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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3937/2008

ATA/622/2008 du 10.12.2008 ( VG ) , REFUSE

Parties : SOTRAG SA ET AUTRES (CONSORTIUM EX UAG), PIASO SA, GUEX SA, EBIOX SA, SPIE FONDATIONS / VILLE DE GENEVE - DEPARTEMENT MUNICIPAL DE L'AMENAGEMENT, MARTI S.A. GENEVE, SERVICES INDUSTRIELS DE GENEVE, DEPT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3937/2008-VG ATA/622/2008

DÉCISION

DU

VICE-PRÉSIDENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 11 décembre 2008

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

CONSORTIUM EX UAG, représenté par GUEX S.A.

formé d'

 

EBIOX S.A.

GUEX S.A.

PIASO S.A.

SOTRAG S.A.

SPIE FONDATIONS

toutes assistées par Me Christophe Maillard, avocat

 

contre

 

VILLE DE GENÈVE - DÉPARTEMENT MUNICIPAL DE L'AMÉNAGEMENT

 

et

 

ÉTAT DE GENÈVE, soit pour lui le DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION, appelé en cause,

 

 

et

 

LES SERVICES INDUSTRIELS DE GENÈVE, appelés en cause,

tous trois représentés par la Ville de Genève, pilote

 

 

et

 

 

MARTI S.A., appelée en cause

représentée par Me François Bellanger, avocat

 

 



1. Dans la Feuille d’Avis Officielle (ci-après : FAO) du 28 avril 2008, la Ville de Genève, agissant comme pilote, en son nom mais également en celui de l'Etat de Genève, soit pour lui le département des constructions et des technologies de l’information (ci-après : DCTI), et des Services Industriels de Genève (ci-après : SIG), a lancé un appel d’offres en procédure ouverte, "soumis OMC", pour un marché de construction portant sur l’assainissement du site contaminé de l’ancienne usine à gaz de la Coulouvrenière, le montant estimatif des travaux s'élevant à CHF 41’000’000.- HT ;

2. Le 11 juillet 2008, six entreprises ou groupes de sociétés (Envisan, Ebiox S.A. -Guex S.A. - Piaso S.A. - Sotrag S.A. - Spie Fondations constituant le Consortium Ex UAG [ci-après : le consortium], Kibag, Marti SA, Scrasa et Sita) ont déposé des offres, trois soumissionnaires (le consortium, Marti SA et Scrasa) ayant de plus présenté des variantes.

3. Toutes ces offres ont été analysées par Gasico, soit le groupement pour l'assainissement du site contaminé de la Coulouvrenière, pour adresse CSD Ingénieurs Conseils SA à Carouge, au terme d'un rapport daté du 7 octobre 2008, lequel a été validé par le comité d'évaluation du projet, composé de représentants des autorités adjudicatrices.

4. Au terme de cet examen, Marti SA - pour une variante - s'est avérée moins-disante et a été classée en première position, le critère du prix ayant un taux de pondération de 40 %.

Après corrections, les montants des offres se présentaient ainsi  :

 

Nom du soumissionnaire

 

Montant ouverture

(CHF TTC)

 

Montant

corrigé

(CHF TTC)

Montant

variante

corrigé

(CHF TTC)

ENVISAN

63’172’563.-

65’629’373.-

-

EX-UAG

54’468’034.-

54’445’050.-

51’243’339.-

KIBAG

58’071’593.-

58’295’151.-

-

MARTI

36’080’142.-

36’244’848.-

35’145’507.-

SCRASA

41’622’119.-

43’655’022.-

43’389’988.-

SITA REMEDIATION

47’942’038.-

48’817’311.-

-

 

 

5. Par pli recommandé daté du 20 octobre 2008, le conseiller administratif compétent de la Ville de Genève a informé le consortium que le marché avait été adjugé à Marti SA pour le montant corrigé de CHF 35'145'507.- TTC correspondant "à la combinaison des variantes 1 et 4 proposées parallèlement à l'offre de base".

L'offre du consortium avait été classée au troisième rang sur les neuf offres évaluées, y compris les variantes. La décision pouvait faire l’objet d’un recours auprès du Tribunal administratif du canton de Genève dans les dix jours dès réception de ladite décision.

6. Par acte posté le 3 novembre 2008, le consortium a interjeté recours en concluant préalablement à la restitution de l’effet suspensif. De plus, il devait être fait interdiction aux parties, à titre provisionnel, de conclure un quelconque acte juridique en relation avec ces travaux.

Sur le fond, l’offre de Marti S.A. était anormalement basse. Les références fournies par Marti S.A. n’étaient pas suffisantes car dans bien des domaines, l'adjudicataire avait eu recours à des sous-traitants ; or, les références de ces derniers ne pouvaient être prises en considération. Enfin, la limite autorisée pour la sous-traitance, fixée à 10 % du coût total, n'était pas respectée par la variante retenue.

7. La Ville de Genève a été invitée à se déterminer sur effet suspensif, ce qu’elle a fait le 14 novembre 2008 en sollicitant l’appel en cause du DCTI et des SIG.

8. Le juge délégué a appelé en cause Marti S.A. de même que le DCTI et les SIG. Toutes ces entités se sont déterminées entre le 14 et le 28 novembre 2008, s’opposant à la restitution de l’effet suspensif et contestant les trois griefs des recourantes.

9. Dans l’intervalle, soit le 18 novembre 2008, le juge délégué avait fait interdiction à l’autorité adjudicatrice et à Marti S.A. de conclure le contrat tant et aussi longtemps qu’une décision sur effet suspensif n’aurait pas été rendue.

10. Les parties ont produit des pièces dont certaines devaient être soustraites à la consultation de leurs concurrents.

Il résulte en particulier du rapport du comité d’évaluation des offres, que le juge a pu compulser, que les organes de Marti S.A. ont été interrogés et ont pu s’expliquer sur les raisons pour lesquelles l’offre de celle-ci était d’un coût inférieur à celles de leurs concurrents. Le comité a également pris en considération les références des sous-traitants et estimé que la limite de 10 % précitée était respectée.

Les autorités adjudicatrices avaient ainsi conclu que la variante présentée par Marti S.A. constituait l’offre économiquement la plus avantageuse, raison pour laquelle les travaux avaient été adjugés à cette société.

11. S’agissant de la pesée des intérêts à laquelle le vice-président du tribunal de céans devait procéder pour statuer sur effet suspensif, les autorités adjudicatrices ont souligné l’urgence à laquelle elles étaient confrontées, car elles devaient respecter le délai au 30 septembre 2011 qui leur avait été imparti par le service de géologie pour effectuer ces travaux. De plus, ceux-ci devraient être coordonnés avec la construction d’une ligne de tram passant à proximité. L'urgence alléguée a été contestée par les recourantes.

12. Spontanément, et à réception des écritures des intimés, le conseil des recourantes s’est exprimé le 28 novembre 2008 en produisant cinq pièces pour contester l’urgence de cet assainissement, pour répéter que le pourcentage de la sous-traitance n’était pas respecté et que l’offre de Marti S.A. était anormalement basse, raison pour laquelle il fallait se montrer "très circonspect sur les informations données tant par l’adjudicateur que l’adjudicataire pour justifier le prix de ce dernier. A ce stade de la procédure, il convenait d’admettre l’effet suspensif et de procéder au fond".

13. Ce courrier et une copie des pièces précitées ont été transmis aux autres parties pour information.

Par pli daté du 5 décembre 2008, la Ville de Genève a demandé que cette dernière écriture et ses annexes soient écartées de la procédure.

EN DROIT

1. A titre préalable, la dernière écriture spontanée des recourantes, ainsi que les pièces annexées, ne seront pas écartées de la procédure, comme le requiert la Ville de Genève : d'une part, elles n'apportent pas d'éléments nouveaux et d'autre part, elles s'inscrivent dans la ligne de la nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 8C_408/2008 du 4 août 2008 ; 2C_688/2007 du 22 février 2008).

2. Selon l'article 45 alinéa 1 LPA, l'autorité peut interdire la consultation du dossier si l'intérêt public ou des intérêts privés prépondérants l'exigent. Toutefois, selon l'alinéa 2 de cette disposition, le refus d'autoriser la consultation des pièces ne peut concerner les mémoires des parties, les documents qu'elles ont produits comme moyens de preuves, les décisions qui leur ont été notifiées et les procès-verbaux relatifs aux déclarations qu'elles ont faites.

Au vu de ce qui précède, le Tribunal administratif admettra que l'ensemble des documents produits par les parties en annexes à leurs écritures, qui doivent être qualifiés de "moyens de preuve", peut être consulté par les autres parties et utilisé sans limitation à l'appui de la présente décision.

3. Le 30 novembre 2006, la loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 (LAIMP - L 6 05.0) a été modifiée, autorisant le Conseil d’Etat à adhérer à l’accord intercantonal du 25 mars 2001, modifiant l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 2004 (AIMP - L 6 05) ;

Le règlement sur la passation des marchés publics (ci-après : le règlement - L 6 05.01) a été adopté le 17 décembre 2007.

Cette loi et ce nouveau règlement sont entrés en vigueur le 1er janvier 2008 ; le règlement a par ailleurs abrogé celui sur la passation des marchés publics en matière de construction du 19 novembre 1997 (art. 60 litt b).

4. A teneur de l’article 17 alinéa 1er AIMP, le recours n’a pas effet suspensif, celui-ci pouvant être restitué à un recours paraissant suffisamment fondé, et pour autant qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose (art. 58 du règlement). L'examen de la recevabilité du recours est toutefois réservée à ce stade de la procédure (ATA/68/2008 du 19 février 2008 ; ATA/171/2007 du 13 avril 2007).

Dès lors que cette exclusion a été érigée en principe, les exceptions y relative doivent s'interpréter restrictivement (ATA/376/2008 du 17 juillet 2008 et les références citées).

5. Dans la pesée des intérêts, l'urgence alléguée par les intimés et appelés en cause sera admise comme constituant un intérêt public prépondérant, primant l'intérêt économique des recourantes, le délai fixé par le service de géologie étant connu et non contesté par les recourantes et la construction de la nouvelle ligne de tram entraînant la démolition des deux ponts de l'Ile d'ores et déjà programmée, même s’il est exact que, conformément à la jurisprudence (ATA/628/2007 du 5 décembre 2007), il appartient aux autorités adjudicatrices de planifier les travaux en incluant les éventuels retards liés aux procédures de recours.

6. Quant aux chances de succès du recours, le Tribunal fédéral a jugé que l'autorité compétente jouit d'une certaine liberté d'appréciation, conformément à l'article 17 alinéa 2 AIMP. Les prévisions qu'elle est amenée à faire - prima facie - sur le sort du procès au fond n'entrent en considération que si elles ne font pas de doute (arrêt du Tribunal fédéral 2D_130/2007 du 26 février 2008 et les arrêts cités consid. 2.2, soit notamment ATF 117 V 185 consid. 2b p. 191), ce qui n'est guère le cas en l'espèce.

Tout au plus peut-on relever que la question de l'existence d'une offre anormalement basse et celle de la part de travaux confiée à des sous-traitants a fait l'objet d'un examen attentif de la part de l'autorité intimée. Marti S.A. a fourni toute explication utile au sujet de son offre. La décision du juge et des travaux apparaît ainsi, à première vue, prise après que celle-ci se soit entourée de tous les renseignements nécessaires.

Les autres griefs requerront une instruction au fond, laquelle ne devrait toutefois pas être particulièrement longue.

7. Au vu des éléments qui précèdent, la demande d'octroi d'effet suspensif sera rejetée (ATA/171/2007 du 13 avril 2007, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_131/2007 du 15 juin 2007).

Le sort des frais sera réservé jusqu’à droit jugé au fond.

 

 

LE VICE- PRÉSIDENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

rejette la demande d'octroi d’effet suspensif au recours interjeté le 3 novembre 2008 par Ebiox S.A., Guex S.A., Piaso S.A., Sotrag S.A., Spie Fondations constituant le Consortium Ex UAG, représenté par Guex S.A., contre la décision prise le 20 octobre 2008 par la Ville de Genève, représentant l'Etat de Genève, soit pour lui le département des constructions et des technologies de l’information ainsi que les Services Industriels de Genève, ces derniers ayant été appelés en cause ;

réserve le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond ;

cela fait  :

fixe à la Ville de Genève et à tous les appelés en cause un délai au 30 janvier 2009 pour répondre sur le fond ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral,

- par la voie du recours en matière de droit public.si la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les articles 113 et suivants LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Christophe Maillard, avocat de Ebiox S.A., Guex S.A., Piaso S.A., Sotrag S.A.,Spie Fondations, constituant le Consortium Ex UAG, représenté par Guex S.A., à la Ville de Genève - département municipal de l'aménagement, à l'Etat de Genève, soit pour lui le département des constructions et des technologies de l’information, aux Services Industriels de Genève, appelés en cause, ainsi qu'à Me François Bellanger, avocat de Marti SA, appelée en cause.

 

 

Le vice-président du Tribunal administratif :

 

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :