 50 % aux mesures pour les cas de rigueur financées par la première partie des aides financières, qui s’élève à CHF 400'000'000.- (let. a), à hauteur de 20 % aux mesures pour les cas de rigueur financées par la deuxième partie des aides financières, qui s’élève à CHF 600'000'000.- (let. b), à hauteur de 33 % aux mesures pour les cas de rigueur financées par la troisième partie des aides financières, qui s’élève à CHF 750'000'000.-. Il y a cas de rigueur au sens de l’al. 1 si le chiffre d’affaires annuel de l’entreprise est inférieur à 60 % de la moyenne pluriannuelle. La situation patrimoniale et la dotation en capital globales doivent être prises en considération, ainsi que la part des coûts fixes non couverts (al. 1bis). Pour pouvoir bénéficier d’une mesure pour les cas de rigueur, l’entreprise soutenue ne doit pas, pour l’exercice concerné, distribuer de dividendes ou de tantièmes ou décider de leur distribution, ni rembourser d’apports en capital ou décider de leur remboursement (al. 1ter). La participation réduite visée à l’al. 1 let. b, ne s’applique que si le canton concerné a épuisé sa part de la première partie des aides financières visée à l’al. 1 let. a. La participation visée à l’al. 1 let. c, ne s’applique que si le canton concerné a épuisé sa part de la deuxième partie des aides financières visée à l’al. 1 let. b (al. 2). Le soutien de la Confédération n’est accordé que si les entreprises étaient rentables ou viables avant l’apparition du Covid-19 et à condition qu’elles n’aient pas droit à d’autres aides financières de la Confédération au titre du Covid-19. Ces dernières n’incluent pas les indemnités en cas de réduction de l’horaire de travail, les allocations pour perte de gain et les crédits visés par l’ordonnance du 25 mars 2020 sur les cautionnements solidaires liés au Covid-19 et par la loi du 18 décembre 2020 sur les cautionnements solidaires liés au Covid-19 (al. 2bis). Si les activités d’une entreprise sont clairement délimitées, différentes aides doivent pouvoir être versées, pour autant que ces aides ne se recoupent pas (al. 2ter). Pour les cas de rigueur, elle peut octroyer des contributions à fonds perdu aux entreprises concernées (al. 3). Le Conseil fédéral règle les détails dans une ordonnance ; il prend en considération les entreprises qui ont réalisé en moyenne un chiffre d’affaires de CHF 50'000.- au moins au cours des années 2018 et 2019 (al. 4). Le Conseil fédéral peut assouplir les conditions d’éligibilité fixées dans le présent article pour les entreprises qui, en raison des mesures fédérales ou cantonales de lutte contre l’épidémie de Covid-19, doivent fermer ou restreindre considérablement leur activité pendant plusieurs semaines à partir du 1er novembre 2020 (al. 5). Pour compléter les aides financières visées à l’al. 1, la Confédération peut verser aux cantons particulièrement touchés des contributions supplémentaires à hauteur de CHF 750'000'000.- au plus en faveur des mesures cantonales pour les cas de rigueur, sans que les cantons doivent participer financièrement à ces contributions supplémentaires. Le Conseil fédéral règle les détails (al. 6).

b. Le 25 novembre 2020, le Conseil fédéral a adopté l’ordonnance concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l’épidémie de Covid-19 (ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 ; ci-après : l'ordonnance Covid-19 - RS 951.262), modifiée à plusieurs reprises.

Selon l'art. 1 al. 1 de l'ordonnance Covid-19, dans sa version applicable, en l'occurrence jusqu'au 31 mars 2021, la Confédération participe aux coûts et aux pertes que les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises occasionnent à un canton.

L'art. 2 de l'ordonnance Covid-19 précise que l’entreprise a la forme juridique d’une entreprise individuelle, d’une société de personnes ou d’une personne morale ayant son siège en Suisse (al. 1) et elle a un numéro d’identification des entreprises (ci-après : IDE ; al. 2).

Au nombre des exigences pour bénéficier du soutien financier, l’entreprise doit établir notamment qu’elle s’est inscrite au RC avant le 1er mars 2020, ou, à défaut d’inscription au RC, a été créée avant le 1er mars 2020 (art. 3 al. 1 let. a), et a réalisé en 2018 et en 2019 un chiffre d'affaires moyen d’au moins CHF 50'000.- (art. 3 al. 1 let. b). Si elle a commencé son activité commerciale le 1er janvier 2020 ou plus tard, ou si elle a été créée en 2018 ou en 2019 et présente ainsi un exercice d’une durée supérieure à une année civile, le chiffre d'affaires moyen est celui qui a été réalisé entre le 1er janvier 2018 et le 29 février 2020, calculé sur douze mois (art. 3 al. 2).

L’entreprise doit également établir que son chiffre d'affaires 2020 est inférieur à 60 % du chiffre d'affaires moyen des exercices 2018 et 2019 en raison des mesures ordonnées par les autorités aux fins de la lutte contre l’épidémie (art. 5 al. 1).

En cas de recul du chiffre d'affaires enregistré entre janvier 2021 et juin 2021 en raison des mesures ordonnées par les autorités aux fins de la lutte contre l’épidémie de Covid-19, l’entreprise peut calculer le recul de son chiffre d'affaires sur la base du chiffre d'affaires des douze derniers mois au lieu du chiffre d'affaires de l’exercice 2020 (art. 5 al. 1bis).

L’entreprise doit confirmer au canton uniquement que le recul du chiffre d'affaires entraîne d’importants coûts fixes non couverts (art. 5a).

Les entreprises qui, en raison des mesures prises par la Confédération ou les cantons pour endiguer l’épidémie de Covid-19, doivent cesser leur activité pour au moins quarante jours entre le 1er novembre 2020 et le 30 juin 2021 ne sont pas tenues de remplir les conditions d’octroi d’un soutien financier visées aux art. 4 al. 1 let. b, 5 al. 1 et 1bis et 5a (art. 5b).

Dès le 1er avril 2021, l’art. 3 a été refondu. Selon l’al. 1 let. a l’entreprise doit s’être inscrite au RC avant le 1er octobre 2020, ou, à défaut d’inscription au RC, avoir été créée avant le 1er octobre 2020. Selon l’al. 2 par chiffre d'affaires annuel moyen des exercices 2018 et 2019, on entend (a) pour une entreprise qui a été créée entre le 31 décembre 2017 et le 29 février 2020 (1) le chiffre d'affaires moyen qui a été réalisé entre la création de l’entreprise et le 29 février 2020, calculé sur douze mois, ou (2) le chiffre d'affaires moyen qui a été réalisé entre la création de l’entreprise et le 31 décembre 2020, calculé sur douze mois, et (b) pour une entreprise qui a été créée entre le 1er mars 2020 et le 30 septembre 2020, le chiffre d'affaires moyen qui a été réalisé entre la création de l’entreprise et le 31 décembre 2020, calculé sur douze mois.

c. Le 29 janvier 2021, le Grand Conseil a adopté l'aLAFE-2021.

La loi a pour but de limiter les conséquences économiques de la lutte contre l'épidémie de coronavirus (Covid-19) pour les entreprises sises dans le canton de Genève conformément à la loi Covid-19 et à l'ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 (art. 1 al. 1), en atténuant les pertes subies par les entreprises dont les activités avaient été interdites ou déduites en raison même de leur nature entre le 1er janvier et le 31 décembre 2021 (art. 1 al. 2), et en soutenant par des aides cantonales certaines entreprises ne remplissant pas les critères de l'ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 en raison d’une perte de chiffre d’affaire insuffisante et qui ne couvrent pas leurs coûts fixes dans les limites prévues à l’art. 12 (art. 1 al. 3).

Les aides financières consistent en une participation de l’État aux coûts fixes non couverts de certaines entreprises (art. 2 al. 1). Une éventuelle subvention monétaire générale d’une collectivité publique est déduite (art. 2 al. 2), mais non la réduction de l’horaire du travail (ci-après : RHT) ou les allocations pour perte de gain (ci-après : APG) ou encore les crédits prévus par la loi fédérale (art. 2 al. 3). Les aides financières octroyées en application des lois 12'783, 12'812, 12'824, 12'825, 12'826 et 12'833 demeurent acquises s’agissant du calcul des montants alloués pour l’année 2020 (art. 2 al. 4). Les versements déjà effectués en application des lois 12'802, 12'803, 12'807, 12'808, 12'809, 12'810 et 12'813 pour la période du 26 septembre 2020 au 31 décembre 2021 sont déduits de l'aide apportée dans le cadre de la loi (art. 2 al. 5). Les contributions exceptionnelles sous forme de prêt versées par la Fondation d'aide aux entreprises ne sont pas déduites (art. 2 al. 6). L'aide financière n'est accordée que si les entreprises satisfont les critères d'éligibilité définis par la loi (art. 2 al. 7).

Peuvent prétendre à une aide les entreprises qui, en raison des mesures prises par la Confédération ou le canton pour endiguer l'épidémie de Covid-19, doivent cesser totalement ou partiellement leur activité selon les modalités précisées dans le règlement d'application (art. 3 al. 1 let. a), ou dont le chiffre d'affaires a subi une baisse substantielle selon les dispositions de l'ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 (art. 3 al. 1 let. b) ou dont la baisse de chiffre d'affaires enregistrée se situe entre 25 % et 40 % et qui ne couvrent pas leurs coûts fixes (art. 3 al. 1 let. c). L'aide financière n'est pas octroyée aux entreprises qui ont bénéficié d'un ou de plusieurs soutiens financiers dans le cadre des mesures prises par les autorités fédérales et cantonales pour lutter contre les effets de la pandémie dans les domaines de la culture, du sport, des transports publics ou des médias (art. 3 al. 2). L'aide financière demandée en raison de l'al. 1 let. b est réduite de l'aide financière éventuelle apportée durant la même période suite à une demande fondée sur l'al. 1 let. a (art. 3 al. 3).

L'aide financière extraordinaire consiste en une participation à fonds perdu de l'État de Genève destinée à couvrir les coûts fixes de l'entreprise (art. 5 al. 1). Sont considérés comme coûts fixes les charges fixes incompressibles liées à l'activité, indispensables au maintien de cette dernière, notamment le loyer, les fluides, les assurances et les contrats de location liés à l'activité commerciale (art. 5 al. 2). La liste est établie par le règlement (art. 5 al. 3).

L’indemnité est versée aux entreprises dont l’activité est interdite par décision des autorités fédérales ou cantonales (art. 7 et 8), dont le chiffre d'affaires est inférieur à 60 % du chiffre d'affaires antérieur (art. 9 à 11), des aides pouvant être octroyées aux entreprises dont la baisse du chiffre d'affaires se situe entre 25 % et 40 % du chiffre d'affaires moyen antérieur (art. 12).

L’indemnité n’est accordée que durant la période pendant laquelle l'activité est totalement ou partiellement interdite suite à une décision des autorités fédérales ou cantonales (art. 8 al. 1). Son montant déterminé par voie réglementaire, calculé au prorata du nombre de jours pendant lesquels l'activité est totalement ou partiellement interdite (art. 8 al. 2) et est en principe au plus de CHF 750'000.- ou 20 % du chiffre d'affaires (art. 8 al. 3, 11 al. 2 et 12 al. 2).

d. Le 3 février 2021, le Conseil d’État a adopté le règlement d’application de l’aLAFE-2021 (ci-après : aRAFE-2021).

Sont bénéficiaires de l’aide les entreprises qui répondent aux exigences de l’ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 définies dans ses sections 1 et 2 (art. 3 al. 1). Les entreprises qui ne répondent pas aux exigences relatives au recul du chiffre d’affaires définies à l’art. 5 de cette ordonnance, et dont la baisse de chiffre d’affaires enregistrée se situe entre 25 % et 40 %, peuvent bénéficier de l’indemnisation cantonale, conformément à l’art. 14 de la loi, pour autant qu’elles répondent aux autres exigences définies dans les sections 1 et 2 de l’ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 (art. 3 al. 2).

Selon l’art. 5 al. 1, les coûts fixes comprennent le loyer et les charges locatives (let. a), les fluides (let. b), les abonnements et engagements fixes (let. c), les assurances liées à l’activité commerciale (let. d), les frais administratifs (let. e), les frais de véhicules (let. f), les charges d’amortissement (let. g), les charges financières (let. h), les charges de leasing (let. i) et les charges sociales patronales sur une base forfaitaire (let. j).

Le montant de l'indemnité correspond à la différence entre les coûts totaux, hors impôts et taxes, et le chiffre d’affaires de l'entreprise en 2020 (art. 12).

e. Le 30 avril 2021, le Grand Conseil a adopté la loi 12'938 relative aux aides financières extraordinaires de l’État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l’épidémie de coronavirus pour l’année 2021 (ci-après : LAFE-2021), qui a abrogé l’aLAFE-2021 (art. 23), tout en en reprenant le dispositif pour l’essentiel.

Selon l’art. 9 al. 1 LAFE-2021, l’État de Genève peut octroyer sans participation financière de la Confédération des aides en faveur des entreprises : (a) dont la baisse de chiffre d’affaires enregistrée se situe entre 25 % et 40 % du chiffre d’affaires moyen des exercices 2018 et 2019, ou (b) créées depuis mars 2020 ou créées avant mars 2020 mais dont les activités commerciales n’ont débuté qu’après le 1er mars 2020 ; dans ce cas, l’indemnisation est calculée sur la base du chiffre d’affaires moyen de l’entreprise pendant les mois durant lesquels elle a pu mener son activité commerciale.

L’indemnisation cantonale comble la différence entre l’éventuelle indemnisation calculée selon les critères de l’ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 et l’indemnité calculée selon les critères de l’al. 1 (art. 9 al. 2). Les critères permettant de déterminer le début de l’activité commerciale sont déterminés par voie réglementaire (art. 9 al. 3).

L’indemnité maximale par entreprise et pour la période du 1er janvier 2020 au 30 juin 2021 est déterminée par voie réglementaire, mais elle ne dépasse pas la somme totale de CHF 1'000'000.- et 20 % du chiffre d’affaires comme prévu à l’art. 8a de l’ordonnance Covid-19 cas de rigueur (art. 10 al. 1).

f. Le 5 mai 2021, le Conseil d’État a adopté le règlement d'application de la loi 12'938 relative aux aides financières extraordinaires de l'État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus, pour l'année 2021 (ci-après : RAFE-2021).

Selon l’art. 3 al. 3, sont également bénéficiaires de l’aide considérée, pour autant qu'elles répondent aux autres exigences définies dans les sections 1 et 2 de l'ordonnance Covid-19 cas de rigueur, les entreprises : (a) qui ne répondent pas aux exigences des art. 3 al. 1 let. b et 5 de l’ordonnance Covid-19 cas de rigueur en vertu des modalités de détermination du chiffre d’affaires annuel moyen visées par l’art. 3 de ladite ordonnance, mais y répondent en vertu des modalités de l’art. 9 al. 1 let. b, de la loi, et (b) qui ont été créées depuis mars 2020, ou avant mars 2020, mais dont les activités commerciales n’ont débuté qu’après le 1er mars 2020.

Peuvent prétendre à une aide financière, les entreprises qui démontrent que leur chiffre d’affaires, généré sur une période de douze mois comprise entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2021, est inférieur à 60 % du chiffre d’affaires moyen déterminé selon les modalités prévues par l’art. 3 de l’ordonnance Covid-19 cas de rigueur (art. 11).

Selon l'art. 12, le montant de l'indemnité pour l’année 2020 correspond à la différence entre les coûts totaux, hors impôts et taxes, et le chiffre d’affaires de l'entreprise en 2020 (al. 1). Le montant de l’indemnité pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021 est déterminé sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise au 30 juin 2021, et correspond à la différence entre les coûts totaux, hors impôts et taxes, et le chiffre d’affaires de l'entreprise sur cette même période (al. 2). Pour toute demande déposée jusqu’au 30 juin 2021 pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021, le montant de l'indemnité équivaut à 50% du montant obtenu en application de l’al. 1, calculé sur douze mois (taux forfaitaire) (al. 3). L’indemnité octroyée en application de l’al. 3 est versée à titre d’acompte, selon les modalités prévues par convention conclue en vertu de l’art. 22. Le montant définitif est déterminé a posteriori sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise bénéficiaire au 30 juin 2021, selon les modalités prévues à l’al. 2 (al. 4). L'entreprise bénéficiaire d’une indemnité octroyée à titre d’acompte au sens de l’al. 3 est tenu de remettre au département les états financiers visés à l’al. 4 au plus tard le 31 octobre 2021 (al. 5). Le montant de l’indemnité pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2021 est déterminé sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise au 31 décembre 2021, et correspond à la différence entre les coûts totaux, hors impôts et taxes, et le chiffre d’affaires de l'entreprise sur cette même période (al. 6).

g. La participation financière indûment perçue doit être restituée sur décision du département (art. 16 al. 1 aLAFE-2021 et 17 al. 1 LAFE-2021).

7) En l'espèce, il ressort de la décision attaquée que la recourante a réalisé un chiffre d'affaires 2018 et 2019, de respectivement CHF 1'531'612.- et CHF 2'013'033.-.

Selon les comptes annuels 2020, datés du 22 avril 2021, le chiffre d'affaires de la recourante s'élevait à CHF 2'366'586.- et les coûts totaux à CHF 6'210'148.- (hors impôts et taxes).

Toutefois, selon les comptes annuels 2020 audités et datés du 11 juin 2021, il s'avère que le chiffre d'affaires de la recourante s'est élevé à CHF 1'054'212.-, alors que les coûts totaux se montaient à CHF 943'564.- (hors impôts et taxes). Elle a ainsi dégagé un bénéfice de CHF 110'648.-.

Au vu des comptes audités, force est de constater que la recourante ne remplit pas les conditions pour être éligible à une aide financière prévue par l'aLAFE-2021 (art. 3 al. 1 let. c aLAFE-2021 et 12 aRAFE-2021) ou par la LAFE-2021 (art. 4 al. 1 let. c LAFE-2021 et 12 RAFE-2021), puisque malgré la baisse de son chiffre d'affaires 2020 de 40,51 %, celui-ci couvre ses coûts fixes. Le même raisonnement vaut pour l'acompte pour le 1er semestre 2021 dont elle a bénéficié en date du 9 juillet 2021.

Comme le relève à juste titre le département dans la décision attaquée, les différents abandons de créances qu'elle a accordés et les raisons pour lesquelles ceux-ci ont été effectués, notamment en vue d'avoir une influence positive sur les négociations en cours avec sa banque de financement, ne sont pas pertinents. Ceci vaut également pour le manque à gagner par rapport à ses relations contractuelles avec B______.

En effet, outre le fait que l'aide financière extraordinaire vise à atténuer une perte (art. 1 al. 2 aLAFE-2021 et 1 al. 2 LAFE-2021), l'examen du droit à l'aide financière extraordinaire destinée aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de Covid-19 s'effectue à l'aune des comptes audités présentés par l'intéressé, lesquels indiquent, en l'espèce, un bénéfice et non une perte.

Au vu de ces éléments, dans la mesure où le chiffre d'affaires 2020 (CHF 1'054'212.-) est supérieur aux coûts totaux (hors impôts et taxes) (CHF 943'564.-), le département était en droit de réclamer à la recourante le remboursement du montant total de CHF 150'504.- (CHF 100'336.- + CHF 50'168.-) perçu indûment en application des art. 16 al. 1 aLAFE-2021 et 17 al. 1 LAFE-2021.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

8) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu'il est recevable, le recours interjeté le 16 août 2021 par l'A______ SA contre la décision sur opposition du département de l’économie et de l’emploi du 9 août 2021 ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de l'A______ SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à l'A______ SA, ainsi qu'au département de l'économie et de l'emploi.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Marinheiro

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :