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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1549/2015

ATA/595/2016 du 12.07.2016 ( AMENAG ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 14.09.2016, 1C_423/2016
Descripteurs : MESURE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ; PLAN DIRECTEUR ; PLAN D'AFFECTATION SPÉCIAL ; INDICE D'UTILISATION
Normes : LaLAT.10; RaPAV.2; RaPAV.6; RaPAV.8; RaPAV.9; RaPAV.7
Parties : AVADIS FONDATION D'INVESTISSEMENT / CONSEIL D'ETAT
Résumé : Examen de la nature du « plan directeur de quartier PAV », instrument de planification ad hoc ne constituant pas matériellement un plan d'affectation mais bien un plan directeur de quartier. Aucune voie de recours n'étant ouverte pour les particuliers contre un plan directeur de quartier, le recours déposé par un propriétaire d'une parcelle sise dans le périmètre PAV a été déclaré irrecevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1549/2015-AMENAG ATA/595/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 juillet 2016

 

dans la cause

AVADIS FONDATION D'INVESTISSEMENT
représentée par Me François Bellanger, avocat

contre

CONSEIL D'éTAT

 



EN FAIT

1) Avadis Fondation d’investissement (ci-après : Avadis), dont le siège social est à Baden, est propriétaire de la parcelle no 2’845, feuille 91 de la commune de Genève-Plainpalais, d’une surface de 2’423 m2, située entre l’Arve et la rue François-Dussaud.

Sur cette parcelle sont édifiés deux bâtiments de bureaux, entièrement mis en location par Avadis, à l’adresse 4 et 6, chemin de la Gravière.

2) Le périmètre du quartier Praille-Acacias-Vernets (ci-après : quartier PAV) a été identifié par le plan directeur cantonal 2015 (ci-après : PDCn 2015) dans sa mise à jour 2006. La fiche 2.20 y relative prévoyait la densification du périmètre. Un Masterplan a été élaboré entre novembre 2006 et 2007, validé le 9 mai 2007 par le Conseil d’état, puis un projet de loi de modification de limites de zones sur les territoires des communes de Genève, Carouge et Lancy a été élaboré par le département en charge de l’aménagement du territoire (ci-après : le département) pour aboutir après plusieurs années de procédure à l’adoption, le 23 juin 2011, de la loi 10'788 relative à l’aménagement du quartier « Praille-Acacias-Vernets », modifiant les limites de zones sur le territoire des communes de Genève, Carouge et Lancy (création d’une zone 2, d’une zone de développement 2, d’une zone de verdure et d’une zone de développement 2 prioritairement affectée à des activités mixtes) et approuvant le plan no 29’712A (ci-après : loi PAV).

La parcelle propriété d’Avadis se trouve dans le secteur « Acacias-Bord de l’Arve (G) » délimité par la loi PAV, en zone de développement 2, dans un secteur dévolu à une affectation mixte, logements, activités tertiaires, entreprises sans nuisances ou moyennement gênantes, ainsi qu’équipements publics, universitaires et hautes écoles (art. 4 al. 7 loi PAV).

3) Suite à l’adoption de la loi PAV, le département, de concert avec les communes de Genève, Carouge et Lancy, a élaboré un avant-projet de plan directeur de quartier « Praille-Acacias-Vernets » (ci-après : PDQ PAV) no 29'951. Le périmètre couvert par le PDQ PAV, d’une surface de 230 hectares, supérieure à celle de 140 hectares couverte par la loi PAV, est délimité au nord-est par l’Arve, à l’ouest par le coteau de Lancy, au sud par la route de Saint-Julien et le Bachet-de-Pesay et au sud-est par les quartiers des Noirettes et des tours de Carouge.

Le projet de PDQ PAV est un document de cent-cinquante pages, constitué de vingt-et-une fiches de coordination comprenant chacune un principe, des objectifs, des mesures, des projets ainsi qu’un texte explicatif et des illustrations. Ces fiches concernent les thèmes suivants : A - Urbanisation, B - Mobilité, C - Environnement, D - Programmation et E - Mise en œuvre. Une carte de synthèse et une carte des grands équilibres (densité et affectations) ainsi que des documents annexes constituent le reste du projet.

Pour le secteur G, la loi PAV définit une affectation mixte. La carte des grands équilibres indique pour ce secteur un programme de 200'000 m2 de surface brut de plancher (ci-après : SBP), la surface des bâtiments maintenus et des équipements publics n’étant pas comprise. Le secteur G est composé de trois
sous-secteurs (fiche A4 : Les Vernets, le Parc de Sports et la Pointe Nord). La Pointe Nord, périmètre dans lequel se trouve la parcelle d’Avadis, est identifiée comme emblématique et de grands équipements publics ou collectifs y sont préconisés. La fiche D5 prévoit d’analyser la possibilité de l’implantation du Pôle Sciences (HES-UNI), de l’Hôtel de police et du Palais de justice, notamment. La carte des grands équilibres indique un indice d’utilisation du sol (ci-après : IUS) prévu dans le secteur G de 2,3 et un indice de densité (ci-après : ID) de 3,5. La légende précise que les calculs des indices est susceptible de varier, notamment selon le statut public ou privé des surfaces extérieures, à confirmer en fonction des projets et de choix ultérieurs. Il s’agit de moyennes sur le périmètre de chacun des secteurs. Les indices qui seront calculés sur le périmètre des plans localisés de quartier (PLQ PAV), non définis à ce jour et qui serviront à déterminer les droits à bâtir, pourront être différents.

4) Le projet de PDQ PAV a été soumis à la consultation publique du 11 avril au 12 mai 2014.

Le 12 mai 2014, Avadis a déposé des observations, exposant notamment que le PDQ PAV ne prenait pas en compte la convention qu’elle avait signée le 15 août 2011 avec l’état de Genève, dans laquelle celui-ci s’était engagé notamment à ce que l’immeuble construit sur sa parcelle soit mis au bénéfice d’une situation acquise étendue, en ce sens que son exploitation, sa rénovation, sa transformation ou surélévation pour des activités tertiaires étaient admissibles.

5) Le 15 août 2014, la direction générale de l’office de l’urbanisme a répondu aux observations d’Avadis. Malgré le PDQ PAV, le maintien du bâtiment était possible ainsi que sa transformation et/ou surélévation dans une certaine mesure. Le projet de PDQ PAV était compatible avec les termes de la convention.

6) Par résolution des 11 et 16 décembre 2014, les Conseils municipaux des communes de Lancy et de Carouge ont adopté le PDQ PAV, le Conseil municipal de la ville de Genève, le 21 janvier 2015.

7) Le PDQ PAV a été approuvé par arrêté du Conseil d’état du 1er avril 2015.

8) Le 12 mai 2015, Avadis a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre l’arrêté du 1er avril 2015 en concluant à son annulation ainsi qu’à une indemnité de procédure.

Le degré de précision du PDQ PAV, notamment celui de la carte des grands équilibres, avait des conséquences directes sur les personnes privées ayant des droits à l’intérieur du périmètre couvert par le plan, ce qui justifiait un contrôle judiciaire du plan au même titre qu’un PLQ. La situation était similaire à l’effet obligatoire d’un changement de zone, les IUS et les affectations particulières étant déjà décidées. De plus, la carte de synthèse du PDQ PAV fixait de manière obligatoire les affectations du sol dans les différents secteurs. Elle déployait à ce titre les mêmes effets qu’une loi modifiant une zone de construction et fixant les affectations à l’intérieur de celle-ci.

Au préalable, la chambre administrative devait ordonner au Conseil d’état la production de la valeur réelle 2012 en matière de surface à bâtir utilisée, telle que retenue pour l’appréciation du plan directeur cantonal 2030 (ci-après : PDCn 2030) par les autorités fédérales.

Sur le fond, le PDQ PAV était incompatible avec la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700) en raison de la
sous-densification prévue. Il ne respectait pas le cadre légal, car il utilisait des notions différentes pour la densité et il violait les exigences minimales de densité imposées par le droit cantonal. Le PDQ PAV violait la loi PAV pour plusieurs motifs et l’égalité de traitement. Finalement, l’adoption du PDQ PAV violait la garantie de la propriété. Elle avait déposé une demande préalable d’autorisation de construire cent nonante-trois logements qui allait être refusée au motif de la contrariété entre le projet et le PDQ PAV. Aucun intérêt public ne justifiait ce refus.

9) Le 3 juillet 2015, le Conseil d’état a répondu au recours en concluant à son irrecevabilité et subsidiairement à son rejet.

Aucune voie de recours n’était ouverte contre ce type de plan.

Sur le fond, le Conseil d’état a répondu point par point aux arguments d’Avadis.

10) Le 4 septembre 2015, Avadis a répliqué en maintenant ses conclusions.

Le fondement du PDQ PAV n’était pas le même que ceux des PDQ ordinaires. Le niveau de détail n’avait rien de commun non plus avec celui des autres PDQ. Les éléments obligatoires du PDQ PAV étaient extrêmement nombreux et précis, que ce soit dans la carte des grands équilibres ou dans la carte de synthèse. Il fixait de manière obligatoire l’affectation des différents secteurs du PAV, notamment avec la répartition activités et logements, établissait des objectifs ainsi que des moyens d’action précis et contraignants. Il déterminait les possibilités de construire en limitant la future SBP. Si, comme l’affirmait le Conseil d’état, les futurs PLQ pouvaient déroger, même de manière importante, au PDQ PAV par dérogation fondée sur l’art. 10 al. 8 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), cela démontrait qu’il avait un effet obligatoire pour tous les propriétaires concernés.

11) Le 30 septembre 2015, le Conseil d’état a dupliqué campant sur ses positions. Avadis s’était engagée à ne pas recourir contre le PDQ PAV dans la convention signée en octobre 2011. Elle n’avait dès lors plus aucune légitimation pour recourir. Il s’agissait d’un motif supplémentaire de déclarer irrecevable le recours.

12) Le 8 octobre 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1) La chambre administrative examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATA/1059/2015 du 6 octobre 2015 et les références citées).

2) Le recours a été interjeté contre l’arrêté du Conseil d’état du 1er avril 2015 relatif à l’approbation du PDQ PAV par une propriétaire dont la parcelle est comprise dans le périmètre du plan.

a. Le droit fédéral ne prévoit aucune possibilité de contester les plans directeurs par une voie de droit cantonale (Heinz AEMISEGGER/Stephan HAAG, in Commentaire de la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire, ad.  art. 33 n. 49).

b. En droit genevois, aucun recours de particuliers contre l’adoption du PDQ PAV n’est prévu dans la loi PAV. Quant à la LaLAT elle ne prévoit pas de voie de recours pour un plan directeur localisé (ci-après : PDL), qu’il s’agisse d’un plan directeur communal (ci-après : PDCom) ou d’un PDQ (art. 10 al. 2 et 8 LaLAT).

En conséquence, aucun recours d’un particulier n’est ouvert contre l’arrêté du Conseil d’état adoptant le PDQ PAV et le recours est en principe irrecevable.

3) En l’espèce toutefois, la recourante fait valoir que le PDQ contesté aurait les qualités d’un plan d’affectation du sol en raison des « conséquences contraignantes pour les particuliers » liées à son degré de précision. Le recours à l’encontre du plan serait alors recevable sur la base de l’art. 35 al. 1 LaLAT en application de l’art. 33 al. 2 LAT.

a. La Confédération fixe les principes applicables à l’aménagement du territoire. Celui-ci incombe aux cantons et sert une utilisation judicieuse et mesurée du sol et une occupation rationnelle du territoire (art. 75 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101).

La loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979
(LAT - RS 700) exige en premier lieu que tous les cantons établissent un plan directeur avec un contenu minimum (art. 8 al. 1 LAT). Ce dernier doit être approuvé par le Conseil fédéral (art. 11 LAT) et il a force obligatoire pour les autorités (art. 9 al. 1 LAT).

La LAT prévoit également des plans d’affectation qui règlent le mode d’utilisation du sol (chapitre 3 LAT), qui ont force obligatoire pour chacun (art. 21 al. 1 LAT) ainsi que des autorisations de construire qui sont nécessaires pour toute création ou transformation d’une construction ou d’une installation (art. 22 al. 1 LAT). 

La LAT exige que le droit cantonal prévoie au moins une voie de recours contre les décisions et les plans d'affectation fondés sur la LAT et sur les dispositions cantonales et fédérales d'exécution (art. 33 al. 2 LAT). Ces voies de recours sont prévues dans la législation genevoise aux art. 34 et 35 LaLAT.

Le droit fédéral n’interdit pas l’adoption d’autres instruments de planification, dont des plans directeurs à une autre échelle que celle du canton, régionaux ou communaux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_472/2014 du 24 avril 2015 consid. 4.1 ; Marc-Olivier BESSE, Le régime des plans d’affectation, 2010, p. 54).

b. Le droit genevois a créé d’autres instruments tels que le plan directeur localisé (ci-après : PDL).

Les PDL prennent soit la forme du plan directeur communal (ci-après : PDCom), lorsqu’il concerne le périmètre d’une ou de plusieurs communes, soit celle du PDQ pour le périmètre recouvrant une partie du territoire d’une ou plusieurs communes (art. 10 al. 2 LaLAT). Les PDL sont élaborés par les communes concernées (art. 10 al. 3 et al. 4 LaLAT). Toutefois, les PDQ le sont par le département en liaison avec les communes concernées (art. 10 al. 4 LaLAT). Le PDL a pour but d’affiner le PDCn ou le PDCom, notamment en ce qui concerne l’équipement de base (art. 10 al. 2 LaLAT).

Les PDL sont soumis à une consultation publique, à une procédure d’adoption par le Conseil municipal de ou des communes et approuvés par le Conseil d’état, le département ayant vérifié auparavant que le plan soit conforme, notamment au PDCn (art. 10 al. 5 à 7 LaLAT).

Le PDL a force obligatoire pour les autorités communales et le Conseil d’état. Pour autant que cela soit compatible avec les exigences de l’aménagement cantonal, les autorités cantonales, lors de l’adoption des plans d’affectation du sol relevant de leur compétence, veillent à ne pas s’écarter sans motifs des orientations retenues par le PDL. Ce dernier ne produit aucun effet juridique à l’égard des particuliers, lesquels ne peuvent dès lors former aucun recours à son encontre, ni à titre principal, ni à titre préjudiciel (art. 10 al. 8 LaLAT).

Le PDL est un plan directeur, selon la définition donnée par le droit fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 1C_472/2014 précité consid. 4.1 et les références citées).

c. Dans la procédure ayant mené à l’adoption du PDQ PAV, le recours aux instruments d’aménagement existants, soit le PDL et les PLQ, a été écarté car la mise en œuvre de ces instruments traditionnels risquait de figer prématurément la forme et l’image du quartier dont la mutation allait s’étendre sur des décennies, sans que la prise en compte de l’évolution inévitable puisse en être assurée (exposé des motifs loi PAV, MGC 2010-2011 VI A, n. 6.4.2).

Il s’agit donc d’examiner si cet instrument ad hoc doit être qualifié de plan directeur ou de plan d’affectation, du point de vue de son adoption, de son contenu et de ses effets juridiques.

4) Lors de l’adoption de la loi PAV, l’art. 10 LaLAT consacré aux PDL a été complété par un alinéa réservant les dispositions particulières de procédure prévues par la loi PAV (art. 10 al. 11 LaLAT). L’exposé des motifs indique que le Conseil d’état a estimé indispensable de créer un PDQ PAV, ainsi que des PLQ PAV ad hoc, pour le périmètre, soit des instruments d’aménagement adaptés aux dimensions et à la durée de mise en œuvre du projet. Il relevait que la définition prématurée d’images trop précises aurait pu générer des oppositions de principe dommageables à l’avancement du projet (MGC 2010-2011 VI A n. 6.4.2). A cette fin, après l’adoption de la loi PAV, sur la base de l’art. 10 al. 11 LaLAT, le Conseil d’état a adopté le Règlement d’application de la loi 10788 relative à l’aménagement du quartier « Praille-Acacias-Vernets » du 18 juin 2014
(RaPAV - L 1 30.04) qui porte sur la procédure d’adoption et de révision du PDQ PAV, ainsi que sur la forme de celui-ci qui devait contenir : un cahier, comprenant notamment les fiches de coordination, une carte de synthèse, une carte des grands équilibres (densités et affectations) et des annexes (art. 2 RaPAV).

Cette procédure d’adoption se distingue de celle d’un PDQ « ordinaire » notamment par le fait que le Conseil d’état peut saisir le Grand Conseil en tant qu’arbitre lorsqu’une commune refuse d’adopter le PDQ (art. 6 RaPAV) et que sa révision peut être faite lorsque les circonstances se sont modifiées, que de nouvelles tâches se présentent ou qu’il est possible de trouver une meilleure solution d’ensemble aux problèmes de l’aménagement (art.  8 al. 1 RaPAV), notions reprises textuellement de l’art. 9 al. 2 LAT concernant les plans directeurs. En outre, des modifications mineures peuvent être approuvées par le seul Conseil administratif de la commune à certaines conditions (art. 8 et 9 RaPAV).

La procédure d’adoption prévue pour le plan litigieux est donc presque identique à celle prévue pour les PDL, elle n’en diffère que sur quelques points qui sont justifiés par l’ampleur du projet dans l’espace et dans le temps.

Cette procédure d’adoption diffère en revanche clairement de celle prévue pour l’adoption des plans d’affectation, que ce soit les modifications de zones pour lesquelles la loi prévoit l’approbation du Grand Conseil (art. 15 LaLAT) ou les PLQ, adoptés par le Conseil d’état mais pour lesquels une procédure d’opposition est prévue, permettant aux particuliers de formuler leurs griefs (art. 11 LaLAT).

La procédure d’adoption du plan litigieux ne permet donc pas de l’assimiler à un plan d’affectation.

5) S’agissant du contenu du plan et de ses effets juridiques, la recourante estime que le niveau de détail, ainsi que le nombre élevé d’éléments obligatoires justifient un contrôle judiciaire, au même titre que celui prévu pour les plans d’affectation.

La planification directrice a pour objet la coordination globale de toutes les activités à incidence spatiale et elle seule est en mesure de traiter des tâches d’aménagement qui s’étendent au-delà du niveau local et concernent plusieurs domaines. Le plan directeur est l’aboutissement de cette planification. Il se conçoit comme un instrument de gestion continue du territoire et non pas comme une conception détaillée de l’état futur de l’organisation du territoire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_472/2014 précité consid. 4.1 ; Pierre TSCHANNEN, in Commentaire de la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire, n. 26 ad. art. 2).

S’agissant du degré de précision des plans directeurs, il est acquis que le plan directeur doit contenir notamment des projets spécifiques lorsqu’ils ont des effets importants sur l’organisation du territoire, par exemple parce qu’ils présentent une emprise au sol importante, qu’ils sont sources d’immissions considérables ou encore qu’ils génèrent un fort trafic et requièrent un équipement lourd. Ainsi, le Tribunal fédéral a retenu que le degré de précision d’un plan directeur (en l’occurrence cantonal) devait être établi en fonction des impératifs de coordination et d’orientation que son objet lui imposait pour assurer une mise en œuvre efficace. La localisation précise de certains objets devait être fixée par un plan directeur et non par un plan d’affectation (ATF 137 II 254 consid. 3.2). Ce sont les caractéristiques propres de l’objet à planifier, en particulier celles de conflits qu’il est de nature à faire naître et des solutions adéquates qui peuvent y être apportées dans la perspective d’une appréhension globale qui déterminent le choix du niveau de décision. Dans le cadre de la récente révision de la LAT, le législateur a donné comme exemples de projet pouvant être soumis à la planification directrice, la détermination de pôles de développement ou de régions cantonales à forte concentration d'emplois, l'équipement de nouveaux domaines skiables, de grands projets globaux d'aménagement de cours d'eau, de carrières ou de décharges, les installations générant un trafic intense comme les centres commerciaux, les marchés professionnels et les installations de loisirs à partir d'une certaine taille, les complexes touristiques ou encore les infrastructures de transport et d'énergie d'importance au moins régionale (Message du 20 janvier 2010 relatif à une révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire, FF 2010 977 ch. 2.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_568/2014, 1C_576/2014 du 13 janvier 2016 consid. 8.1).

En revanche il n’existe guère de critères pour fixer le degré de précision maximum qu’un plan directeur peut avoir. La fonction du plan directeur implique que celui-ci n’ait pas, en règle générale, à tracer des délimitations en prenant pour base le parcellaire (Pierre MOOR, in Commentaire de la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire, n. 60 ad. art. 14).

De l’examen du contenu du PAV, il ressort que pour chaque thème traité dans les fiches de coordination, figurent des objectifs, des mesures ainsi que des projets avec l’état de coordination ainsi que les instances concernées et un calendrier de coordination. à cela s’ajoutent un texte explicatif ainsi que des cartes synthétisant les différents projets et une carte contenant la répartition des domaines : public existant et futur, privé persistant et privé constructible. Cette carte des grands équilibres prévoit un programme de construction réparti entre nouveaux logements et nouveaux emplois ainsi que des démolitions et reconstructions par secteurs en SBP, mais sans référence au parcellaire. Les ID et IUS qui résultent de ce programme sont indiqués par secteur avec la mention qu’ils seront calculés sur les PLQ PAV dont le périmètre n’est pas encore défini, qui serviront à déterminer les droits à bâtir qui pourront être différents.

Ces éléments sont constitutifs d’un plan de gestion continue du territoire en tant que le PDQ PAV ne se limite pas à donner une image du développement souhaité, mais propose des moyens propres à atteindre ce but (arrêt du Tribunal fédéral 1C_472/2014 précité consid. 4.1).

Il découle également de ce qui précède que ce n’est pas le niveau de détail du plan ou son degré de précision qui permet de qualifier sa nature et l’argument de la recourante tombe donc à faux.

6) Restent à examiner les effets juridiques du PDQ PAV au regard de ceux des plans directeurs et des plans d’affectations.

a. Les plans directeurs et les plans d'affectation se complètent : les premiers permettent de mettre en évidence les interdépendances en temps utile et dans toute leur ampleur ; ils doivent montrer comment il faut faire concorder les activités qui influent sur l'organisation du territoire, au niveau national, régional et cantonal. Les seconds règlent le mode d'utilisation de chaque parcelle, de façon contraignante pour les propriétaires (ATF 137 II 254 consid. 3.1 ; Pierre MOOR, op. cit., n. 50 ad art. 14 LAT). Les orientations futures fixées par un plan directeur de quartier relèvent de la planification directrice. Elles sont appelées à trouver concrétisation par la planification opérationnelle, principalement par l’adoption subséquente de plusieurs catégories de plans d’affectation du sol (plans de zone, plans localisés de quartier, etc.), obligatoires pour chacun (ATA/74/2008 du 19 février 2008).

b. La LaLAT indique que les PDL fixent les orientations futures de l’aménagement de tout ou partie du territoire d’une ou plusieurs communes (art. 10 al. 1 LaLAT). S’agissant des plans d’affectation, en revanche, ils règlent le mode d’utilisation du sol et prévoient le régime d’aménagement des terrains compris à l’intérieur d’une ou plusieurs zones (art. 14 LAT et 13 LaLAT).

c. Les plans directeurs lient les autorités (art. 9 al. 1 LAT ; art. 10 al. 8 LaLAT) alors que les plans d’affectation ont un effet obligatoire pour les particuliers en fixant le statut juridique de chaque bien-fonds, la mesure de l’utilisation et les conditions de construction (art. 14 al. 1 LAT ; ATF 135 II 328 consid. 2.2 et les références citées).

d. La chambre de céans a déjà été amenée à préciser qu’en créant les PDL, le législateur avait exprimé clairement sa volonté de donner à cet instrument une portée exclusivement politique et de laisser la sanction de son irrespect aux seules autorités politiques. Il ressort d’ailleurs de l’exposé des motifs y relatif que, selon la volonté du législateur, les PDL ont le caractère d’un outil de travail consensuel liant les autorités entre elles, dépourvu d’effet juridique. Il ne s’agit pas d’un nouvel instrument formel d’aménagement du territoire, venant s’ajouter à ceux existants, pouvant être invoqué par des tiers dans le cadre de la procédure d’adoption des plans d’affectation du sol et donc susceptible de retarder ce dernier type de procédure, ce qu’il convient d’éviter (MGC 2001 41/VIII 7360ss, not. 7366 ; ATA/450/2016 du 31 mai 2016 ; ATA/556/2015 du 2 juin 2015 ; ATA/1019/2014 du 16 décembre 2014).

e. En lien avec l’effet juridique d’un plan d’affectation, le Tribunal fédéral s’est penché sur la nature d’une ordonnance et d’un arrêté adoptés par le Conseil d’État du canton de Fribourg et a conclu qu’en raison de leurs effets juridiques, ils constituaient matériellement des plans d’affectation, dans la mesure où ils contenaient des mesures suffisamment précises et détaillées et surtout, réglaient les droits et les obligations des propriétaires concernés, en l’occurrence, ceux de chalets de vacances construits au bord du lac de Neuchâtel. Il a retenu que ces actes déterminaient de façon concrète, impérative et contraignante, sans laisser de marge de manœuvre, les droits des propriétaires. Ces derniers étaient soumis à l’obligation de devoir signer des «contrats nature » sous peine de devoir démolir leurs chalets. Dans cette espèce, les actes touchaient un cercle de propriétaires défini et uniquement des constructions existantes, toute nouvelle édification étant expressément exclue s’agissant d’une réserve naturelle d’importance nationale depuis 1992 (ATF 135 II 328).

En l’espèce, le règlement fixe les éléments qui ont force obligatoire à l’égard des autorités, au sens de l’art. 10 al. 8 LaLAT, à savoir les textes sur fond coloré (principes, objectifs, mesures et projets) des fiches de coordination, les éléments représentés sur la carte de synthèse et les chiffres sur fond coloré figurant sur la carte des grands équilibres (densités et affectations). En revanche, les autres éléments, tels que textes, chiffres et illustrations, ainsi que les annexes, ne sont pas liants et ont une valeur indicative (art. 7 RaPAV).

Rien ne permet donc de retenir que ces éléments, obligatoires pour les autorités, auraient force obligatoire pour les particuliers. La recourante n’expose d’ailleurs pas en quoi les effets juridiques du PDQ PAV seraient identiques à ceux d’un plan d’affectation, s’agissant de sa parcelle, hormis le fait qu’elle soutient que le plan litigieux prévoit pour le secteur concerné un IUS et un ID inférieurs à ceux minimaux prévus par le PDCn 2030.

Or, même cas échéant, cet examen est prématuré et ce n’est qu’au stade de l’adoption des PLQ obligatoires en zone de développement (art. 2 al. 1 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 - LGZD - L 1 35) que ces indices stricto sensu seront déterminés et pourront être contestés par les particuliers en lien avec les droits à bâtir afférents à leur parcelle. Cette précision figure d’ailleurs en toutes lettres dans la légende du PDQ PAV.

7) La recourante soulève encore la question de la conformité des futurs PLQ PAV au PDQ PAV. Une dérogation serait nécessaire pour permettre à un PLQ de s’écarter du PDQ PAV, démontrant ainsi la qualité de plan d’affectation de
celui-ci.

Comme vu ci-dessus, le plan directeur n’a aucun effet direct sur les droits et obligations des administrés contrairement au plan d’affectation. Son caractère contraignant doit être nuancé à plusieurs égards : le plan directeur n’est contraignant que dans le cadre du droit applicable, il ne se substitue pas à
celui-ci ; sa concrétisation nécessite un acte de planification ultérieur, lequel n’est pas un simple acte d’exécution (Peter HÄNNI, Planungs-, Bau- und besonderes Umweltschutzrecht, 6ème éd. 2016, p. 135 et 136 ; Marc-Olivier BESSE, Le régime des plans d’affectation, 2010, p. 54 et 57 ; Pierre MOOR, op. cit., p. 28 ss).

La notion de « dérogation » n’existe pas dans le rapport existant entre un plan directeur et un plan d’affectation, contrairement à l’interprétation que fait la recourante de l’art. 10 al. 8 LaLAT. Cette disposition prévoit que lors de l’adoption des plans d’affectation du sol, les autorités cantonales veillent à ne pas s’écarter sans motifs des orientations retenues par le PDL. Cette formulation et l’utilisation des termes « veillent » et « pas sans motifs » précisent le rapport existant entre les deux plans de nature différente. L’existence d’un motif permet lors de l’adoption d’un plan d’affectation subséquent à un plan directeur de s’écarter des orientations que retient ce dernier. Lors de cette adoption, pour laquelle l’autorité dispose d’une certaine marge d’appréciation, les intérêts publics pris en compte lors de l’élaboration du plan directeur devront être confrontés aux intérêts privés et aux intérêts publics qui ne sont pas liés à l’aménagement du territoire et l’autorité devra alors effectuer une pesée exhaustive de ceux-ci. Concrètement, le plan directeur ne modifiant pas le droit en vigueur, la notion de dérogation n’est donc par pertinente (Marc-Olivier BESSE, ibidem ; Pierre MOOR, op. cit. n. 63 ad art. 14 ; Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine
GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, p.106).

En l’espèce, l’adoption d’un PLQ PAV n’était d’ailleurs initialement pas subordonnée à celle préalable du PDQ PAV (MGC 2010-2011 VI A n. 7.4.3). La même règle est formalisée pour les instruments de planification ordinaires à l’art. 11 al. 2 LaLAT.

Il convient également de souligner que l’absence de conformité d’un PLQ à un PDL ne peut fonder l’invalidation du PLQ (ATA/450 2016 du 16 mai 2016 ; ATA/556/2015 du 2 juin 2015).

Il n’est dès lors pas possible de retenir, comme le fait la recourante, que le PDQ PAV constituerait un plan d’affectation du fait que les PLQ subséquents ne pourraient s’en écarter qu’à la faveur d’une dérogation.

8) Finalement, la recourante entend tirer argument des oppositions faites à sa demande préalable d’autorisation de construire par la ville de Genève et la direction de la planification directrice, liées à une incompatibilité du projet avec le PDQ PAV.

La procédure d’autorisation de construire ne fait pas l’objet du présent recours. En outre, comme vu ci-dessus, un projet de construction en zone de développement nécessite l’adoption préalable d’un PLQ. Il n’y a dès lors pas lieu d’examiner ce grief plus avant.

9) En conclusion, rien ne permet de retenir que le PDQ PAV serait matériellement un plan d’affectation et le recours sera déclaré irrecevable.

10) Les pièces dont la recourante a demandé la production concernent le fond du litige, il n’y a dès lors pas lieu de donner suite à sa requête, vu l’issue de celui-ci.

De même, il n’est pas nécessaire d’analyser la portée de la renonciation à recourir faite par la recourante dans le cadre de la convention signée avec le Conseil d’État en octobre 2011.

11) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera alloué aucune indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 12 mai 2015 par Avadis Fondation d’investissement contre l’arrêté du Conseil d’État du 1er avril 2015 ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge d’Avadis Fondation d’investissement ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me François Bellanger, avocat de la recourante ainsi qu'au Conseil d'état et à l’office fédéral du développement territorial ARE.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot
Zen-Ruffinen et M. Pagan, juges.


 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :