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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4916/2008

ATA/609/2011 du 27.09.2011 sur DCCR/1440/2010 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4916/2008-ICCIFD ATA/609/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 septembre 2011

2ème section

 

dans la cause

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

contre

Madame O______ et Monsieur O______
représentés par Me Soizic Mendes De Leon, avocate

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 4 octobre 2010 (DCCR/1440/2010)


EN FAIT

1. Madame O______ et Monsieur O______ (ci-après : les contribuables), parents de trois enfants, sont domiciliés au chemin______sur la commune de Vernier.

2. M. O______ exerce une activité de physiothérapeute indépendant depuis 1982.

3. Depuis le 1er janvier 1985, les contribuables ont loué un appartement, à titre privé, à l’adresse précitée, situé au premier étage de la villa appartenant à Madame S______, tante de M. O______. Cette dernière habitait le rez-de-chaussée.

4. En 1991, le contribuable a aménagé à ses frais le sous-sol de la villa pour y installer son cabinet de physiothérapie sis jusque-là rue______. Ces aménagements lui ont permis de disposer à cet endroit d’une surface de 75 m2.

Entre 1992 et 2002, M. O______ a chaque année inscrit à l’actif du bilan de son entreprise, dans la rubrique relative aux immobilisations, la valeur comptable des travaux d’aménagement sous déduction du montant du fonds d’amortissement représentant le total des amortissements annuels effectués à raison de 10 % de la valeur comptable transcrite, ceci selon le tableau suivant :

 

Valeur comptable

Fonds d’amortissement

Amortissements

1992

256’629.-

25’663.-

25’663.-

1993

315’052.-

57’168.-

31’505.-

1994

352’305.-

92’398.-

35’230.-

1995

352’305.-

127’629.-

35’231.-

1996

352’305.-

162’860.-

35’231.-

1997

376’029.-

200’463.-

37’603.-

1998

367’029.-

238’066.-

37’603.-

1999

389’530.-

277’019.-

38’953.-

2000

389’530.-

315’971.-

38’953.-

2001

389’530.-

354’924.-

38’953.-

2002

389’530.-

389’529.-

34’604.-

5. Le 2 novembre 1995, Mme S______ a fait don à M. O______ de la parcelle n°______, commune de Vernier, d’une surface totale de 1321 m2 et de la villa sur laquelle elle était sise, moyennant reprise de l’hypothèque de CHF 300’000.- grevant le bien-fonds et l’octroi d’un droit d’habitation viager en sa faveur.

6. En 1995, le contribuable a effectué des travaux d’isolation et d’aménagement dans la villa pour une valeur totale de CHF 532’414.-. Le service immobilier de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) n’ayant accepté de prendre en considération que la part de ceux qui avaient été déclarés en 1988 et 1993, la valeur fiscale de l’immeuble a été arrêtée à CHF 835’000.- dès la période relative à l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) 1996 et à l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 1997-1998.

Les frais d’aménagement précités n’ont pas été reportés dans la comptabilité du cabinet de physiothérapie, ni les dettes hypothécaires reprises ou nouvellement contractées par M. O______.

7. Depuis 1995, les contribuables ont dûment indiqué dans leur déclaration fiscale, dans la rubrique 15.10 « immeubles occupés par le propriétaire », les valeurs fiscales et locatives dudit immeuble, calculées à partir des chiffres précités, aux fins de l’imposition sur le revenu et la fortune.

De même, ils ont indiqué dans l’état de leurs dettes privées les hypothèques contractées pour un montant total de CHF 500’000.-, par lesquelles ils avaient financé les travaux entrepris dans la villa en 1995.

8. Dans leur déclaration fiscale 2001-B, les contribuables ont déclaré un revenu brut de CHF 173’357.-, dont CHF 10’803.- constituant le bénéfice net provenant de l’activité lucrative indépendante de M. O______, ainsi qu’une fortune brute de CHF 559’257.-, dont CHF 505’000.- de fortune immobilière. Après déduction des différents montants autorisés, le revenu net imposable était de CHF 102’857.- pour l’ICC et de CHF 85’235.- pour l’IFD. Quant à leur fortune, elle était nulle.

Le bilan du cabinet de physiothérapie au 31 décembre 2001, annexé à la déclaration, faisait état d’un actif « construction » de CHF 389’529,55 et d’un poste « fonds d’amortissement » de CHF 354’924,40, soit CHF 315’971,45 représentant le report du fond d’amortissement 2000, auquel s’ajoutaient CHF 38’952,95 passés par charges au titre d’amortissement dans le compte de pertes et profits 2001.

9. Dans leur déclaration fiscale 2002, les contribuables ont déclaré un revenu brut de CHF 229’888.-, dont CHF 65’093.- provenant de l’activité lucrative indépendante de M. O______, et une fortune brute de CHF 596’436.-, dont CHF 501’000.- de fortune immobilière. Après déduction des différents montants autorisés, le revenu net imposable était de CHF 150’556.- pour l’ICC et de CHF 131’904.- pour l’IFD, tandis que leur fortune était nulle.

Le bilan du cabinet de physiothérapie au 31 décembre 2002, annexé à la déclaration, faisait état d’un actif « construction » de CHF 389’529,55 sous déduction d’un poste « fonds d’amortissement » de CHF 389’529,55 soit CHF 354’924.- représentant le report du fond d’amortissement 2000, auquel s’ajoutaient CHF 34’604.- passés par charges au titre d’amortissement dans le compte de pertes et profits 2002.

10. Le 7 avril 2003, l’AFC-GE a adressé aux contribuables un bordereau provisoire IFD 2002 d’un montant de CHF 1’089.-, fondé sur un revenu imposable de CHF 69’700.-.

11. Le 3 mai 2004, l’AFC-GE leur a également fait parvenir un bordereau provisoire ICC 2001 d’un montant de CHF 10’103,85, fondé sur un revenu imposable de CHF 102’826.- et une fortune nulle.

12. Le 15 septembre 2004, la direction de la taxation de l’AFC-GE a écrit aux contribuables pour leur demander de remplir et retourner un questionnaire aux fins de vérification de certains éléments de leur déclaration « concernant le bien immobilier à utilisation professionnelle », dûment complété, daté et signé.

La note explicative attachée à celui-ci précisait que, dorénavant, tant en matière d’IFD que d’ICC, en cas d’utilisation mixte d’un bien immobilier le principe du partage jusque-là appliqué ne serait plus de mise et était remplacé par l’application du principe de prépondérance, le bien étant considéré comme faisant intégralement partie soit du patrimoine privé, soit du patrimoine commercial.

13. Le 27 octobre 2004, le contribuable a retourné ce questionnaire. Le bâtiment se trouvant sur le bien-fonds n°______, feuille ______, commune de Vernier, était utilisé à 45 % à titre professionnel et à 55% à titre privé. La valeur vénale du tout était de CHF 875’000.-. Il avait été donné au contribuable le 2 novembre 1995. L’amortissement du prêt de l’emprunt hypothécaire était différé dans le temps, en lien avec le paiement de primes d’assurances 3ème pilier de CHF 19’000.- par an. Le contribuable répondait par un point d’interrogation à la question relative au montant cumulé des amortissements comptables.

14. a. Le 29 novembre 2004, l’AFC-GE a écrit aux contribuables. Elle leur transmettait un bordereau rectificatif du bordereau provisoire ICC 2001, qui valait notification définitive de la taxation ordinaire. Certains éléments de la taxation provisoire avaient été modifiés à leur détriment.

Le montant de l’impôt s’élevait à CHF 110’750,40, en fonction d’un revenu imposable de CHF 421’453.- au taux de CHF 421’453.-. Elle retenait un bénéfice net de l’activité lucrative du contribuable de CHF 330’995.-, venant s’ajouter au salaire brut de son épouse et aux autres revenus déclarés. La fortune des époux était nulle, compte tenu d’un immeuble dont la valeur était de CHF 529’000.-, sous déduction de CHF 474’138.- de dettes hypothécaires.

b. Le même jour, elle leur a également notifié :

- un bordereau IFD 2001 de CHF 39’748.-, fondé sur un revenu imposable de CHF 405’100.- au taux de CHF 405’100.-. Elle se fondait sur les mêmes éléments que pour l’ICC 2001.

- un bordereau ICC 2002 d’un montant de CHF 37’505.-, fondé sur un revenu imposable de CHF 185’024.- au taux de CHF 185’024.-. Le bénéfice net du contribuable retenu était de CHF 99’698.-.

- un bordereau IFD 2002 de CHF 8’626.-, fondé sur un revenu imposable de CHF 165’700.- et sur un bénéfice net du contribuable identique à celui retenu pour l’ICC.

15. Le 29 novembre 2004 également, la direction de la taxation, service des indépendants de l’AFC-GE, a envoyé un courrier aux contribuables « en complément des quatre bordereaux [qu’elle leur avait] notifiés » auquel était annexé un procès-verbal de taxation. Ce document était libellé de la manière suivante :

« Transfert du bien immobilier sis ______, commune de Vernier, du patrimoine professionnel au patrimoine privé :

Comme le précisent les art. 18 al. 2 [de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11] et 3 al. 2 et [de la loi sur l’imposition des personnes physiques - Détermination du revenu net - Calcul de l’impôt et rabais d’impôt - Compensation des effets de la progression à froid du 22 septembre 2000 - aLIPP-V - D 3 16], le transfert d’un élément du patrimoine professionnel au patrimoine privé est considéré comme une aliénation. De ce fait, les bénéfices en capital réalisés lors de l’aliénation de valeurs immobilières viennent s’ajouter aux autres éléments du résultat des cotations et sont en principe soumis à l’impôt ordinaire sur le revenu (le bénéfice).

De ce fait, nous avons retenu les éléments suivants afin de déterminer le bénéfice en capital qui était ajouté à votre résultat d’exploitation :

- valeur fiscale professionnelle (875’000.- x 45 %) : 393’750.-

- valeur comptable : 389’529,55

bénéfice sur transfert : 4’220,45

+ dissolution de réserves latentes (354’924,40 - 38’952,95) : 315’971,45

bénéfice en capital CHF 320’191,90 ».

Le courrier du 24 novembre 2004 précité et son annexe ne figuraient pas dans le chargé de pièces transmis par l’AFC-GE au Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) mais ont été produits par les recourants devant la première instance de recours.

16. Le 30 novembre 2004, les contribuables ont réclamé auprès de l’AFC-GE contre les bordereaux rectificatifs 2001 et 2002 ICC et IFD. Ils ne comprenaient pas comment le bénéfice net de CHF 8’392,20 déclaré en 2001 passait à CHF 330’995.- suite à la rectification de taxation 2001. Il en allait de même pour 2002, où il passait de CHF 63’436.- à CHF 99’698.-.

17. Le 20 décembre 2004, M. O______ a écrit à l’AFC-GE. A la suite d’un entretien téléphonique qu’il avait eu avec un taxateur du service des indépendants. Il demandait une correction de la répartition de l’utilisation privée-professionnelle de son bien immobilier.

Il avait commis une erreur dans la communication de cette répartition. La répartition 45 % - 55 % ne reprenait pas le rapport réel de surface professionnelle et de surface d’habitation privée, mais surtout n’avait pas pris en compte la totalité des surfaces du bien-fonds liée à la valeur vénale totale de celui-ci. En réalité, la totalité de la surface du bien-fonds et du bâtiment était de 1’575 m2, dont il utilisait 75 m2 à titre professionnel, représentant le 4,8 %, le reste, soit 95,2 %, correspondant à la part privée. En outre, la valeur fiscale professionnelle figurant dans ses états financiers correspondait au montant d’investissement financé par une augmentation de l’hypothèque sur la maison, dans laquelle il avait aménagé ses locaux professionnels. Cela ne constituait pas un bénéfice en capital mais devait être considéré comme une dette contractée en lieu et place d’un loyer commercial. Lorsqu’il utilisait les locaux sis ______, son loyer s’élevait à plus de CHF 36’000.- par an. En revanche, ses investissements étaient intégrés à la valeur du bien immobilier et devaient être considérés comme de la fortune.

18. Le 20 octobre 2006, l’AFC-GE a écrit aux contribuables en réponse à la réclamation relative aux taxations ICC et IFD 2001. Elle entendait rectifier celles-ci en leur défaveur par application des art. 43 al. 1 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17) et 135 LIFD. Ils avaient un délai de vingt jours pour se déterminer et produire leurs moyens de preuve. Passé ce délai, ils étaient censés avoir accepté les termes de ce courrier. Un retrait de la réclamation n’aurait aucun effet sur la procédure en cours.

Le transfert d’éléments du patrimoine professionnel au patrimoine privé était considéré comme une aliénation. De ce fait, les bénéfices en capital réalisés à cette occasion venaient s’additionner aux autres éléments du résultat d’exploitation et étaient donc soumis à l’impôt ordinaire sur le revenu. En l’occurrence, la valeur fiscale professionnelle s’élevait à CHF 583’333.- (2/3 de CHF 875’000.-). La valeur comptable à déduire était de CHF 389’530.-. Le bénéfice sur transfert s’élevait à CHF 193’803.-. Il y avait lieu d’ajouter à ce dernier montant celui des réserves latentes dissoutes qui s’élevait à CHF 315’971.- (CHF 354’924.- sous déduction de CHF 38’953.-). Le bénéfice en capital était ainsi de CHF 509’774.- (CHF 193’530.- + CHF 315’971.-).

Les contribuables ayant un délai de vingt jours pour se déterminer sur ces calculs, sans réponse dans le délai imparti ils seraient considérés comme admis.

19. Le 14 novembre 2006, les contribuables ont écrit à l’AFC-GE. Les taxations rectificatives précitées devaient être annulées.

La position de l’AFC-GE exprimée dans son courrier du 20 octobre 2006 était illégale et la proposition de taxation devait être rejetée pour les raisons suivantes :

- Selon la notice de l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH), l’application du principe de prépondérance devait être effective en 1995 et non sept ans après. La taxation définitive du 29 novembre 2004 rectifiait la taxation 1995, qui était entrée en force.

- La rectification proposée le 20 octobre 2006 était tardive, Elle corrigeait une erreur d’appréciation commise lors des taxations définitives du 29 novembre 2004, qui étaient entrées en force.

- A l’actif des états financiers 2001, le poste repris correspondait à une valeur d’installation professionnelle et non pas à une valeur immobilière proprement dite.

L’AFC-GE disposait d’un délai de deux ans après l’introduction de la notice fédérale du 12 novembre 1992 pour se déterminer sur la question d’attribution entre fortune privée ou commerciale.

Au surplus, ils avaient toujours déclarés leur bien immobilier comme faisant partie de leur fortune privée et sa prépondérance privée, dès 1992, avait été démontrée le 20 décembre 2004. Le montant porté à l’actif du bilan du cabinet correspondait à des installations et non pas à une valeur immobilière proprement dite. Les travaux en question, notamment la construction en sous-sol d’une piscine pour la rééducation, avaient été effectués entre 1992 et 1993, ainsi qu’ils l’établissaient par la liste des factures d’entreprises de l’époque. Le calcul de l’AFC-GE était erroné. La part utilisée à titre professionnel était de 75 m2 représentant 18 % d’une surface brute totale de la maison de 410 m2. Dans l’hypothèse où il serait justifié, le bénéfice en capital ne serait que de CHF 83’941.-.

20. Le 10 novembre 2008, l’AFC-GE a statué sur la réclamation du 1er décembre 2004 relative à l’ICC 2001. Elle rectifiait et complétait l’imposition des contribuables. Elle se référait à ses courriers des 29 novembre 2004 et 20 octobre 2006. Le bénéfice en capital réalisé lors du transfert d’un élément du patrimoine professionnel au patrimoine privé constituait un produit de l’activité lucrative indépendante et était soumis à l’impôt ordinaire sur le revenu à teneur de l’art. 3 al. 2 aLIPP-IV. Selon les comptes remis les années antérieures, le bien immobilier avait toujours été comptabilisé pour deux tiers à titre professionnel et c’était ce même rapport qui servait de base pour déterminer la valeur fiscale professionnelle prise en considération. Le bénéfice en capital à prendre en compte dans le revenu de l’activité indépendante était de CHF 509’774.-. La proportion de la prépondérance n’entrait pas en considération dans ce calcul mais ne servait qu’à déterminer le loyer professionnel admis en déduction du revenu.

Avec cette décision, l’AFC-GE a communiqué aux contribuables un bordereau rectificatif ICC 2001 de CHF 177’124,40 fondé sur un revenu imposable de CHF 617’843 au taux de CHF 617’343.- et une fortune de CHF 0.-.

Pour déterminer le bénéfice net et le capital imposables, elle avait retenu une valeur locative après abattement de CHF 20’341.- et des charges et frais d’entretien de CHF 3’560.-. Le loyer professionnel admis au titre de charges était de CHF 4’021.-, soit 75/313 de la valeur locative nette.

Pour l’imposition de la fortune, l’intégralité de la valeur de l’immeuble était affectée à la fortune privée même s’il y avait utilisation mixte, ceci en raison des éléments immobiliers déclarés. La valeur attribuée à l’immeuble correspondait à CHF 529’000.- (465’000.- ./. 40 % + CHF 100’000.- ./. 36 %).

21. Le 10 novembre 2008, l’AFC-GE a également statué sur les réclamations concernant l’IFD 2001, l’ICC 2002 et l’IFD 2002. A chaque fois, elle a rectifié et complété l’imposition des contribuables sur certains points, la maintenant pour le surplus.

Concernant l’IFD 2001, sa décision reposait sur les mêmes motifs que pour l’ICC 2001 si ce n’était qu’elle se fondait sur l’art. 18 al. 3 LIFD. Un bénéfice en capital de CHF 509’774.- était à prendre en considération dans le revenu de l’activité indépendante. Elle leur communiquait un bordereau rectificatif. L’impôt dû s’élevait à CHF 66’915.-, soit un supplément de CHF 26’078.-, fondé sur un revenu de CHF 605’700.- à un taux équivalant.

Pour l’ICC 2002 et l’IFD 2002, la modification de la taxation était la conséquence de la modification de l’assiette fiscale en 2001.

Pour l’ICC 2002, l’imposition était maintenue pour le surplus car l’amortissement de CHF 34’604,15 qui avait été opéré dans les comptes du cabinet de physiothérapie ne pouvait plus être admis en déduction puisque le bien immobilier faisait entièrement partie de la fortune privée. L’impôt dû s’élevait à CHF 39’571.- fondé sur un revenu imposable de CHF 191’901.- au taux de CHF 191’901.- et sur une fortune de CHF 0.-.

Dans le cadre de l’IFD 2002, elle avait retenu une valeur locative de CHF 33’901.- et des charges et frais d’entretien de CHF 6’780.-. L’imposition était également maintenue pour le surplus car aucun amortissement de l’immeuble n’était possible dans les états financiers de l’entreprise de M. O______. L’impôt dû s’élevait à CHF 11’145.-, fondé sur un revenu de CHF 176’700.-.

22. Le 12 décembre 2008, les contribuables ont interjeté recours auprès de la commission cantonale de recours en matière d’impôts, remplacée depuis le 1er janvier 2009 par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à l’annulation des quatre décisions sur réclamation du 10 novembre 2008. L’autorité de recours devait principalement constater que  l’immeuble appartenait à la fortune privée des contribuables, que le droit de taxer le bénéfice réalisé sur les réserves latentes dû au passage de la fortune commerciale à la fortune privée était prescrit, que les suppléments d’impôt notifiés le 29 novembre 2004 n’étaient pas dus, que la valeur locative de l’immeuble de Châtelaine était de CHF 12’988.-, et les frais et charges d’entretien de 20 % de CHF 2’597.- ; en matière d’IFD, que l’amortissement de CHF 34’604.- pouvait être admis en déduction de l’activité indépendante ; qu’en matière d’ICC 2002 la valeur locative de l’immeuble correspondait à celle déclarée par la contribuable, soit CHF 7’793.-, et les charges d’entretien à CHF 1’363.-. Subsidiairement, les recourants demandaient l’annulation des quatre décisions sur taxation. Il devait être constaté que la surface utilisée à titre commercial était de 18,8 %, partant du fait que le gain en capital généré par la résiliation des réserves latentes était de CHF 83’941.-.

M. O______ avait toujours fait figurer un poste « aménagement locaux » ou « construction » à l’actif des bilans annuels de son cabinet de physiothérapie, dont la valeur comptable qui était de CHF 256’629.- en 1992, avait crû par paliers pour s’élever à CHF 389’530 en 2001 et 2002. Chaque année, ce poste avait fait l’objet d’amortissements équivalents à son 10 %. En 2001, il avait été ainsi amorti à raison de CHF 354’924.- et en 2002 à raison de sa totalité, soit CHF 389’529.-. A teneur des avis de taxation produits pour les années 1995 à 2000, ce mode de faire n’avait pas été remis en question par l’AFC-GE.

Les quatre décisions rendues sur réclamation par l’AFC-GE violaient leur droit d’être entendus, dès lors qu’elles n’exposaient pas en quoi elle entendait appliquer, pour les exercices fiscaux 2001 et 2002, la méthode de la prépondérance, alors que celle-ci avait été introduite en 1995 au moment de l’entrée en vigueur de l’art. 18 al. 2 LIFD. L’AFC-GE n’expliquait pas à partir de quelle date elle avait considéré qu’une partie de l’immeuble faisait partie de la fortune commerciale du contribuable alors qu’ils l’avaient toujours déclarée comme faisant partie de leur fortune privée. Elle ne disait rien sur les raisons qui faisaient qu’en définitive, elle avait considéré que la surface de l’immeuble dévolue à une utilisation commerciale représentait non pas 45 %, comme elle l’avait retenu dans un premier temps, mais 66 %.

Le droit de taxer un éventuel passage de la fortune commerciale à la fortune privée était prescrit et les taxations contestées violaient le principe de périodicité et d’étanchéité des exercices fiscaux. En effet, dès l’exercice comptable 1995, l’AFC-GE avait été en possession de tous les éléments du revenu de fortune du contribuable qui lui auraient permis d’appliquer dès cette année-là la méthode de la prépondérance, tout au moins pour l’IFD puisque l’art. 3 al. 2 aLIPP-IV n’était entré en vigueur qu’en 2001. En outre, elle avait violé le principe d’égalité de traitement entre contribuables dans sa façon d’appliquer de manière non systématique, et au cas par cas, la circulaire n° 2 du 12 novembre 1992 «  revenus provenant de l’activité lucrative indépendante selon l’art. 18 LIFD ; extension de l’assujettissement au bénéfice en capital, passage à la méthode de la prépondérance et application générale de cette méthode dans le nouveau droit publiée par l’Administration fédérale des contributions » (ci-après la circulaire).

Dès lors que l’AFC-GE avait toujours traité l’immeuble comme appartenant à la fortune privée du contribuable, c’était en violation des art. 18 al. 2 LIFD et 3 al. 2 aLIPP-IV qu’elle avait considéré qu’il y avait eu un transfert d’un patrimoine à l’autre qui avait dégagé un bénéfice qui s’ajoutait au revenu. Il y avait lieu de rappeler que seule la valeur de travaux effectués afin de ménager le sous-sol de la villa, qui n’appartenait pas encore aux contribuables, avait été activée au bilan de l’entreprise dès 1992. La méthode de la prépondérance n’avait pas lieu d’être appliquée au cas d’espèce.

Subsidiairement, si l’on admettait en définitive qu’il y avait lieu d’activer ladite méthode, le bénéfice en capital ne pourrait s’élever à plus de CHF 83’941.- compte tenu de ce que seuls 75 m², soit 18 % de la surface brute totale de la maison de 410 m², étaient utilisés à titre professionnel.

23. Le 10 février 2010, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours. Elle avait correctement appliqué la loi. Le recours à la méthode de la prépondérance permettait d’attribuer entièrement à la fortune privée des biens utilisés partiellement à titre commercial lorsque cette part était inférieure à 50 %. Le recours à cette méthode avait été introduit dès 2001 dans le droit cantonal. Dès lors que le contribuable avait amorti un bien immobilier dans sa comptabilité commerciale, au moins une partie de celui-ci faisait partie de sa fortune commerciale. En outre, le droit d’être entendu des recourants n’avait pas été violé.

24. Le 6 juillet 2010, la commission a demandé à l’AFC-GE de fournir une copie du courrier qu’elle avait adressé aux contribuables pour leur indiquer qu’elle envisageait de procéder à une reformatio in pejus en rapport avec la taxation ICC et IFD 2002.

25. Le 12 août 2010, l’AFC-GE a répondu qu’elle n’avait pas adressé un tel courrier aux contribuables. Toutefois, aux termes de l’art. 50 al. 2 LPFisc, la commission avait les mêmes compétences que le département dans la procédure de taxation et pouvait également s’écarter des conclusions des parties, voire réformer la taxation en défaveur des contribuables.

26. Le 4 octobre 2010, la commission a admis partiellement le recours. Les quatre décisions sur réclamation étaient annulées ainsi que le bordereau de taxations relatives aux deux années fiscales. Le dossier était renvoyé à l’AFC-GE pour qu’elle notifie de nouveau bordereaux IFD et ICC 2001 et qu’elle instruise la réclamation concernant l’IFD et l’ICC 2002, conformément aux considérants.

Il était établi qu’en 2001, l’immeuble des recourants était utilisé de manière prépondérante à des fins privées et qu’il faisait intégralement partie de ce fait de la fortune privée de ceux-ci, en application de la méthode de la prépondérance. C’était à tort que l’AFC-GE avait retenu que l’attribution de la part professionnelle de l’immeuble à la fortune privée du contribuable constituait un acte d’aliénation de l’immeuble dégageant un bénéfice en capital, et que celui-ci venait s’additionner au résultat d’exploitation de l’activité professionnelle indépendante du contribuable. Cette attribution étant inhérente à un changement de méthode et non pas à un acte volontaire et concret de la part du contribuable, il n’y avait pas lieu d’en tenir compte dans le calcul de l’impôt sur le bénéfice. Il s’agissait d’une opération neutre sur le plan de cet impôt, conformément à la circulaire. De ce fait, le bénéfice en capital retenu par l’AFC-GE n’avait pas à être pris en considération.

En revanche, dès lors que les travaux d’aménagement du sous-sol de l’immeuble mentionnés à l’actif du bilan faisaient partie dès 2001 de la fortune privée du recourant, il n’y avait pas lieu d’admettre qu’ils puissent faire l’objet d’un amortissement pour l’exercice commercial 2001. De ce fait, le montant de cet amortissement devait être ajouté au bénéfice imposable de son activité lucrative indépendante de 2001.

L’AFC-GE n’avait pas le droit de revenir sur les taxations des années fiscales antérieures à 2001. En revanche, elle avait la possibilité, en vertu du principe de périodicité et d’étanchéité des exercices, de l’appliquer tant pour l’ICC que pour l’IFD dès 2001.

Concernant l’ICC et l’IFD 2002, la procédure autorisant l’administration à décider d’une reformatio in pejus n’avait pas été respectée, dès lors que l’AFC-GE admettait elle-même ne pas avoir envoyé une invitation préalable à se déterminer sur les éventuelles conséquences défavorables d’une telle décision. Le dossier devait lui être renvoyé pour qu’elle procède à l’instruction de la réclamation pour cette année fiscale.

27. Le 12 novembre 2010, l’AFC-GE a interjeté recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif. Elle a conclu à son annulation partielle. Son recours ne portait que sur un aspect de la taxation 2001 relatif à la réintégration des amortissements comptabilisés par le débiteur antérieurement.

Elle ne contestait pas la conclusion de la commission qui se fondait sur la circulaire et considérait que le passage dans la fortune privée des parties d’immeuble attribuées jusque-là à la fortune commerciale ne constituait pas un acte de réalisation. Elle admettait donc qu’il s’agissait d’une opération neutre sur le plan de l’impôt sur le bénéfice. C’était également à juste titre que la commission avait retenu que l’amortissement opéré par les contribuables de CHF 38’953.- en 2001 devait être ajouté au bénéfice imposable de l’activité lucrative réalisée cette année-là. Toutefois, il y avait lieu en sus de cela de reprendre les amortissements pratiqués antérieurement sur le montant des travaux d’aménagement portés à l’actif du bilan du cabinet de physiothérapie pour les imposer, conformément au ch. 3.3 de la circulaire, et à l’art. 18 al. 2 LIFD. Ces amortissements qui, jusque-là, avaient eu pour effet de diminuer les bénéfices imposables dans les années concernées, devaient être taxés. Il s’agissait de réserves latentes imposables au moment de la récupération des amortissements. Ces derniers s’élevaient à CHF 315’971.- et il s’agissait de les ajouter au bénéfice réalisé en 2001, en sus de l’ajout du montant de CHF 38’953.-.

En matière d’ICC, l’AFC-GE n’a pas traité la question directement sous l’angle de l’art. 3 al 2 aLIPP IV. Elle s’est cependant référée au commentaire du projet de loi de nouvel art. 3A de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), contenu dans le PL 10247 adopté le 10 octobre 2008. Celui-ci permettait de justifier sa position au sujet de l’imposition des amortissements effectués par le contribuable sur les frais d’aménagement de son cabinet. Il y était en effet expliqué qu’avant l’adoption de cette nouvelle disposition, il y avait, au moment du passage de la fortune commerciale à la fortune privée, imposition tant des amortissements que de la plus-value conjoncturelle tandis que le but de cette nouvelle norme était de permettre de différer dans le temps la prise en compte fiscale de cette dernière, limitant l’imposition à la prise en compte des seuls amortissements.

28. Le 7 décembre 2010, les contribuables ont répondu, concluant au rejet du recours. Les reprises sollicitées par l’AFC-GE avaient fait l’objet d’une taxation devenue définitive. Un changement de méthode ne pouvait amener à une reprise de ces montants en les ajoutant au bénéfice réalisé lors d’une année ultérieure. Les conditions pour l’ouverture d’une procédure en rappel d’impôt n’étaient pas remplies en l’espèce et l’ouverture d’une telle procédure était prescrite.

29. Les parties ont été entendues le 23 mai 2011 lors d’une audience de comparution personnelle des parties.

Selon les représentants de l’AFC-GE, dans l’application du principe de prépondérance, seuls étaient pris en considération les mètres carrés utiles, soit dévolus à l’exercice de l’activité commerciale, soit à l’utilisation privée. On ne tenait compte ni de la surface du jardin ni de celle des places de parking. Si la LIFD avait été modifiée en 1995, l’AFC-GE avait attendu à Genève que ce principe soit également introduit en droit cantonal, ce qui fut le cas dès l’exercice fiscal 2001.

L’AFC-GE avait considéré que les amortissements sur le montant des travaux effectués en lien avec le cabinet de physiothérapie constituaient des réserves latentes dont l’entier devait pris en considération à titre de bénéfice 2001 dès lors que l’ensemble du bien immobilier était transféré dans le patrimoine privé. Il n’avait pas été tenu compte des éventuelles pertes de valeur liées à une dépréciation due au vieillissement de l’objet. Dans l’hypothèse où le contribuable était locataire du sous-sol dans lequel il avait son cabinet, il aurait été soumis à l’impôt sur les gains de liquidation en cas de remise de celui-ci et imposé sur la totalité du bénéfice de liquidation à ce titre.

Selon les contribuables, en 2001, le sous-sol de la villa comportait 75 m2 de surface utile. Quant à la partie de la villa affectée au logement, elle était composée d’un rez-de-chaussée et d’un étage de 90 m2 chacun auxquels s’ajoutaient une véranda de 45 m2 et deux pièces dans les combles d’une surface totale de 50 m2.

En 2004, M. O______ avait complété le questionnaire de l’AFC-GE sans comprendre sa portée, ayant eu un entretien téléphonique avec un collaborateur de l’AFC-GE qui lui avait dit qu’il n’avait pas d’importance.

En 1991, il avait effectué des travaux pour l’installation de son cabinet dans les sous-sols à l’aide de fonds propres ou de fonds provenant de la reprise de son ancien cabinet de physiothérapie. Le montant total des travaux effectués s’était élevé à environ CHF 380’000.- qu’il avait activé au bilan de son entreprise et qu’il avait décidé d’amortir par tranches de 10 % sur dix ans. Il avait terminé de le faire en 2002. Ces travaux n’avaient rien à voir avec d’autres travaux effectués dans la partie logement en 1995.

30. Le 20 juin 2011, l’AFC-GE a persisté dans les conclusions de son recours.

31. Le même jour, les intimés en on fait de même, se référant à leurs conclusions du 7 décembre 2010.

Le montant des amortissements sur travaux du cabinet de physiothérapie qui était litigieux s’élevait à CHF 315’972.- dès lors que la commission n’avait pas admis dans la décision querellée les amortissements de CHF 38’953.- effectués en 2001 et de CHF 34’604,- effectués en 2002. Dans son recours, l’AFC-GE avait admis que la plus-value du bien immobilier, qu’elle avait estimée à CHF 193’803.-, n’était pas imposable. Cet élément était nouveau dès lors que celle-ci avait estimé devant la commission que la totalité des réserves latentes, soit la plus-value et les amortissements, devait être imposée.

L’AFC-GE ne pouvait être suivie dans le raisonnement consistant à admettre que le rattrapage d’amortissement était imposable en raison du point 3.3 de la circulaire, de la pratique constante des autorités fiscales cantonales et fédérales, du raisonnement par analogie qui doit être fait avec le projet de loi cantonales PL 10 247 prévoyant un nouvel art. 3A LIPP. En effet, si les intimés ne contestent pas que leur bien immobilier faisait partie de leur fortune privée, ils contestent le fait qu’il y ait eu passage à la fortune privée en 2001, autorisant une reprise des amortissements par application de l’art. 18 al. 2 LIFD ou 3 al. 2 aLIPP IV.

32. Le 21 juin 2011, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l’ensemble des compétences jusqu’alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 131 et 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction alors compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 dans leur teneur au 31 décembre 2010).

3. A ce stade de la procédure, le litige ne concerne plus que la taxation de l’ICC et de l’IFD 2001.

Imposition en matière d’IFD

4. A teneur de l’art. 18 LIFD, font l’objet d’une imposition au plan fédéral tous les revenus provenant de l’exercice d’une activité lucrative indépendante (art. 18 al. 1 LIFD). Est assimilé au produit de l’activité lucrative indépendante tout bénéfice en capital provenant de l’aliénation, de la réalisation ou de la réévaluation comptable d’éléments de la fortune commerciale (art. 18 al. 2 LIFD).

5. L’art. 18 al. 2 LIFD, entré en vigueur le 1er janvier 1995, consacre le recours au principe de la prédominance ou de la prépondérance. Depuis lors, en matière d’IFD, il n’est plus possible qu’un bien, notamment immobilier, puisse être rattaché à la fois à la fortune commerciale et privée. Les biens servant de manière prépondérante (plus de 50 %) à l’exercice d’une activité lucrative indépendante sont affectés à la fortune commerciale tandis que ceux affectés de manière prépondérante à une situation privée sont affectés à la fortune privée (P. AGNER / B. JONG / G. STEINMANN, Commentaire de la loi sur l’impôt fédéral direct, Schultess 2001, ad art. 18 LIFD, p. 67 ; Y. NOEL in D. YERSIN, Y. NOËL, Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l’impôt fédéral direct, 2008, ad art. 18 n° 64 p. 256 ; X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 3ème éd., § 7, n° 35, p. 90).

6. Le passage dès 1995 à l’application du principe de prépondérance a fait l’objet de la part l’AFC-CH de la circulaire à laquelle est annexée une notice (ci-après : la notice), lesquelles en préconisent l’application et le concrétisent.

7. Concernant les immeubles à utilisation mixte considérés selon la LIFD comme fortune privée par application du principe de prépondérance, la notice, sous ch. 2.3, prévoit :

« Après l’entrée en vigueur de la LIFD, les immeubles utilisés d’une manière prépondérante à des fins privées, doivent être attribués intégralement à la fortune privée. Faute d’une base légale, le passage dans la fortune privée, inhérent au système, des parties d’immeubles attribuées jusque-là à la fortune commerciale, ne représente pas un acte de réalisation. Ce passage reste donc neutre du point de vue de l’impôt sur le revenu ».

Inhérent à la modification du système, un tel passage aura pour conséquence d’interdire tout amortissement futur sur le bien attribué à la fortune privée mais il ne constitue pas un cas de réalisation immédiate, ni dans les faits ni sur le plan comptable (P. AGNER / B. JONG / G. STEINMANN, op. cit., ad art. 18, n° 6, p. 67). Partant, il ne peut être assimilé à un cas d’aliénation au sens de l’art. 18 al. 2 LIFD.

8. En règle générale, les instructions, les circulaires et les directives administratives – ou, en d’autres termes, les ordonnances administratives – n’ont, selon la jurisprudence et la doctrine, pas force de loi et ne constituent pas du droit fédéral au sens de l’art. 49 let. a de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021 ; ATF 121 II 473 consid. 2b p. 478 ; ATF 121 IV 64 consid. 3 p. 66 ; ATA/270/2006 du 16 mai 2006, et les références citées ; ATA/437/2008 du 27 août 2008).

Si elles ne peuvent contenir de règles de droit, elles peuvent cependant apporter des précisions quant à certaines notions contenues dans la loi ou quant à la mise en pratique de celle-ci. Sans être lié par elles, le juge peut néanmoins les prendre en considération en vue d’assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré. Il ne doit cependant en tenir compte que si elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATF 121 II 473 consid. 2b).

Lorsqu’elle est émise par l’autorité chargée de l’application concrète, l’ordonnance administrative est un mode de gestion : elle rend explicite une ligne de conduite, elle permet d’unifier et de rationaliser la pratique, elle assure ce faisant aussi l’égalité de traitement et la prévisibilité administrative, et elle facilite le contrôle juridictionnel puisqu’elle dote le juge de l’instrument nécessaire pour vérifier que l’administration agit selon des critères rationnels, cohérents et continus, et non pas selon une politique virevoltante du cas par cas (ATA/503/2007 du 9 octobre 2007, et les références citées).

9. L’AFC-GE ne remet plus en question la neutralité fiscale à laquelle doit obéir l’attribution de la part d’actif commercial dans la fortune privée. Elle considère cependant être autorisée à reprendre au titre de bénéfice en capital les amortissements comptables auxquels le contribuable a procédé sur la valeur des investissements immobiliers effectués dans son cabinet, comptabilisés pour un montant de CHF 315’971.- au 31 décembre 2000.

L’art. 18 al. 2 LIFD a cependant pour objectif de régler la situation des actifs de contribuables qui interrompent l’exercice d’une activité lucrative indépendante. En tel cas, il autorise l’imposition des diverses formes de gain en capital que le passage d’actifs commerciaux dans la fortune privée peut entraîner. Cela implique le droit d’imposer au moment du passage à titre de gain les diverses formes de réserves latentes au sens de l’art. 669 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), mais aussi les amortissements sur ces actifs comptabilisés antérieurement par le contribuable. En revanche, dès lors que la notice rattachée à la circulaire prévoit que le passage doit être neutre fiscalement pour l’ensemble des contribuables concernés lorsqu’il résulte du changement de système intervenu à Genève en 2001, on ne voit pas quelle raison justifierait la reprise des seuls amortissements à l’exclusion d’autres formes de gain en capital. La solution retenue par la commission pour cet aspect du contentieux relatif à l’ICC ne peut qu’être confirmée.

Imposition en matière d’ICC

10. Le contentieux concernant l’exercice 2001, il est soumis non pas à la LIPP mais doit être tranché au regard des dispositions en vigueur pour cette période, notamment celles de l’aLIPP-IV.

11. Le litige concernant l’ICC ayant le même objet et l’art. 3 aLIPP-IV, étant de contenu similaire à celui de l’art. 18 al. 2 LIFD, une solution identique à celle intervenue en matière d’IFD doit être retenue.

12. Le recours de l’AFC-GE sera rejeté. Les autres points du dispositif de la décision de la commission du 4 octobre 2010 n’étant pas contestés, celle-là sera confirmée.

13. Aucun émolument ne sera perçu (art. 11 al. 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Une indemnité de procédure de CHF 1’500.- sera allouée aux contribuables à la charge de l’Etat de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 novembre 2010 par l’administration fiscale cantonale contre la décision du 4 octobre 2010 de la commission cantonale de recours en matière administrative ;

 

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue à Madame O______ et Monsieur O______ une indemnité de procédure de CHF 1’500.- à la charge de l’Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à l’administration fiscale cantonale, à Me Soizic Mendes De Leon, avocate de Madame O______ et Monsieur O______, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :